II. Hayley au palais


Jour 6.

Wusashan. Tel était le nom du royaume sur lequel Hayley avait atterri et où elle comptait s'entraîner deux ans, pour s'endurcir et reprendre l'aventure avec ses amis.

Ses blessures étaient en phase de guérison, Hayley conservait néanmoins encore quelques hématomes mais elle ne les sentait plus. Elle nagea une petite heure dans la piscine royale, avant qu'un garde ne la prévienne que l'homme qu'elle avait demandé était arrivé. Elle sortit de l'eau, le garde lui donna une serviette et se présenta ainsi au bibliothécaire.

- Vous m'avez fait venir, madame ?

Hayley n'était pas très à l'aise avec ces phrasées : elle avait grandi comme un animal, elle allait devoir beaucoup travailler... Peu habituée au luxe, elle faisait de son mieux pour se retenir de marcher pieds nus ou incomplètement vêtue. Tout le monde la dévisageait quand elle lapait ses boissons ! Sanji l'avait toujours trouvée mignonne quand elle buvait ainsi, elle n'avait donc jamais perdu cette habitude. 

Elle essora ses cheveux devant le bibliothécaire et lui expliqua son projet : elle voulait apprendre à lire. Ce dernier parut étonné mais accepta. Comme il faisait beau, Hayley prit son premier cours dehors. Le bibliothécaire remarqua qu'elle écrivait en phonétique et tenait sa plume comme une vulgaire craie. Il avait du pain sur la planche. Mais devant la motivation de son élève, il décida de la remettre entre les mains de professeurs de sa connaissance qui travaillaient au sein même du palais.


Jour 7.

Hayley apprit que les images d'elle à Marineford en compagnie d'Ace, mais sans Baggy Le Clown, étaient si rares qu'elles se vendaient à prix d'or ! Surtout celle où Hayley, enveloppée de feu, perchée sur l'épaule du pirate, contre-attaquait avec une arbalète.

La marine avait également tenu à se venger de sa victoire : en plus de mettre sa survie en doute et d'affirmer qu'elle n'avait été qu'une "aide" pour les pirates de Barbe Blanche, les photos d'Hayley les plus populaires la montraient en sang, fuyante, dans des postures peu avantageuses, à terre entre les jambes du Grand Corsaire blond ou sur ses épaules, pire, à genoux au beau milieu de Marineford... Et les articles qui en parlait rappelait qu'elle était ignorante, que sa réussite venait de la chance et qu'elle s'était prit l'échafaud en pleine poire !


Nuit 9.

Couchée sur le flanc comme un félin, Hayley se réveilla en sursaut : dans son cauchemar, elle avait distingué l'ombre du Grand Corsaire qui poussait les mêmes cris que sa mère....


Jour 10.

Tous les matins, Hayley s'étirait pour travailler sa souplesse. Le grand-père de Luffy le lui avait bien dit avant leur "affrontement" : elle pourrait gagner en vitesse si elle était plus souple. Alors elle y travaillait rudement. Ensuite, elle faisait travailler ses muscles avec des exercices physiques plus ou moins intensifs et son équilibre en se déplaçant à quatre pattes. Intriguées, plusieurs de ses nouvelles amies l'imitaient. 

Hayley les fascinait : elles avaient décidé de ne rien dire sur les origines de la pirate. De toutes façons, personne au palais ne l'avait remarqué et elle était tellement gentille et candide, elles savaient qu'elles n'avaient rien à craindre d'elle. Et puis, un peu d'action était la bienvenue ! De plus, Hayley ne semblait si rien connaître du monde civilisé qu'elle était considérée comme une petite sœur pour toutes. Elles aimaient l'écouter raconter des histoires, de son île natale, de ses amis, de la guerre au sommet... Hayley ne leur cachait rien.

Le reste de la journée, elle apprenait à lire et à écrire, partout, avec tout le monde. Des professeurs, des amies et même des gardes suivaient ses progrès. Elle s'améliorait grâce à un exercice qu'avait inventé un précepteur en l'observant : sur un carnet, il écrivait un mot, il lui lisait, sur l'autre page Hayley dessinait ce que c'était et essayait de l'écrire ensuite.

De plus, elle se tenait informée des nouvelles du monde grâce aux journaux de Wusashan.


Jour 13.

Ses coupures en excellente phase de guérison, Hayley se tressait les cheveux quand une concubine, timide, s'approcha d'elle, un journal en main :

- Hayley... Est-ce vrai que tu as chanté une chanson d'amour en plein milieu de Marineford et que, touchés, les soldats de la marine t'ont laissé gagner ?

- Absolument... PAS !

Ils vont encore parler longtemps de cette histoire ?


Jour 15.

