《Maman !》

Anna. Ma puce, mon ange. Je l'attrape et la serre dans mes bras de toutes mes forces. La petite gigote en riant. Ça fait du bien d'être à la maison.
J'entends Dimitri discuter avec quelqu'un dans la cuisine. Jérôme.
Je ne l'ai pas oublié. Jérôme c'est mon frère. Cinq ans de plus que moi, un sourire grand comme ça et un poste de moniteur d'équitation. Voilà. Je lâche Anna à contre-coeur pour le serrer à son tour dans mes bras. Il sent bon le foin.

Le repas débute joyeusement, Anna ne sait pas encore que je suis malade, on lui dira plus tard. Dès la fin du dîner je pars la mettre au lit avant de rejoindre les hommes dans le salon.
Jérôme a perdu son masque souriant et me fixe le regard grave.

《Pourquoi n'as tu pas de médicaments pour te guérir ?

-C'est incurable. Il n'y a pas de remède.

-Il y a toujours un remède.

-Pour être honnête, il existe un comprimé outrageusement cher qui a pour seul but de ralentir mes pertes de mémoires.

-Tu l'as refusé.

-Oui. Premièrement, ses effets ne sont pas prouvés, il n'y a que très peu de patients atteints de cette malade. Ensuite, ce médicament me ferait perdre les cheveux et est extrêmement cher. Je n'en veux pas.》

Jérôme et Dimitri se consultent du regard. Ils sont inquiets pour moi et ça me crève le coeur de les voir ainsi.
Je me redresse et vais chercher mon sac. J'en sors un carnet.

《A défaut de médicament miracle, la médecin m'a vivement conseillé de prendre notes de chacun de mes jours. Dès que je change de lieu et que je me retrouve seule, je dois être en mesure de me gérer.》

J'attrape un feutre laissé sur la table par Anna et commence à écrire.
Au moment de noter des numéros d'urgences, je lève la tête, les yeux écarquillés.

《Jérôme... quel est ton numéro de téléphone?

-Tu...

-Oui, je ne me rappelle pas.》

Jérôme me le dicte puis ajoute l'air de rien 《après tout j'en ai changé il n'y a pas longtemps, c'est normal que tu ne le connaisse pas par coeur》.

Je ne sais pas si il se rassure ou si il me rassure.