13. Il inferno di Don Giovanna (1)

Bonjour tout le monde. Comment allez-vous ? ^^

Captive poursuit son petit bonhomme de chemin et grâce à vous elle va bientôt atteindre les 4k. Je ne vous remercierai jamais assez pour votre soutien et votre fidélité, vous lecteurs et lectrices qui continuaient à me suivre dans mes délires en tous genres.

Je préfère vous prévenir, ce chapitre qui s'annonce en deux parties ne sera pas des plus gais mais je vous souhaite quand même une bonne lecture. ^^

Ps : L'image est une illustration de Benjamin Lacombe, j'aime beaucoup son travail et principalement celui sur Alice au pays des merveilles. :)


13. Il inferno di Don Giovanna (1)


"Nous sommes faits de la même matière

que les rêves et nos courtes vies

sont bordées de sommeil"

W. Shakespeare


Bien que confus et troublé, Giorno eut tôt fait de détacher les poignets de sa belle endormie. Il fit une halte rapide dans le cabinet de toilette attenant à sa chambre, prenant seulement le temps de jeter le préservatif usagé et de se plonger le visage sous l'eau froide. Puis, saisi d'un irrépressible besoin d'aller la retrouver, de prendre soin d'elle, il retourna à son chevet avec un gant tiède et humide. La main leste mais le visage soucieux, il passa le tissu d'éponge sur le front de Gigi ainsi que sur le reste de son corps, le débarrassant du voile de sueur qui refroidissait sa peau et la recouvrait tel un linceul.

Ses épaules, son cou et son buste, il les avait réservés en dernier, comme par crainte d'être confronté à sa propre sauvagerie. À ces endroits, ses gestes se firent encore plus délicats et paradoxalement moins assurés. Il aurait souhaité que le passage du gant suffise à faire disparaître de son épiderme les infâmes stigmates qu'il avait imprimé sur sa chair en une myriade de marques rouges et violacée. Un peu plus tôt, il s'était extasié devant cette magnifique peau blanche et pure, digne d'une sainte. Désormais, il devait faire face à la souillure qu'il lui avait infligée par ses viles morsures et ses innombrables succions. Si Gigi avait tenu le rôle de la créature enchanteresse, alors Giorno pouvait se comparer au vampire qui, dans un élan de prédation, avait sauté à la gorge de sa proie pour absorber son essence vitale. Et cette simple pensée l'horrifiait.

Malgré la culpabilité d'avoir trop goûté et trop abîmé cette peau délicate, ses lèvres semblaient encore fourmiller de plaisir, et ce souvenir prégnant étourdissait son esprit comme une mauvaise fièvre. Se laissant envahir par la rancune qu'il nourrissait à l'encontre de lui-même, il essayait de comprendre son emportement et sa négligence. Est-ce que, dans une inextinguible soif d'absolu il avait souhaité engloutir Gigi, son être et sa féminité, pour la figer à travers lui ? Perdu dans une extase mystique, s'était-il pris pour Adam voulant faire rentrer Eve dans sa cage thoracique pour l'y enfermer à jamais ?

Mettre au jour ses propres désirs inconscients était effrayant. Jusque-là, il avait été persuadé de ne vouloir lui faire que du bien, et sans doute avait-il réussi, mais pas sans laisser surgir la bête immonde et vorace, enfouie dans les tréfonds de sa conscience. Ce monstre qu'il pensait avoir bridé et muselé, il l'avait relâché sans le vouloir sur la seule femme qui avait à ce jour pénétré son cœur. Comme si ses ténèbres avaient réagi à la lumière que la jeune femme avait introduite en lui, se ruant dessus pour tenter de l'éteindre. Et pour ça, il s'en voulait amèrement, au point d'éprouver un profond dégoût de lui-même.

Parfaitement lucide, Giorno n'ignorait rien de ce qui s'était joué entre eux lors de ces ébats passionnés. Gigi lui avait offert le plus profond et le plus gracieux des abandons et lui, en retour, l'avait abusé au point de faire sourdre en elle un instinct de soumission mortifère. Et le pire de tout, c'était que s'il devait là maintenant écouter ses bas instincts, il l'aurait réveillée pour le simple plaisir de voir se rejouer cet instant magique où, dans une osmose parfaite, ils avaient joui ensemble, juste avant que Gigi ne quitte ses bras pour rejoindre ceux de Morphée.

Pourtant, raison et remords l'empêchaient de la tirer du sommeil du juste. Observer son visage reposé, aux traits aussi doux et paisibles que ceux d'une bienheureuse, suffisait à apaiser ses pulsions. Il aurait voulu avoir la force de s'éloigner d'elle, de ne plus la toucher, mais le besoin de la sentir encore contre lui le taraudait si puissamment qu'il ne put s'y résoudre.

Alors, il la prit dans ses bras, prenant garde à ne pas perturber son repos, et avec elle, il plongea sous les draps. Tout en l'étreignant, il ferma les yeux et se laissa apaiser par son odeur et la brise de son souffle qui venait caresser son torse. Il ne savait pas pourquoi, mais l'enlacement de leurs deux corps était si naturel et agréable qu'il semblait lui apporter une sorte de rédemption. Il irradiait de cette femme une douce chaleur et tout contre elle, il avait la sensation d'être perché sur un nuage au-dessus des portes du paradis.