Les bras, les genoux et le ventre enveloppés de bandages, Hayley se promenait dans les couloirs du palais. Les fenêtres étaient immenses. Pour s'exercer (et parce que se déplacer de liane en liane lui manquait), elle se mit à escalader les immenses rideaux, tel un chaton ! Elle s'éclatait, seule, comme une petite folle !


Jour 19.

- Je ne comprends pas, Hayley : Imeri nous a dit que tu allais rester ici deux ans... Sur ordre de ton capitaine ? Mais pourquoi ?

- C'est simple : Luffy estime que nous n'avons pas le niveau nécessaire pour affronter le Nouveau Monde. Alors, chacun va s'entraîner de son côté pour devenir plus fort. Et quand nous nous reverrons, nous formerons probablement le plus puissant équipage de cette génération !

- Euh... Tu y vas un peu fort, là. D'après les journaux, il y a des pirates bien plus redoutables que ton capitaine... Et, si je puis me permettre, comment ton capitaine peut-il te donner cet ordre alors que tu as sauvé son frère ? Tu as affronté toute l'élite de la marine, je te trouve bien assez balèze !

- C'est gentil, mais, en y repensant, je me suis surtout ridiculisée. Je n'ai rien pu faire contre un Corsaire, j'ai eu peur, j'ai rampé pour lui échapper... Nous avons tous eu peur et n'avons pas su réagir quand la marine a contre-attaqué. Non, je ne veux plus jamais être en infériorité sous prétexte que mon adversaire a un fruit du démon incompréhensible. Je dois devenir plus forte ! Je ne me donnerai plus jamais ainsi en spectacle !


Jour 22.

Hayley fut bien obligée d'admettre que ses cauchemars étaient plus violents quand elle n'était pas auprès de ses compagnons...


Jour 25.

Hayley constata que les femmes de ce "harem" étaient toutes différentes : tandis que certaines continuaient à entretenir leur forme pour elle (ou pour une visite surprise inespérée de l'Empereur), d'autres, lasses de leur vie cloîtrée loin de chez elles, passaient leur temps allonger, à s'empiffrer de pâtisseries et à se droguer d'opium. D'autres, souffrant de solitude, entamaient des liaisons entre elles.

Elles se dégourdissaient grâce à des cordes à sauter et elles semblaient être toutes fascinées par les pirates...

Hayley, à elle seule, était une source de distraction à tous les niveaux.


Jour 29.

- " ... L'aube se leva avant que le prince n'eut fini son récit. Mais, ne pouvant attendre la suite, la Sultane reporta son exécution au lendemain et exigea qu'il continue de raconter cette trépidante aventure..."

Aussi attentive qu'une enfant, Hayley se régalait des contes que lui lisait gentiment Imeri.


Jour 36.

Les précieuses avaient certes une chambre commune selon leurs rangs qui était bien surveillée, mais cela ne les empêchait pas de pouvoir se promener comme il leur plaisait dans le palais et de côtoyer tout le monde, domestiques et ministres.

Hayley n'avait plus la moindre cicatrice sur le corps. Marineford n'était pour elle plus qu'un lointain souvenir.

Elle était presque tombée amoureuse des jardins impériaux. Elle s'y promenait tous les jours, pour se dégourdir les jambes, parler aux jardiniers, dessiner au calme... Un jour, alors qu'elle y était entourée de deux autres filles, elle ne put ignorer les regards très insistants de deux hommes qui n'étaient pas des gardes mais qui les suivaient. Hayley interrogea ses amies. Ces dernières partirent enquêter et découvrirent que ces deux hommes avaient infiltré le palais et n'étaient qu'autre que des chasseurs de primes ! Avant qu'Hayley ne puisse s'inquiéter, ses amies prévinrent les gardes que ces messieurs rôdaient un peu trop des rangs 1 et 2 à la recherche de quelques faveurs... Ils furent expulsés de Wusashan dans l'heure qui suivit.


Jour 40.

Micire observait prétentieusement Hayley faire ses longueurs dans la piscine. Il attendit qu'elle se rapproche du bord pour lui poser une question qui lui brûlait les lèvres :

- Dites-moi, Miss Hayley : qui vous as appris à nager ?

- "Appris", c'est un grand mot, mais c'est en copiant les mouvements des anguilles et des loutres.

- C'est bien ce que je pensais...

- Pourquoi ?

- Pour rien...

Plus tard, une servante du palais se présenta à Hayley et lui montra quelques mouvements aquatiques et des nages plus élégantes que celle que pratiquait Hayley, qui ressemblait à celle des chiens.


Jour 44.

