XI - La forgeronne de réservoirs d'âmes (partie 1)

 C'était, pour Libellule et Hotaru, une évidence, mais Maximilien demanda :

- Pourquoi êtes-vous dans un tel endroit ?

- Comme vous l'entendez, répondit Mephisto, je suis doué pour la communication, les langues n'ont aucun secret pour moi ! D'accord, je triche un peu, mais à méthode spirituelle travail spirituel et nul interprète ou traducteur n'aurait pu mieux que moi transcrire d'un idiome à un autre les jeux d'esprit que j'affectionne tant ! Mais j'ai préféré me spécialiser dans la médecine puisque, voyez-vous, je suis non seulement meilleur malade que les docteurs mais aussi meilleur docteur que les médecins !

- Le plus grand des malades, là-dessus, y a aucun doute... grommela Libellule.

- Vraiment, j'apprécie cet endroit de tout mon cœur, poursuivit-il. Je peux compter sur une grande famille intéressante. Prenez ce jeune homme par exemple.

Tout en parlant, Mephisto se leva et décolla délicatement le garçon de Yoann.

- C'est un grand artiste. Il signe les plus beaux dessins de tout l'asile !

Le marionnettiste se mit à fouiller dans le tiroir d'une commode et en sortit une liasse de feuille format A3, noircies par des gribouillis, des enchevêtrements de lignes et de taches réalisées à la pastelle.

- Voilà quelques unes de ses œuvres. Ça ne vous rappelle rien ?

Il ne laissa évidemment pas de temps de réflexion et ajouta tout de suite :

- Oui, ce sont les costumes que vos reflets portaient dans les miroirs du parc d'attraction !

Angel plissa les yeux, se forçant à discerner le contour d'un gilet mais ne voyant que le papier froissé par endroits, percé dans un coin, strié de rayures tantôt rouges, tantôt violettes, comme autant de cicatrices. Cependant, le marionnettiste s'était métamorphosé en critique d'art enthousiaste :

- N'y a-t-il pas de plus poignante, de plus hypnotisante représentation du tissu que celles-ci ? On sentirait presque le velours sous nos doigts. Grains de poussière, ombre et lumière, boucle de laine, manche reprisée, initiale brodée, non sous une forme conventionnelle, mais codifiées dans la passion brûlante du ressenti. Il ne manque rien. Le soin apporté dans tous ces détails me ravit à chaque fois ! C'est une ode à l'existence de la moindre chose.

- Mephisto ? l'interrompit Maximilien. Vos pouvoirs...

- ... me servent dans la simplicité de la vie quotidienne. L'exquise nature de l'instant unique qui s'unifie à ses abstraits congénères temporels tel un anneau au cœur d'une spirale mérite bien tout ce dont je suis capable pour l'apprécier à sa juste valeur. J'ai reçu le don de respirer...

L'homme balançait théâtralement ses bras en tout sens, attirant à lui des vapeurs qu'il était seul à percevoir. Max fronça les sourcils et tenta de recentrer la conversation sur le sujet qui l'intéressait :

- Je veux dire, spirituellement.

- Ne ressens-tu pas l'importance de l'acte de fusion avec l'air, d'inspiration des inspirations extérieurs...

Mephisto suspendit ses mouvements en plein élan, restant les bras figés dans une posture improbable et ouvrit un œil qui roula sur l'assistance. Remarquant enfin que son entrain n'était pas partagé, il laissa retomber tirades et gestes et dit, d'une voix nettement plus prosaïque :

- Bon, d'accord.

Maximilien reprit sur un ton qui n'admettait plus les débordements :

- Vous ne les dévoilez pas, vous ne vous en servez pas pour les autres. Je ne dis pas que vous êtes égoïstes mais...

- Si, tu le dis, le coupa Mephisto, affichant un genre de sérieux bien à lui. Tu ne comprends pas, c'est tout. Et tu ne peux même pas essayer de comprendre vu que tu crois déjà comprendre. Laisse-moi t'éclairer. Au Moyen-Âge, l'Homme avait déjà entamé sa découverte de la création, chassant les mystères les uns après les autres, amenant le rationnel parce que. Parce que ? Parce que Dieu. On a alors pris possession des nouvelles connaissances pour les étaler sur le plan de travail, les mêler à l'obscurantisme et mijoter entre autre l'asservissement, chose pour laquelle on était très malin et pour laquelle on l'est toujours. Aussi, très souvent, les esprits libres finissaient-ils...

