● 082
Je cogitais jusqu'à m'en donner mal au crâne et ça me rendait toujours un peu plus mal. C'était la dernière chose à laquelle j'aurais pu penser à cette période. Je m'étais toujours pas remis du décès de mon fils quelques mois plus tôt, malgré que je ne montrais rien j'étais toujours aussi abattu et là, ça qui c'était rajouter par-dessus.
Je repensais à tous ceux que j'avais perdu depuis le temps, à commencer par mon frère Maamar, puis mon fils et tous les autres. Chaque année je perdais deux à trois proches. Quand j'y pense il y a vraiment aucune année ou je n'ai pas perdu quelqu'un, tous les ans sans exception et même encore il y a quelques mois.
Quand on parle de ça avec mes kheyou et les autres, ils disent tous «C'est parce qu'on a beaucoup de connaissances donc forcément on n'est plus susceptible d'être touché, contrairement à ceux qui en ont peu» Mais je ne comprends vraiment pas quand ils disent ça. Je trouve juste ça énorme de perde deux à trois proche par année.
Je cogitais toujours autant. J'avais attendu le retour d'Ines toute la soirée et sincèrement ça m'avait fait énormément de bien quand elle était enfin arrivée. Elle me faisait encore la gueule par rapport à la veille, mais au moins elle était là et c'est tout ce que j'avais attendu. J'étais au plus bas et leur présence m'était indispensable.
Dès qu'elle était arrivée elle avait senti que j'avais quelque chose, et c'est pour cette raison qu'on avait été très distant jusqu'au point de ne pas s'adresser la parole du tout, parce que nous on n'est comme ça. Quand on a quelque chose on va dans un premier temps se renfermer sur soit même et s'éviter.
J'étais resté solo à faire ce que je faisais, enfin je ne faisais plus tellement grand-chose. J'étais vraiment au plus bas et je ressassais énormément de choses, qui petit à petit me faisaient de plus en plus mal. Je pensais à des choses de fou, c'était incroyable. J'étais vraiment parti dans des délires complètement louches.
«Pourquoi tu n'es pas mort le jour où Abdel t'avais lynché, quand Assef t'avais ouvert le crâne, quand Massinissa t'avais shlassé, ou dans toutes les autres histoires louches dans lesquelles tu avais traîné, là où c'était allé beaucoup plus loin que les autres fois ? Si tu étais mort dans le premier bourbier dans lequel tu avais été mêlé tu n'aurais pas vécu toutes ces merdes dans lesquelles tu t'es enfoncé. Tout ce serait stopper avant que tu commences à vriller. Tu n'aurais pas connu Ines ni même aucune autre, tu n'aurais pas eu d'enfants dans de mauvaises conditions avec deux femmes, tu ne te serais jamais droguer comme tu as pu le faire jusqu'à présent. Tu n'aurais jamais eu le temps de faire toutes ces conneries..»
C'était ce genre de choses auxquelles je n'avais fait que de penser. J'étais quand même parti très loin dans mes pensées et encore ça ce n'était absolument rien comparer aux restes qui me tapaient le crâne à n'en plus finir. J'étais complètement en train de vriller, j'étais comme devenu fou tellement ça me prenait de l'intérieur.
L'annonce de son décès m'avait emmené complètement ailleurs, mes pensées avaient été bousculées par plein de choses. Je repensais à toutes ces dernières années et à la façon dont je les avais vécus, sur le moment j'avais regretté tellement de choses, mais malheureusement je le savais que ça n'allait pas durer.
La mort ça met d'accord, ça nous rappelle, ça nous fait énormément cogiter et pour quelques-uns ça les fait changer, mais malheureusement pour ma part ça me rappelait que quelques jours voire quelques semaines, mais après ça s'arrêtait là et je retournais m'enfoncer au plus profond de mes mauvaises habitudes.
Sur le moment j'étais tellement mal. C'était tout frais, je venais de l'apprendre il y a peu de temps donc forcément j'étais au plus bas. J'étais tellement en train de me rendre mal, limite malade que j'étais allé faire ghusl et j'étais parti à la Mosquée, invraisemblable. Je m'étais glissé au dernier rang et j'avais prié.
J'y étais resté un petit moment, puis par la suite je m'étais installé au fond et j'avais lu. J'y étais resté un bon moment à lire par contre, et finalement j'étais retourné chez Ines. Je l'avais laissé seule et j'étais directement parti m'enfermé dans la chambre de Zaher qui lui était avec Ines, et j'étais resté un moment à cogiter.
Après quelques temps de réflexion j'avais sorti le sajada que Nouredy m'avait acheté quelques semaines plus tôt et je m'étais mis de nouveau à prier. Dès que j'avais commencé la première, après ça avait suivi. Je n'arrivais plus à m'arrêter, plus j'en faisais et plus j'avais envie d'en faire. J'avais énormément fait de du3as.