Regroupées autour d'Imeri, Hayley et ses amies écoutaient d'une oreille attentive une splendide fable d'amour qui racontait l'histoire d'une paysanne qui communiquait avec les animaux et rêvait de rencontrer l'élu de son cœur. L'innocence et  le caractère de l'héroïne rappelait fortement Hayley... Sauf que cette dernière préférait pousser des cris d'animaux plutôt que de chantonner un air gai.


Jour 53.

Hayley savait lire elle-même le journal.


Jour 55.

L'Empereur fit cadeau d'un lot de trésors aux concubines de rang 4. Toutes purent choisir tous les bijoux d'or qu'elles voulaient. Seule Hayley s'intéressa uniquement à une dague courbée. Elle lui rappelait celle de son frère, qui l'attendait sur le Sunny... Hypnotisée, Hayley la gardait contre elle quand elle s'endormait, comme pour éloigner les mauvais rêves, et s'entraînait quotidiennement avec.


Jour 57.

Hayley écrivait de mieux en mieux. Elle connaissait les mots, maintenant elle devait s'appliquer pour que ses pâtés deviennent de belles lignes aérées et lisibles.

Ses copines, très honnêtes et serviables, aidaient, autant qu'elles le pouvaient, Hayley à devenir plus forte. Elles lui avouèrent qu'elle manquait malheureusement de grâce mais que cela pouvait se travailler en même temps que la souplesse. Elles lui apprirent quelques pas de danse et Hayley tomba sous le charme du mouvement qui la faisait reculer sans lever les pieds du sol. Elles dansaient ensemble, Hayley adorait ça et décida de ne jamais oublier d'exécuter quelques pas de danses durant ses futurs combats.


Jour 60.

Les précieuses du rang 4 prenaient leur bain toutes ensemble et faisaient une ronde pour que chacune lave le dos et les cheveux d'une autre. Une adorable harmonie régnait entre elles.

Hayley leur apprenait à se tresser les cheveux de toutes les façons et à tailler des pierres. En retour, elle était initiée à toute la modernité, aux dernières étoffes à la mode, au port de bijoux (Hayley en abusait et en portait beaucoup trop), à la broderie, à la fabrique de joyaux...

On lui apprenait l'architecture, l'imprimerie et même l'aquarelle, ce qui était plus délicat que la peinture.

Elle découvrit que quelques journaux qui avaient suivi la guerre avaient une étrange rubrique racontant les ''amourettes d'Ace et d'Hayley''. Dedans, des auteurs, en manque de reconnaissance et rêvant d'être publiés, racontaient l'histoire des deux pirates. L'un affirmait qu'ils s'étaient rencontrés sur le bateau de Barbe Blanche dont elle était la fille légitime, l'autre qu'elle était une princesse qui aurait tout quitté après s'être éprise de Poings Ardents, un autre qu'Ace l'avait sauvé d'une cruelle sirène ou encore, que Luffy s'était servie d'elle pour secourir son aîné... Certains affirmaient que la guerre de Marineford avait été falsifier !

N'importe quoi...

Au moins, cela divertissait ses copines.


Jour 66.

En cette fin de journée, après une journée orageuse, sur le toit du palais impérial, Hayley dessinait un arc-en-ciel.


Jour 71.

Un beau jour, l'Empereur emmena toute sa cour et ses précieuses en sortie : un spectacle au bord de la mer était organisé en son honneur. Pour l'événement, toutes les femmes revêtirent le même sari fendu mais chacune d'une teinte différente. Hayley en avait un vert d'eau pour aller avec ses yeux. Si certaines étaient surexcitées à l'idée de croiser l'Empereur, d'autres se réjouissaient de sortir enfin un peu du palais et d'autres s'en plaignaient. Hayley se contentait de suivre le mouvement.

L'Empereur était installé sur une tribune face à un bassin avec son épouse et ses enfants. Autour de lui, sa gigantesque garde personnelle et derrière, les rangs de ses concubines. Il y avait en tout six rangées, toutes d'une vingtaine de femmes. Hayley faisait partie de la quatrième.

Les femmes du premier rang étaient petites, mûres mais n'avaient pas de formes féminines développées et avaient les cheveux courts.

Celles du deuxième rang étaient chauves, avaient le teint mat, les yeux très clairs et le corps recouvert de divers tatouages (qu'Hayley s'amusa à reproduire sur une feuille de papier durant le discours de présentation).

Celles du troisième rang avaient le regard sombre, des larges épaules, une forte poitrine et une chevelure semblable à la crinière d'un lion.

Celles du quatrième rang étaient les plus élancées et avaient les cheveux très longs.

L'Empereur était un homme toujours de bonne humeur, qui aimait se dandiner, taper dans ses mains et faire des paris pour rien.

- Mille berrys qu'il nous présente un animal fabuleux !

