Chapitre 4 : Le défi des éléments
Tous les dragons et les dragonniers faisaient face à la falaise. L'endroit vers lequel nous allions nous envoler était une gorge étroite. Le but du défi était de passer dans trois anneaux à des hauteurs différentes. Nous pouvions apercevoir le premier prêt de l'océan loin devant nous. Le départ fût donné et l'épreuve commençait déjà. Certains dragons ne décollaient pas. Le vent ou la peur des dragonniers ? On ne peut le dire. Alors que nous allions décoller avec Soliane, la voix de Charlie hurla :
- Il faut qu'on vole en ligne, la carrière est trop étroite pour passer à plusieurs !
Il avait raison, mais les jumeaux blonds avaient déjà décollé. Nous nous envolions aussi. Les falaises s'étendaient devant nous, d'immenses vagues se fracassaient avec violence sur la roche. Le premier anneau étant au raz de l'eau, il allait vite falloir descendre. Charlie avait raison. Si nous plongions tous en même temps, nous allions nous écraser.
Un garçon de mon groupe au cheveux châtains commençait à plonger en même temps que tous les autres groupes.
« Non ! Si nous descendons maintenant nous allons percutés els autres. Il faut attendre ! »
Sous le coup de la peur, je ne m'étais pas rendu compte que j'avais hurler mentalement ces paroles. Ester s'arrêta net derrière moi. Il était crispé et ne bougeait pas. Charlie passait au-dessus de moi.
- En me mettant un coup de poing tu n'aurais pas pu me faire plus mal. Ta voix est très forte, fais attention à la contrôler.
Le garçon brun qui allait descendre volait à présent à côté de nous. Il ne manquait plus que les jumeaux qui continuait de voler devant nous. Charlie me fit un signe de tête et passa devant. Je le suivis passant à côté d'une fille aux cheveux verts qui me sourit. On pouvait voler côte à côte avec Charlie, Soliane étant de petite taille.
Les jumeaux avaient pris en sandwich un garçon du groupe bleu chevauchant une grande dragonne violette. Celle-ci fit un mouvement d'aile et passa sous ceux des jumeaux. Le coup d'aile heurta le dragon beige du jumeau qui fut éjecter de selle côté de selle.
- Imbécile de dragon tu vas m'aider à remonter ?
Le jumeau avait l'air fou de rage. Le ton qu'il utilisait pour parler à son dragon me dérangeait. Mais il faisait partie de l'équipe. Malgré le ton qu'il venait d'employer avec son congénère, Soliane me demandait de l'aider.
« Tu dois l'aider. Tu prends le risque qu'il t'aime encore moins, mais tu dois l'aider. Utilise la télékinésie. »
« D'accord, mais pourquoi sa sœur et lui ont l'air de ne pas pouvoir me voir. » demandais-je en rassemblant ma concentration.
« Aucune idée. Dépêche-toi, l'anneau approche. »
La nuque me picotait. C'était le moment.
« Nil, tu es avec moi ? »
« Toujours. »
L'énergie partait le long de ma nuque, jusqu'à descendre dans ma colonne vertébrale. Comme des serpents électriques le long de mes bras. Il fallait que je lâche le pommeau de la selle. Mes cuisses se serraient contre la selle et mes bras se tendaient devant moi. Je lâchais les serpents d'énergie pour entourer le jumeau et le remonter délicatement au-dessus de sa selle. Un mouvement sur la droite attira mon attention et ma concentration se relâcha et les serpents d'énergie revinrent dans mes bras et remontèrent jusqu'à ma nuque, m'arrachant un cri de douleur.
« Reste avec moi petit dragonnier. »
Un chemin de lumière traversa mon esprit me faisant émerger doucement. C'était Soliane, c'était l'énergie de Soliane. Devant moi le jumeau avait réussi à se remettre en selle. Quel soulagement. Nous entamions la descente.
« Comment as-tu fait ? » Demandais-je.
« Je t'ai transmis une partie de mon énergie. Tu en avais besoin pour éviter un contrecoup trop violent. » Expliqua-t-il.
« Fais attention à toi quand même. Tu en as besoin aussi. »
« Arrête ton char. On est lié et tu en as besoin pour la suite. Je ne l'ai pas fait pendant ton entrainement parce que ça fatigue mentalement et tu pouvais te reposer après. »
Le jumeau volait sous moi et me faisait signe.
