La paix après le chaos. Tout est calme. Plus rien ne bouge. La vie est réglée comme sur du papier à musique. Il n'y a plus ni vol, ni crime.
Nous sommes à l'ère ▲ ■ ●.

Julien regarde par la fenêtre. Le soleil de printemps commence à briller, timide. Il aperçoit, en bas de l'immeuble, la petite fourmilière de la société. Les voitures roulent au pas réglementaire. Un groupe d'adolescents passe, le portable à la main. Sans aucun bruit. Julien détourne le regard et se replonge dans les mathématiques. A vingt ans, le destin du jeune homme est déjà tracé. Il deviendra ingénieur. Le garçon se passe une main sur la nuque. Il la sent. La petite bosse, aussi grande qu'une tête d'épingle. Il sent l'œil fixé sur lui. Il souffle, se lève d'un bond. Il étouffe.
Il se penche à la fenêtre et avale plusieurs goulées d'air frais avant que le rythme cardiaque ne redescende. Le soleil joue sur les feuilles vertes à peine écloses. Il ferme les yeux, s'évade dans cet imaginaire, le seul endroit où il peut encore être libre. Il rêve d'un autre monde. Celui que d'autres ont vécu. Un monde où la violence existe, oui, mais aussi où on est libre de choisir un rêve, une vie. De se marier avec qui on veut, et d'avoir les enfants que l'on veut.
La main de Julien tremble.
Il la sent. Elle palpite dans la nuque. Doucement, mais fermement, elle lui rappelle qu'elle existe. Alors, il s'évade encore plus loin dans un monde où on est libre. Où on ne nous surveille pas. Dans un monde où cette petite capsule n'existe pas... encore.