Chapitre 9 : Le sourire d'Anna

Ce matin-là, Léo se sentit un peu différent. Ce n'était pas seulement à cause de sa rencontre avec Anna au parc la veille, mais parce qu'il avait commencé à se libérer de quelque chose qu'il avait longtemps gardé pour lui : Le masque.

Il n'était plus seulement ce Léo qui faisait rire tout le monde. Aujourd'hui, il avait une sorte de légèreté, comme si un poids avait été enlevé de ses épaules.

En arrivant à l'école, il se rendit compte qu'il avait envie de regarder les gens autrement. De ne pas simplement les observer en surface, mais de voir ce qu'il y avait derrière leurs sourires, leurs attitudes. Ce matin-là, il remarqua quelque chose qu'il n'avait jamais vu avant : Anna. Elle n'était pas seule, comme d'habitude. Elle discutait avec Clara et quelques autres élèves dans la cour, mais ce qui attira son attention, ce fut son sourire. Un sourire rare, mais sincère. Il n'était pas forcé comme celui qu'il avait l'habitude d'arborer, c'était un sourire tranquille, un sourire d'âme.

Alors qu'il passait devant elle, il sentit une main sur son épaule. C'était Max, son ami de longue date. Max était le genre de gars à toujours avoir une remarque en réserve, et aujourd'hui ne faisait pas exception.

__ Alors, Léo, t'es amoureux de la poétesse ou quoi ? T'as vu ton regard quand tu la regardes ?! T'as l'air aussi sérieux qu'un élève de terminale en période de bac !

Maxime se moqua gentiment, comme il le faisait toujours, mais il y avait une lueur de curiosité dans ses yeux.

Léo éclata de rire, presque trop fort, histoire de cacher la gêne qui montait en lui. Il s'appuya contre son ami et haussa les épaules avec une fausse décontraction.

__ Non mais t'es malade, Max ! Franchement, c'est juste qu'elle a un style... un peu à l'ancienne, tu vois ? Ça fait un peu poétesse du dix-huitième siècle, genre, tout en métaphores et en pleurs. Rien de bien excitant. T'imagines pas le temps que ça me prend de la comprendre, hein !

Max haussa les sourcils, visiblement dubitatif, mais il ne chercha pas à insister. Léo lui lança un regard rapide, en tentant de drainer son attention.

__ D'ailleurs, t'as vu le dernier film de Tarantino ? Ça c'est du vrai cinéma, mon pote. T'as l'impression d'être dans une autre dimension à chaque scène ! Honnêtement, c'est pas du tout le genre de trucs qu'on retrouve dans les poèmes d'Anna.

Max fronça les sourcils, mais sembla accepter la diversion. Léo soupira intérieurement, content d'avoir esquivé la vraie question, même s'il savait que son copain avait probablement compris qu'il n'avait pas tout dit. Mais pour l'instant, ça lui suffisait.

Les cours de l'après-midi commencèrent. Il s'assit dans sa place habituelle, au fond de la classe, à côté de son ami. Le professeur de mathématiques entra et comme d'habitude, la salle se vida vite de toute l'énergie du matin. Mais Léo avait du mal à se concentrer.

Alors que le professeur commençait à expliquer des théorèmes incompréhensibles, il sortit son carnet de notes. Il était là, posé sous son bureau, presque comme une invitation. Une invitation à écrire. Peut-être pour se vider la tête.

Léo prit son stylo, hésitant un instant, puis il commença à griffonner des mots, des phrases qui lui suivirent sans trop réfléchir.

Il écrivit d'abord quelques lignes, mais il se rendit vite compte qu'il ne pouvait pas s'empêcher de coucher sur le papier des pensées plus sombres. Il se laissa aller à un poème qui n'avait rien de joyeux. Il parlait de la solitude, du poids du masque qu'il portait chaque jour. Un poème étrange, mêlant humour noir et ironie.

« Le sourire est un art, dit-on,
Mais moi je le porte comme une arme,
Sous chaque ricanement, un poison,
Et sous chaque blague, une larme.

Je suis le clown, celui qui fait rire,
Mais qui pleure en silence dans l'ombre,
Chaque rire est un cri de pire,
Et mon cœur se noie  et sombre.

Les gens veulent du fun, des blagues, des fêtes,
Mais tout ce que j'ai, c'est ce masque à garder,
Ce masque parfait, une comédie en tête,
Où je m'éteins sans jamais crier. »

Léo s'arrêta en entendant la cloche de la classe retentit. Le poème qu'il venait d'écrire le laissait perturbé, comme si une partie de lui venait de se révéler à travers ces mots. Ce n'était pas le genre de poème qu'il avait l'habitude de partager. C'était trop... brut, trop vrai.

Soudainement, il referma le carnet d'un geste sec, comme si Maxime venait d'y surprendre un code confidentiel.

__ Qu'est-ce que t'as là ? demanda-t-il. Tu es entrain d'écrire ? C'est une lettre d'amour ou quoi ?

Léo lève les yeux au ciel.

__ Carrément, dit-il avec un sérieux exagéré. Chère pizza quatre fromages, reviens-moi vite.

Maxime éclata de rire.

__ Allez, sérieux, montre-moi !

__ Non, a répondit Léo en glissant le carnet dans sa poche. Ça, c'est top secret. Un truc genre plan de conquête mondiale.

__ Ah ouais ? Et t'as prévu de faire quoi ? M'éliminer en premier ?

Léo le fixa avec un sourire en coin.

__ T'éliminer ? Non, Max. T'embaucher. Chaque méchant qui se respecte a besoin d'un sbire pour raconter des blagues nulles.

Maxime partit dans un fou rire.

__ Ok, ok, je te laisse ton carnet. Mais fais gaffe, un jour, je tombe dessus.

Léo haussa sourit les épaules, son toujours en place.

__ Bonne chance. Mais je te préviens, si tu décryptes mes gribouillages, tu deviens automatiquement mon complice.

Maxime rigolat, sans insister.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top