Chapitre 35



Plus d'une heure suivant leur étreinte passionné, Nessa monta sur le navire du jarl avec appréhension. En effet, Nessa avait senti le poids du regard de la saxonne qui était la seule femme faisant partie de ce voyage. Plus tôt dans la matinée c'est avec émotion qu'elle avait aide Kara à se préparer pour son mariage. C'est le long de la plage qu'Ivar les avait unis dans le mariage faisant de sa cousine la femme de son frère. Plus belle que jamais, Kara rayonnait de bonheur. Nessa priait à présent pour que Hayar remplisse le cœur de sa cousine de bonheur. Tout semblait parfait....tellement parfait qu'elle craignait qu'un malheur ne vienne détruire ce bonheur.

Plus beau que jamais Ivar monta sur le drakkar vêtu d'une épaisse cape noire. Son regard était dur mais ses yeux bleus reflétaient un sentiment d'apaisement. Nessa ne pouvait plus ignorer ses sentiments pour lui. Elle était tombée en amour pour lui lorsqu'elle était tombé malade après le banquet. À travers la fièvre qui l'avait tenue de longue heure, Nessa se souvenait encore de la peur qu'elle avait pu lire dans son regard.

- Allons-y ! Je voudrais rentrer avant la nuit.

Nessa sursauta quand elle sentit deux grandes mains s'emparer de sa taille.

- Il te faut rejoindre l'arrière du bateau Nessa, les vagues risquent d'être violentes.

- Et toi ? Où seras-tu ?

- À l'avant, ne t'inquiète pas mon amour, je garde un œil sur toi.

S'efforçant de ne pas lui révéler ses craintes Nessa rejoignit l'arrière du Drakkar et s'installa sur le banc sur lequel Ena était assise, le regard noir.

Comme redouté, la saxonne se tourna vers elle pour la dévisager avec mépris.

- Pourquoi es-tu ici ? Tu crains que je te vole ton époux ?

- Je désire vendre un peu de laine, répondit Nessa en la confrontant les yeux plissés ; Pourquoi ? Tu avais l'intention de séduire mon mari sous les yeux de Gunard ?

La bouche de la saxonne se tordit en grimace.

- Je ne suis pas si stupide, lâcha-t-elle sèchement ; Quoi que ça ne me déplairais pas de partager ma couche avec ces deux hommes.

Sous le choc Nessa resta néanmoins de marbre devant l'air bravache de sa rivale.

- Ivar n'en a que faire de toi, pourquoi insister au lieu d'accuser la défaite ?

Des éclairs de rage traversèrent les yeux noisettes de la saxonne.

- Ivar se ment à lui-même, je sais au fond de moi qu'il me désire.

Nessa se rendit compte que la femme était prise de folie. Une folie qui pourrait la pousser à faire des choses regrettables. Nessa jugea bon de rester prudente pendant ce voyage. Elle se leva sans un mot et se dirigea vers l'autre banc afin de recouvrer un peu de calme. Elle ne ressentait aucun sentiment de jalousie en revanche elle n'avait de cesse de se demander si Ivar aurait pu la prendre pour concubine s'il ne l'avait pas enlevé. Tristement elle sentit un point se former dans son cœur en imaginant Ena dans les bras de son mari. Pire encore ! Elle ne parvenait pas à comprendre comment Gunard faisait pour ne rien voir. Pourtant certains regards ne trompaient pas alors pourquoi il semblait si indifférent ?

Perdue, Nessa baissa la tête vers ses cuisses serrées et fut prise de panique quand Gunard en personne vint s'installer à ses côtés. Elle réprima un sursaut, osant à peine relever la tête.

Si le viking affichait toujours un regard doux il n'en demeurait pas moins dangereux. Elle le craignait autant qu'elle craignait Ivar.

- Tu es la femme du seigneur, tu ne devrais pas avoir peur de lever la tête, déclara-t-il en aiguisant la lame de son couteau.

Nessa releva la tête pour le regarder.

- Tu agis comme une esclave et cela te rend plus belle, ajouta-t-il en la regardant ; Seulement tu ne peux guère te comporter ainsi maintenant.

- J'ai l'esprit d'une fermière pas d'une guerrière, rétorqua Nessa en fermant brièvement les yeux.

- Tu as bravé bien des épreuves, tu as défier Ivar, tu es une guerrière, une douce et innocente guerrière.

Nessa réprima un frisson. Gunard s'esclaffa alors en regardant l'horizon.

- Il a beaucoup de chance de t'avoir, murmura-t-il d'une voix à peine audible.

Nessa sentit des larmes lui monter aux yeux. Elle comprit que Gunard n'était pas si ignorant que ça et qu'il éprouvait une grande tristesse. Que dire ? Que faire ?

Elle n'eut pas le temps de poursuivre cette étrange conversation car Ena s'approcha avec un sourire en coin.

- Ce n'est pas bien de parler à un homme marié, lança celle-ci en croisant les bras.

