Chapitre 4
Tentant désespérément de délier les cordes qui entravaient ses poignets, Nessa finit par abandonner par épuisement et se laissa retomber lourdement sur le couchage. Les vagues épaisses de la mer provoquaient des secousses qu'aucune femme aurait trouvé la force de supporter. La seule chose à laquelle Nessa s'était forcée de se montrer reconnaissante fut quand l'un des barbares lui avait ramené Kara.
- Qu'allons-nous faire Nessa ?
- Rien qui puisse nous conduire à la mort, promets-le moi Kara ?
La jeune femme acquiesça en silence puis ferma les yeux désespérément.
- As-tu été bien traitée ? Demanda-t-elle en vérifiant que la porte était toujours close.
- Oui, du moins mieux que je le pensais, avoua Kara en tremblant ; Le guerrier qui ma capturé semble pris démence en haut.
Nessa trouva la force de se relever sans quitter sa cousine du regard.
- Quoi ? Que veux-tu dire par-là ?
- Je l'ignore, sanglota celle-ci en fermant les yeux ; Quand j'ai traversé le ponton il paraissait affreusement en colère et le balafré aussi.
Paniqué, Nessa sentit son cœur s'arrêter presque de battre. Elle n'eut pas le temps de reprendre son souffle que l'un d'entre eux pénétra dans la cabine. Elle le reconnut tout de suite. Il se rapprocha de Kara en lui saisissant les épaules. Nessa se mordit la lèvre pour s'empêcher de hurler. Les traits crispés de rage, il dévisagea Kara le souffle court. Celle-ci baissa les yeux, lèvres tremblantes. La couleur flamboyante de sa chevelure semblait fasciner le guerrier. Sans mot dire il la souleva dans ses bras pour la basculer sur son épaule.
- Ne lui faites pas de mal ! S'écria Nessa avant que le balafré n'intervienne.
- Hayar ! Doucement !
Les deux guerriers s'affrontèrent du regard et aucun des deux semblaient vouloir se plier. Horrifiée, Nessa les dévisagea tour à tour.
- Ôte-toi de mon chemin Ivar !
Le balafré s'écarta à contrecœur, laissant passer son frère en rage.
- Je vous en prie ! Ne lui faites pas de mal !
Nessa retint son souffle lorsqu'il s'approcha de la couche. Il lui ôta les liens qui lui entravaient les chevilles et l'obligea à se lever.
- Peux-tu marcher ? Demanda-t-il brutalement.
Nessa grimaça en faisant quelques pas vers la sortie. La tenant fermement par le bras, Nessa ne touchait presque plus terre. Elle avait l'impression d'être une enfant tant il était grand et imposant. Dehors, les hommes quittaient un à un le navire pour emprunter un sous-bois sombre. Forcée de descendre à son tour, Nessa chercha désespérément Kara puis l'aperçut au loin, toujours hissée sur l'épaule du fameux Hayar. Déroutée, affaiblie, Nessa se rendit compte trop tard qu'elle fermait la marche de cette armée, fermement maintenue en équilibre par le jarl.
La pluie accompagnait leur traversé.
- À qui appartenait-elle ?
Nessa trouva la force de lever la tête vers lui. Bien-sûr elle comprit qu'il parlait de Kara. Derrière les barrages de ses cicatrices elle perçut dans ses yeux une lueur dangereuse noyer ses yeux bleus.
- À Richard, un ami de Gareth.
Nessa retint un cri de douleur lorsqu'elle marcha sur une ronce séché. Dans la bataille, elle avait perdu ses chaussures. Chaque pas qu'elle faisait était un supplice.
- Qu'allons-nous devenir ? Osa-t-elle demander en manquant de tomber ; Comptez-vous obtenir une rançon ?
- Je ne veux pas de rançon, lâcha-t-il froidement.
- Gareth ne viendra jamais jusqu'ici pour moi, lâcha-t-elle en prenant le risque de le mettre en colère.
- Et moi je crois le contraire, rétorqua-t-il de sa voix rocailleuse.
- Ainsi je suis un appât ?
Il ne répondit rien et la hissa sur son épaule sans efforts. Avait-il deviné qu'elle souffrait ?
Non, songea Nessa en peinant à respirer. Le trajet dura si longtemps qu'elle sentit sur son visage le soleil se coucher. Des flammes géantes se mirent à jaillirent dans les profondeurs de la forêt. Les mers étaient déchaînées comme lui avait précisé le viking. Dorénavant, elle était sur ses terres et ignorait encore quel destin lui serait réservé. Le village semblait vide. Seules quelques flammes embrasaient les maisons d'une lueur inquiétante. La dernière chose qu'elle vit fut Kara emportée dans l'une des maisons. La porte en bois claqua violemment derrière eux...la laissant dans l'incertitude de ce qu'il pourrait arriver à sa cousine.
Ivar serra les mâchoires en repensant à la violente bagarre qu'il avait eu avec son frère. Ivar avait laissé Hayar le frapper pour évacuer sa rage mais rien n'y faisait. Cet aveu l'avait brisé comme il l'avait prédis. Sur son épaule, la jeune esclave ne bougeait pas. Elle semblait plus inquiète pour le sort de Kara que pour le sien. Était-elle son appât ? Était-il en train de se servir d'elle pour attirer Gareth dans un piège ?