- Altesse, c'est le but de son spectacle...

Un homme en costume fit mille compliments à l'Empereur avant de signaler que le spectacle allaient commencer. Imeri et ses amies trépignaient d'impatience.

C'est alors qu'un gigantesque hippocampe doré émergea de l'eau et détailla l'assemblée. Des cris de stupéfaction et des applaudissements résonnèrent. Son dresseur, sur la terre ferme, lui faisait des signes pour qu'il reste concentré... Mais l'animal, paniqué devant toute cette foule, s'éleva de toute sa grandeur, poussa des cris et cracha de l'eau sur tous ceux qui étaient à proximité de lui. Les gardes se jetèrent devant l'Empereur, le rang 1 se mit à hurler de terreur. Le dresseur, honteux, dégaina un fouet et et le brandit devant sa créature. 

Le sang d'Hayley ne fit qu'un tour. Elle sentait ce que l'animal ressentait, elle ne pouvait supporter de le voir s'agiter comme un prisonnier, alors elle accourut et sauta sur l'hippocampe. L'animal plongea, avec elle. Tous se précipitèrent sans quitter des yeux tout le remue-ménage qui se passait sous l'eau... Enfin, l'hippocampe ressortit de l'eau et se tortilla pour dégager Hayley qui le chevauchait. Elle cria aux gardes de lâcher leurs armes. L'hippocampe ne cessait de gigoter, comme en plein rodéo, mais Hayley tenait bon : elle avait déjà eu affaire à des bêtes plus féroces, elle n'avait pas peur. Finalement, elle entoura le buste de la bête de ses bras et le comprima. Lorsqu'il sentit sa respiration faiblir, l'animal géant se stabilisa et se calma. Hayley lui caressa le crâne avant de le laisser fermer les paupières et s'allonger sur l'eau. Il se mit sur le dos et flotta, en reprenant tranquillement son souffle, la pirate sur son ventre. Elle savait qu'elle n'aurait pas dû se montrer ainsi en spectacle, mais elle n'avait pas résisté à porter secours à un animal humilié. Il lui ressemblait. Il lui rappelait ce qu'elle était sous son bel habit et ses bijoux. 

Tenue détrempée, trouée, et bijoux cassés ou perdus... Mais elle n'en avait aucune honte. Toujours à califourchon dessus, Hayley regarda tout autour d'elle : que des têtes d'ahuris, surtout pour le dresseur.

Sauf l'Empereur, qui la détaillait d'un air suspicieux.


Jour 75.

Dans sa salle de réunion, l'Empereur était debout à la fenêtre, à observer très méticuleusement la jeune femme aux longs cheveux gris clairs qui s'entraînait à enchaîner le plus de roues possible dans ses jardins... Il descendit même pour la voir de plus près.


Jour 79.

L'Empereur suivit discrètement Hayley jusqu'à la bibliothèque, puis l'espionna à travers le trou de la serrure. Il découvrit qu'elle apprenait à lire et à écrire.


Jour 80.

- Professeur, quel est ce mot ?

- « Shuriken ». C'est une arme.

- Vraiment ? À quoi ça ressemble ?

- Venez, je vais vous montrer un livre sur les armes ninjas.


Jour 86.

Hayley avait demandé à un garde de la prendre en duel, pour apprendre à manier les lourdes épées et boucliers de l'arsenal militaire de ce royaume.

Elle gagna, non sans mal.


Jour 95.

Des gardes et des ministre disparaissaient et se faisaient remplacer mystérieusement... L'Empereur et son entourage s'affichaient de moins en moins... Les couloirs silencieux étaient de plus en plus perturbants, des nouvelles têtes faisaient leur apparition... Aucun doute ; quelque chose se tramait au palais.


Jour 101.

Hayley sortit un matin pour s'entraîner à escalader les palmiers des jardins. À cause de la chaleur, elle était uniquement vêtue d'un corset violet et d'une longue et fine jupe de dentelle. Et, évidemment, pieds nus. Une gouvernante avait failli s'évanouir en l'apercevant, affirmant qu'elle était en sous-vêtements. Hayley ne s'en était guère préoccupée.

Alors qu'elle s'étirait, elle sentait des regards malveillants autour d'elle. Elle aperçut des silhouettes sombres derrière les bosquets. Elle regarda autour d'elle, les sens en alerte : près d'un rosier, un jeune homme prenait des notes sur un calepin. Elle le reconnaissait, c'était un des fils de l'Empereur, le quatrième prince pour être exact. Elle avait entendu parler de lui car il était très souvent critiqué, seul et délaissé, parce qu'on jugeait qu'il ne pourrait jamais accéder au titre d'Empereur de Wusashan. En effet, contrairement à ses frères aînés qui rêvaient de grandeur, il était maigre, pâle, un peu peureux et ne comprenait rien à la politique.