- Nous faisions que discuter de mon ami, réplique Gunard en se levant lentement ; Tâche de maintenir tes distances avec Nessa ou je serais forcé de te punir.

Ena pâlit brutalement alors que le viking s'éloignait déjà. Prostrée sur le banc, Nessa se passa une main dans ses cheveux en sentant sa rivale s'éloigner. S'ensuivit un instant seule avec elle même. Le cœur gagné par la peur qu'elle ait pu laisser croire par son silence que Ena était attirée par Ivar, Nessa sursauta quand son mari vint poser ses doigts sur son menton.

- Tu sembles préoccuper ma chérie, j'aimerais connaître tes pensées.

Elle sentit un frisson parcourir sa peau.

- Ena me préoccupe beaucoup, avoua Nessa en soutenant son regard.

Ivar prit place à ses côtés et la fit choir sur ses cuisses.

- Je te l'ai déjà dit Nessa, je...

- As-tu songé à la posséder avant de me rencontrer ?

- Jamais ! Encore moins une saxonne !

- Pourtant tu pensais que j'en était une le jour où...

- C'était une erreur et je cherche encore à me pardonner. Tu n'avais pas l'allure d'une saxonne.

Nessa baissa timidement les yeux, peinant à croire qu'elle était sa femme.

- J'ai accepté l'union seulement parce que Gunard était tombé en amour pour elle.

- Je crois qu'il se pose énormément de questions, lui confia Nessa en posant sa main sur son épaule ; Cela me rend triste pour lui, il ne mérite pas ça.

- Gunard est l'un des vikings les plus menaçant que j'ai jamais rencontré, si un divorce venait à se faire, il s'en remettra.

Nessa le croyait sur parole.

- Tu es trop humaine pour être vraie, chuchota Ivar en l'obligeant à le regarder ; Nul autre aurait eu autant de sentiments pour des hommes comme nous.

Nessa aurait pu jurer qu'il semblait ému.

- J'ai vu des hommes commettre des crimes et ils n'étaient pas des vikings, murmura Nessa en se tournant vers l'horizon.

Il ne répondit rien, il se contentait de lui caresser le bras. Le cœur battant elle reporta son attention sur lui et lut dans son regard une flamme noyer son regard bleus.

Il se leva en l'obligeant à se lever à son tour. Avec une passion contenus il captura sa bouche devant ses hommes.

- Reste loin de Ena, je m'occupe d'elle.

- Je suis capable de me défendre Ivar, rétorqua Nessa en lui souriant.

- Je n'ai aucun doute là-dessus mon amour...

Il la caressa du regard et s'en alla vers ses hommes. Prise de vertige Nessa se retint à la corde et se pinça les lèvres nerveusement. Quand ils touchèrent les terres, Nessa avait l'impression de revoir son village lorsqu'il était encore animé. Certains regards s'attardèrent sur eux. Elle put lire de la peur dans les yeux de certaines femmes mais tous continuaient de vaquer à leur occupations.

- Pourquoi es-tu accueilli sans craintes ? Demanda-t-elle quand il l'aida à descendre.

- J'ai traité avec ces gens pour avoir un peu de paix, expliqua Ivar en dépliant la cape rouge pour la lui donner ; Il accepte ma présence et en échange je ne pille pas leur village.

La gorge de Nessa se noua. Parfois elle oubliait qu'il était un barbare. Un viking. Elle voyait seulement l'homme...

Il chassa les mèches qui barraient son front.

- Je sais, murmura-t-il d'une voix enrouée par la dégoût.

Nessa n'osa pas relever. Il venait de lire dans ses pensées et une fois de plus Nessa l'avait laissé croire qu'elle le craignait.

- Je peux faire le tour du village ? S'enquit-elle en rabattant la capuche de sa cape.

- Ne t'éloigne pas...

- Bien-sûr que non, assura Nessa en confrontant son regard menaçant.

Péniblement, Ivar la laissa s'éloigner dans sa belle cape et déjà sa beauté attira tous les regards...des regards qu'il voulait anéantir. Très vite, il dut se ressaisir et ne la quitta pas des yeux. Incapable de la laisser seule, Ivar la suivit en retrait. D'un regard possessif, il montra à tous à qui elle appartenait et plusieurs hommes baissèrent leurs regards.

Sa belle s'arrêta à hauteur d'une femme et elle lui proposa la laine. Captivé, Ivar resta en retrait, saisi par la crainte qu'elle veuille le quitter. Une présence féminine se glissa près de lui.

- Tu crains qu'elle te quitte guerrier ?

La vieille femme esquissa un sourire étrange.

- Méfie-toi, cette femme est un grand trésor qui te donnera bien plus que tu ne le crois.

Perplexe, dans l'incompréhension, Ivar suivit des yeux cette vieille dame qui partait en direction de Nessa. Il le retint par le bras et l'empêcha de passer.

- Que veulent dire tes présages ? Dis-moi !

Mystérieuse, la vieille femme déclara ;

- Tu verras, ça arrive, sois patient...

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top