59. Noël glacial, Noël brulant


Enfin les vacances. Le mois de décembre était passé tellement vite que Kilian ne s'était même pas rendu compte que les fêtes étaient déjà là. Un de ses meilleurs souvenirs avait sans aucun doute été la convention avec Martin où, déguisé en personnage de manga, il avait fait le crétin pendant une après-midi entière et s'était constitué des réserves de japonaiseries pour l'hiver. Cette journée avait surtout été profitable au jeune rouquin qui cicatrisa ses plaies affectives en se rinçant l'œil sur certains cosplays un peu dénudés. Les deux garçons étaient plutôt d'accord sur un point : leur passion commune pour les bêtises asiatiques étaient quand même beaucoup plus intéressantes que les devoirs du lycée.

Pourtant, même au niveau scolaire, tout se passait plutôt bien pour Kilian. Après le conseil de classe du premier trimestre et malgré des critiques acerbes de la part de sa prof principale, à savoir la mère de Gabriel, il avait obtenu les encouragements. Renée lui reprochait son manque de sérieux et ses gamineries qui perturbaient la moitié de ses cours. C'était avant tout pour la forme. Comme la majorité de ses collègues, elle adorait cet adolescent aux yeux verts. Et puis, son propre fils ne lui aurait sans doute pas pardonné une trop grande sévérité à l'encontre de son blondinet de copain et modèle attitré. Le second trimestre avait ainsi à peine commencé que tous les élèves furent renvoyés chez eux pour passer un peu de temps en famille au pied du sapin.

Affalé sur son lit, une BD japonaise à la main, Kilian jetait de temps en temps un œil sur le paysage. Le ciel était gris et l'air frais. Tout indiquait que sa petite ville connaitrait un Noël blanc, comme l'année précédente. C'était pourtant quelque chose de rare dans la région, mais le dérèglement climatique avait eu assez rapidement raison de la logique. Et puis, de la neige, c'était romantique. Il se souvenait comme si c'était hier du réveillon misérable qu'il avait passé en compagnie de sa famille. Marie, sa mère, s'était comportée de manière odieuse. Fuyant cette mégère, il avait fini dans les bras d'Aaron. Cela avait marqué le début de quelque chose qui l'avait fait grandir. Une affirmation de lui-même, un apaisement soudain, une joie d'aimer et d'être aimé, le plus beau des cadeaux.

Après avoir fermé son manga et l'avoir posé sur son torse, il fixa le plafond et soupira. S'il ne passerait pas les fêtes avec sa génitrice, ce qui le rassurait plutôt, il ne les passerait pas non plus avec son cher petit brun à la peau goût pomme. Il avait beau être triste, cela ne lui donnait pas envie de pleurer, ce qui semblait plutôt étrange vu la véritable fontaine qu'il était d'ordinaire. Ce n'était pas sa faute s'il chialait facilement, il était juste incapable de contenir ses émotions. Au primaire, il avait essayé plusieurs fois, sans le moindre succès. Si se casser la figure dans la cour le faisait plutôt rigoler, la moindre petite vexation, la plus insignifiante peine, la plus misérable déception le faisait craquer. Et ce n'était pas le comportement ultra protecteur de son frère qui aurait pu changer quoi que ce soit à ses habitudes. Dès qu'il se mettait à geindre, Cédric accourait pour l'enlacer et lui caresser la nuque. Jamais l'ainé n'avait pu reprocher à son cadet ses larmes. Il aimait trop être celui qui les séchait pour cela. Peut-être que parce que cela les réunissaient, ils se complaisaient tous les deux dans cette ultra-sensibilité qui était restée et qui était même devenue une des marques de fabrique de l'adolescent, avec ses Kilianiaiseries, son goût pour l'eau froide, ses bouderies et son impudeur qui défiait toute concurrence. De tout cela, le jeune garçon aux cheveux blonds était plutôt fier. Lui, au moins, à la différence de la masse de pauvres hères qui peuplaient la terre, il avait une personnalité, une vraie, qu'on l'apprécie ou non. Pourtant, là, allongé en pyjama sur son lit et malgré une intense émotion qui lui faisait mal au ventre, les larmes ne voulaient pas venir. Il en ricana avant de se lever. Si aucun liquide ne voulait sortir de ses yeux pour rincer son visage tiré après une nuit de sommeil, une bonne douche froide s'en chargerait. En toute hâte, il se lava, enfila un caleçon et descendit en direction de la cuisine sans même prendre le temps de se sécher.