« Tu n'as pas besoin de te justifier. Même si tu as plus d'énergie que moi, garde tes réserves tu vas en avoir besoin. Mais merci mon grand. »
« Je t'en prie Lassa. »
- Merci abruti ! J'aurai pu remonter seul !
Il vaut mieux prendre ça pour un remerciement, de toute façon je n'ai pas fait ça pour lui. Nous continuions d'avancer prudemment, même les jumeaux cette fois.
Autour de nous les autres groupes se coordonnaient comme ils le peuvent. Nous étions le seul groupe à être resté tous ensemble. Les autres étaient à deux ou trois mais jamais en entier. L'anneau était à moitié immergé.
« Prêt à passer dans l'eau mon grand ? Les dragons peuvent passer dans l'eau ? »
« Moi oui, mais les autres non Jolan. La peur de l'eau est la peur la plus répandue des dragons. Elle est presque généralisée. Assure-toi que vous soyez tous prêts. Apprends à tisser des liens avec ton groupe. »
« Je suis moins prêt pour ça bizarrement. »
J'hésitai à interpeller le groupe mentalement comme tout à l'heure. Je ne savais pas contrôler ma télépathie et je ne voulais pas leur faire mal. C'est un garçon avec des lunettes bizarres qui nous interpella. Sa voix semblait ne pas se préoccuper du vent.
- Suivez-moi.
« Tu ne fais que retarder le moment. »
« Je sais. »
Il nous conduisit jusqu'à une grotte où nous nous posions tous. Le garçon au cheveux noirs retira ses lunettes pour dévoiler deux yeux d'un gris presque blanc.
- Le seul qui peut passer hors de l'eau c'est toi. Dit-il en me montrant du doigt. Ton dragon est plus petit et plus jeune que les notre. À pleine vitesse et en repliant les ailes, vous pouvez passer. C'est possible. Mais nous on doit passer dans l'eau, vous êtes prêts ?
Ester sauta de selle et recula.
- C'est impossible.
- Et voilà, il remet ça, dit la jumelle. Dit donc toi, c'est dur pour tout le monde alors arrête de faire ta chochotte.
Je sautais de selle ignorant le regard assassin que me jetais les jumeaux. Ma main se posa sur l'épaule d'Ester, et comme Soliane fait avec moi, je lui transmis une vague d'apaisement. Il me regardait en souriant.
- J'ai peur de trois choses pour l'instant : l'eau, le vide et les dragons. Il faut juste qu'on passe à pleine vitesse dans l'eau. Ça semble facile dit comme ça, mais ça ne l'est pas.
Charlie sauta de selle.
- Si on te cache les yeux Ester, avec l'écharpe de Jolan et que tu te bouches les oreilles, tu ne verras ni le vide, ni l'eau, et tu ne les entendras pas.
Il se dégageait de sa voix une autorité naturelle et son sourire semblait rassurer tout le monde.
- Et comment il fait pour se tenir ? Demanda le jumeau en se moquant.
- Il pourrait mettre ses mains dans les lanières des étriers si on les croise sur la selle. Il peut caller ses pieds derrière des écailles. Proposais-je.
- Bonne idée Jolan. Ça te va Ester ?
Il tremblait comme une feuille mais pousser par les paroles encourageantes de la fille aux cheveux verts, il remonta en selle. Je retirai mon écharpe tandis qu'Ester croisait les lanières sur la selle. Je refermais ma veste en enfonçant la capuche sur ma tête. Je n'avais pas pris de sweat et la veste de vol beaucoup trop grande pour moi laissait passée les courants d'air. Je tendis l'écharpe à Charlie qui plus grand que moi, la noua autour des yeux d'Ester, qui lui-même avait déjà passé les mains dans les sangles.
- Je ne peux pas.
- Mais si tu peux. Et puis tu as moins peur d'Otil que de l'eau non ? Dit-il avec une assurance qui ferrait monter un mouton sur le dos d'un dragon.
- Oui je crois.
- Très bien. Les autres ?
Je sautai en selle en disant que j'étais prêt. Le jumeau s'avança vers moi en demandant deux secondes à Charlie. Il me jeta un bonnet gris.
- Ta veste est trop grande pour toi.
