Chapitre 18 (1). Le Sud
Oui je triche, ce chapitre est en deux parties, mais je fais ce que je veux c'est mon histoire 😉❤️ (Et pour la peine je mets ma chanson préférée)
"On dirait le Sud
Le temps dure longtemps
Et la vie sûrement
Plus d'un million d'années
Et toujours en été"
Ilyes a quitté mon lit vers 7h30 du matin, après être resté à me regarder faire semblant de dormir pendant une demi-heure.
Je ne sais pas s'il se souvient de ce qu'il s'est passé dans la nuit, mais j'ai senti ses doigts jouer avec une mèche de mes cheveux quand il m'observait en silence. Puis il a poussé un long soupir avant de se lever souplement et de m'abandonner à mon faux sommeil.
Maintenant je ne sais pas ce qu'il va se passer, ça m'angoisse un peu. Je ne suis pas certaine de lui avoir pardonné, mais je crois que je ne lui en veux plus vraiment.
Et comme une idiote je pense à lui en m'habillant ce matin.
Jade Castelle, tu es faible.
Quand je débarque sur la terrasse pour le petit déjeuner, je tombe sur les jumeaux attablés et trempés par une baignade matinale.
Ils en profitent parce que leur mère n'est pas là pour leur dire de mettre un t-shirt quand ils sont à table.
Ne sachant comment me comporter avec Ilyes, je me contente de m'assoir à côté d'Amir, cramoisie et les yeux baissés sur mon assiette.
— Bah bonjour, lâche ce dernier, t'as mal dormi ou quoi ? Sah d'habitude tu fais des câlins à tout le monde.
— T'es tout mouillé.
Lui a l'air d'excellente humeur, sans doute à cause de la perspective de passer la journée à enquêter.
— Si c'est ça qui te gêne.
Il se lève brusquement, attrape ma chaise et nous soulève toutes les deux avec une facilité déconcertante.
Ah non, pas ça.
— Amir ! Je t'interdis de faire ça !
Je me débats mais ne parviens pas à éviter de finir au fond de la piscine lorsqu'il renverse la chaise au dessus de l'eau.
Et dire que j'ai essayé d'être mignonne en me préparant.
— Tu vas me le payer ! hurlé-je en toussant.
Il m'observe avec un sourire satisfait, les bras croisés sur son torse.
— T'avais qu'à dire bonjour.
Ilyes l'a rejoint et je suis surprise de voir qu'il rit lui aussi. Je sors de la piscine mi furieuse mi amusée, quand il se place face à moi et me repousse en arrière pour me refaire plonger.
Donc aujourd'hui j'ai le statut de victime.
Ressortant la tête de l'eau je vois les deux frères hilares, bien qu'Amir soit un peu surpris par cette interaction entre Ilyes et moi, je fixe ce dernier avec un regard incertain.
— Tu m'as pas dit bonjour non plus.
Ah d'accord, donc il me parle maintenant.
Il y a donc réellement quelque chose qui a changé cette nuit.
Je décide de ne pas me poser trop de questions et de laisser les choses se faire, peut-être qu'il veut que nous soyons de nouveau amis.
— Vous êtes des sales cons.
— Oh ma nine ! s'exclame Mamie qui vient de sortir sur la terrasse, Tu étais si pressée de te baigner que tu as plongé toute habillée ?
Elle rit elle aussi, la journée commence bien.
— Allez va te changer, me fait Amir, Et dépêche toi on part dans une demi-heure !
Il est pas sérieux lui.
Mais je suis trop contente d'avoir retrouvé les jumeaux en tant qu'entité pour me plaindre de ce réveil un peu violent.
Quand je les rejoins dans la voiture, ils ont mis de la musique et j'oublie presque où nous allons.
— T'as failli nous faire attendre, me dit Ilyes quand je claque la portière.
Il me parle.
Il me parle.
Il me parle.
Et le pire c'est qu'il a l'air parfaitement naturel. J'échange un regard avec Amir dans le rétroviseur qui semble tout aussi surpris que moi.
Après avoir réglé le GPS, nous voilà partis pour une petite heure de route en direction de la maison louée par la mère de Nora.
— Bon alors, comment on procède ?
— J'ai construit tout un plan, fait Ilyes, Ce matin je me suis levé archi tôt et...
Nos regards se croisent et il ne termine pas sa phrase.
— Hassoul, j'ai eu le temps de cogiter. Voilà l'idée : toi et Amir vous faites genre vous voulez vous marier et vous cherchez un endroit pour accueillir tout le monde. J'ai vérifié sur leur site, ils font les mariages. Et vous demandez à visiter la propriété. Vous allez forcément tomber sur les gens qui sont dans le gîte.
