Chapitre 4
Isla se plongea dans la baignoire et ne put s'empêcher de pousser un soupir d'aise. Elle avait presque perdu la sensation de l'eau brûlante sur sa peau. Mais très vite ce moment de détente se transforma en un dilemme qui manifestement taraudait son esprit plus qu'elle ne l'aurait cru.
Une journée entière venait de s'écouler, il était bientôt dix-neuf heures et Isla hésitait encore à se rendre au ritz.
" C'est votre dernière chance "
Elle sentit un frisson la parcourir au souvenir de cet homme qui semblait prendre un malin plaisir à la torturer. Cependant, cette dernière chance signifiait peut-être qu'elle pouvait sauver la maison.
Prenant son courage à deux mains elle quitta la baignoire et s'enroula dans une serviette pour rejoindre sa chambre. Sa pauvre garde-robe renfermait quelques robes élégantes mais rien qui puisse égaler les robes de grand créateurs comme elle avait pu le constater dans le hall de l'hôtel.
Après maintes hésitations Isla avait choisi la bleue nuit qui s'associait à la couleur de ses yeux. Elle était simple et à son image. Elle releva ses cheveux en chignon à l'aide d'une pince et ne jugea pas nécessaire de se maquiller.
L'heure approchait à grand pas.
Isla prit son sac à main et quitta la maison le ventre noué. Durant tout le trajet elle se posa mille questions.
Des questions qu'elle espérait résoudre dès ce soir.
Une fois le seuil de l'entrée franchie elle n'eut guère le temps de réagir qu'elle fut escortée jusqu'à l'ascenseur comme si son arrivée avait été longuement surveillée.
Isla réprima un accès de peur et inspira profondément jusqu'à ce qu'elle franchisse la porte qu'elle avait franchie la veille.
L'homme qui venait de l'escorter referma la porte derrière elle, la laissant seule face à son destin.
Elle dut faire face à un silence prenant qu'elle tenta de combattre en admirant cette fameuse suite royale. Elle respirait le luxe, un luxe qu'elle n'aurait jamais la chance de s'offrir.
Elle progressa jusqu'au salon et remarqua au loin une table dressée pour deux. Il lui fallut alors plusieurs secondes pour réaliser de quoi il s'agissait.
Dîner ?
Il voulait dîner ?
Isla se retourna suivit d'un sursaut incontrôlable quand elle rencontra son regard.
- Vous n'étiez tout de même pas sur le point de fuir ? Demanda-t-il d'une voix suave.
Une brusque sensation de froid intense l'envahit alors qu'il se tenait à quelques mètres d'elle, dans une veste noire et une chemise au col ouvert.
- C'est une habitude de surgir de nulle part ?
- J'aime être là où l'on ne m'attends pas, répondit-il en s'approchant dangereusement.
Isla s'imposa un court silence dans lequel elle chercha un moyen de contourner ce dîner.
- Alors ? Qu'avez-vous à me dire ? Demanda-t-elle en mettant toute son impatience dans son timbre de voix.
Dans son regard sombre elle vit une lueur énigmatique s'y fondre.
- Êtes-vous pressé mademoiselle Rose ? Si tel est le cas je suis au regret de vous annoncer que nous allons dîner.
- Dîner ? Avec vous ? Et pour quelle raison devrais-je accepter ?
- Parce que j'en ai décidé ainsi, répondit l'homme d'affaires d'une voix sombre et implacable : Nous serons plus à l'aise pour discuter.
Sans lui donner le temps de répondre il allongea sa main vers la table.
Isla rassembla ses forces pour parvenir jusqu'à cette table sans que ses jambes ne se dérobent sous le poids inexplicable de son regard.
- Cette proposition a-t-elle un rapport avec ma maison ?
- Évidemment, dit-il en s'installant en face d'elle : Pour quelle autre raison aurais-je pu vous faire venir ?
Rouge de confusion elle haussa des épaules pour se donner un air désinvolte.
Il lui servit un verre de vin sans la quitter des yeux.
- Oliver ne s'est pas manifesté ce soir, pourtant je lui avais donné jusqu'à dix-neuf heures.
- Oliver ne se manifestera jamais, c'est pour cette raison qu'il m'a envoyé ici.
- Mais vous êtes venue pour sauver votre maison et non lui, nota-t-il d'une voix intriguée : vos rapports sont-ils si compliqués qu'ils le paraissent ?
Isla hésitait à se confier.
- Nos parents se sont mariés il y a six ans, au début tout allez bien, et puis ma mère est décédée brutalement il y a deux ans.
- Puis-je vous demander qu'elle malheur l'a emporté ?
Devant cette sincérité manifeste Isla répondit :
- Méningite foudroyante.
Une profonde lueur de compassion passa dans son regard.
- Je suis désolé pour vous.
Isla s'agita sur sa chaise pour tromper son chagrin et décida de poursuivre.
