Rien. Rien ne se passa. Pendant quelques millièmes de secondes, avant qu'un cri strident fendisse l'air. Une voix très aiguë.

Cela dura peut-être deux ou trois secondes. Mais après, plus rien. Carelle fit ce que Mr Arewa lui avait conseillé : faire le vide dans son esprit. Profiter de chaque instant. La jeunes femme avait la sensation de voler. Et ce n'était pas une sensation qui lui déplaisait, loin de là.

Mais alors qu'elle en profitait un maximum, son cœur fit un bond dans sa poitrine lorsqu'elle sentit qu'elle rebondissait. Il rata même un battement.

Et puis, deux mains l'attrapèrent. En un rien de temps, elle fut détachée et ses pieds touchèrent la terre ferme.

C'est alors qu'elle vit la silhouette de Félix, qui s'approchait d'elle à grands pas.

"Merci. Merci infiniment. Cette sensation de liberté...c'est juste incroyable."

Un sourire se dessina sur les lèvres de son patron.

"-J'étais sûr que vous apprécieriez. Et puis, vous avez vu, cela vous a détendu !
-Oui, c'est vrai. Ça a marché. Vous avez de bonnes idées."

Ils rièrent quelques instants, puis ils décidèrent d'aller s'acheter une glace chez un marchand qui était tout près.

"-Cône vanille pour moi s'il-vous-plaît !
-Vous aussi vous aimez la vanille ? C'est ma glace préférée."

Carelle le regarda, un sourire pendu aux lèvres et répondit :

"Bien sûr. La meilleure !"

Pour toute réponse son patron lança au marchand :

"Mettez-en deux, s'il-vous-plaît."

Ils trainèrent en ville jusqu'à 18h, lorsque Carelle vit le jour commencer à baisser.

"Je ferais mieux de rentrer. Je n'aime pas rentrer tard. Et puis, demain, j'ai un avion à prendre !" dit-elle avec un sourire taquin.

"-Dans ce cas, cette belle journée s'achève. J'ai passé une très bonne soirée en votre présence, Carelle. Cela vous dérange-t-il si je vous raccompagne jusqu'à la gare ? Je n'aime pas vous savoir seule à cette heure-ci.
-Vous inquiétriez-vous de ma sécurité ?"

Une lueur de malice brillait dans son regard.

"-Non, je l'aurais fait pour toutes mes employées. Je n'ai aucune envie que l'une d'entre vous se fasse agresser. Je connais malheureusement que trop bien ce monde rempli de choses affreuses..."

Il secoua négativement la tête et ses yeux se remplirent de larmes. Carelle comprit qu'il avait vécu quelque chose de ce genre, et, pour lui changer les idées, dit :

"Dans ce cas, allons-y maintenant, si je veux arriver avant la nuit !"

Puis, sans un mot, ils marchèrent vers la gare.

La jeune styliste voyait qu'il se détendait et lorsqu'ils arrivèrent devant son train, il ne montrait plus aucun signe de tristesse.

Elle se demandait encore pourquoi il avait réagi de cette façon, mais n'en dit rien.

"Mon train entre en gare. Je vais devoir y aller. À demain, Mr Arewa." souffla la jeune femme.

"À demain Carelle."

Mais alors que le train partait, la créatrice de mode se pencha vers la vitre et vit des larmes dévaler ses joues.

Mais bon sang, que s'était-il passé ?