- ... sur le bûcher ? compléta Angel.

- Gagné ! Allez, on prend une pause café ?

- Continuez, exigea Guillaume.

Mephisto haussa les épaules en montrant ses paumes.

- Mais ça ne va pas plus loin. Transposez seulement à notre époque. Vous n'avez pas besoin de moi pour ça, si ? On est assez intelligents pour éviter à notre nom d'être classé top secret et à notre corps la vivisection ; il n'est pas non plus question de plonger le monde dans la terreur des pouvoirs mystiques. Donc, lorsqu'on a un peu de mal à se tenir, ce lieu est un bon exemple de la destination finale. Et dire que c'est l'amour qui m'a condamné !

Le comédien né avait reprit ses accents pompeux.

- L'amour ? répéta Amanda, incrédule.

- Oui, l'amour ! s'écria-t-il en tendant une main élégiaque vers la jeun fille. Oh, je l'aimais tant mais notre union n'était pas du goût de tous. Ses bras solides et noueux ne m'enlaceront-ils plus jamais ? Ne pourrais-je plus jamais l'admirer au printemps quand il se pare des atours d'un fiancé ? Cela me manquera-t-il toujours de ne plus goûter sa tendre chair rouge, couché sous...

- Ne dites plus un mot, on a compris !

- ... l'ombre de son feuillage.

- Quoi ?

Amanda décolla prudemment ses mains plaquées sur ses oreilles.

- C'était un cerisier si majestueux, soupira finalement Mephisto.

- Un cerisier ?

- Oui. L'arbre qui donne des cerises, vous savez.

- Dans ce cas, ne dites pas des choses qui peuvent porter à confusion !

- Attendez, ce type est amoureux d'un arbre ? demanda confirmation Angel.

- Allons Angelo, l'ouverture d'esprit, railla Yoann qui n'en menait pourtant pas large en donnant une claque dans le dos du garçon. Ses préférences ne ne regardent que lui. Ça a même un nom je crois : la dendrophilie. Ha , ha, qu'est-ce que je raconte, moi ?

- Comment est-ce que tu connais des mots pareilles ? Tu files un mauvais coton, toi, grinça Angel.

- Quoi qu'il en soit, reprit Mephisto, je ne l'ai plus revu. Même pas en rêve. J'essaie de ne pas trop m'inquiéter, je pense à autre chose. Avec l'aide des patients et pour eux je m'amuse à construire le parc d'attraction, Mephisto's Theater.

Il avait une expression réellement désolée et pressait le bout de ses index l'un contre l'autre.

- Donc voilà, vous vous amusez, prononça gravement Maximilien, loin de s'attendrir. Vous êtes coincé ici et c'est loin de vous déplaire. Vos excuses me sont égales, je suis déçu. Du moins, vous n'êtes pas un hypocrite : vous êtes conscient de la chance que vous avez de vivre dans un environnement paisible et vous ne voulez pas avoir affaire au reste du monde.

- Le reste du monde, songea Mephisto sans s'offusquer, oui, il est exact d'envisager les choses sous cet angle. Tu as raison, j'en suis complètement détaché et je le trouve beau. Contrairement à ses habitants pessimistes, j'ai toute confiance. Il n'y a jamais eu autant d'entente entre les peuples, les moyens de communication sont fantastiques ! À mon avis, l'être humain se débrouille fort bien.

- Et ce n'est pas grâce à vous, lui reprocha encore Max. Vous avez des facultés mais vous ne voulez pas vous fatiguer.

- Et comment veux-tu que j'interagisse ? Je n'aime pas vraiment me trouver en présence d'autres gens. Qu'on m'admire ou qu'on me dise fou, je suis mal à l'aise. Je m'exprime à travers l'art de la comédie et du drame,ce qui n'est d'ailleurs pas inutile. Tu dois penser que les réflexions de nombreux auteurs, peintres, cinéastes, musiciens et dramaturges n'ont fait que pointer du doigt les problèmes sans les résoudre. Mais les œuvres auxquelles les gens sont confrontées, à partir du moment où elles touchent leur cœur, forgent ce dernier et sont capitales dans la formation de l'individu. Toi aussi tu dois sans cesse te souvenir d'histoires que tu as aimées et dont les messages qu'elles t'ont fait fait passer déterminent une partie de toi.

