19 juillet 2424 - L'archipel de Scilly.

Rùnda.

- Lyzé, raconte-moi l'histoire de la cité des livres !

- Très bien Rùnda. Mais ensuite il faut que tu dormes.

- Promis !

- Il était une fois, lors d'une nuit d'été, un jeune homme qui rêvait de liberté. Sans cesse plongé dans ses livres, il ne relevait la tête que pour observer les étoiles à sa fenêtre.
En lisant son dernier livre adoré, il s'imaginait ailleurs que chez lui. Il rêvait éveillé de cette île, ce cet endroit spécial où l'on se passe de permissions. Puis un jour, il s'endormit le livre entre les mains et se réveilla quelques temps plus tard, dérangé par une lumière bien plus vive que celle qu'il avait dans sa chambre.
Il n'en croyait pas ses yeux. Il était sur cette île, la cité des livres...

- Mais Lyzé, comment c'est possible ?

- Rùnda...

- Pardon, j'écoute j'écoute !

- Il était si heureux d'être dans la cité qu'il laissa son livre pour découvrir le lieu. Il passa d'un bâtiment à l'autre et fit la connaissance d'autres rêveurs, comme lui. C'était bien plus qu'une cité sans loi, c'était également un endroit rempli de bibliothèques merveilleuses ! Il se mit à lire tous les ouvrages qu'il trouva, puis un jour, après un long moment, il retomba sur son livre préféré... Il n'en voulait plus. Tu sais pourquoi Rùnda ?

- Mmh, non...

- Alors qu'attends-tu pour y réfléchir en  t'endormant ?

...

- Rúnda, tu m'entends mon petit ?

- Qu'est-ce que...

- Non, ne bouge pas. Tu es à l'infirmerie. Tu as fait un malaise.

J'ouvre les yeux et en effet, je suis allongé sur le lit de l'infirmerie avec une femme Minotaure penchée au-dessus de moi.

Ses gros yeux me fixent et son mufle remue au rythme de sa respiration.

Je crois que j'ai sous-estimer l'effet de la pluie sur mon organisme...
Je me sens vide et je suis incapable de faire le moindre geste.

Les derniers événements me reviennent en mémoire et je grimace en sentant une larme roulée sur ma joue.

Gallia...

- Rúnda, tu te sens mieux ?

Je renifle et tourne la tête vers la porte d'entrée de la pièce carrelée et jaunie par le temps.
C'est Cleite et ses deux copines.
Je me demande si elles sont au courant, si elles savent pour Gallia.

En croisant le regard fatigué de Cleite, la culpabilité me tord le ventre. Elle était venu me voir aujourd'hui, pour me dire que Gallia avait des problèmes. J'aurai dû agir, le voir et peut-être que...

- Je crois... Je murmure.

- Loroï t'as trouvé inconscient dans les escaliers. Il s'est passé quoi ? Pourquoi tu étais à l'intérieur ? Commence Cleite en replaçant une petite bûche dans le poêle à bois près de mon lit.

Donc, elles ne sont pas au courant.
Ça ne m'étonne pas...

- La cornue... Je commence, mais Amethyst et Lúbtha interviennent en même temps.

- Tu avais déjà l'air bizarre quand je t'ai croisé tout à l'heure dans la cour... Tu as vu quelque chose ?

- Tu sais pourquoi l'alarme s'est déclenchée ? T'étais ou durant le comptage ?

Je fronce les sourcils face à cette avalanche de questions.
Mon cerveau tourne au ralenti et j'ai l'estomac encore tout retourné par la scène devant la bibliothèque.

- Les filles, allez-y doucement. Soupire l'infirmière en plaçant un sceau rempli de charbon de bois encore fumant au pied de ma couchette.

- C'est Gallia... Je chuchote aux filles.

- Quoi Gallia ? Il s'est encore fait isolé au sous-sol ? Râle Cleite en croisant les bras avec un air renfrogné.

Comment lui dire ?
Comment expliquer que son petit protégé s'est fait tué ?
Et puis... Par qui d'ailleurs ?

- Rúnda ? T'es toujours avec nous ?? S'impatiente Amethyst en secouant sa main marron devant mes yeux, les siens ne cachant pas son agacement.

Je souffle, prêt à annoncer la mauvaise nouvelle mais je suis devancé par l'infirmière.

- Il a été retrouvé devant la bibliothèque, mort. Le chef Loroï pense que c'est un accident.

- Un accident ?? Je dévisage la femme taureau en serrant les dents.

Alors que la colère me redonne assez d'énergie pour me redresser, les filles elles, se sont figées suite à l'annonce.
Cleite s'est mise une main devant la bouche, les yeux déjà embués et Amethyst a pris la même teinte que Lúbtha...

- Il est mort ? Sanglote Cleite en me fixant, son visage se recouvrant de larmes.

Je hoche la tête peiné en fixant mes mains.

La porte s'ouvre à nouveau et Loroï débarque avec trois autres gardes sur ses talons. 
En le voyant, je sors du lit pour avoir une réelle explication mais je m'arrête une fois debout.

Je suis nu.

- La chambre 20, dehors sur le champ !!! Cri l'infirmière en s'adressant aux trois filles qui n'ont rien le temps de dire.

- Loroï, comment tu peux dire que c'est un accident ?? Gallia était en petits morceaux !!!! Je gueule en me rhabillant avec énergie.

- Rúnda du calme ! Il envoi son poing contre le mur.

Je me tais, la mâchoire serrée et le corps en ébullition.
Je suis en colère et cette fois, j'ai retrouvé mes forces.
Il ne me fera pas taire aussi facilement.

- Ce qu'il s'est passé est triste, je suis d'accord, c'est horrible mais c'est ainsi. Il s'est battu contre un garde et les choses ont...

- Il s'est fait exterminé !! Je vocifère en sentant des flammèches bleues apparaîtrent autour de mes mains.

- Hé reste tranquille microbe. Me crache le garde qui m'a découvert plus tôt dans le hall.

- Vous comptez faire quoi ? Dire aux Uncleans qu'il s'est juste fait tué, par accident ? Comme ça, sans plus d'explications ? Je plonge mon regard dans celui de Loroï qui reste étonnement calme.

Une telle atrocité ne peut laisser personne de marbre...
Tout à l'heure, il fixait la scène avec une aisance effrayante, comme si cette scène était habituelle.

- C'est vous qui l'avez tué ? Je demande enfin, la paume ouverte et une boule de feu dansant dangereusement dans sa direction.

Je veux des réponses ! Son excuse de simple bagarre ne marchera pas ! Gallia avait raison, les Minotaures cachent des choses et ça n'augure rien de bon.

- Il suffit. Siffle Loroï en secouant la tête.

Je n'arrive plus à bouger...
Qu'a-t-il fait ?
Il vient d'utiliser sa capacité sur moi ?
J'ai besoin d'aide.

×××

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