Sous le nez de son ainé et devant son brunch composé d'une omelette aux lardons et à la tomate préparée avec amour par le jeune adulte, d'une tartine de pâte à tartiner à la noisette, d'un verre de jus de fruit de marque discount, d'un bol de Nesquik, et d'un yaourt nature, Kilian grelota. Cédric, lui, le dévisagea en secouant légèrement la tête de gauche à droite, geste qui, dans le cas présent, montrait qu'il avait bien du mal à comprendre pourquoi son jeune frère se baladait en slip les cheveux mouillés après une douche gelée en plein hiver alors que le thermomètre à l'extérieur était négatif, que le chauffage de la cuisine était de loin le moins efficace de toute la maison et que le carrelage était glacé. Croisant les yeux du jeune adulte, le blondinet contracta ses lèvres et le toisa d'un air mauvais. Son frangin était quand même un gros imbécile à le regarder comme ça sans rien comprendre ! Il fallait tout lui expliquer !

« Au lieu de me fixer comme une vache qui regarde le train, tu voudrais pas me réchauffer ? Ça caille ici ! »

Cédric s'esclaffa avant de se passer la main sur le visage, puis s'approcha de son cadet et le serra fort contre lui en lui frictionnant le dos. Cela lui rappela de bons souvenirs, ceux de l'époque où pas un jour ne passait sans qu'ils ne se fassent un gros câlin. Toutes les occasions avaient toujours été bonnes pour se coller l'un à l'autre : réparer les effets de leurs nombreuses chamailleries, passer le temps devant la cheminée, sécher les larmes incessantes du blondinet un peu crétin, ou tout simplement le réchauffer. Déjà dans sa tendre enfance, Kilian faisait exprès d'avoir froid pour que son frère lui serve de bouilloire. Cela faisait des années qu'il n'avait pas utilisé cette technique pour obtenir des poutous, mais il ne l'avait jamais oubliée. Cédric non plus, d'ailleurs, même si voir l'adolescent la ressortir au lycée était une véritable bien qu'agréable surprise. C'était une sorte de cadeau de Noël avant l'heure qui leur fit du bien à tous les deux et qui leur permit de parler, ce qui n'était pas arrivé depuis des semaines.

« Dis, tu crois qu'elle va bientôt revenir à la charge la folle ? J'vais devenir quoi Ced, sans toi ni Aaron pour me protéger l'année prochaine ? Tu crois que je peux faire confiance à papa ? Je... j'ai peur, j'ai peur de finir tout seul, j'veux pas... »

Cette fois-ci, les larmes coulèrent naturellement sur les joues du jouvenceau, au plus grand plaisir de Cédric qui put les sécher avec toute sa délicatesse.

« T'en fais pas Kili, ça ira bien, j'te l'promets, on trouvera une solution... On en trouvera une...»

Après ce moment fraternel d'une grande douceur, Kilian passa les premiers jours des vacances à préparer sa soirée du vingt-quatre. Même si cela lui faisait un peu de peine de laisser François seul, il ne se sentait pas capable de tenir un tête-à-tête avec son tuteur légal un soir de fête. Pour se remonter le moral et oublier tout ce qui pouvait le tracasser, il avait une arme ultime qui prenait la forme d'un sourire rieur, d'yeux pétillants et d'une longue chevelure douce. Alia... Si les trois premières semaines de décembre étaient passées aussi vite, c'était avant tout grâce à elle. Il lui avait fait découvrir ses passions, elle avait partagé les siennes. Main dans la main, à l'abri des regards indiscrets, ils avaient flâné dans les beaux quartiers, se chamaillant souvent et s'embrassant dans le cou parfois. Et pour se dire au-revoir, c'étaient toujours leurs lèvres qui s'effleuraient. Sortaient-ils ensemble ? Les choses étaient plus compliquées que cela. Ils étaient avant tout deux âmes en peine qui avaient besoin l'une de l'autre. Et pourtant, Kilian l'aurait souhaité, il l'aurait voulu, même. C'était ce qu'Aaron lui avait demandé, et c'était ce dont son cœur avait besoin. Il était un adolescent sensible, son affection devait s'exprimer pour ne qu'elle ne l'écrase pas. Il avait besoin de vivre des aventures intenses et fugaces en attendant le grand amour, ou dans son cas, plutôt son retour.