- L'art est donc une forme de manipulation, selon vous ?

Mephisto sourit.

- Si on veut puisque d'autres agissent en fonction. Néanmoins, tu es venu pour faire les choses à ta façon. Si tu penses être capable de défendre une cause, ce n'est pas moi qui vais t'en empêcher. Je t'écoute.

- Apprenez-moi à me servir de mes capacités spirituelles dans le monde terrestre, s'il vous plaît !

- Eh bien, il suffisait de demander. Tu feras une charmante marionnette.

- Comment ?

- Évidemment, ce n'est pas gratuit.

- Quel genre d'homme êtes-vous ?

- On en reparlera après, conclut le marionnettiste. Au suivant. Voyons voir si on peut faire un tarif de groupe.

Mephisto tourbillonna sur son siège, chaise classique que son caprice dota subitement de roulettes. La tête penchée sur le côté, un index curieux appuyé sous son sourire malicieux, il s'arrêta devant Angel. Ce dernier eut le sentiment que l'homme avait posé sur lui un regard pénétrant et sondait son âme, mais ce fut le policier qui lui vola la parole, toujours impatient d'obtenir ce qu'il voulait et d'en finir au plus vite :

- Moi, je veux simplement savoir ce qui s'est passé dans cette zone morte et ce qu'il est advenu d'André.

- Ah, le jargon des flics, je l'attendais ! s'esclaffa Mephisto. Expliquez-moi ce dont il s'agit pour vous.

- Un cauchemar. Un terrible cauchemar, répondit Angel à la place de Guillaume qui se mettait à grincher de cette perte de temps supplémentaire.

- Un piège qui se referme sur votre âme, développa lui-même le marionnettiste. Une dimension que vous avez construite et qui un jour vous dévore. Pourquoi pareille décadence survient-elle ? Qu'y a-t-il au-delà du trou noir ? Pour commencer, vous devriez vous poser ces questions auxquelles je ne puis malheureusement pas vous proposer de solution.

Sur ces mots, Mephisto se leva brusquement de sa chaise. Il était assez grand pour donner le sentiment au petit groupe de diriger la réunion sans partage.

- A présent, dit-il, c'est à mon tour d'exposer ma requête. Mes propres interrogations se tournent vers un objet doté d'âme. Vous savez, ceux qui passent physiquement du rêve à la réalité et qui disparaissent après avoir accompli leur mission. C'est précisément la mission de Rachel qui m'échappe.

Amanda se raidit, venant d'apercevoir une poupée de porcelaine assise sur le lit. Pour elle, ce genre d'objet avait toujours symbolisé la manipulation, le temps figé, le mensonge. Faisant abstraction de son dégoût, elle la souleva de l'oreiller.

- Elle vous accompagne partout, dit la jeune fille. C'est une étrange... conrêve.

Mephisto la lui prit des mains et commença à la déshabiller tout en la détaillant sous toutes ses coutures.

- Elle ne te plaît pas, hein ? Mais ce n'est pas l'objet qui importe. C'est ce qu'on voit en lui et ce qu'on en fait. Par exemple, une corde : tandis qu'elle vole la vie des condamnés, elle sauve celle des alpinistes. On ne peut pas tout interdire. Autre exemple : ce n'est pas la faute de celui qui l'a conçu si ton camarade de classe passe son temps à se planter son compas dans le doigt en souriant bêtement. Bref. Raah... Elle est où cette étiquette ? Ouf, la voilà. Ah, bah pas étonnant que ça te fasse peur, y a marqué Enélos. Tu me diras, tous les meilleurs trucs sont fabriqués chez Enélos.

Personne, pendant ce temps, n'osa lui dire de taire son babillage incessant pour en venir au fait, mais chacun n'en pensa pas moins. Il lui fallut quelques minutes pour s'expliquer enfin :

- Je ne vois pas à quoi elle sert. Peut-être est-elle liée aux zones mortes, comme vous dites. Je compte donc aller me renseigner auprès du fabricant.

- Le fabricant ? s'étonna Amanda.