L'idée est bonne en soi, si j'avais pas l'air d'une gamine ça pourrait marcher.
— Kho faut que ce soit toi qui fasse le hlel, parce que moi la daronne à Nora elle m'a déjà vu.
Quelle importance, même si on peut les différencier, ils se ressemblent tant que ça parait dingue que la mère de Nora ne fasse pas le rapprochement.
— Et Jade elle ressemble à sa mère, aussi bien elle vont comprendre direct que c'est une Castelle.
— Mais justement ! fait Ilyes, C'est ça qu'on veut, voir leur tête si elles reconnaissent celle de Jade ! Faut qu'on fasse zahma y'a R, on reste archi naturel si on les croise et on voit comment elles réagissent. Les Castelle sont du coin y'a aucune raison qu'elle puisse pas visiter une propriété par le plus grand des hasards.
— Sauf que Ilyes, elles sauront bien que j'ai pas l'âge de me marier, si elles me reconnaissent.
Il se gratte la tête, se rendant compte de la limite de son plan.
— Bah on verra sur le moment, mais je pense c'est le meilleur truc à faire.
Bon...
L'idée n'est pas si mauvaise, mais ça me tend un petit peu.
— J'ai l'air vraiment jeune.
— T'inquiète on va s'arrêter acheter des fringues et du maquillage. Faut qu'on ait l'air plus vieux.
Oh la la j'ai l'impression d'être dans un film et j'ai vraiment peur que ça tourne mal.
Amir se gare devant le centre commercial que nous rejoignons tous les trois.
— Bon qui fait le hlel du coup ? demande Amir, J'te jure c'est mieux si c'est toi.
— Ok ok, concède Ilyes, je vais me trouver des sapes de bourge un peu, ça doit coûter un bras un mariage chez eux. Jade fais pareil.
Encore une fois la façon dont il s'implique dans sa mission me fascine, je retrouve le Ilyes que j'avais découvert quelques mois plus tôt, et mon coeur se réchauffe. Un peu trop peut-être.
On se sépare pour faire les courses je réussis à trouver un robe qui fasse trop dame pour mon âge, une paire de lunettes de soleil qui cache un peu mes traits enfantins et des boucles d'oreilles qui donnent aussi l'illusion que je suis plus âgée.
Quand je retrouve les garçons ils ont des sacs dans les mains et j'ai la sensation qu'ils en ont un peu profité pour se faire plaisir.
— C'est bon t'as tout ? On passe aux chiottes pour se changer. J'espère que ça va marcher parce que j'ai claqué ma paye de juin dans ces conneries.
Et dire que la veille il ne m'adressait même pas la parole.
Quand je ressors des toilettes il me faut un instant d'adaptation à la version "classe" d'Ilyes.
Aïe aïe aïe.
Il a refait le coup du polo.
Mais cette fois il est blanc.
Et lui est archi bronzé.
— Wow t'es beau.
Oh mon Dieu j'ai vraiment dit ça.
Enfermez moi.
Je deviens aussitôt cramoisie et d'autant plus lorsqu'un soupir amusé nait sur les lèvres du garçon. Ah il est fier.
Gênée par ma phrase un peu trop spontanée je me tourne vers le miroir au dessus des lavabos et m'empresse de sortir un tube de rouge à lèvres de mon sac pour me maquiller en vitesse.
Ilyes ne dit rien mais je sens son regard sur moi et ça me trouble, ma main tremble un peu et je dois plusieurs fois corriger mes faux mouvements.
Heureusement Amir arrive en trombe dans la pièce, faisant aussitôt baisser la tension qui règne entre nous.
— Frère t'es nickel, dit-il, Faut que je te prenne en photo pour la daronne elle a toujours rêvé de te voir sapé comme ça. Jade t'en penses quoi ?
— Elle aime bien, répond aussitôt Ilyes à ma place.
Je me tourne vers les jumeaux après un léger recoiffage et hoche la tête en évitant le regard de l'aîné des deux.
— Ehhh mais Jadou ! s'exclame Amir, T'es fraiche de ouf, heureusement que Gab est pas là !
Gabriel c'est un des gars de la bande, apparemment il s'intéresse un peu à moi depuis quelques temps. J'y crois moyennement vu les filles avec qui il est sorti auparavant.
— N'importe quoi, dis-je en rougissant encore à cause du compliment de mon meilleur ami, Arrête avec Gab, c'est des conneries tout ça.
On sort des toilettes pour retourner à la voiture et Amir jure qu'il n'invente rien et qu'il lui a demandé il n'y a pas trois jours si j'étais toujours célibataire.
— T'as répondu quoi ?
On adresse tous les deux le même regard surpris à Ilyes.