Pour Alia, pourtant, ce n'était pas aussi simple. Ce garçon, peut-être qu'elle l'aimait, elle ne savait pas vraiment. Ou plutôt, elle ne voulait pas l'admettre. C'était une question d'honneur que de ne pas céder à ce serpent qui symbolisait tous les péchés. Si elle croquait sa pomme, pourrait-elle seulement se le pardonner ? Ne risquait-elle pas, elle aussi, de se retrouver changée en statue de sel si elle devait finir dans les bras de ce citoyen de Sodome ? Et pourtant, quand il l'avait invitée à passer la soirée du vingt-quatre avec lui, même si cette date ne symbolisait rien à ses yeux, elle n'avait pu s'empêcher de rougir et de ressentir un immense plaisir. Elle était faible, mais dans les bras de ce garçon aussi gentil que mignon, cela ne la dérangeait pas, fût-il coupable du plus grand des péchés. Non pas celui d'aimer un représentant de son propre sexe, Aaron, ce qui pourtant le vouait à un enfer éternel, mais bel et bien d'aimer ce garçon plus qu'elle.

Le soir de Noël, Kilian partit chez lui sur le coup de vingt heures quinze. Il lui fallait bien quarante-cinq minutes pour rejoindre la cabane de pécheur de l'oncle du brunet. Tout était prêt. Sur place, il avait préparé du bois pour le poêle, ramené des couvertures et même décoré un petit sapin. Dans son sac à dos, il avait rangé un cadeau pour la belle, des jeux, une buche de Noël et d'autres friandises, de quoi tenir sans problème jusqu'à minuit. Comme il l'avait prévu, le sol était recouvert de neige. Ce qu'il n'avait pas anticipé dans son plan, par contre, c'était la force du vent et le froid des flocons qui lui brulèrent le visage et qu'il dut braver courageusement. Il s'en foutait, ce réveillon serait sans doute magique, juste parce qu'il ne le passerait pas seul.

Quand enfin il arriva devant la petite cabane, Alia était déjà là, vêtue de vêtements légers et assise sur une souche. Elle ne faisait pas que trembler, elle semblait frigorifiée, comme si des minuscules épines de froids lui avaient perforé tout le corps. En la voyant, Kilian se jeta à son cou. Son front et ses joues étaient glacials. Ses lèvres étaient bleues et sa respiration des plus calmes. Elle semblait dans un état second qui l'empêchait de parler. Sans même prendre le temps de lui demander ce qui s'était passé ni depuis combien de temps elle attendait là sans avoir pensé à le prévenir, le blondin la tira à l'intérieur de la cabane dont il déverrouilla en toute hâte les cadenas, avant de l'allonger sur le matelas, de la recouvrir de chaudes couvertures et d'allumer un feu. Même si la température augmentait peu à peu, les vêtements trempés de la jeune fille semblaient la maintenir dans un froid dangereux. Sans réfléchir, Kilian fit la seule chose qui lui semblait légitime et logique pour réchauffer le corps de sa camarade : il jeta toutes ses fringues à même le sol et fit de même avec celles de la jeune fille, qui se retrouva en sous-vêtement sans même avoir la force de réagir, puis se colla à elle pour que son propre corps lui serve de bouillotte.

Pendant près de deux heures, les deux adolescents restèrent ainsi enlacés sans un mot. Des sortes de flocons gelés sur le visage de la belle s'étaient mis à fondre et révélèrent ce qu'ils étaient vraiment, de simples larmes qui séchaient au rythme des bisous du blondin sur sa joue. Ayant repris ses esprits et un peu de force, Alia lui murmura quelques mots avec une voix douce, avant de se mettre à rigoler.

« Putain, j'ai chaud, tu m'étouffes ! Et sérieux, t'aurais pu garder ton calbut hein, t'étais pas obligé de te foutre à poil pour me réchauffer ! »

Surpris, vexé et un peu gêné, Kilian se recula en tirant vers lui une couverture afin de masquer son entre-jambe. Lui reprocher d'avoir oublié de réfléchir alors que c'était son mode de fonctionnement habituel, ce n'était pas sympa, surtout qu'il avait quand même veillé à ne pas découvrir les zones sensibles de la belle pour ne pas commettre d'attentat à la pudeur. Dans l'équation, il avait juste oublié de prendre en compte son propre corps. Alia, elle, semblait remise de ses émotions et se montra plus taquine que jamais. Profitant de l'embarras de son camarade, elle tira vers elle ce qui protégeait son intimité, dévoilant du même coup tout ce qu'il cherchait à cacher.

