zéro


Cassien surgit dans sa vie le même jour que le Vide. Elle aurait alors dû se douter de l'évidence de ces apparitions simultanées, mais les choses les plus visibles sont aussi celles que l'on voit le moins. 

Il était arrivé à toute vitesse, sans prévenir, et avait déposé au cœur de son existence une empreinte indélébile de son nom en capitales. CASSIEN. Il lui avait sourit, avait posé ses bagages sur le sol et l'avait serrée dans ses bras. Elle avait senti le Vide sursauter dans sa poitrine et avait saisit l'importance de cette étreinte. 

Cassien était apparu dans son monde sans que personne ne s'en soit douté : ni elle, ni le Vide qui reprenait peu à peu son aise, remis de sa surprise.

Quand il lui parla pour la première fois, elle comprit qu'elle ne pourrait plus survire sans entendre sa voix. Ce fut une pensée énoncée comme un fait absolu qui ne quitta plus jamais son esprit. Cassien était beau, il était tendre, et il faisait du bruit. Suffisamment pour couvrir celui du Vide qui ne s'arrêtait jamais. C'était un sauveur, un messager du ciel venu à sa rescousse, destiné sûrement à dompter les hurlements et les agissements constants et malsains du Vide qui ne cessaient ni le jour ni la nuit.

Quand ceux ci devenaient trop douloureux, elle avait l'habitude de fermer les yeux. Le noir de ses paupières closes donnait au Vide un signe de soumission qu'Il lui arrivait d'accepter. Alors, sur le court instant de cette trêve silencieuse, Il baissait le son de ses cris et elle pouvait respirer à nouveau. Parfois il arrivait même qu'Il lui laisse quelques jours de répis, mais Il revenait toujours, s'imposant à elle dans une froideur noire qui la prenait dans chacun de ses membres.

Cassien savait que le Vide existait. Il le savait mais ne l'appelait jamais par son nom. Il se contentait d'un signe de tête, d'un coup d'œil appuyé en direction de son cœur, cachette étroite de son bourreau intérieur. Il posait une main chaude sur son visage et lui soufflait à l'oreille des mots réconfortants. Elle aurait préféré qu'il les hurle car un murmure ne suffisait à couvrir les ricanements du Vide qui s'extasiait en elle.

Il lui avait fallut du temps pour cerner le sens de Son existence. Et puis, force d'expérience, elle avait finit par comprendre. Il s'entretenait de ses joies, se nourrissait de ses éclats de rire, avalait goulument ses pensées heureuses pour les recracher noires comme la suie. Et il recouvrait les parois de son cœur de de cette noirceur immonde, décolorant son existence, dénuant ses sentiments de clarté pour agrandir sa tanière. Et petit à petit, elle le sentait grandir. Et plus il grandissait, plus il s'étalait en elle, étendant ses tentacules sombres partout dans son corps, dans sa tête, dans ses mots ; plus elle se sentait partir. La personne qu'elle avait été se faisait dévorer lentement et douloureusement par ce Vide qui prenait une place omniprésente en ne laissant derrière lui qu'une étendue sans vie.

Elle savait qu'elle ne Lui survivrait pas. Que même les étreintes de Cassien ne suffiraient à préserver la partie saine de son âme qu'Il n'avait pas encore atteinte. La barrière de son prénom (CASSIEN) dressée comme un rempart se fissurait lentement, elle ne tiendrait pas la vie entière. Elle allait s'écrouler. Elle le savait. La mer attaque à chaque secousse le barrage et quand il s'écroule, elle se jette dehors et détruit tout sur son passage.

CASSIEN.

Le Vide n'allait jamais partir.

Elle entendait déjà son rire en elle qui résonnait.

"Je vais gagner.

Je vais gagner."


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