Chapitre 58


Avec une lenteur calculée, Samaël se leva de la chaise et l'écarta. Il s'approcha d'elle en tirant lentement le couteau qu'il avait à sa ceinture et le fit tourner entre ses doigts, sans la quitter des yeux. Carmen se plaqua contre le mur, tentant de retarder le plus longtemps possible le moment où il serait à portée de main pour la blesser. Il s'arrêta à trente centimètres d'elle. Il la dominait de plus de deux têtes et Carmen fut obligée de lever les yeux pour continuer à le regarder.

Son sourire s'accentua :

- Tu faisais partie de la Famille du Sud, non ? Lui demanda-t-il.

Elle ne répondit pas. Son sourire ne quitta pas ses lèvres :

- Oh, il est inutile de me répondre ! Poursuivit-il. Adonis et moi t'avons déjà croisé auparavant dans le quartier. Et Laurent nous as beaucoup parlé de toi.

- En bien, j'espère ? Parvint-elle à lancer avec une pointe d'ironie malgré la peur qui nouait son ventre.

Le sourire du mercenaire s'élargit :

- Ne sois pas trop insolente, ma belle. Nous énerver est l'une des pires stratégies que tu puisses trouver. Notre patience n'est pas illimitée. C'est déjà quoi, ton nom ?

Carmen garda le silence. Samaël soupira :

- Ça ne fait rien. De toute manière, tu nous le donneras avant qu'on ne t'achève. Et ton ami en fera de même.

- Crève. Intervint Beniamino en lançant un regard noir au mercenaire.

Sa remarque lui valut un coup de poing en pleine poitrine de la part d'Adonis. Ben grogna de douleur.

- Toi, tu ferais mieux de la fermer si tu ne veux pas qu'on commence par toi. Intima-t-il d'un air mauvais.

Samaël reporta son attention sur Carmen :

- Toi qui faisais autrefois partie de la Famille du Sud, combien de temps es-tu restée auprès de Laurent ?

- Longtemps. Répondit-elle en déglutissant.

Sa voix était rauque. Son bras gauche avait commencé à trembler. Elle tenta de se contrôler mais la peur était en train de prendre le dessus sur son corps et sa volonté.

- Longtemps...Répéta-t-il. Et tu n'as jamais eu affaire à nous. Jusqu'à ce que tu décides de nous trahir, bien sûr.

- Ce n'est pas vous deux que j'aurais trahi, dans ce cas. Répliqua-t-elle avec le peu de courage qu'il lui restait encore. Vous ne faites pas partie de la Famille du Sud, même si Laurent vous paye comme de vulgaires larbins pour punir ses membres.

Elle crut que Samaël allait la frapper. Mais au lieu de ça, il éclata d'un rire froid :

- Tu as entendu ? S'exclama-t-il à l'adresse d'Adonis. Elle n'a visiblement pas compris que plus elle nous insultait, plus elle allait souffrir.

- Elle n'est pas aussi maligne que ce qu'elle veut nous faire croire. Sourit ce dernier. Coupe lui les doigts, et peut-être apprendra-t-elle plus rapidement la leçon qu'on va lui donner ?

Carmen sursauta violemment et reporta son attention sur le couteau que Samaël tenait toujours entre ses mains. La lame brillait, blafarde, sous la pâle lueur de l'ampoule. Elle l'imaginait déjà trancher ses chairs, faire jaillir son sang, la transpercer et la crisper de douleur.

Mais le mercenaire sourit en secouant la tête, comme amusé par le manque d'originalité de son ami.

- Non, j'avais plutôt une autre idée en tête. Répliqua-t-il.

Lorsqu'il reposa ses yeux sur elle, son sourire devint pernicieux.

- Une idée qui est plus, disons... exotique.

Adonis ricana et alla s'appuyer contre l'un des murs, bras croisés.

- Vas-y, j'admire !

Samaël s'approcha encore et posa sa main contre le mur, à quelques centimètres du visage de Carmen. Elle n'y jeta qu'un rapide coup d'œil avant de rester focalisée sur le couteau qui s'avançait lentement vers sa gorge. Elle tressaillit lorsque le métal froid et aiguisé se posa contre sa carotide. Elle cessa de respirer.