Hayley comprit tout de suite. D'un bond, elle se jeta sur lui et le renversa. Des fléchettes atterrirent sur le rosier. Hayley vit les silhouettes prendre la fuite et appela les gardes. Elle se releva et aida le prince à se remettre debout.

- Tu, hum, vous allez bien ?

- Je... Ça va, merci... Merci... ?

- Pas de quoi. Prince Wuji, c'est cela ?

- Oui...

- Ne sortez pas sans un minimum de protection. Altesse. ajouta-t-elle avec un clin d'œil.

Il hocha la tête en rougissant. Hayley se remémora ce que Micire lui avait appris à dire ou non devant les enfants de l'Empereur et, pour éviter de faire n'importe quoi, elle fit une révérence et s'en alla, laissant le prince Wuji aux bons soins des gardes. 

Il était totalement troublé par la tentative de meurtre à laquelle il avait échappé de justesse... Et par les yeux de sa sauveuse.

Le soir, dans sa chambre, quand elle eut raconté cette anecdote à ses amies, elles éclatèrent de rire et répétèrent qu'Hayley était décidément une "sauveuse de princes".


Jour 103.

Hayley avait été convoqué dans la salle du trône par l'Empereur lui-même. Elle y alla, des fleurs dans les cheveux, vêtue d'un kimono jaune, encadrer de deux gardes. Contrairement à ce que ses amies avaient pensé, ce n'est pas pour la remercier d'avoir sauvé son fils ou parce qu'il avait découvert qui elle était que l'Empereur souhaitait la voir. Avachi sur son son trône, à quinze mètres de là où elle était inclinée, l'Empereur révéla à la jeune femme qu'il ne cessait de penser à elle depuis son intervention devant sa cour avec l'hippocampe. Il avait appris qu'elle savait lire et écrire, et décida de faire d'elle sa secrétaire d'État.

Elle commença le jour même, épaulée par les ministres les plus hauts placés, épiée en secret par le prince Wuji, qui rougissait dès qu'il la voyait.


Jour 109.

- On dit aussi que vous dessinez, est-ce exact ?

- Oui, votre Majesté. confirma Hayley, en levant la tête des lettres qu'elle recopiait.

- Je veux voir comment vous vous débrouillez !

Cela dit, l'Empereur renversa tout ce qu'il y avait sur son bureau, y étala une grande feuille blanche et ordonna à la pirate de faire son portrait ! Celle-ci s'exécuta et passa la journée à cette tâche.


Jour 111.

- Quoi, Sakazuki est devenu Amiral en chef de la marine?!

- Eh oui. Il avait les faveurs de la hiérarchie. Je sens que sa nouvelle politique sera dure et agressive. Je ne voudrais pas être pirate qui l'aurait pour ennemi !

Hayley encaissa la nouvelle. Dans un parc où ils se promenaient, ses amis ministres lui avait révélé, entre deux affaires d'État, l'identité du nouveau dirigeant de toutes les forces de la marine. 

- Je sens venir d'autres grands changements pour le monde...


Jour 117.

Hayley et les autres concubines adoraient se dessiner dessus. Hayley rêvait de se faire tatouer mais hésitait sur le motif (une plume ou un animal ?) et sur son emplacement (la nuque ou la cuisse ?)


Jour 129.

- De grâce, un peu plus d'élégance quand vous vous battez ! geignait Micire, durant les entraînements d'Hayley. Vous avez toujours l'air d'un bourrin ! Et arrêtez avec ces cris d'animaux, vous êtes une dame ! Que vous rencontrez un noble ou que vous assassinez quelqu'un, soyez délicate dans vos actions ! Ô, mes aïeuls, aidez ce brave chimpanzé, je veux dire, cette pauvre enfant...


Jour 150.

Alors qu'elle se baladait dans les rayons de la grande bibliothèque, Hayley tomba sur un vieil exemplaire scellé du Rokushiki...


Jour 168.

- Des... Insultes ?

- Oui, ou des noms moqueurs ou rabaissants, comme "gros rat" ou "fils de crétin" !

- ... Pourquoi faire ?

- Je n'ai aucune répartie quand on m'insulte ! Je veux clouer le bec de mes ennemis avec des mots et non mes poings ! 

- Mademoiselle, dire de telles injures, à qui que ce soit, n'est qu'une démonstration d'immaturité. Même en plein combat, se montrer grossier est indigne !

Hayley ne dit plus rien.


Jour 172.