« C'est donc vrai, t'as vraiment des couilles ! Bon, je les avais déjà vues cette été hein, mais ça me fait toujours un choc ! Allez, fais pas ta timide, montre-les-moi ! Oh, des p'tites noisettes et un asticot c'est trop mignon ! Purée, même à cet endroit-là, t'es blond ! »

Furieux d'être ainsi moqué alors qu'il avait tant donné de sa personne, l'adolescent se ressaisit de la couverture et prit un air bougon avant de répondre en tournant la tête sur le côté.

« Bah quoi, tu t'imaginais quoi ? Que j'étais roux du slip ? »

Alia s'esclaffa puis lui passa la main dans les cheveux, avant de lui déposer un léger baiser surprise sur les lèvres, qui figea instantanément le blondinet sur place.

« Merci Kilian. Je suis désolée de m'être montrée dans un tel état... Je suis juste partie de manière précipitée de chez moi tout à l'heure et j'ai oublié mon téléphone. Comme je ne savais pas où aller, je me suis dirigée vers notre lieu de rendez-vous pour t'y attendre. J'avais simplement pas prévu que la porte serait fermée et qu'il ferait si froid. Je ne sais même pas combien de temps je suis restée dehors. Ah et... Joyeux Noël... C'est bête, j'ai oublié mon cadeau pour toi à la maison ! On a qu'à dire que ce bisou le remplace ! C'est couillon, j't'aurai bien donné autre chose, mais comme je ne suis pas un garçon, ça va être dur de t'offrir ce que tu aimes le plus... Après, je comprends vraiment Aaron, elles sont belles tes fesses ! »

Le souffle lourd et les joues brulantes, assis à genoux devant sa douce princesse du Maghreb, Kilian respirait lentement. Alors que la chaleur intense qui parcourait son organisme lui faisait mal, il tremblait comme si le froid s'était immiscé jusqu'aux tréfonds de ses muscles. Bien qu'il n'eut pas bu une seule goutte d'alcool, son corps tout entier semblait ressentir une drôle d'ivresse. Sa gorge nouée lui faisait mal. Il ressentait une chose étrange que, pourtant, il comprenait bien. Oubliés le débardeur sympa qu'il voulait lui offrir et les gâteaux et autres confiseries qui attendaient au fond du sac. Elle était là, abandonnée juste à ses côtés, et lui, sans même comprendre pourquoi ni même comment cela était possible, il avait envie d'elle. Alors il fit la seule chose qu'il pouvait faire, il cria et gémit jusqu'à ce que son visage soit recouvert de larmes puis, comme s'il était pris de frénésie, il enleva la seule chose qui l'habillait encore. Son collier. Pour la première fois depuis cet été, il avait éprouvé le besoin de se libérer d'Aaron. Il n'avait même pas conscience de ce qu'il venait de faire, il l'avait juste fait. Pour elle. Pour eux. Devant les yeux tendres de la belle, il était à présent lui-même, nu comme au premier jour, la bouche légèrement entrouverte et les paupières gonflées.

« Est... est-ce que tu accepterais que ça soit moi tout entier ton cadeau ? », demanda-t-il en bégayant et en respirant lourdement.

Alia regarda l'adolescent. Elle non plus n'était plus vraiment elle-même. Ce qui s'était passé dans l'après-midi avec sa famille l'avait heurtée et blessée. À cause de ça, elle ne pouvait s'empêcher de vouer une haine intense à son père. Elle lui en voulait tellement qu'elle n'avait plus qu'une seule idée en tête, la vengeance. Et quelle plus belle manière de se venger que de tout simplement faire preuve d'amour ?

« Oui », répondit-elle naturellement avant de se laisser tomber à la renverse sur sa couche. Si elle devait s'offrir à un garçon, alors cela ne pouvait être qu'à celui-là.