- Tu as autre chose à dire ? Lui demanda Samaël et faisant glisser la pointe du couteau sur son cou. Une autre réplique cinglante à nous jeter à la figure ? Non ? Dommage.

Elle ferma les yeux et se mit à prier. Il allait lui trancher la gorge. C'était une mort horrible mais au moins avait-elle le mérite d'être rapide. Elle n'avait pas envie d'être une nouvelle victime des jeux sanguinaires de ces deux chiens enragés.

Elle poussa un hoquet terrifié lorsqu'elle sentit le corps de Samaël se coller brutalement contre le sien. Elle rouvrit les yeux, juste à temps pour le voir pencher son visage vers elle. Elle détourna la tête et sentit un frisson de dégoût la parcourir quand les lèvres du mercenaire frôlèrent sa gorge.

- A ton avis, dans combien de temps vas-tu hurler de peur ? Souffla-t-il à son oreille.

- Je...je ne sais pas. Balbutia-t-elle. Par contre, je peux te dire dans combien de temps je vais vomir.

Le mercenaire émit un ricanement. Ses lèvres parcouraient son cou, mordillant sa peau par endroit, la faisant tressaillir. Carmen tenta encore une fois de maîtriser les tremblements qui parcouraient son corps mais ce dernier ne lui répondait plus. Elle sentait la panique la gagner lorsqu'il accentua la pression de son corps contre le sien.

La dernière et seule fois où un homme s'était ainsi approché d'elle, c'était lors d'une étreinte avec Sergueï. C'était tendre et passionné, doux et ardent à la fois. Mais cette fois, Carmen ne ressentait aucune de ces sensations. Son corps ne frissonnait que de dégoût et d'écœurement alors que Samaël resserrait sa prise sur elle.

Il n'avait pas lâché la pression qu'il exerçait sur le couteau contre sa gorge mais Carmen savait que ce n'était pas celle-là dont elle devait se soucier pour le moment. Le mercenaire retira son autre main du mur pour la poser sur la hanche de sa prisonnière.

- Qu'est-ce que tu fais ? Hoqueta-t-elle, terrifiée, quand elle sentit ses doigts passer sous son débardeur.

- Comme je l'ai déjà dit ; ça fait longtemps que nous nous sommes plus occupés d'une fille. Susurra le mercenaire à son oreille. On va donc en profiter pour faire durer le plaisir...Et je sens qu'avec toi, on va bien s'amuser. Ajouta-t-il en accentuant la pression de son torse contre elle.

Carmen sentit la main de Samaël caresser son ventre, montant de plus en plus haut vers sa poitrine. Il poussa un soupir de contentement à son oreille. Elle voulut hurler.

- Lâche-la !

La voix de Beniamino retentit dans la pièce, dure et sèche. Samaël s'immobilisa et tourna la tête vers lui. Il l'observa quelques secondes avant de lui adresser un sourire méprisant :

- T'emballe pas. Profite plutôt du spectacle qui s'offre à toi !

- Spectacle qui s'annonce bien plus réjouissant que celui qui t'attends. Renchérit Adonis avec un sourire mauvais. Par contre, je n'aime pas t'entendre donner des ordres. Ajouta-il en se détachant du mur.

Il s'avança jusqu'à Beniamino et lui donna un violent coup de poing dans la mâchoire, projetant sa tête contre le mur. L'infirmier grogna de douleur, sonné. Carmen poussa un hoquet horrifiée qui n'échappa pas à Samaël.

- T'inquiète, ton chéri n'a rien. Ricana-t-il. Pour l'instant, du moins.

Cette remarque fit rire son acolyte qui retourna tranquillement à sa place, le dos appuyé au mur.

- Reprenons...Murmura Samaël en se penchant à nouveau sur Carmen.

La porte s'ouvrit brusquement.

Samaël jura, mécontent d'être à nouveau interrompu. Carmen regarda par-dessus l'épaule de son tortionnaire pour voir le nouvel arrivant. Elle se figea quand elle aperçut Laurent.