- Merci, le remerciais-je.
- Je ne fais pas ça pour toi. T'entendre claquer des dents me tape sur les nerfs, gamin.
Il éclata de rire.
- Allons-y. Dit Ester en décollant immédiatement sans nous laisser le temps de régir.
Nous décollons tous suivit du roux qui fermai la marche derrière moi. Nous longeons la surface de l'eau. Les dragons avançaient moins vite. Je ne comprenais toujours pas pourquoi les dragons avaient peur de l'eau. Et surtout pourquoi les dragonniers ont l'air aussi effrayé.
« La vue est le sens le plus important pour un dragon. Or sous l'eau, la plupart sont quasiment aveugle. Autant dire que ça a de quoi les faire paniquer.
« Mais attends Soliane, c'est la peur des dragonniers qui est visible. Ester a dit qu'il avait peur du vide, de l'eau et des dragons. Est-ce que ça veut dire que les dragonniers et les dragons partagent leurs peurs ? » Demandais-je.
« Bien vu petit dragonnier mais concentre toi, Ester est déjà passé sous l'anneau. Si la plupart des dragons peuvent gérer leur peur, le ressenti qu'en ont les dragonniers est bien plus fort. Et avant que tu poses la question, oui Otil a peur d'Ester aussi et du vide. Bien que ces deux dernières peurs appartiennent à Ester. »
La fille aux cheveux verts ressortait de l'eau derrière Ester. Le garçon blond qui devait être Jo, selon le récit d'Ester allait s'immerger.
« Tu n'as pas peur pourtant toi mon grand. »
« Les dragons ont des cousins des mers que l'on appelle Élusims. La légende raconte qu'avant nous étions une même espèce. Aujourd'hui certains dragons peuvent encore voir sous l'eau. J'en fais partie, la dragonne de la fille aux cheveux verts aussi. Ce qui ne nous empêche pas d'avoir peur que vous tombiez de selle sous l'eau. »
L'anneau fût devant nous et nous plongions. Soliane m'intimait de garder les yeux ouverts. Il avait peur que je chute. Les autres s'étaient élevés et nous vîmes l'anneau très haut vers l'Est. Seul le bas de l'anneau perçait les nuages. Une fille aux cheveux blonds regarda derrière elle et cria.
- Où est Charlie ?
Tous les dragons se retournèrent. La grande dragonne orange volait au-dessus de l'eau, mais son cavalier n'était plus sur son dos. Un bout de sangle coupée montrait qu'elle avait été coupée.
« Soliane, il faut plonger ! »
« Jolan, je ne suis pas assez fort pour soulever un dragonnier de sa taille hors de l'eau en plus de mon cavalier. On ignore même si tu peux retenir ta respiration suffisamment longtemps, je ne veux pas prendre le risque de te perdre aussi dans l'eau. »
« Il va se noyer ! »
« Les maitres dragonniers arrivent pour l'aider. »
Des dragons tachetés de noirs volaient dans notre direction.
- Viens Jolan, ils vont le sortir de là. On doit continuer.
La fille aux cheveux verts s'était approchée de moi sur sa dragonne. Mon regard rencontra celui de la dragonne orange. Au fond de moi, quelque chose se mit à bouillir. Mes bras me chatouillaient. Je fermai les yeux. Des filaments d'énergie couraient le long de mes bras. Avec l'aide de Soliane, j'avais plus d'énergie que je n'en avais jamais eu. Elle pulsait le long de mes bras. C'était comme la fois où j'avais fait jaillir l'étincelle. L'énergie pulsait le long de mes bras comme dans un mouvement fluide. Je lâchais la selle de Soliane.
- Jolan que fais-tu ? demanda une voix qui semblait être celle du garçon brun aux lunettes.
Aucune idée. C'était comme si une rivière coulait dans mes bras. Mon instinct avait pris le dessus. Mes bras bougeaient dans un mouvement verticale fluide. Une seule volonté guidait mes gestes : sortir Charlie de l'eau. Et c'est ce que j'ai plus ou moins fait. Les gestes devenaient plus durs à réaliser, comme si c'était plus lourd. Je levais les bras le plus haut possible et j'ouvris les yeux, sentant l'énergie se dissiper. Charlie avait été projeté dans les airs.