Pour mon frère Maamar et mon fils Zian, pour mon frérot Nourredin, pour Ayssem, Bilal, Nacim, Moad, Zinedine, Hakim et tous ceux que j'avais perdu Allahi rahmoum, mais aussi pour Hûsin, Bassem, Tarik, Hafez et tous mes frérots qui étaient enfermés depuis le temps. Je n'avais vraiment oublié aucun d'eux.
J'avais également fait des du3as pour tous mes frérots encore présent, notamment Zyam et Houssam, mais aussi pour la guérison de mon Grand-Monsieur, pour ma sœur ainsi que la mama malgré tout, et toute ma famille en général de l'Algérie, aux Émirats en passant par l'Iraq. Cette nuit-là mes pensées leurs avaient tous été destinés.
Je n'avais pas oublié Ines, Zaher, Lylia et le petit bébé qu'elle portait en elle. Ils avaient aussi été visés par mes du3as. Je voulais tellement que notre situation s'arrange parce que forcément l'entente aurait été meilleure entre nous tous et c'est pour cette raison que j'avais prié pour nous quatre ainsi que le bébé qu'elle portait.
Après tout ça je m'étais installé dans la chambre tout seul et je m'étais mis à cogiter de nouveau, ça n'arrêtait pas et ça me rendait vraiment très nerveux. Je ne savais plus quoi faire tellement ça me rendait mal. Je tournais et retournais sur moi-même, c'était affolant. J'étais resté seul comme ça pendant un long moment.
Tard dans la nuit Ines m'avait envoyé un message pour que j'ouvre la porte, du coup je l'avais fait. Après tout c'était chez elle donc je ne pouvais pas refuser ça, mais du coup elle était directement rentrée dans la chambre parce qu'elle voulait parler avec moi, du moins elle voulait savoir des choses. Elle se posait des questions.
- Ines : Qu'est-ce qu'il y a ?
- Moi : Rien, j'étais posé.
- Ines : Qu'est-ce qu'il y a j'ai dit !
- Moi : Oh rien j'ai dit, moi !
- Ines : Je sais que tu as quelque chose.
- Moi : Il y a rien qui montre que j'ai quelque chose !
- Ines : Il y a tout qui montre que tu as quelque chose. Tu ne peux pas faire semblant toi, ça se voit directement quand tu as heja.
- Moi : N'importe quoi.
- Ines : Quand je suis rentrée tu m'esquivais, j'ai compris que tu avais heja donc je t'ai laissé, après t'es sorti faire je ne sais pas quoi pendant plusieurs heures, ensuite t'es revenu tu t'es enfermé, et là t'es trop nerveux quand je te parle. Explique ?
- Moi : J'étais allé à la Mosquée.
- Ines : Ça y est tu as repris contact avec les autres ?
- Moi : Non, je n'ai pas besoin d'eux pour me rendre à la Mosquée.
- Ines : Ok, bon clairement tu n'as pas envie de me dire ce que tu as ? Je le comprendrais, mais dit le moi au moins.
- Moi : Il y a rien c'est ça que tu ne comprends pas.
- Ines : Ok si tu me dis que tu as rien très bien, mais moi je sais que tu as quelque chose. Je te connais trop et je sais que tu ne me dis pas tout.
- Moi : Quel dommage !
- Ines : Hassoul lila s3ida.
- Moi : Ntiya tani, mais je vais sortir là.
- Ines : Tu vas faire quoi ?
- Moi : Je vais retrouver des gars.
- Ines : Vas-y je vais rien dire parce que je sais que je vais m'emporter et ça va sentir l'embrouille.
- Moi : Ok bah ne dit rien alors. Moi je reviendrais tout à l'heure.
J'étais en train de pété un plomb, mais clairement et j'avais ressenti le besoin de sortir, sinon j'aurai fait du sale et ce n'était pas ce que je voulais pour eux, donc j'avais pris mon sac j'avais mis de la marchandise ainsi que de la consommation dedans et j'étais parti retrouver mes gars avec qui je passais mes nuits depuis quelques temps.
C'était des gars que j'avais connu comme ça dans la rue quelques mois avant et avec qui je m'étais lié l'espace d'une soirée entre khabta et petite song, puis finalement j'avais gardé le contact avec et depuis quelques jours on se voyait énormément malgré que ça chauffait beaucoup entre nous tous. J'aimais bien être avec eux.
On allait jusque Mantes-La-Jojo et on se posait là-bas. On se trouvait un coin et on se mettait bien, on se mettait surtout ko, et on vendait également. Nos nuits étaient rythmées par ça. On partageait nos consommations, les bénéfices qu'on avait sur les petites ventes, et des discussions qui n'avaient aucun sens dû aux fortes doses.