Plus de culpabilité, plus de tourments, juste la quiétude invoquée par la simple présence de Gigi au creux de ses bras. Pour la première fois depuis bien longtemps, il s'endormait sans que son esprit tortueux ne soit assailli de regrets ou ne fomente vengeances et machinations. Pourtant, à l'heure où la nuit commençait à mourir, percée par les premières lueurs de l'aube, ses démons avaient ressurgi. Sous la forme d'un songe angoissant, entremêlé d'âpres souvenirs et de visions traumatiques, ses peurs s'étaient cristallisées dans une improbable descente aux enfers digne de la Divine Comédie de Dante.

Ainsi, dans cette distorsion du temps propre aux rêves qui ne durent qu'un court instant dans la réalité, il avait inlassablement parcouru les cercles infernaux de son inconscient.

Cercle 1 : Enfance

Un fragment de son innocence brisée, le souvenir d'une enfance viciée, aussi vif et limpide qu'au jour où il l'avait vécu, amorça son terrifiant voyage onirique.

Il se revit alors âgé de sept ans, au beau milieu du jardin familial, tenant entre ses mains d'enfant un petit lapin blanc au pelage duveteux. L'adorable petite boule de poils s'était lovée contre son tee-shirt en toute quiétude. Les yeux fermés, l'animal semblait apprécier les caresses attentionnées qu'il lui prodiguait sur le haut de son crâne et le long de ses grandes oreilles. Il avait toujours aimé le contact des animaux et n'avait pas son pareil pour les apprivoiser. Cet amour du vivant, ce respect et cette admiration des choses de la nature faisait partie de lui comme un sentiment inné. Un sentiment qu'on lui avait appris, dès son jeune âge, à étouffer et à remplacer par une cruauté et une froideur que personne ne devrait être en droit d'exiger d'un enfant.

L'ombre d'un homme immense était soudain apparue devant lui, faisant naître par sa simple apparition l'angoisse et l'insécurité. Ni sa beauté admirable, ni son calme inquiétant ne parvenaient à étouffer la haine honteuse et contre nature que Giorno nourrissait à son égard. N'était-il pas son père ? Ne devait-il pas plutôt l'aimer ?

- Regarde cette belle et innocente créature. Est-ce que tu sens sa vie reposer entre tes mains. Sa chaleur. Les battements de son cœur ?

Le regard de son géniteur était perçant, impénétrable, et sa voix posée ne parvenait pas à dissimuler ses inclinations perfides. Giorno avait la gorge sèche, mais il avait répondu comme l'homme le lui avait appris, cérémonieusement et sans hésitation :

- Oui père.

- L'as tu apprivoisé ? Crois-tu qu'il te fasse confiance ?

- Oui, il m'aime bien parce que je prends soin de lui.

Inconsciemment, ses mains avaient entouré plus sûrement le corps du petit lapin, comme pour le protéger.

- Et lui que t'apporte-t-il ?

- De l'affection ? avait-il hasardé instinctivement.

Un rire sans âme avait précédé la leçon paternelle.

- C'est chose inutile Giorno, tu n'en as pas besoin. Pour lui tu ne peux être qu'un prédateur, une menace.

- Mais pourquoi ? s'était-il exclamé sans oser véritablement exprimer son désaccord.

- Parce que tu es mon fils et que sur toi repose mon héritage et mon empire. Tu es prédisposé au pouvoir et pour le conserver, tu te dois d'être sans pitié. Avant tout, il faut que tu inspires la crainte. Tu peux à la rigueur rechercher l'admiration si tu le souhaites, mais l'amour et l'affection sont à bannir. Ne t'en remet pas à ces sentiments inutiles et trompeurs. Jamais. Ils sont vecteurs d'hésitation, des freins à l'ambition.

- C'est pour ça que vous n'aimez pas ma mère ?

La question qui lui avait échappé aurait pu être innocente ou naïve, mais elle ne l'était pas.

- Oui Giorno, ta mère est pour moi comme ce lapin : faible et sans intérêt. Sa vie m'appartient et ma seule satisfaction quand je la regarde est de me dire que si elle respire encore, c'est parce que je le lui permets.

- Mais... Moi j'aime ma mère et je la respecte.

- Ca Giorno, c'est parce qu'elle ta mise au monde. C'est parce que tu lui dois la vie. Mais je vais te donner un conseil. À l'avenir, arrange-toi pour ne rien devoir à personne. Tu es de mon sang et en conséquence tu es un être supérieur. Tu ne dois rien, à personne. Ce sont les autres qui te doivent une absolue dévotion. Tu comprends mon fils ?

- Oui père.

- Bien. Maintenant je veux que tu tues ce lapin. Que tes mains s'imprègnent de sa peur pour que désormais tout autre petit animal oisif qui croisera ta route, reconnaisse en toi le plus haut maillon de la chaîne alimentaire.

- Mais père... je... je ne sais pas comment faire pour le tuer...