- Attention ! cria le garçon aux lunettes.
Il fit un geste de la main et immobilisa Charlie par télékinésie. La dragonne orange s'approcha tandis que son cavalier s'était mis à tousser. Il secoua la tête et ouvrit les yeux. Il était suspendu en l'air et regardait autour de lui. Il nous vit et leva le pouce. Celui qui le tenait le déposa sur le dos de sa dragonne où il se dépêcha de rattacher une sangle. Une fois à notre hauteur nous nous remîmes en route. Nous volions tous les trois, côte à côte, les autres devant. Nous étions au complet. Charlie était au centre.
- Merci Elwin ! cria-t-il contre le vent.
- Je t'en prie. C'est Jolan qui a fait le gros du travail, c'est lui qui t'a sorti de l'eau. Répondit celui qui s'appelait Elwin.
- Merci Jolan ! Je ne pouvais pas retenir ma respiration plus longtemps. Je ne sais pas ce que tu as fait, mais c'est comme si l'eau avait eu une prise sur moi et m'avait saisi avant de me projeter dans les airs. Comment as-tu fait ?
- Aucune idée, avouai-je.
- On demandera à maitre Anila.
« Merci de ne pas avoir abandonné mon cavalier. Je suis Norberta. »
La voix de la dragonne orange résonnait avec force dans ma tête.
« Ce n'est rien, je ne sais même pas ce que j'ai fait. »
« C'est beaucoup pour moi. Charlie était un très bon nageur avant notre rencontre, mais je lui ai transmis ma peur de l'eau. Je suis responsable de ce qu'il s'est passé. J'ai une dette envers toi. Pour le reste, tu comprendras bien assez tôt petit dragonnier. »
Elle s'élançait plus haut dans le ciel avec Charlie, me laissant voler à côté du brun aux lunettes, Elwin. Le prochain anneau était donc très haut dans le ciel et le vent était notre deuxième ennemie. C'était difficile de ne pas fermer les yeux. Je regardais les autres et seul Elwin ne semblait pas déranger par le vent. Il avait croisé mon regard et s'approcha de moi sur son dragon.
- Je suis des vents, c'est pour ça qu'il ne me gêne pas. Fais comme tu as dit à Ester, tes mains dans les lanières et tes pieds derrière des écailles. Tu seras moins la proie des vents une fois couché sur l'encolure de ton dragon.
J'hochai la tête, malgré le bonnet du jumeau mes oreilles bourdonnaient. Lâchant une main après l'autre, je récupérais les sangles et y passai mes mains. Ainsi couché sur l'encolure de Soliane, le trajet jusqu'au deuxième anneau se passa sans plus d'encombre. Le tonnerre me fit sursauter, et la pluie s'est abattue sur nous sans autre avertissement.
- Génial... lâchais-je entre mes dents.
Nous étions tous trempés. La capuche de ma veste de vol, trop grande pour moi, ne tenait pas avec le vent. Si le vent nous avait plus ou moins sécher à l'extérieur, notre veste de vol n'est pas prévue pour nous garder au sec après un plongeon dans l'océan. Nous continuons de monter malgré la pluie. Seul Charlie restait au sec.
Nous passions l'anneau et les nuages en priment. Au revoir la pluie. Nous sommes pour l'instant le seul groupe à l'avoir fait. L'air était plus rare ici, mais le paysage en vaut le coup. C'est un autre monde au-delà des nuages. Alors que nous regardions tous autour de nous, je crus apercevoir maitre Hûto sur son dragon. Mon regard fut attiré sur la droite. Charlie était en train de passer à côté de tout le monde. Que fait-il ? Le temps de reporté mon regard sur la gauche, maitre Hûto avait disparu.
« Tu as vu Soliane ? »
« Oui, il doit surement surveiller. »
« Ça m'étonnerait, les autres maitres sont là pour ça. Je n'aime pas ça mais espérons que tu aies raison. »
- Jolan ? m'a appelé Charlie. Tends ton bras vers moi.
Ses cheveux brillaient d'un étrange halo rouge. Sa main toucha la mienne et c'était comme si j'étais pris dans une tornade de feu. Mes vêtements étaient secs et je n'avais plus froid.
- Comment tu as fait ça ? demandais-je.
