Chapitre 12
Nathan – Saint exorciste
Chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem
J'ouvris la porte de mon appartement et laissai entrer Michaël et Donna. Ils se déchaussèrent en me voyant le faire et purent ainsi profiter du chauffage au sol. Je pris mille précautions en enlevant mon pull mais malgré mon attention, la barre de douleur revint au niveau de mes côtes cassées. J'ôtai enfin mon vêtement et baissai mon tee-shirt qui était venu avec, laissant voir mon strapping à mes deux visiteurs.
— Qu'est-ce que tu as fait ? demanda Michaël en accrochant son manteau à la patère.
— C'est une longue histoire.
Si la potion donnée par Virginie ce matin avait agi directement sur mes organes, celle pour les os devait être prise en traitement d'une semaine. En attendant, je devrais faire avec la douleur.
Je priai mes invités de s'asseoir à table et allai leur chercher à boire. La présence de Michaël ne faciliterait pas la conversation avec Donna, mais au moins j'avais pu compter sur lui pour l'amener jusqu'à chez moi. Seule, elle ne l'aurait jamais fait.
Une fois les deux cafés prêts, je les leur apportai avec du sucre et m'assis face à Donna.
— Ça te redonnera un peu des couleurs, lui dis-je en remontant mes manches longues jusqu'à mes coudes.
Ses yeux de merlan frit me montrèrent qu'elle était totalement décontenancée par mon brusque changement d'attitude au point qu'elle ne savait pas si me faire confiance était judicieux. La pauvre. Si ma théorie était juste et qu'elle était impliquée, elle n'était pas au bout des mauvaises surprises.
— Je peux me rafraîchir quelque part ? demanda-t-elle.
— Le couloir derrière toi à droite. La porte d'en face.
Elle hocha la tête et fila. Je reportai alors toute mon attention sur les iris magnifiques de son ami qui détaillaient les tatouages sur mes mains et mes avant-bras.
Michaël, dérivé de Michel, prénom du plus grand archange des Cieux signifiant « semblable à Dieu ». Son nom de baptême résumait à lui seul le contraire de ce que je représentais. Et celui qu'il était en tant qu'homme réveillait celui que j'avais juré de ne plus être.
— Ça fait longtemps que vous vous connaissez ? demandai-je pour chasser mon trouble.
Il leva les yeux vers moi.
Putain qu'il était beau !
— Depuis le lycée.
Au contraire de m'apaiser, sa voix grisante augmenta mon émoi.
— Tu as son âge ? m'étonnai-je.
— Non, j'ai vingt-trois ans. Donna était la seule Seconde à traîner avec des Terminales sans que l'un d'eux soit de sa famille.
— Comment c'est arrivé ?
— Elle m'a fait marrer dès son premier jour au lycée, du coup je l'ai prise sous mon aile, si on peut dire.
— Vous êtes ensemble ?
Ma question le fit sourire.
— Non, non. J'ai une copine. Donna est comme une petite sœur.
Dommage, il était hétéro...
— Je vois.
— Tu as de la famille ? demanda-t-il.
Son sourire retomba et je le vis gêné. L'expression que je lui renvoyais devait vraiment être pitoyable pour qu'il réagisse comme ça.
Je baissai les yeux.
— Je suis désolé, s'excusa-t-il.
— C'est rien, assurai-je.
Un silence embarrassant s'installa sans que je sache comment le briser. Michaël se racla un peu la gorge avant de reprendre :
— Sympa, ton appart'.
— Merci.
— Tu fais quoi dans la vie ?
Nouveau silence et nouvelle gêne.
Chaque fois, je me demandais pourquoi je ne pouvais avoir aucun ami et chaque fois que je rencontrais quelqu'un, je m'en souvenais. Je n'avais pas le droit de parler de ma vie. Répondre honnêtement aux questions qu'on pouvait poser dans la plus banale des conversations m'était interdit par le serment que j'avais prêté, tout comme l'était le mensonge. Alors à chaque fois, je donnais la même réponse, celle qui faisait croire aux gens que je ne souhaitais pas me lier à eux.
— C'est compliqué, répondis-je.
— Je vois...
Le ton de sa phrase ne me laissa plus grand espoir.
Pourtant, il se mit à l'aise sur sa chaise et retenta :
— Et toi, tu l'as connue comment, Donna ?