- Et pourtant Giorno, il n'y a rien de plus simple que d'enrayer le mécanisme d'un corps pour que la vie s'en échappe. Tuer ce lapin est un véritable jeu d'enfant. Tu peux le faire rapidement en tordant son petit cou. Tu devras y mettre assez de force pour sentir ses os se rompre sous tes doigts. Ce sera presque sans douleur pour lui, tout s'arrêtera en un claquement de doigt, sans même qu'il n'ait le temps de réaliser qu'il vient de basculer de vie à trépas. Tu peux aussi le faire souffrir, le cogner avec mesure ou lui ouvrir la chair, à tel point que la mort lui semblera être une délivrance préférable à la douleur que tu lui infliges. Si tu prends ton temps, si tu observes ses réactions, tu pourras le sentir se débattre entre tes mains pour sa survie. Et quand il comprendra que tu es le plus fort, tu pourras voir dans son œil terrorisé, son humble résignation face à ta supériorité.

Plus son père parlait dans une emphase délétère, plus Giorno devait lutter pour contenir les tremblements qui assaillaient ses épaules et son dos.

- Je... je ne me sens pas capable... Je n'en ai pas envie ! avait-il essayé de s'insurger.

- Tu es encore faible mon fils. Si tu exposes ainsi tes faiblesses, ne doute pas que l'on s'en servira contre toi. Tu dis que tu aimes ta mère. Alors qui préfères tu entre elle et ce lapin ?

- Ma mère !

- Alors tue cet animal ou ce soir, je la ferai hurler de douleur et ce sera ta faute Giorno !

L'exemple suivait toujours la leçon. Son père était en train de lui montrer comment il pouvait en effet retourner ses faiblesses contre lui. La menace, bien qu'abjecte était habile. Dans un renversement irrationnel des valeurs, tuer ce lapin équivalait désormais à protéger sa mère. Alors, les mains tremblantes, il essaya de trouver la volonté de satisfaire à la cruauté paternelle. Et devant l'hésitation qui tardait à le quitter, son géniteur gronda :

- Obéis Giorno ! Maintenant !

Déterminé, poussé à bout, Giorno resserra ses doigts autour de la nuque minuscule. Pourtant, son corps refusait de violenter le lapin, il avait si peur de lui faire du mal. Alors sans réfléchir, il lui pressa le museau sur son cœur et se contenta de le serrer contre lui pour le maintenir dans une étouffante étreinte. C'était comme lui faire un dernier câlin, affectueux et mortel à la fois. Les yeux résolument fermés, les paupières et les membres crispés, il attendit que le petit animal cesse de gigoter et ce laps de temps lui parut interminable. Puis, quand il sentit que le lapin blanc n'était plus qu'un poids mort entre ses mains, il rouvrit les yeux. Et en regardant le petit corps sans vie qui gisait entre ses paumes, il ne put ravaler ses larmes.

Indifférent à la peine et à la culpabilité qui rongeait son fils, le paternel se contenta de lui annoncer froidement :

- Tu ferais bien de t'y habituer. Désormais, chaque jour, je te regarderais prendre la vie d'un animal. Et arrivera le moment où tu découvriras que tuer un homme, n'est pas si différent. Tu verras Giorno, un jour, ôter la vie te semblera être une seconde nature et crois-moi mon fils, tu y prendras du plaisir.

Accablé, Giorno ne l'écoutait plus, comme si ses paroles venimeuses, se perdaient au loin. Il laissa échapper la dépouille du petit animal qui tomba lourdement sur le sol. Sa chute résonna dans son crâne comme au ralenti, faisant bourdonner ses tempes. Le ciel s'obscurcit, la terre se mit à trembler et un gouffre noir s'ouvrit sous ses pieds. Et précédé de l'animal mort, il sombra dans les ténébreuses entrailles de ce trou béant.

Comme dans Alice, le lapin blanc avait ouvert la voie d'un passage souterrain, mais ce n'était pas celui qui menait au pays des merveilles. C'était le chemin vertigineux de sa propre descente aux enfers.


Bon, ce n'est pas un chapitre des plus joyeux. Et le cauchemar est loin d'être fini, il nous reste encore trois cercles de l'enfer de Giorno à parcourir dans le prochain chapitre. J'espère que vous ne m'en voulais pas trop de vous avoir fait assister à la mort du petit lapin blanc. Ce souvenir me semblait nécessaire pour amorcer le cauchemar et ainsi approfondir le personnage de Giorno.

Dites-moi ce que vous avez pensé de cette scène et aussi du paternel ? J'ai vraiment essayé d'en faire un homme mauvais, dont le sadisme et la soif de domination confinent à la folie. (Si ça peut vous rassurer sachez qu'au moment de l'intrigue de Captive, il est déjà mort, néanmoins à de faibles doses, on continuera à entendre parler de lui et de son penchant pour le mal). Je précise par ailleurs pour les fans de Jojo bizarre adventure qu'il m'a été inspiré de Dio qui dans le manga n'est autre que le père de Giorno.

Sur ce je vous dis à bientôt. ^^

Prenez soin de vous. <3 

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