Ça me faisait oublier, mais pourquoi putain, pourquoi j'étais devenu accro, oh shit. Dès que j'étais au plus bas, à chaque fois que j'apprenais une mauvaise nouvelle je consommais à forte dose, et ça commençais clairement à me rendre fou. Ça peut paraître dingue pour certain, mais il faut le vivre pour vraiment le comprendre.
J'étais parti les retrouvé à Mantes et on s'était tous posé tranquillement, en même temps j'avais appelé des khey que je connais de Mantes depuis plusieurs années, et ils étaient venus terminer la nuit avec nous. On avait vendu, consommer, discuter de tout plein choses utiles et inutiles à la fois. Ça m'avait fait oublier quelques temps.
Notre nuit nous avait complètement cogné le crâne, on n'avait pas lésiné sur les doses et on l'avait énormément ressenti. La tension était montée, et les coups étaient partis entre nous tous. Avec les poings et les tazer à fond, heureusement qu'il y en avait qui étaient plutôt sobre, et qui nous calmait dès qu'on s'emparait de shlass ou autres.
On y avait passé toute notre nuit et j'étais reparti le matin pour retrouver Ines et Zaher. Dès que j'étais arrivé je n'avais pas su quoi faire. Je voulais encore sortir, je ne tenais plus en place et je ressentais le besoin de sortir constamment malgré que je n'avais pas eu un réel sommeil depuis longtemps et que j'étais ko.
Finalement j'avais appelé Kalvin et je l'avais prévenu que j'allais passer le voir avec tous les autres, puis j'avais appelé Hocine, Krim et ceux avec qui je vendais pour leur dire de me rejoindre chez Kalvin. Il fallait que je leur explique, que pour ma part c'était fini le délire de vendre de la drogue avec eux, j'étais passé à autre chose.
Enfin plus ou moins on va dire. J'en avais fini avec eux parce que ça ne m'intéressait plus de partager ça avec eux, puis aussi le squatte se trouvait juste à côté de la cité donc tout le monde était toujours au courant de nos faits et gestes et ça me montait le sang ça, donc c'était une raison de plus pour arrêter, mais pas ailleurs.
Je continuais quand même de vendre. Je préférais vendre à Mantes avec ceux avec qui je m'étais lié. Personne n'était au courant de ce que je faisais, que ce soit Nina, la mama, Zyam, Houssam ou d'autres, vu que ça se trouvait loin d'où ils étaient ça me permettait de faire ça sans entendre jacter à longueur de journée.
Là je partageais ça avec eux, on était tous réglo sur les comptes, c'était du bon délire, c'était parfait. Je ne savais pas jusque quand j'allais continuer ça, mais en tout cas c'était ma nouvelle manière de me faire de l'oseille malgré que je n'avais plus besoin de ça, parce qu'en sah les thunes c'était ce que je dépensais le moins.
Je faisais tout sauf baisser mon froc évidemment, pour gagner des thunes. Depuis que je m'étais réellement enfoncer dans les trafics, au point de gagner la masse de thunes j'en avais jamais réellement profité, à part être parti dans les îles quelques fois. Je n'étais pas vraiment un grand dépensier et je ne le suis jamais été.
A cette époque je m'étais retrouvé avec énormément d'argent, au point où je ne savais plus quoi en faire et malheureusement je ne pouvais pas le donner à des nécessiteux malgré que j'aurai voulu, vu que c'était du sale. Je continuais de vendre sans faire attention au fait que j'étais rempli. C'est très paradoxal le fait d'être dans ce milieu, mais de ne pas en profiter plus que ça.
Mais en fait c'était devenu une habitude, ce n'était même pas dans le sens «Je veux me faire des thunes pour dépenser à fond» Non, je me faisais des thunes pour rien au final. Les thunes elles finissaient au fond des sacs, et je l'utilisais de temps en temps pour m'acheter à graille ou des choses utiles du quotidien, mais khlass.
Après oui c'est vrai que je m'étais fait des gros plaisirs en partant dans les îles à quelques reprises ou en achetant la RR, mais encore une fois ce n'était pas quelque chose que je faisais à chaque fois. J'en connais qui se faisait plaisir en terme de gova, chaque mois, hors que moi une seule m'avait suffi. J'étais quand même conscient.
