Chapitre 3 : Équinoxe
Le lendemain, Léo ne tenait plus en place. Pendant tout le cours de mathématiques, ses pensées erraient loin des équations et des graphiques. Il dessinait distraitement sur son cahier, traçant des mots et des lignes qui ressemblaient aux poèmes du carnet, tentant de s'approprier le style mystérieux de l'auteur. Mais rien de ce qu'il écrivait ne lui semblait aussi beau, aussi saisissant que les poèmes qu'il avait découverts.
À la pause, il s'isola dans un coin du lycée, son casque sur les oreilles pour éviter qu'on vienne le déranger. Mais même là, il avait l'air de l'appeler. Il sortit discrètement le petit objet de son sac, feuilletant à nouveau les pages. Il s'arrêta sur un poème qu'il avait à peine remarqué auparavant :
« Ils m'ont dit qu'ici je trouverais ma place,
Mais je n'ai trouvé que des regards qui passent.
Alors j'ai fait de la ville mon écrin,
Et de mes mots, des éclats pour éclairer demain.
Car si personne ne m'attend, personne ne m'entend,
Mes lettres, elles, me tiennent vivant.
Dans ce chaos, je sculpte mon refuge,
Un monde où les absences deviennent des allées où je déambule.
Et même si la solitude pèse sur mon chemin,
Elle reste ma compagne, ma force, mon destin. »
En bas, une autre annotation. Cette fois, ce n'était pas une date, mais un simple mot : Équinoxe.
Léo fronça les sourcils. Équinoxe ? Était-ce un lieu ? Un café, une bibliothèque ? Ou simplement une référence poétique ? Il sortit son téléphone pour rechercher rapidement en ligne. Une librairie portant ce nom existait bien, à une trentaine de minutes à pied de chez lui. Ce n'était peut-être qu'une coïncidence, mais il se dit qu'il n'avait rien à perdre.
Le vent s'était levé lorsqu'il arriva devant la boutique. Une vieille enseigne en bois pendait au-dessus de la porte, gravée des mots « Librairie Équinoxe – Où les âmes vagabondent ». Cela était trop parfait pour ne pas être un indice.
L'intérieur était tout aussi mystérieux. Les étagères croulaient sous des livres aux couvertures abîmées, et une douce odeur de papier ancien flottait dans l'atmosphère. Une femme d'âge mûr, avec des lunettes rondes et une écharpe rouge, était assise derrière le comptoir, plongée dans un roman. Elle leva les yeux lorsqu'il entra, mais ne dit rien, attendant qu'il se présenta.
Léo s'approcha timidement.
__ Bonjour... Excusez-moi, je cherche quelqu'un qui aurait peut-être écrit ce carnet.
Il tendit l'objet comme un trésor précieux. La libraire posa son livre et l'examina avec attention. Ses sourcils se froncèrent un peu.
__ Je reconnais cette écriture, je crois... Oui, c'est un habitué de la boutique. Un jeune qui vient souvent acheter des recueils de poésie. Mais je ne connais pas son nom.
Léo sentit une pointe de déception. Il s'était approché d'une piste, mais il n'avait toujours pas de réponses concrètes.
__ Vous pensez qu'il pourrait revenir ?
Elle haussa les épaules.
__ Il venait souvent vers la fin de l'après-midi, mais cela fait un moment que je ne l'ai pas vu. Peut-être que je pourrais vous prévenir si je le revois. Laissez-moi votre numéro.
Léo griffonna son numéro sur un bout de papier qu'elle glissa dans un tiroir. Avant de partir, une question lui échappa, celle qu'il n'avait pas osé poser plus tôt.
__ Est-ce que... vous avez vu quelqu'un d'autre avec ce genre de carnet ?
La libraire sourit énigmatiquement, comme si elle comprenait la quête de Léo.
__ Ce carnet semble être tombé entre de bonnes mains. Les mots trouvent toujours ceux qui doivent les lire... Peut-être que ce n'est pas lui que vous cherchez.
Sur le chemin du retour, le jeune homme se sentit perdu. La librairie était une piste, mais elle ne l'avait pas rapproché de l'auteur. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de penser aux mots de la libraire : Ce n'est pas lui que vous cherchez... Il ne savait pas encore pourquoi, mais il avait l'impression qu'il venait de franchir un nouveau seuil dans son enquête.
Sur le chemin du retour, il se sentait plus confus que jamais.
Dans son esprit, une idée germa. Il décida que la prochaine étape serait de retourner à l'étang à l'heure où l'inconnu(e) venait peut-être écrire. Et cette fois, il allait attendre.
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