Il la déposa sur le sol puis s'écarta pour l'admirer. Non...elle n'était pas un appât. Elle était la plus belle femme que les dieux lui aient permis de voir. Il baissa son regard sur ses lèvres purpurines et sentit un puissant désir l'immobiliser.
- Ne me faites pas de mal, le supplia-t-elle en osa le regarder dans les yeux.
- Obéi et tout ira bien, dit-il d'un air menaçant.
Elle hoqueta, comme si elle résistait à un flot de larmes incontrôlables.
Soudain, il ressentit de la peine pour elle. Mais très vite Ivar recouvra ses esprits. Peut-être qu'elle avait revêtue ses habits de servante pour masquer sa véritable identité, songea-t-il en serrant les poings.
- Donne-moi tes mains que je puisse les délier.
Elle les tendit...Ivar baissa les yeux sur ses poignets entravés et desserra les liens pour lui ôter. Ses mains fines révélaient des blessures antérieurs aux cordes.
- Une femme viendra te porter des vêtements propres, quand tu seras prête, on te ramènera à moi.
Vaincue, elle baissa les yeux. Ivar quitta la maison et refermant brutalement la porte. Une fois dehors profitant de l'air et du silence, il laissa passer Ena, la femme de maison en lui jetant un regard dédaigneux. Ancienne Saxonne, Ena était parvenue à séduire Gunard mais Ivar se méfiait encore d'elle.
D'autant plus que quand elle passerait cette porte, celle-ci sera maudit par la jalousie en découvrant la belle captive.
Nessa releva la tête lorsque la porte se rouvrit. Une femme s'arrêta à l'entrée, figé, puis méprisante. La confrontation silencieuse dura suffisamment longtemps pour qu'un bruit retentissant ne face vibrer la porte.
- Dépêche-toi Ena ! Grogna le jarl.
Désorientée, la femme aux cheveux blond lui jeta une robe rouge sans ménagement et quitta la maison précipitamment.
Ébranlée par le dédain auquel elle venait d'être confronté, Nessa se baissa pour saisir la robe.
Elle enfila le vêtement maladroitement en sentant la présence du jarl juste derrière la porte. Terrifiée elle serra les cordages puis s'entoura de ses bras en jetant un regard circulaire à la maison bâtit d'un bois rêche mais solide. Elle ruisselait d'un luxe fièrement exposé par des teintures dont elle devinait la douceur. Prise de vertige, elle s'échoua sur le sol en priant pour sa vie et celle de Kara. Il fallait qu'elle trouve un moyen de quitter ce village au plus vite. Mais pour l'heure il lui fallait absolument gagner un peu de la confiance du jarl. Ensuite, Nessa s'enfuirait avec Kara.
- Es-tu prête ?
Elle sursauta lorsque la porte se mit à rebondir contre le bois. Elle croisa son regard acéré avant de baisser les yeux sur son poing serré. Elle remarqua qu'il semblait épuisé. Bientôt, Nessa sentait qu'il aurait besoin de repos. Et alors seulement là, Nessa quitterait le village.
- Oui, murmura-t-elle en se relevant.
Il darda son regard sur elle puis lui ordonna de le suivre. Nessa obtempéra pour lui montrer qu'elle était obéissante. Une sensation étrange naquit au creux de ses reins lorsqu'elle sentit sur sa peau nue, le poids de sa chaleur imposante. Il l'emmena dans une autre maison dans laquelle Kara était prostrée le long d'un mur. Elle fut poussée à l'intérieur puis la porte se referma. Sans le savoir, le guerrier venait d'accélérer ses plans de fuites.
- Il t'a fait du mal ? S'empressa-t-elle de demander en enlaçant Kara.
Elle secoua négativement de la tête, les lèvres scellées. Nessa se releva précipitamment et s'approcha du mur en bois pour regarder à travers les minuscules trous entre les planches. Les grosses voix rieuses des vikings l'informaient qu'ils festoyaient pour leur retour.
- Je vais nous sortir de là, dit-elle en cherchant un objet qui pourrait l'aider à décrocher l'une des planches.
- J'ai si peur Nessa, bredouilla Kara en se levant à son tour.
Nessa préféra fermer les yeux pour ne pas lui montrer qu'elle était aussi terrifiée qu'elle l'était puis se redressa en sursautant quand la porte se rouvrit une deuxième fois.
- Allez-vous en ! S'écria la femme qui lui avait donné la robe.
Perplexe, Nessa protégea Kara quand celle-ci s'approcha avec une torche enflammée.
- Prenez ceci est allez-vous en !
Un jais de lumière l'aida à mieux comprendre les bonnes intentions de cette femme au regard méprisant. Elles n'étaient les bienvenues...
Sans réfléchir, Nessa prit la torche enflammée sans un mot et quitta la maison en emportant Kara avec elle.
En fuyant à l'orée du bois, une seule question terrorisait son esprit.
Comment aller réagir le guerrier quand il découvrirait qu'elles s'étaient enfuis ?
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