- Bien sûr. Cette poupée n'a pas pris forme toute seule. Le problème, c'est que le lieu de sa naissance est protégé par une puissante arène et on ne peut y accéder qu'à plusieurs. Il faut pour cela traverser deux couloirs séparés débouchant sur une même porte munie de serrures dont on peut obtenir les clés en répondant à des énigmes posées dans les corridors. Bien sûr, il est toujours possible de se réveiller si l'on souhaite arrêter la quête et on revient au point de départ. C'est-à-dire au point zéro sachant que les devinettes et les pièges changent sans cesse.

- En gros, vous voulez qu'au moins l'un d'entre nous vous accompagne afin de trouver la clé gardée dans l'un des tunnels tandis que vous vous occuperez de l'autre, récapitula Maximilien.

- Exact. Comme je refuse de mêler à mes histoires qui que ce soit de ce pauvre hôpital, je compte sur vous.

- Et votre pantin ? suggéra Amanda. Il possède âme et esprit, c'est un être à part entière.

- J'ai déjà essayé avec elle, mais c'est son corps l'obstacle : il n'est pas composé de cellules organiques ; la dimension rejette ce genre d'êtres. Une personne seule ne peut pas entrer en se servant d'un objet. Tout est fait pour qu'on y passe au moins à deux. J'ai même essayé de me dédoubler mais l'endroit ne se laisse pas duper confronté à des copies conformes.

- C'est entendu, je viens, conclut Max.

- Attends un peu avant d'arranger les choses tout seul, s'opposa Mephisto. Ce que je voulais dire par tu feras une bonne marionnette, c'est que je vais être obligé de te manipuler. Les devinettes proposées sont d'une exaspérante facilité mais je ne prendrai pas le risque de te laisser te tromper et de finir plus abîmé que tu ne l'es déjà.

Le jeune homme plissa les yeux et eut un mouvement de recul.

- Concrètement ?

- Tu cesseras d'avoir conscience de toi-même, ton existence sera réduite à celle d'un pantin sous mes ordres.

Max ne broncha pas, quoiqu'il était clair que cette idée ne lui plaisait guère. Plus jamais il ne voulait qu'on le commande, qu'on le dirige, comme un pion, sacrifiable. Mephisto lisait en lui comme dans un livre. Il soupira et regarda l'assistance silencieuse.

- Aucun de vous ne veut tenter une telle expérience, n'est-ce pas ? Bon, j'ai prévu un plan B. J'envoie le plus sage secondé du plus fort et je vous laisse vous débrouiller. C'est-à-dire toi et toi.

Son index pointait Yoann et Angel.

- Vous vous trompez, le corrigea ce dernier. Je suis sûr que Maximilien ou Guillaume sont dix fois plus forts qu'Amanda qui est cent fois plus forte que moi. Et Yoann n'a jamais fait de rêve conscient. Par contre, puisque Libellule peut traverser les murs, il serait plus judicieux de...

- Dans tes rêves, pas les miens ! protesta la fée. C'est un lieu placé sous haute protection, ça peut-être très dangereux. Il n'est pas question que j'essaie de passer de l'autre côté d'une porte dont on ignore ce qu'elle cache.

- Calme-toi, calme-toi, tout doux, tout doux, l'apaisa le marionnettiste. Ce sera le blondinet ou rien, je l'ai décidé en le voyant libérer cette incroyable lumière dans la zone morte. Et puis ce sera intéressant pour le grand dadais. Il faut croire en l'expérience épatante que peuvent avoir ceux qui vivent loin des rêves. Leurs réflexions terre-à-terre font parfois des miracles.



***



 Angel soupira. Il n'avait tout simplement pas le choix. Bien que l'endroit ne fût pas accueillant, il allait devoir faire avec et surtout ne pas céder à la peur. Il avait connu bien pire après tout. Montrer la moindre faiblesse déstabiliserait Yoann. Ce dernier apparut d'ailleurs derrière lui, suivit de Mephisto et Hotaru.

- Cette fois, je suis obligé de te croire, hein ?

Le jeune homme déglutit.

- Ça ne risque rien, le mit en confiance Angel. On y va ?

