Après avoir eu pour ordre d'accompagner Nessa dans la maison des bains, Ydi prit son fils dans ses bras sous le regard anxieux de son époux.

- J'ai fait quelque chose de mal ? Demanda-t-il en se grattant l'arrière de la tête.

- Oui ! S'écria Ydi en berçant leur fils ; Comment as-tu pu douter de cette femme au point d'imaginer qu'elle puisse tuer notre jarl ?

- C'est une esclave Ydi ! S'emporta Haakon ; Nous devons nous montrer prudent !

- La guerre ne te réussi pas mon pauvre ami, gronda Ydi en arpentant leur maison d'un pas agacé ; Tu crois sincèrement que cette jeune fille aurait pris le risque de tuer Ivar par simple esprit de vengeance au risque d'être donné à un autre ?

Haakon pâlit subitement.

- Sur l'instant j'ai eu des doutes, cette femme paraît froide et réservée, difficile de lire dans ses pensées, se justifia Haakon avec fermeté.

- Laisse-moi te décrire ses pensées, commença Ydi en dévoilant sa poitrine pour nourrir leur fils ; Elle a vu Gareth détruire son village, elle a assisté à la tuerie de toute sa famille, elle s'est fait enlevé par celui qui nous à trahi et la voilà prisonnière d'un homme à la réputation d'être sauvage et animé par une colère que même les dieux ne parviendraient pas à affronter.

Ydi marqua une pause dans laquelle son mari se passa une main nerveuse dans les cheveux.

- Voilà les pensées qui animent l'esprit de cette jeune femme.

- Ydi, je suis navré mon jugement était infondé.

- D'autant plus qu'elle m'a aidé à mettre Eirik au monde, sans elle, je serais probablement allongée sur un radeau en flammes emportés par les mers.

- Suffit Ydi ! Gronda Haakon en attrapant la mâchoire de son épouse ; Dis-moi ce que tu souhaites que je fasse pour réparer mon jugement.

- Convainc Ivar de bien la traiter et de la protéger des autres femmes.

Haakon grimaça.

- Je t'en supplie Haakon, essaye de lui parler.

- Tu es en train de me demander d'exiger de mon ami de mieux traiter cette femme qui est sa captive alors qu'il hait les femmes.

- Et c'est d'ailleurs ce qui me pose un soucis ! S'emporta de nouveau Ydi en faisant un pas en arrière ; Il n'a jamais pris une esclave à ce jour, ni même une épouse depuis Hanlyse.

Haakon se retourna pour aller s'asseoir près de leur foyer.

- Ne parle pas de cette femme Ydi tu sais ce que tu risques.

- Nous sommes seuls mon amour, rétorqua Ydi en venant se mettre sur ses genoux, seins nus, Eirik dans ses bras ; Rappelle-toi de sa douleur et de sa haine. Je m'inquiète énormément pour Nessa.

- Par tout les dieux ! Depuis quand tu soucis-tu du sort d'une esclave ?

Ydi esquissa un sourire en posant un tendre regard sur son fils.

- Depuis qu'elle s'est occupée de mettre au monde notre fils, murmura Ydi en relevant la tête vers les flammes du foyer ; Et puis je m'inquiète pour elle, Ena et d'autres femmes jalousent sa beauté, je crains qu'elles s'en prennent à elle. De plus, Ena a toujours eu un faible pour Ivar quant à Hillyss elle espère devenir sa femme depuis deux ans.

- Ena a un faible pour Ivar ? Répéta Haakon incrédule.

Idy inspira brutalement en réalisant qu'elle venait de trahir un secret.

- C'était avant qu'elle épouse Gunard, avoua-t-elle en soutenant le regard dur de son mari ; Elle a laissait entendre à certaines femmes qu'elle avait grand espoir de devenir l'épouse du jarl.

- Gunard le sait ?

- Non ! S'écria Ydi en secouant de la tête.

La porte de leur maison s'ouvrit à la volée.

Ivar en personne entra dans la maison et détourna la tête. Idy décrocha son fils de son sein tandis que Haakon remontait sa robe pour la couvrir.

- Navré de rompre un moment de famille mais elle attend pour son bain ! S'agaça le jarl d'une voix grave ; Dois-je lui donner moi-même ?

- Non, j'arrive immédiatement.

Ydi reposa Eirik dans son berceau recouvert de couvertures chaudes et quitta la maison en pressant le pas.

Ivar s'apprêtait à fermer la porte pour la suivre mais Haakon s'interrompit son geste.

- Pouvons-nous parler Ivar ?

Ivar considéra son ami en plissant ses sourcils et fut catégorique.