Ce jour-là était une belle journée ensoleillée. Encouragé par ses domestiques qui en avaient ras la casquette de l'entendre parler d'elle, le prince Wuji prit son courage à deux mains, mit son plus bel habit, se servit discrètement dans les cuisines impériales et invita Hayley à aller pique-niquer avec lui.

Il la fit chercher après son entraînement, par un garde, et sortir par une porte dérobée à l'arrière du palais. De bonne humeur, et curieuse, la jeune femme accepta l'invitation.

C'était strictement interdit, pour une précieuse, de côtoyer un autre homme que l'Empereur, surtout un membre de son entourage. Wuji espérait qu'elle remarquerait cette importante dérogation à la règle et en serait impressionnée. Pas du tout.

Il avait dit qu'ils iraient explorer les collines, elle n'attendait que ça. D'ailleurs, seul Wuji s'inquiétait d'être découvert ; il avait prétexté d'être souffrant pour échapper à la séance d'escrime imposée par le protocole (discipline où ses frères le battaient tous) et se faufiler hors du palais. Pour Hayley. Quand il ne pensait pas à elle, ni à ce qu'il voulait lui dire, il était terrifié à l'idée qu'on puisse découvrir qu'il s'était enfui et songeait à la punition qu'il l'attendrait... On lui avait raconté qu'il y a longtemps, une concubine avait du défiler nue dans la ville et avait eu les mains broyées pour s'être éprise d'un cousin germain de l'empereur... Chargé du panier à pique-nique, il regardait tout le temps par-dessus son épaule, tandis qu'Hayley fonçait tout droit, impatiente de se dégourdir les jambes en pleine nature, en confectionnant différents bouquets de fleurs sauvages sur le chemin. Elle admirait la beauté des paysages de Wusashan. Wuji l'entraîna vers une petite clairière reculée. 

Il installa de quoi de se rassasier. Hayley inspecta la source d'eau et s'agenouilla devant. Elle plongea ses mains dedans et s'aspergea le visage. Le temps que le prince étale une nappe, car il avait peur des'asseoir sur l'herbe et d'y croiser une fourmi, la pirate avait relevé sa jupe et avança dans l'eau. Wuji était abasourdi. Il voulu lui demander s'il pouvait la rejoindre, mais il bégaya tellement que la jeune femme ne comprit pas. Elle sortit de l'eau et se sécha au soleil. Wuji s'empressa de lui préparer un en-cas, mais ne parvint pas à ouvrir le pot d'houmous. Il y mit toute sa force et son visage vira au rouge. Le voyant dans l'embarras, Hayley lui déboucha son pot en un tour de main et croqua dans une pomme, tandis qu'elle se séchait au soleil. Le silence ne la dérangeait pas. Wuji l'observait du coin de l'œil en se tripotant les doigts, nerveux. Alors qu'il prenait une grande inspiration pour engager la conversation, Hayley se redressa quand un oiseau se mit à chanter. Un sourire aux lèvres, elle proposa au prince de partir à sa recherche et s'élança dans les arbres. Stupéfait, Wuji remballa maladroitement leurs affaires et tenta de la suivre, en restant à l'écart des branches, par peur des tiques. Hayley, allongée sur un arbre comme une chatte parée à attaquer, observait un nid où piaillaient trois oisillons. Leur parent, un imposant perroquet verdâtre, les rejoignit et les lova dans son pelage pour qu'ils se taisent. Touchée par le spectacle, Hayley descendit de l'arbre, s'adossa au tronc et se mit à faire un croquis de ces animaux. Elle ramassa trois plumes abandonnées par ce volatile. Face à elle, Wuji la regardait faire, penaud.

Ils rentrèrent au coucher du soleil. Wuji était si dépité qu'il se fichait d'être vu ou pas. Hayley le salua et retourna dans sa chambre commune, avec diverses fleurs colorées dans les bras. Elle comptait en faire des couronnes pour chacune de ses amies. Le prince fit la moue jusqu'à son retour dans ses appartements. Froids. Personne n'avait remarqué son absence. Personne n'avait cherché à lui rendre visite, il n'y avait même pas une plante médicinale sur sa table de chevet. Il se laissa tomber mollement sur son lit. Il pensait à Hayley. Un faible sourire éclaira son visage quand il vit, accroché à une mèche de ses cheveux, un petit bouton d'or.


Jour 174.

À force d'avoir le nez plongé dans les documents officiels du royaume, Hayley était complètement cultivée sur Wusashan et son histoire.

Elle apprit à se reconnaître dans cette ville de 2000 habitants qu'était le palais impérial.

Elle avait de nombreux amis, dont Imeri, ses compagnes de chambres, ses professeurs, l'Empereur, ses fils, des gardes, quelques ministres, mais aussi des ennemis, jaloux de la confiance qu'avait l'Empereur en elle...