Tout en suffoquant, Kilian s'approcha de sa proie, lui dégrafa avec peine le soutien-gorge et descendit sa culotte sans pour autant oser regarder la fleur qui s'y cachait. C'était une indécence qu'il ne pouvait s'autoriser. Alors, toujours rouge, il laissa ses yeux parcourir le reste de son corps, s'arrêtant sur chaque détail de son visage ambré, de ses bras longs, de ses mains délicates et de son buste voluptueux

C'était la première fois qu'il voyait d'aussi près une poitrine féminine. C'était la première fois qu'il pouvait en caresser et en embrasser une. De manière un peu gauche, il laissa ses lèvres toucher les extrémités de ces collines vallonnées sur lesquelles glissaient ses doigts. Une excitation divine dirigea son sang vers les corps spongieux de son organisme. La peau d'Alia était douce et sentait la pèche. Lui, il se sentait homme.

S'allongeant sur elle, il l'embrassa en cherchant naïvement son chemin. L'aidant de la main, elle le lui indiqua. Kilian tremblait. C'était complètement fou. Il ne savait pas comment faire, on ne le lui avait jamais appris, jamais expliqué. Après tout, parce qu'il appartenait à Aaron, il pensait ne jamais avoir besoin de savoir ! Et pourtant, c'était naturel et agréable. Une douce chaleur humide sembla le recouvrir et lui provoqua quelques râles. Sentir les griffes de la belle lui taillader le dos et les fesses était une expérience exquise à laquelle il répondit par une respiration lourde et troublée. Sentir ses doigts s'emmêler dans ses cheveux lui donna l'impression de s'abandonner telle une offrande vivante. Sentir la langue de sa princesse enlacée à la sienne était le plus exquis de tous les bonbons. Pris par les multiples perceptions qui parcouraient son corps, il ne se rendait même pas compte qu'il faisait l'amour.

Alia, elle, en était tout à fait consciente. Ses cuisses la brulaient comme le froid de l'hiver les avait gelées. Son cœur battait à un rythme fou. Peut-être parce que Kilian avait l'habitude de s'offrir aux autres, ses gestes étaient emplis d'une douceur infinie. Il l'aimait comme il appréciait qu'on l'aime, avec tendresse et masculinité. Elle, elle n'avait pas mal. Elle se sentait bien. Elle se sentait femme.

Puis enfin, après plusieurs minutes hors du temps, bouillant et vidé de toute énergie, le blondinet gronda et s'écroula sur le corps d'Alia. Malgré le plaisir intense qu'il venait de vivre, il avait mal. Il pleurait. Ce qui venait de se passer était sans aucun doute une des choses les plus agréables de toute sa vie. Il avait adoré l'instant au point de succomber à un rire nerveux. Et pourtant, ce n'était pas lui. Cela n'avait pas le même goût qu'avec Aaron. C'était différent. Ni mieux, ni moins bien, et pourtant, cela le faisait souffrir. Il se sentait sale. Si le bonheur coulait dans ses artères, c'était le malheur qui remontait par ses veines. Il se détestait d'avoir aimé ça. Il se détestait de l'avoir fait. Il regrettait de ne pas avoir été celui qui s'offre, mais celui qui prend. Et surtout, il haïssait son égoïsme et sa jalousie qui l'avaient poussé à aimer quelqu'un tout en refusant ce droit à sa panthère. Rien que pour cela, rien que pour se punir de cette cruauté envers Aaron qui avait été la sienne depuis des semaines, il avait envie de mourir. Les bras d'une jeune fille enlacés autour de son cou l'en empêchaient. Un seul mot lui vint à l'esprit. Il le chuchota en gémissant à l'oreille de sa partenaire.

« Tigresse... »

Alors que le feu semblait s'éteindre, tous deux s'endormirent paisiblement enlacés. Et lorsqu'ils se réveillèrent, ils se jetèrent sur les friandises qu'avait ramenées le blondin. Au moment de quitter les lieux et de rentrer chez eux, Alia se jeta sur son torse et pleura sans la moindre raison. Ou plutôt, elle en avait tellement qu'il lui était impossible d'en désigner une en particulier.

« Je t'aime ! Depuis le premier jour ! Sauve-moi Kilian ! »

Sous le choc d'une telle révélation, l'adolescent ne flancha pas. Au contraire, il la serra dans ses bras avant de lui déposer un léger bisou sur le front. Lui aussi il l'aimait.

Aussi fou que cela pouvait lui paraitre, à cet instant, il n'y avait plus d'Aaron dans son esprit, tout juste une petite féline qui pleurait, recroquevillée dans ses bras.

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