Kate se mit à courir.

 Très vite. 

Jamais elle n'avait couru aussi vite. 

La foule derrière elle se rapprochait à toute vitesse. 

Mais tout d'un coup, elle trébucha, et tomba tête la première. Aïe ! pensa-t-elle. Mais elle n'avait pas le temps de se lamenter sur son sort. Elle s'engagea dans le couloir de gauche en espérant les semer. Mais voilà qu'on l'encerclait de toutes part ! Kate était prise au piège.

Une fille sauta sur elle en lui tirant brutalement les cheveux. Kate cria de douleur. On abreuva cette dernière de coups de poings, de coups de pieds, tous plus forts les uns que les autres. Mais voici que le pire arriva : Quelqu'un derrière elle lui arracha sa boucle d'oreille droite, ce qui déchira son lobe d'oreille, qui se mit à saigner. Kate s'effondra sur le sol, épuisée et à bout de forces. 

- Vas-y, chiales ! lui lançe un garçon de sa classe.

- On ne fait que jouer avec toi, ajouta un autre d'un ton moqueur.

Kate ne voulait pas pleurer. Elle ne voulait pas leur montrer sa faiblesse. Mais maintenant, elle n'y arrivait plus. Ça allait de mal en pis. Au début, ce n'était que de petites insultes, du genre "carotte", mais maintenant, on lui arrachait carrément sa boucle d'oreille ! Bientôt, on allait l'attaquer au couteau, si ça continuait !

Une élève blonde aux grands yeux bleus l'assomma en lui cognant la tête contre le mur. Ce coup l'étourdit plus que tous les autres. Elle allait s'évanouir, elle le sentait. 

Soudainement, Kate remarqua un surveillant au bout du couloir qui marchait dans sa direction. Il devait avoir sans doute vu la scène ! Tous les bourreaux se redressèrent immédiatement et firent comme si de rien n'était. Lorsque le surveillant parvint jusqu'à elle, elle le regarda dans les yeux, en attendant qu'il fasse quelque chose. Après avoir aperçu son oreille, il ne lui dit que :

- Vas à l'infirmerie, pour soigner ton oreille. 

Puis il reprit son chemin tranquillement.

Quoi  ?! s'indigna Kate. Il ne fait rien ! Il ne prend même pas ma défense ! Il s'en fous complètement ! 

Elle était furieuse. D'une fureur immense. Gigantesque. Icommensurable. Le groupe de bourreaux se mit à ricaner. Elle envoya brutalement son poing dans le ventre de l'un d'eux, ce qui le laissa sans voix, puis elle hurla presque :

- VOUS ME GONFLEZ ! J'EN AI MARRE ! DE VOUS ET DE TOUT LE LYCÉE ! QU'EST-CE QUE JE VOUS AI FAIT, HEIN ? RIEN ! Y'A PLEIN D'AUTRES ROUX, IÇI, ET ON LES LAISSE TRANQUILLES, EUX ! 

Elle avait tellement d'autres choses à leur dire... Mais elle courut en direction de la sortie du lycée, sans même passer à l'infirmerie. Elle s'essuya l'oreille avec un mouchoir, puis appella sa mère en lui parlant de son oreille, mais sans lui révéler la véritable raison. Elle lui expliqua qu'en sport, pendant la course d'orientation, elle était tombée dans un buisson d'épines. Sa mère la crut. Elle avait l'air très inquiète. Quand celle-ci vit son lobe d'oreille déchirée, elle poussa un cri d'horreur.

- Je ne vais pas pouvoir réparer ça moi-même, ma chérie, s'excusa-t-elle. Il faudra t'emmener à l'hôpital pour que l'on te recouse l'oreille.

Kate hocha la tête en silence.  À cause de ces imbéciles, elle allait devoir se faire opérer ! 

- Maman, commença-t-elle, changes-moi de lycée, s'il te plaît. 

- Pourquoi ? répondit sa mère, tu as des problèmes ?

- Non, mentit-elle. Seulement, je ne m'y sens pas à mon aise et puis...les profs sont trop sévères (ce qui était vrai), et les cours incompréhensibles. Tu devrais me mettre dans un lycée de filles, comme en Irlande. Là-bas, le niveau est nettement meilleur.

Mais sa mère ne trouvait pas que ses arguments étaient valables. Kate soupira. Si elle lui expliquait vraiment sa situation, sa mère la changerait de lycée immédiatement. Mais elle n'arrivait pas, parce qu'elle avait peur.

La peur. Ce sentiment ne devrait jamais exister.