Sa détermination me ragaillardit. Cette fois, ce fut à mon tour d'esquisser un sourire. Il avait compris que je n'étais pas fermé à la discussion s'il ne me posait aucune question sur moi.
— Elle m'a pris en photo dans la rue, répondis-je.
— Sérieux ?!
— Je te jure.
— Normalement, elle est plus branchée vieux bâtiments en ruine mais je comprends qu'elle ait fait une impasse, tu dois être super photogénique.
Son compliment me toucha un peu trop. Beaucoup trop.
— C'était un devoir pour son école, ça n'a rien à voir avec moi, expliquai-je.
Donna nous rejoignit enfin, l'air un peu plus en confiance que tout à l'heure. Lorsqu'elle s'assit, le téléphone de Michaël sonna. Pendant qu'il répondait, je me penchai vers elle.
— Il va falloir que je te parle rapidement, chuchotai-je.
— Tu me tueras, après ? demanda-t-elle sur le même ton.
Son air sérieux m'amusa. Elle avait vraiment cru à ma menace.
— Ne te moque pas de moi, maugréa-t-elle.
— Je n'oserais pas.
— Tes yeux parlent pour toi.
— Je ne te tuerai pas, promis-je en me redressant.
J'écoutai la conversation de Michaël avec sa copine, à en croire ses propos. Il n'avait pas l'air content quand il raccrocha.
— Qu'est-ce qui se passe ? demanda Donna.
— Clara a fini plus tôt que prévu, elle veut que je rentre. On y va ?
— Je termine mon café et...
— Pas la peine, intervins-je. Je ramènerai Donna chez elle, ne t'inquiète pas pour ça.
Donna ne trouva rien à redire tant elle était surprise. Michaël ne s'attarda pas plus longtemps, visiblement pressé de remettre les pendules à l'heure avec sa copine. Quand la porte se referma derrière lui, je fixai mon interlocutrice :
— À nous deux.
**
Donna – Étudiante pas rassurée
Mon sang ne fit qu'un tour. Moi qui pensais avoir réussi à reprendre le dessus, je m'étais plantée ! Et je n'avais pas prévu que Michaël me lâcherait en territoire ennemi. Traître !
Nathan m'observait sans discontinuité et je n'aimais pas ça du tout, du tout.
— Je ne sais rien de plus, le prévins-je. C'est un copain qui a trouvé le message en nettoyant sa bande son et qui me l'a envoyé dans la foulée. Et il l'a supprimé, aussi. Y'a plus aucune trace. Promis.
— C'est bien, me félicita-t-il. Mais j'ai comme l'impression que malgré tout, toi et moi sommes liés d'une manière ou d'une autre.
Il se leva.
— Comment ça ? questionnai-je.
— Je ne sais pas, mais il faudra bien trouver, dit-il en prenant quelque chose dans son manteau avant de revenir. En attendant, si jamais un truc d'étrange t'arrive, appelle-moi.
J'attrapai machinalement la carte qu'il me tendait. J'ouvris de grands yeux en lisant l'inscription dessus.
Je levai un visage dubitatif vers lui :
— Tu es un exorciste. C'est une blague ?
— Je ne vais pas chercher à te convaincre par des mots.
— Comment, alors ?
— Tu verras. Dans tous les sens du terme. Donne ton portable.
Soucieuse de ne surtout pas l'énerver tant que j'étais seule avec lui, j'obéis sans broncher. Il composa un numéro. Quelques secondes plus tard, son propre portable sonna : il avait le mien, maintenant.
— Je t'appellerai dans les jours qui viennent, me prévint-il en me rendant mon bien. Peu importe où tu es et ce que tu fais, tu devras te tenir prête pour venir avec moi.
— Où ? Pourquoi ?
— Pour que tu voies de tes propres yeux. Et après, seulement, on parlera. Maintenant, bois ton café et je te ramène.
Je bus ce qu'il restait dans ma tasse et me levai.
Je ne comprenais rien. Qu'est-ce qu'il voulait me montrer ? Une séance d'exorcisme ? Un démon ?
J'avais dit qu'il était taré ? Ben je le pensais toujours. Sauf qu'entre-temps, il y avait eu le fantôme et ça, c'était vraiment bizarre.
Tout était étrange depuis que j'avais pris cette photo de Nathan. Et j'avais peur que ce ne soit que le début.
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