Alors que j'aurai pu faire des choses de fou. J'aurai pu en avoir rien à faire de tout et dépenser à chaque fois tout ce que je ramassais en masse, j'aurai même pu investir dans des choses ou me prendre un toit, plus qu'un simple appartement dans Paris, mais je me disais «Pourquoi investir ici alors que tu sais que tu vas pas y finir ta vie»
Avec du recul, je me rends compte qu'en fait l'argent ne m'avait pas rendu si fou que ça. Je faisais des choses folles et je me mettais dans des bourbiers de fou pour ramasser des thunes, mais je ne devenais pas hystérique ou dingue à la vue des billets, loin de là. En fait c'était plutôt devenu un passe-temps ce que faisais, sans vraiment plus.
En fait, je continuais à vendre et tout ce qui s'en suis, tout simplement parce que je suis quelqu'un qui aime l'adrénaline. J'aimais la sensation que je ressentais à chaque fois que je me trouvais dans des situations de fous, et il est clair que dans ce milieu j'avais été à plusieurs reprises dans des bourbiers de malades.
Ça peut paraître fou pour certains, mais oui il y en a qui sont comme ça, qui aiment le risque et tout ce que ça peut engendrer par la suite, et je suis de ces gens-là, c'est pour cette raison qu'on me rabâchait sans cesse et même encore actuellement «Tu joues trop avec ta vie, tu crois trop que t'es dans un jeu et que t'as plusieurs chances»
Donc j'étais parti me préparé et remplir à nouveau mon sac parce que j'allais également me posé chez Kalvin, et on allait profiter tous ensemble avec les autres. Dès qu'Ines m'avait vu bouger de partout elle s'était posée des questions, donc elle était directement venue me retrouver dans la chambre pour en savoir plus.
- Ines : Tu ne restes pas avec Zaher et moi lyoum ?
- Moi : Je suis resté toute la semaine avec Zaher, profite avec lui toi et je reviendrais tout à l'heure.
- Ines : Ok tu es resté avec lui, mais pas avec moi. Depuis que j'ai repris le travail et les études on ne se voit plus.
- Moi : Cette nuit je reste avec toi si tu veux.
- Ines : Je m'en fous. La nuit moi je ne3ss, je crois que tu n'as pas conscience qu'on n'a pas le même rythme de vie.
- Moi : Tu feras un effort pour lyoum.
- Ines : Qu'est-ce tu parles d'effort ? Vas-y c'est mieux que tu ailles retrouver tes shiteux là.
- Moi : Pourquoi directement, shiteux ?
- Ines : Et en plus tu me prends pour une behloula, t'es un malade Emir. Tu crois que je n'ai pas vu tout ce que tu as mis dans ton sac.
- Moi : Saha. Bon j'y vais et je reviens tout à l'heure.
J'étais parti et j'étais retourné sur Paris. J'avais rejoint les autres en bas de chez Kalvin et on l'avait capté chez lui. On s'était posé et je n'avais pas directement attaqué le sujet, j'avais laissé un peu couler, on avait consommé, on avait parlé de plusieurs choses, mais je n'avais pas encore abordé ce sujet-là, qui je pense allait être long.
Depuis qu'on s'était revu en bas de chez Kalvin avec Hocine et les autres, Hocine faisait que de me regarder, je le voyais sur le côté et quand mon regard se posait sur lui, il tournait à chaque fois le regard, comme si il était gêné. C'est moi qui aurait dû l'être, mais on avait l'impression qu'il l'était plus que moi, enfin moi je ne l'étais même pas.
Sûrement qu'il avait été gêné sur le fait que je n'avais pas répondu à son message, parce qu'il avait quand même fait un grand effort à m'écrire tout ça, il avait dosé les lignes, il avait essayé de s'appliquer sur l'écriture, et moi je l'avais mis amnése meskin, mais sur le coup j'avais été très gêné donc je n'avais pas su quoi faire.
Plus les discussions elles passaient et plus je sentais qu'ils cherchaient à avoir des explications sur le fait que j'avais tout retiré du squatte et que je n'avais plus donné signe de vie depuis ce jour-là. J'avais essayé plus ou moins d'esquiver leurs piques qu'ils me lançaient tous, mais il fallait bien que ça sorte à un moment.
Ils étaient dans l'incompréhension depuis ce jour-là. Ils nous avaient vu débarquer Zyam, Houssam et moi-même, on les avait viré, j'avais tout sorti du squatte, j'étais parti en laissant ouvert et dès qu'ils étaient revenus, ils avaient vu que c'était vide, et depuis ils se demandaient ce que ça allait donner par la suite tout ça.
Je pense qu'ils se doutaient que c'était fini pour nous, sur ce qu'on avait réussi à monter et à faire grandir ensemble vu comment j'avais laissé le squatte en repartant, mais ils se posaient tout de même des questions sur le pourquoi. Après je ne les empêchais pas de faire affaire ensemble, là où il le voulait, sauf, ça allait être sans moi désormais..
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