- J'ai une maitrise de feu. Viens, Camélia, la fille aux cheveux verts, a trouvé le dernier anneau.
Nous redescendons tous et nous mettons à longer la falaise. J'avais un mauvais pressentiment et me mis à regarder de droit à gauche. Il ne pleuvait plus mais le ciel était noir. Mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine.
- Soliane... J'ai peur.
Le tonnerre gronda et les ombres s'étirèrent vers nous. Je n'étais pas le seul à sentir un danger. Ma nuque était électrique. La fille aux cheveux verts scruta de droite à gauche. Une ombre la toucha et sa dragonne percuta la falaise et s'y écrasa. Mais Camélia avait été éjecter de selle, sa longe avait été coupée.
- Plonge !
Soliane se laissait déjà tomber et nous rattrapions Camélia. Je regardais autour de moi tandis que Soliane déposait ma camarade à côté de sa dragonne. En dehors de Camélia qui s'est posé, nous sommes tous en train de faire du sur-place en groupe, ne comprenant pas la nuit qui nous entourait à ce moment-là. J'ai replacé doucement mes pieds dans mes étriers et saisis le pommeau de selle. Une flèche siffla dans l'air. Le feu qui y brulait était en train de s'éteindre au contact de la nuit. Mes poumons me brulaient comme la veille. Une étincelle, juste une étincelle. La flèche explosa. Une brèche se créa mais fut vite rebouchée. Les ombres s'étiraient vers moi, Camélia n'était qu'un dommage collatéral. La nuit s'étirait vers moi et me touchait presque les pieds. J'étais terrifié. Alors qu'elle allait me toucher, ma nuque semblait prête à exploser.
- Ne me touchez pas ! criais-je.
Dans l'instant qui suivit, une onde de lumière blanche éclaira la nuit tout autour de moi. L'ombre disparut à son contact. Les autres reculèrent, elle ne pouvait pas m'approcher. Elles commencèrent à se masser autour des jumeaux et l'instant d'après les deux blondinets tombaient de leur selle. Norberta, la dragonne de Charlie, saisit un des dragons beiges dans ses pattes, tandis que le dragon d'Elwin, le garçon aux lunettes prenaient déjà l'autre.
- Soliane !
Il s'est laissé tomber comme une pierre, mais les jumeaux étaient trop bas, ils allaient s'écraser sur les rochers.
« Jolan, à toi ! On n'arrivera pas à temps. »
« Qu'est-ce que je suis censé faire ? »
« Épaules ! »
À peine avait-il évoqué cette partie du corps qu'elles devinrent douloureuses, comme bruler par le froid. Je poussais mes bras devant moi les yeux fermés. L'énergie semblait figée et modulable. Elle descendit jusqu'à mes mains où une fois relâcher, les deux glissèrent le long de la falaise pleine de neige. Elwin et Charlie les récupérèrent et les posèrent à côté de Camélia. Elwin appelai une fille blonde qui s'était posée à côté des trois.
- Kira, quel est leur état ?
- Tous les trois inconscients. Jolan, qu'est-ce que tu fais avec tes jambes ?
Je l'ignorais moi-même. Les ombres nous avaient de nouveau entourées. Je secouai mes jambes. C'était comme si des éclats de verre se trouvait à l'intérieur. Cette jeune femme, Kira essayait de déchirer les ombres de son petit canif. Ses mouvements étaient fluides comme si elle dansait. Je sortis le mien et me mit debout sur la selle. Mes jambes avaient pris le contrôle.
« Jolan assied toi. »
Deux minutes. Les fragments de verre traversèrent mon corps d'un coup, venant se loger dans la lame du poignard qui s'allongea. Qu'est ce qui se passait ? Je ne savais pas me servir d'une épée. Une idée traversa mon esprit.
- Kira ! Attrape !
L'ancien poignard tournait en l'air. Kira le fixait et se jeta en avant pour attraper le pommeau au bon moment.
- Allez aider les princes ! Je protège les trois marmottes, cria Kia.