- Je n'ai pas le temps mon ami, nous verrons ça plus tard.

Ivar quitta la maison suivi par Haakon.

Nessa pénétra dans la maison des bains en serrant nerveusement ses mains contre son ventre. Éclairée par des torches enflammées, l'endroit était tout de même très agréable et elle fut surprise de sentir une vapeur d'eau se poser sur sa peau.

Ydi la dirigea vers la baignoire puis s'occupa des pierres et les seaux d'eaux.

- Dépêche-toi Nessa, je ne voudrais pas que les autres femmes ne viennent nous divertir de leur méprise.

Nessa se déshabilla à la hâte et se glissa dans la baignoire. L'eau chaude était comme un cadeau du ciel. Elle aurait presque pu gémir si Ydi n'était pas venue détruire son plaisir en lui versant un seau sur la tête.

- Navrée Nessa, murmura Ydi en lui donnant un savon.

- Je me dépêche, murmura-t-elle en se frottant les bras et le cou.

Agréablement surprise par le parfum du savon, Nessa huma l'odeur en fermant les yeux. Une fois lavée de la tête aux pieds, Nessa se tourna pour vérifier qu'elles étaient seules et quitta précipitamment la baignoire pour se couvrir d'un linge propre.

- Merci d'avoir sauvé Ivar.

- J'étais responsable de sa blessure, je me devais de le soigner.

- Si Gareth ne t'avais pas attendu de l'autre côté de la foret, serais-tu partie ?

Nessa releva les yeux pour confronter Ydi.

- Qui n'aurait pas essayé de retrouver sa liberté ?

Idy prit une expression peinée et vint lui frotter énergiquement le corps.

- C'est ici que tu vis Nessa, essaye de te faire une raison.

Le ton catégorique de Ydi ajouta de la tristesse à son désespoir. Elle avait peut-être raison. Il était sans doute temps pour elle de se faire à l'idée qu'elle ne retrouverait jamais sa liberté.

- Pourtant, Ena m'a dit qu'il me vendrait une fois qu'il aura tué Gareth.

Ydi fit claquer sa langue entre ses dents.

- N'écoute pas Ena, elle tente de te faire peur.

Ydi l'aida à enfiler une robe pourpre puis reprit ;

- Tu appartiens au jarl maintenant, dit-elle sur un ton définitif.

Tristement, Nessa noua les lacets de sa robe en battant énergiquement des paupières pour retenir ses larmes. Propre et fraîche, elle quitta la maison des bains et traversa le village en direction du jarl qui semblait en plein conversation avec Haakon.

Elle se positionna derrière lui et put sentir sa chaleur imposante se poser sur sa peau encore fraîche.

Il se tourna vers elle, l'expression très grave.

- Déjà ? Lança-t-il en prenant son bras avec une douceur qui la prit de court.

- Oui, je vous remercie pour ce privilège.

Sans plus attendre il l'entraîna avec lui en la maintenant par le bras. Docile et n'ayant plus d'autre choix que d'accepter son sort elle réprima un hoquet lorsqu'il passa de nouveau la porte de la maison des bains.

- Tu es libre de te retourner, lâcha-t-il d'une voix mystérieusement calme ; Seulement j'ai besoin de toi pour les seaux.

Nessa tourna les yeux vers le mur quand il se déshabilla entièrement. Soulagée qu'il lui donne le choix de ne pas le regarder, Nessa se dirigea vers les sceaux pour les remplir. Une étrange chaleur courut sur sa peau quand elle se risqua un regard vers lui. Troublée par sa carrure elle détourna les yeux un instant puis revint vers lui pour verser l'eau dans la baignoire. Le cœur battant à toute vitesse elle versa l'eau en prenant soin de ne jamais regarder sa nudité.

Elle reposa le seau à terre pour se mettre en retrait mais il agrippa son poignet si vivement qu'elle n'eut d'autre choix que de le confronter.

- On m'a rapporté que Ena t'avais rendu visite hier, est-ce bien vrai ?

Nessa acquiesça silencieusement. Alors il l'attira vers la baignoire de façon à ce qu'elle se laisse choir près de celle-ci. Ses joues devinrent brûlantes.

- Qu'est-ce qu'elle t'a dit ?

Fixant la cicatrice qui barrait son visage Nessa bredouilla ;

- Que...vous me vendrez après avoir tué Gareth.

Ses traits se durcirent aussitôt. D'un bond, il quitta la baignoire en éclaboussant le sol et tel un rugissement dans la nuit, il disparu de son champ de vision, laissant sur son passage une empreinte de ses doigts sur sa peau.

Une empreinte qui s'insinua dans sa peau et qui lui envoya une décharge électrique indescriptible.