Jour 182.

Toujours lourdement parée et les cheveux garnis de fleurs, Hayley était initiée à toutes les formes d'arts.


Jour 199.

Tous les soirs, Hayley et le reste des concubines se rassemblaient pour faire quelque chose ensemble : une fête dans la piscine, de la danse, un concours d'histoires d'épouvantes, une lecture... 

Hayley était toujours la dernière couchée et la première debout. Elle recevait fréquemment des fleurs ou des cadeaux venant de Wuji. Mais le prince était si occupé (et si timide!) qu'elle ne parvenait jamais à le trouver libre au palais.


Jour 203.

Hayley fut de nouveau convoquée dans la salle du trône. L'attendait la cour complète de l'Empereur ; une partie la foudroyait du regard et l'autre la détaillait avec ahurissement. Le souverain, avachi sur son trône, la regardait sans expression. Hayley s'agenouilla à quelques mètres de lui et attendit qu'il prenne la parole. C'est un autre homme, le ministre Moziko, qui lui révéla sa venue ici. Il s'approcha d'elle.

- Étrangère, décline ton identité !

Il jeta devant elle deux vieux journaux : celui du rapport de la guerre et celui de la disparition de Monkey D. Luffy. Hayley frémit.

- Ainsi, vous avez menti à tout le monde, Madame Hayley ! Ou, devrais-je dire, Hayley, la Belligérante ! Vous pensez que votre manège ne serait jamais dévoilé ? Pensiez-vous prendre le contrôle de notre pays ? Vous emparer de la couronne ? Vous, une misérable pirate, vous...

- Je n'ai jamais menti ! avoua-t-elle sans hausser la voix. J'ai préféré me taire, afin de vous protéger...

- Afin de vous protéger, nuance, la virago ! Votre Majesté, cette espionne doit être livrée à la marine sans plus tarder ! Avec sa prime de 136 millions de berrys, vous pourrez lever l'impôt de votre peuple ! Le Gouvernement, dont nous sommes les obligés, je le rappelle, se fera un plaisir de faire de cette fille un exemple : nul pirate ne peut se cacher indéfiniment !

Il se promena dans toute la pièce en clamant, pour être entendu partout le monde :

- Hayley, ici présente, n'est qu'une usurpatrice qui a profité de votre bonne âme et de ses charmes pour s'infiltrer dans votre palais ! Nul doute que ses complices se tiennent là, quelque part, et attendent qu'elle leur envoie un signal pour nous attaquer ! Ces mêmes bandits qui ont osé lever la main sur un membre de la noblesse mondiale ! Dommage pour vous, pirate, je vous ai démasquée à temps ! Je propose de la livrer sans plus attendre ! Elle est mauvaise ! N'oubliez pas qu'elle s'est jetée dans la bataille de Marineford pour sauver le fils de Gold Roger, Portgas D. Ace, dont elle est l'amante ! Imaginez le danger qu'elle représente !

Wuji regardait Hayley avec tristesse, en tremblant. L'Impératrice bailla. Les trois fils aînés se tenaient bien droit, impassibles.

- Et tout ça pour...

- Moziko, il suffit ! Vous nous avez assez dévoilé votre don d'orateur... ordonna l'Empereur.

- Mais...

- Vous pouvez disposer.

Un silence s'installa.

- Que... Pardon ?

- Ça suffit, retournez à vos occupations. Et vous aussi, et vous, et vous, tout le monde ! Ah, et vous aussi, Hayley.

La concernée releva la tête. L'Empereur fit un signe pour qu'on lui allume sa pipe.

- Vous croyez que j'ignore qui se trouve dans mon palais ?!

Il mentait très mal.

- Je ne crois que ce que je vois. Si cette dame est en effet la pirate Hayley...

- Je le suis, votre Majesté.

Micire faillit s'évanouir : elle avait prit la parole sans autorisation !

- Je me fiche complètement de ces histoires de piraterie, de guerre ou de la marine ! Si elle était dangereuse, ça se verrait.

- Un animal n'attaque que lorsqu'il sent le danger ! rétorqua Moziko.

Hayley leva les yeux au ciel.

- Qu'importe : elle est inoffensive et a toute ma confiance.

Des murmures se firent entendre parmi la cour.

- Mais... Majesté, elle... Le Gouvernement et... La morale ?... Vous... Millions de berrys...

- Si la marine la veut, qu'elle vienne la chercher si elle ose ! Hayley est mon invitée !

Cette déclaration provoqua un silence fulgurant dans la salle. Moziko ne bougeait plus.

- Bon, j'ai faim.

Il claqua des doigts ; un servant lui présenta une coupe de crevettes.

- Hé hé, je parie mille berrys qu'il y aura du sanglier pour le dîner de ce soir !