— Bah la vérité frangin tu voulais que je dise quoi ?
— Bah je sais pas, y'a pas si longtemps ça te dérangeait pas tant que ça de lui inventer des relations imaginaires.
Amir s'apprête à répliquer et je sens que la conversation dégénère pour rien. Alors j'y coupe court.
— Vous pouvez arrêter de parler de moi comme si j'étais pas là ? Amir tu peux dire ce que tu veux à Gab dans tous les cas il ne m'intéresse pas. Est-ce qu'on peut se concentrer sur ce qui est important maintenant ? On peut récapituler le plan ?
De mauvaise grâce les deux frères m'obéissent et nous passons le reste du voyage à peaufiner les détails. Je commence à sentir le stress monter.
Que se passera-t-il si Nora ou sa mère me reconnait réellement ?
Finalement je suis contente du fait qu'Ilyes et moi devons jouer un couple, cela me rassure qu'il soit avec moi.
— Ok tout est prêt ? demande Amir alors que nous ne sommes plus qu'à quelques mètres de la propriété, Jadou mets tes lunettes. Ok parfait. Oh putain j'ai failli oublier le plus important ! Jade à côté de toi y'a un sac de bijouterie, dedans y'a une bague, c'est pas un vrai diamant mais je pense pas qu'ils vérifient.
J'obéis et découvre la bague qui imite parfaitement un solitaire de fiançailles, en voyant le ticket de caisse je me rends compte qu'elle lui a quand même coûté un peu plus de cinquante euros.
— Amir c'est cher pour un déguisement, je te rembourserai.
Il rigole.
— C'est pas moi, répond-il.
Oh.
Mon coeur se réchauffe à nouveau et pendant quelques secondes, j'oublie que tout ceci n'est qu'une mascarade.
Puis le grand portail de la propriété me ramène rapidement à la réalité.
— Allez-y je vous attends pas loin, vous appelez si y'a un problème.
Prenant une grande inspiration, les mains moites et le pouls en déroute, je sors de la voiture en sentant l'angoisse monter de façon violente.
Je regarde la golf noire s'éloigner avec son propriétaire et regrette aussitôt de m'être embarquée dans cette histoire.
— Arrête de ronger tes ongles, grogne ma voix préférée juste à côté de moi, Ça fait pas pro.
Comme je détourne la tête vers lui Ilyes tente de me rassurer un peu :
— T'inquiète ça va le faire, faut juste qu'on ait l'air naturels.
Facile à dire.
— Au pire laisse moi gérer.
Il saisit ma main dans la sienne et m'entraine vers la superbe maison provençale qui trône au milieu d'un parc soigneusement entretenu. Plusieurs dépendances sont réparties tout autour, parmi lesquelles sans doute, le gîte qu'ont loué Nora et sa mère. J'entends des cris d'enfants et des bruits d'eau qui révèlent la proximité d'une piscine.
Mon Dieu c'est tellement stressant.
Repérant une femme occupée à tailler un rosier, nous nous dirigeons vers elle afin de savoir à qui nous devons nous adresser.
Comme j'ai soudainement peur qu'Ilyes parle avec son langage habituel ou ne soit pas très crédible, c'est moi qui prend la parole, nous surprenant tous les deux :
— Bonjour Madame, excusez-nous de vous déranger dans votre travail, vous êtes la propriétaire ?
— Bonjour, répond-elle, C'est bien moi, en quoi puis-je vous aider ?
Je prends une grande inspiration pour déballer mon mensonge.
— Mon fiancé et moi sommes à la recherche d'un lieu pour accueillir la réception de notre mariage. Votre propriété n'était pas sur notre liste mais à la mairie de Cotignac, on nous a indiqué que vous accueillez ce genre d'évènement. Excusez nous de notre venue complètement à l'improviste, elle n'était pas prévue dans nos plans.
La femme nous dévisage avec une pointe de surprise dans le regard et je me dis que tout est foutu. Evidemment, avec ma tête de bébé ça paraît complètement improbable que je sois fiancée.
— Effectivement, on accueille beaucoup de mariages, mais vous savez c'est réservé plus d'un an à l'avance, vous vous mariez quand ?
— Dans un an et deux mois, réponds-je aussitôt, On s'y prend à l'avance justement, ce serait dans l'idéal le deuxième week-end de septembre.
J'espère sincèrement que j'ai l'air crédible.
— Ah oui, vous n'êtes pas si pressés, Je pense qu'en septembre ça devrait être bon. Je vais regarder mon planning. Et puis, je peux toujours vous faire visiter, si j'ai du monde mais que ça vous plaît, vous voudrez peut-être changer la date.
Oh elle a l'air bien gentille cette dame.
— Ce serait parfait merci.