Le Chef de la Famille du Sud se tenait sur le seuil de la cellule, la main encore posée sur la poignée. Il contemplait la scène de son regard d'acier, le visage insondable.

Bien malgré elle, Carmen ne put s'empêcher de ressentir un brusque sentiment de soulagement à le voir. Mais cette émotion s'estompa aussi vite qu'une ampoule qui grille. Laurent la prenait certainement pour une traîtresse, il allait la laisser se faire tuer par les deux mercenaires. Elle ne devait espérer aucun secours de sa part.

Laurent lâcha la poignée et entra dans la cellule d'un pas mesuré.

- Je peux savoir ce qui se passe ? Demanda-t-il d'une voix basse, tout en s'approchant de Samaël.

Adonis se décolla du mur et lui barra la route.

- Nous sommes en train de faire ce que nous faisons le mieux. Répondit-il en se plaçant entre Laurent et Samaël. On s'occupe de tout, alors laisse-nous !

- Est-ce que tu viens de me donner un ordre ? Répliqua Laurent en arquant un sourcil d'un air méprisant.

Adonis dû se rendre compte qu'il avait franchi une ligne invisible car il recula aussitôt contre le mur.

- Excuse-moi. Grogna-t-il en baissant la tête en signe de soumission. Je n'étais pas à ma place.

- J'ai entendu dire que vous aviez attrapé Carmen et un membre de la Famille du Nord. Poursuivit Laurent sans prendre en compte les excuses du mercenaire. Est-ce que c'est elle ?

Il croisa le regard de la jeune fille qui était toujours coincée entre le mur et le corps de Samaël. Ils s'observèrent durant de longues secondes. Elle fut incapable de déceler la moindre émotion dans son regard.

- Lâche-la, Samaël.

La voix du Chef de Famille était toujours aussi basse, mais elle était devenue si grave qu'elle en était plus menaçante qu'une explosion de rage. Le mercenaire poussa un soupir et relâcha Carmen, une lueur de regret dans les yeux. Il recula de quelques pas et se tourna vers Laurent en se forçant à sourire :

- Tu es venu pour nous voir à l'œuvre ? Je t'aurais volontiers proposé de participer, mais nous nous occupons toujours des prisonniers seuls...

- ...Et bien que ça ne nous dérange pas d'avoir un public de temps en temps...Poursuivit Adonis.

- ...Nous n'acceptons jamais que quelqu'un d'autre s'occupe de nos proies. Acheva Samaël.

- Je ne suis pas venu pour prendre part à vos jeux tordus. Répliqua sèchement Laurent. J'ai cru comprendre que vous aviez attrapé Carmen et je suis venu m'en assurer.

Samaël fit un signe de tête en direction de la jeune fille :

- Si ta Carmen est cette fille, alors oui, nous l'avons attrapé. Navré, je ne perds pas mon temps à me souvenir des noms des membres de ta Famille. Ajouta-t-il d'un ton faussement désolé en remarquant le regard noir de Laurent.

- En fait, les seuls noms dont on se rappelle, ce sont ceux de nos victimes. Commenta Adonis d'un ton léger.

- Mais nous allons sûrement retenir son nom dans peu de temps. Renchérit Samaël. Tout dépend du nombre de minutes qu'elle tiendra avant de céder à la douleur et rendre l'âme. D'ailleurs, Nous nous apprêtions justement à passer aux choses sérieuses.

A ces mots, il passa un doigt sur la gorge de Carmen qui rejeta la tête pour échapper à son contact. La voix de Laurent claqua tel un coup de fouet :

- Je t'ai ordonné de la lâcher, Samaël.

- Ce que j'ai fait. Répliqua le mercenaire d'un ton plus froid.

- Ne la touche pas. Et éloigne-toi d'elle.

Samaël leva ses mains à hauteur d'épaule et recula de quelques pas, un sourire narquois aux lèvres :

- Puisque tels sont tes ordres. Susurra-t-il.

Il alla se placer à côté d'Adonis et croisa les bras à son tour, regardant successivement Carmen qui était toujours attachée contre le mur et Laurent qui s'avançait lentement vers elle, sans accorder la moindre attention à Beniamino.


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