Ses serviteurs ne lui rappelèrent pas que c'est ce qu'il avait exigé au chef cuisinier du palais. Comme le souverain ne renfonça dans son siège en grignotant ses crevettes, comme pour faire une sieste, sa cour se dispersa lentement et la salle se vida, mettant fin à la convocation. La pirate fut l'une des dernières.

- Majesté, je dois m'excuser de ne pas m'être présentée. Peut-être voulez-vous que je vous dise toute la vérité à mon sujet ?

- Pas la peine, cela ne m'intéresse pas.

Hayley se leva, fit une révérence et partit. Le prince Wuji, rougissant, souriait jusqu'aux oreilles.

Hayley regagna la bibliothèque, légère, en dansant presque dans les couloirs. 136 millions... Ça fait beaucoup ?


Jour 204.

- Evidemment que ça fait beaucoup !

- Bof, pour avoir affronter la marine, je trouve que c'est pas assez !

- Non, pour ses compétences, c'est raisonnable !

- Y des pirates qui valent beaucoup plus !

Les précieuses causaient prime.


Jour 205.

Comme pour lui prouver sa confiance, l'Empereur fit accrocher son portrait, dessiné par Hayley, dans la salle du trône...


Jour 212.

En plus de lui apprendre comment en fabriquer, on enseigna à Hayley comment se battre avec des éventails piégés.


Jour 226.

- Votre Altesse, nous, euh, VOUS ne pouvez pas autoriser cette Hayley à fréquenter votre cour !

- Elle peut être une espionne !

- Ne croyez pas que sous ses airs de godiche sauvage se cache une enfant ! Ce n'est qu'une pirate, à la prime de plus de 100 millions de berrys !! Voyez les journaux :  elle a attaqué le QG de la Marine pour sauver UN homme ! Elle est redoutable !

- Dangereuse !

- Folle à lier !

- Indigne de confiance !

- Son capitaine est le pire de toute la "nouvelle génération" !!

- Pour le moment, elle fait partie de vos concubines ! Forcez-la à se plier à sa condition ou livrez-la à la Marine !

- Il est certain que cette bohémienne n'apportera que le malheur sur Wusashan !

- Cette traîtresse du Gouvernement !

- La putain des pirates de Barbe Blanche !

- Voilà quelque chose d'aisé à vérifier ! Convoquez la doctoresse et forcez l'examen !

Alors que le prince Wuji allait intervenir, tout rouge, après de tels propos lors d'un conseil, son père l'Empereur le devança et explosa :

- Le premier qui doute encore de cette femme, je l'exile !! Je ne vous laisserai pas salir son nom et remettre en cause sa pureté !!!

Ce fût la dernière fois que les ministres critiquèrent la pirate.


Jour 230.

Les journées d'Hayley étaient chargées : le matin, elle allait aux nouvelles du royaume, puis elle courrait, se musclait en compagnie des gardes, déjeunait avec ses amies, repartait étudier, jouait le garde du corps de l'Empereur quand il sortait, apprenait les échecs avec Wuji, confectionnait des armes...


Jour 247.

- Allons, Prince, vous ne pouvez pas paraître aussi intéressé par cette femme ! Qu'importe qu'elle soit une pirate dangereuse ou une sauvageonne, pour le moment, elle est au service de votre père l'Empereur !

Le serviteur passa les bras de son maître dans un kimono rouge étincelant.

- Qui vous dit qu'elle n'est pas éprise de cet Ace aux Poings Ardents ? Elle ne l'a sauvé pas de la plus importante exécution de cette génération pour rien !

- Pourquoi n'est-il pas avec elle, alors, à veiller sur elle ?

- Rien ne dit que les sentiments sont réciproques. Vous l'avez vu ? Fils de feu Roger, jeune puissant pirate redouté et ennemi du Gouvernement Mondial...

- ... Et il est très beau...

- Moui...

- Vous croyez qu'elle préfère ce genre d'hommes ?

- Je pense, au vu de ses origines, qu'elle n'est pas femme à avoir un genre. Voyons, c'est une sauvage, elle vient d'apprendre à lire ! Ni vous, illustre 4ème héritier de la dynastie Saku, ni celui que l'on appelle désormais le "Prince des Pirates", ne s'abaisserait à fréquenter une, euh, dame de sa condition. 

Devant son miroir, Wuji considéra plus les paroles de son serviteur que son reflet.


Jour 289.

L'Empereur mourut. 

Empoisonnement, crise cardiaque, Hayley ne le sut jamais. Mais pour ses amies, c'était encore pire que si le ciel leur était tombé sur la tête... 

Le jour qu'elles redoutaient toutes était arrivé.


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