— Attendez moi là, je vais chercher toutes mes clés.
Elle s'éloigne et je me tourne vers Ilyes pour l'interroger du regard sur ma prestation.
— T'es parfaite, murmure-t-il.
Prise d'un élan d'affection, je me colle à lui et sens mes muscles se transformer en coton quand il lâche ma main pour poser la sienne sur ma taille.
Ne t'emballe pas Jade, tout ceci n'est qu'une comédie.
La dame revient le sourire aux lèvres.
— On y va ? demande-t-elle.
Nous hochons la tête d'un même mouvement avant de la suivre. Elle se lance dans un petit historique de la maison, nous explique qu'elle est dans sa famille depuis plus de cent ans mais que l'entretien était trop cher pour son mari et elle, c'est pourquoi ils se sont lancé dans cette activité de chambres d'hôtes et gîte. Entre temps elle nous pose quelques questions sur nous, ravivant mon stress de n'être pas crédible.
— Le mariage n'est pas très à la mode chez les jeunes, nous dit-elle, C'est rare les couples dans votre genre. C'est indiscret si je vous demande vos âges ?
Cette fois c'est Ilyes qui répond pour nous deux.
— J'ai vingt-et-un et elle a dix-neuf.
C'est bien il n'a pas été trop ambitieux, mais on n'est pas non plus sur un âge fréquent pour se marier. La dame écarquille les yeux.
— Ah oui, dis-donc, je crois que même mes parents ne se sont pas mariés aussi jeunes.
— Ça dépend des cultures, répond Ilyes, Et puis je gagne ma vie, elle pourra continuer ses études tranquille.
Oh mais c'est pas normal que je le trouve aussi mignon alors qu'il ment.
D'ailleurs je crois que la propriétaire est toute attendrie elle aussi vu le sourire qu'elle nous lance.
Jade, garde les pieds sur terre.
Je commence à me dire que j'aurais dû faire ce cinéma avec Amir, c'est trop perturbant avec Ilyes. Quoique, Amir en aurait sûrement trop fait et j'aurai fini à retenir un fou rire permanent.
Afin de continuer à être crédible nous posons des questions pratiques sur les capacités d'accueil de la propriété. Puis je sens mon estomac se tordre quand nous nous approchons des bruits d'eau.
— Ça vous embête si je prends des photos ? demande soudainement Ilyes, Pour qu'on puisse montrer à nos parents.
Oh il est brillant.
— Absolument pas, mais si jamais, il y a beaucoup de photos sur notre site.
Ilyes la remercie et je me sens un peu délaissée lorsqu'il me lâche pour saisir son portable dans la poche de son short.
— Nous avons du monde au gîte en ce moment, mais je vais vous montrer tout de même discrètement les dépendances et la piscine.
Je déglutis avec difficulté et sens mon corps se mettre à trembler à mesure que nous nous approchons. Un très mauvais pressentiment, une peur presque panique me gagne. Ma main se cramponne au polo d'Ilyes pendant que je murmure son prénom.
Puis mon regard se pose sur la piscine et la grande table de jardin qui la surplombe. Mon coeur s'arrête aussitôt de battre quand mes yeux analysent les personnes assises en train de discuter.
Il faut partir.
Vite.
Mes jambes se mettent à flageoler et je sens tout mon sang quitter mon visage.
— Ilyes.
Je crois qu'il s'en est rendu compte en même temps que moi car il s'empresse aussitôt d'interrompre la propriétaire qui nous explique toujours les détails.
— Excusez-moi, ma fiancée se sent pas très bien, je crois qu'on va écourter.
Elle prend alors conscience que je suis à deux doigts de défaillir et se met dans tous ses états.
Pitié non, il ne faut surtout pas qu'ils se rendent compte de notre présence.
Ilyes me soutient autant qu'il peut et se charge de me ramener vers la maison principale pendant que la dame part me chercher de l'eau.
Assise sur un banc du parc, je repasse les images dans ma tête, complètement traumatisée.
— J'a-j'arrive pas à y croire.
Ilyes me prend dans ses bras en murmurant qu'il appelle Amir et qu'on va partir. La propriétaire revient avec de l'eau, pestant contre la chaleur.
La chaleur n'a rien à voir dans tout ça, je peux vous le promettre.
Après de rapides adieux à l'hôte des lieux, nous nous empressons de rejoindre la golf qui s'est garée à l'entrée du portail. Ilyes m'accompagne sur la banquette arrière et ordonne à son frère de rouler.
— T'as vu, ils ont la même bagnole que ton père, fait ce dernier en désignant le parking derrière lui.
Aussitôt un flot de larmes franchit mes yeux et je m'effondre sous le poids des mensonges.
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