Ils se tenaient sur un terrain abandonné aux herbes folles parmi lesquelles semblaient se cacher des animaux inconnus qui les observaient de leurs regards brillants, couleur nuit froide. Devant eux une falaise se faisait un dîner d'un échafaudage en acier quelque peu rouillé. Les barres de fer, couvertes de peinture rouge écaillée, formaient deux arcs anguleux. L'incertitude, la présentation illogique du rêve. Tout donnait la chair de poule, quoique sans préméditation.

- J'y vais, annonça Mephisto. Bonne chance.

Le marionnettiste s'engagea sous un des arcs et passa à travers la falaise comme sous le rideau d'eau d'une cascade délicate. Angel saisit Yoann par la manche et s'apprêta à son tour à franchir son côté du portail quand Hotaru le retint.

- Angel, je me souviens enfin de ce que je voulais te dire.

Le bond fit signe à Yoann ne patienter quelques instants et tira l'asiatique à l'écart. Celui-ci lui chuchota quelques mots à l'oreille, produisant chez lui un étrange et dramatique bouleversement qu'il s'efforça de contenir au fond de lui. Il eut le sentiment que cette révélation se répercutait contre des boîtes aux lettres, lui renvoyant en écho le dernier mot que Julien avait prononcé à ce moment-là. Angel fit mine de ne pas avoir bien entendu, fronça les sourcils, secoua la main évasivement et fonça dans le passage, entraînant son aîné à sa suite, les oreilles sifflant, le cœur battant.

Ils débouchèrent sur un chemin forestier fermé par des arbres aux troncs serrés, se dressant de chaque côté de la piste et recourbant leurs branches au-dessus de leurs têtes. Des lampions orangers suspendus aux rameaux illuminaient l'onirique route de verdure. Il s'aperçurent qu'ils marchaient sur des rails.

- Pourquoi... commença Yoann.

- J'en sais rien, le coupa le blond en tressaillant. Ne me demande pas de t'expliquer les coutumes d'un autre monde. Avançons.

- Attends une minute, lui demanda le jeune homme.

- Quoi ? souffla l'adolescent sur les nerfs.

- Je veux savoir pourquoi il y a une voie ferrée et où elle mène précisément.

- Ne te pose pas de questions. Comment veux-tu que je le sache ? Ce n'est pas comme sur Terre ici.

- Que ça soit symbolique, esthétique ou fonctionnel, il doit bien y avoir une raison.

- Je te dis qu'il n'y en a pas.

- Moi je ne bouge pas d'ici. Pas avant que tu ne m'aies un peu parlé de ces rails.

- Écoute, je sais que son baptême de déplacement spirituel conscient est une phase difficile mais on doit vraiment y aller.

Tandis qu'Angel se mettait en route, sautant vivement d'une planche à une autre, Yoann restait de marbre. Toutefois, son fort intérieur s'agitait de doutes. Il tentait de comparer ce rêve à ceux qu'il faisait habituellement, à ses différents ressentis entre songes et cauchemars. Mettant de côté l'anormalité commune, il se concentra sur le mal être qui le traversait. Ce moment était très désagréable. Il voulait faire confiance à son instinct, certain que l'énergie qui se dégageait d'Angel avait quelque chose de faussée. Mais il se disait aussi que son inquiétude était infondée et qu'il ne connaissait pas suffisamment le garçon. Une idée lui vint qui lui permettrait de vérifier la cause de sa peur.

- Angel ?

- Hein ?!

- Angelo ? Angel ?

- À quoi tu joues ?

- Es-tu Angel ou Angelo ?

- Je t'ai déjà dit cent fois que je m'appelle Angel.

- Donc tu es Angel. Moi je cherche celui que je nomme Angelo.

- Qu'est-ce que tu racontes ?

- Donne-moi une preuve que tu es bien Angelo.

Le garçon se raidit. Un air gêné apparut sur son visage.

- Mouais, c'est bien ce que je pensais, poursuivit Yoann. Tu n'es qu'une copie d'Angelo.

- Angel, bordel !

Ces derniers mots venaient d'être criés par un second adolescent, en tout point semblable au premier, qui avait brusquement jailli de terre. Il tenta d'asséner un coup de sabre magistral sur son double qui esquiva de justesse et changea d'apparence, se métamorphosant en un sphinx prêt à tout pour leur barrer la route.

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