Nous remontons tous les trois. Un garçon brun dont les cheveux cachait un œil se débattait dans la nuit. Sa dragonne s'approchai de la falaise mais il chuta de selle, sa lange coupé, comme les jumeaux. J'avais des fourmis dans les pieds. Une nouvelle source d'énergie. J'acheminais l'énergie jusqu'à mes mains et la projeta vers la falaise. Les herbes vertes s'épaissirent pour amortir sa chute. Le jeune homme blond, dont m'avait parlé Ester, Jo, venait de se poser et courait déjà dans sa direction. Mon corps était tout fourbu. Deux transferts d'énergie dans une même journée, mon corps ne le supporterai pas, du moins pas encore.
Soliane changea de direction pour porter son aide au deuxième garçon brun. Sur le coup, j'ai cru à une illusion. Jetant un regard à la falaise où l'autre était allongé, je compris qu'eux aussi étaient jumeaux. Soliane, toutes griffes dehors, fonçait dans l'ombre. Il n'avait pas peur lui. Mais moi si. Je fermai les yeux, terrifié.
- Non !
Une nouvelle onde de lumière s'échappait de mon corps créant une percée dans la nuit artificielle. Le deuxième jumeau profita de ce moment pour regagner la falaise. La nuit gagnait du terrain et nous entourait. Au bout de mes doigts dansaient des éclairs.
« Lance les, petit dragonnier ! »
Ma panique était en train de gagner mon compagnon. Je laissais s'échapper l'énergie dans un arc électrique. Nous apercevons un bout de jour. Charlie était juste devant nous et avait du mal à regagner la falaise. Le dénommé Elwin, venait de se poser et tentait par sa maitrise du vent de le ramener vers la falaise. Ses cheveux semblaient entourés d'un halo blanc. En le regardant faire, mes oreilles se mirent à bourdonner. Reposant une main sur la selle, je tranchais l'air devant moi provoquant une rafale de vent. Charlie et Norberta, sa dragonne, s'écrasèrent sur la falaise. Charlie se releva immédiatement et coupa sa sangle avec son poignard. L'arme dans une main, une flamme dans l'autre, il se tenait dos à Elwin et les deux faisaient équipe pour repousser la nuit.
- Il manque Ester ! criais-je soudain.
Soliane gronda et envoya une salve de flammes pour créer des brèches. Il avait vu Otil et volait dans leur direction. Ester avait accroché ses deux sangles et les protégeait de son corps. Aussitôt les ombres quittèrent la falaise pour venir nous entourer. La panique montait en moi.
- Ester !
Il ne me répondait pas. Ma nuque pétillait. Un bras de nuit s'approcha et je n'eu que le temps de reculer pour éviter qu'elle ne me touche. Ma sangle fut coupée sur le coup.
- Laissez-nous ! criais-je.
J'étais terrifié et mes poumons semblaient compressés dans ma poitrine. La nuit se compactait autour de nous quatre. Otil, l'immense dragon bleu crachait des flammes jaunes de tous les côtés. La nuit était de plus en plus compacte. Les ombres étaient là pour moi, je le savais. Les rares souvenirs qui étaient remontés des limbes de mon esprit, montraient ces ombres. Elles me suivaient. La culpabilité commençait à monter. C'était de ma faute si elles s'en prenaient au groupe. Un feu d'artifice semblait éclater dans ma nuque.
- Allez-vous-en ! Criais-je.
Au moment où ces mots quittèrent mes lèvres, la tension présente dans ma nuque m'échappa. Ce n'était pas une onde de lumière cette fois qui partait de mon corps mais mon corps émettait de la lumière en permanence. Elle éclairait autour de Soliane et moi la nuit, dispersant les ombres. La nuit ne pouvait pas m'approcher, alors elle se compacta autour d'Ester.
- Ne vous approchez pas de lui !
Un nouveau feu d'artifice explosa dans ma nuque et la lumière blanche émise éclaira le ciel, je fus obligé de fermer les yeux. Les explosions se multipliaient dans ma nuque. Le bouquet final. Une explosion plus forte que les autres me traversa et je perdis l'équilibre. J'étais en chute libre vers l'océan. J'ouvris les yeux, Le ciel était dégagé de sa noirceur. Soliane s'agitai, aveuglé, ne me sentant certainement plus sur son dos. Il n'arrivera pas à temps. Je fermais les yeux. Un battement de cœur plus fort que les autres me poussai à lancer un appel télépathique.
« Aidez-moi ! »
Mon dos heurta durement la surface de l'océan.
Je sombrais dans le noir le plus total. Celui qui vous garde à jamais.
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