- Le père d'Oliver est parti deux mois après son décès. Oliver jouait beaucoup sans qu'il le sache. Poker, table de jeux, casino, machine à sous. Il a ruiné son père et il a donc décidé de partir. Oliver est alors resté avec moi et toutes les semaines il me demandait des sommes d'argents que je lui donnais et qui provenait de l'héritage de ma mère. Elle avait tout pensé pour mon avenir.
Isla releva les yeux pour savoir s'il s'intéressait à son récit. Sa profonde paire d'yeux gris était braquée sur elle, impassible.
- Il me disait qu'il était sur un projet qui pourrait nous rapporter de l'argent et qui si j'investissais je serais gagnante.
Isla poussa un faible rire amer.
- Puis un soir, un homme m'a appelé pour m'informer qu'il était interdit de casino et j'ai fini par comprendre que tout mon argent était passé dans le jeu. Il est parti, en me disant que je ne lui servait plus à rien puis avant-hier il est revenu pour que je l'aide.
- Quel charmant demi-frère vous avez là mademoiselle Rose, murmura-t-il impassible : voilà ce qu'apporte la bonté quand vous la donnez à la mauvaise personne.
- Je suis ainsi, trop gentille pour déceler les pièges.
- Et vous voilà tel un agneau en plein sacrifice pour sauver votre maison.
- Je ne vois pas cela comme un sacrifice, rétorqua-t-elle sèchement : je vois ça plutôt comme une preuve d'amour.
Il pinça ses lèvres puis se redressa en expirant lentement...une expiration qu'elle crut sentir sur sa peau.
- Je déteste le vol et le mensonge, je serais intransigeant, je ne passerais pas outre mais je suis cependant capable d'effacer cette dette par un autre moyen.
Un espoir inattendu lui coupa le souffle.
- Comment ?
Son regard impassible la scrutait avec une intensité troublante.
- Comme vous avez pu l'apprendre, je suis un homme d'affaires accompli, le problème c'est que je suis souvent la proie des journalistes surtout lorsqu'il s'agit de ma vie personnelle. Ils adorent me décrire comme un homme à femmes qui ne trouvera jamais la compagne idéale.
Il parlait avec un ton professionnel. Isla déglutit en attendant la suite.
- Et comme vous avez pu le comprendre mon ancienne maîtresse est un peu tenace, reprit-il en se penchant pour prendre son verre.
- Je ne vois toujours pas où vous voulez en venir.
- Ma proposition est la suivante : mes relations ne durent jamais plus d'un mois. Je veux me défaire de la presse et pour cela je dois leur donner quelque chose de surprenant. Vous vivrez chez-moi et vous m'accompagnerez lors de mes dîners d'affaires, le but est très simple, jouez la comédie à mes côtés.
Isla ouvrit la bouche décontenancée, sous le choc.
- Jouez la comédie ? Vous voulez que je fasse semblant d'être votre petite-amie.
- C'est exactement ça mademoiselle Rose, affirma-t-il avec un sourire entendu.
Isla cilla avant de secouer sa tête énergiquement.
- Il y a vingt-quatre heures vous me considériez comme une étudiante, qu'est-ce qui vous fait penser que ça marchera ?
- Parce que j'en suis convaincu, répondit-il avec un sourire en coin.
- Moi non, dit-elle franchement.
- Trois mois, je vous demande trois mois à faire semblant, à compter de cette échéance j'efface la dette de votre demi-frère et vous gardez votre maison. À l'instant même où votre signature figurera sur le contrat je m'engage à prendre en charge les réparations de votre maison.
Isla avait de plus en plus de mal à respirer. Jouer la comédie ne semblait pas difficile mais la jouer au côté de cet homme rendait la mission presque impossible. De plus, comment pourrait-elle survivre trois mois avec cet inconnu dont elle ne connaissait rien hormis qu'il se montrait impitoyable et mystérieux.
- Je refuse de vous entendre dire que j'exerce du chantage sur vous. Vous êtes libre de partir. Je vous offre un compromis bien plus agréable qu'un sacrifice dont vous n'êtes que la victime. Hélas Oliver semble muet à mes menaces et même si je l'envoyais en prison, vous serez contrainte d'en payer le prix.
Il n'avait pas tort, elle était au pied du mur dans les deux cas.
- Vous devriez manger un peu, nous avons la soirée pour en discuter.
- Je n'ai pas faim.
- Ce n'était pas une proposition, répliqua-t-il avec un éclat sombre dans les yeux.
Isla sentit un frisson naître entre ses reins.
- Comment pouvez-vous être certain que je suis douée pour jouer ce rôle alors que vous-même ne donnez pas l'air de croire en l'amour comment pouvoir le feindre sans même...
- Croyez-moi j'ai eu affaire à ce sentiment il y a sept ans jusqu'à me marier, la coupa-t-il d'une voix sèche : dix-huit mois plus tard, après mon divorce je me suis jurer de ne plus jamais laisser une femme entrer dans les profondeurs de mon âme.
Il se pencha en avant, retrouvant son sourire glacial.
- Mais je suis assez expérimenté pour donner l'impression d'être fou de vous mademoiselle Rose...
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