Lettre de désespoir

Bonjour, ce texte est issu d'un rêve que j'ai fait. Il est assez triste, mais il ne contient pas de contenu choquant explicit. Pour une fois, j'ai utilisé de nombreuses métaphores. J'espère que ce texte saura vous émouvoir ! Bonne lecture !

Cher journal, c'est comme ça que toutes les histoires intimes commencent, n'est-ce pas ? Pourtant, cela me met mal à l'aise. On devrait écrire ses états d'âme parce qu'on le désire et non parce qu'on nous y a forcé. Mais bon, c'est soit ça soit je suis considérée folle par mes parents. Parents qui sont persuadés que je vais mal depuis que je refuse presque de m'alimenter. Ils n'ont pas tort de s'inquiéter, mais ce n'est pas à un papier inanimé que je vais parler de tout ça....Alors quoi en parler à des humains ? Hors de question, je veux que personne ne le sache. Même s'il s'agit d'une personne tenue par le secret professionnel. Bon, j'ai peut-être une idée pour m'accommoder à cette situation. Je vais te nommer, tu seras...Alicia. Ce n'est pas un journal, mais à Alicia que je parle. Alicia serait une jeune fille de mon âge, rousse, les cheveux ondulés et qui aurait de magnifiques yeux bleus. Le reste de ses formes m'intéressent peu, ce sera à elle de choisir. Cette amie ne me parle jamais, mais elle est toujours à l'écoute. Je vais donc tout lui dire....

Alicia, on me dit que je suis malheureuse. Hélas, je crains que ce soit vrai. J'ai l'impression d'aller bien, mais ça devient de plus en plus un mensonge qui me permet de subsister. Je recherche une sécurité dans cette routine qui dirige mes jours. J'ai peur, j'ai peur d'en parler Alicia. Je sais que c'est débile, mais j'ai peur de partager mon malheur. J'ai peur de me confier et de voir simplement le reste de mon âme se briser en mille morceaux. Je suis effrayée de me dévoiler et de découvrir que je ne suis plus qu'une coquille vide. J'ai peur qu'il m'ait volé tout ce qui me faisait sourire. Je crains qu'il ait pris un bout de mon âme ce soir-là. Et ça me hante. Je crois que ça me ronge petit à petit même si je ne veux pas me l'avouer. Je crois que je ne pourrais jamais accepter ce qu'il m'est arrivé. Le pire, c'est que j'ignore si je suis plus affectée par l'acte ou par la personne qui l'a commis. Il m'a trahie...et je n'arrive pas à m'en remettre.

Pour que tu comprennes tout Alicia, je vais te remettre dans le contexte. Imagine une jeune femme de dix-sept ans, animée de rêves et d'espoirs. Cette jeune fille a été belle sans être non plus une beauté fatale. Elle a des cheveux bruns et bouclés, une peau de couleur caramel et des yeux noisette qui deviennent verts au soleil. De taille moyenne, elle n'a pas trop de formes et elle est plutôt maigre. Pourtant, elle attire le monde comme le miel attire les abeilles. Si elle est tant entourée, admirée et jalousée, c'est grâce à son esprit et à son sourire. Aimable, altruiste, elle est toujours prête à aider ceux qui en ont besoin. Pour autant, elle ne supporte pas que l'on profite de sa gentillesse et sait se faire respecter. Fiable et loyale, elle est une bonne oreille pour ses amis qu'ils soient filles ou garçons. Elle est tellement adorable que sa maladresse et ses autres défauts sont largement excusables. Elle parle un peu fort et rit pour un rien aux éclats. C'est un véritable rayon de soleil qui ne demande qu'à éclairer son entourage. Jusqu'à ce que l'on brise cette boule de feu et d'énergie.

Pour elle, ça a juste été un soir comme les autres. Je sais, je devrais lui donner un prénom. Sauf que son prénom est le mien et je ne veux pas que ce soit réel. Je ne l'accepte toujours pas, je veux juste l'oublier et laisser ce cauchemar derrière moi une bonne fois pour toutes. Apparemment, mon corps n'est pas d'accord vu qu'il me fait subir un stupide choc post traumatique. Enfin bref, je suis désolée Alicia, mais je ne veux pas nommer cette jeune fille. Je veux qu'elle reste aussi abstraite que cette histoire. Et quelque part, je rêve qu'elle disparaisse et que ce traumatisme l'accompagne dans les ténèbres. Enfin bref, tu n'es pas là pour subir mes divagations. Je te propose plutôt de reprendre là où je me suis arrêtée. Cet effroyable moment qui a fait basculer la vie tranquille de cette jeune fille sans histoire.

C'est donc une soirée comme les autres. Une rude soirée d'hiver. Comme à son habitude, elle traîne un peu dans les vestiaires car elle attend son amie qui a encore une heure de sport à subir. Assise sur un des bancs, elle voit son meilleur ami approcher. Son ami est un beau jeune homme qui la dépasse de deux têtes. Il est musclé car il entretient son corps, c'est même un véritable athlète. Des cheveux bruns courts, une mâchoire carrée et des yeux aussi purs et argentés que des diamants, il a tout pour faire tomber les filles sous son charme. Sauf cette jeune fille, pour elle, ce n'est que son ami et il le restera toujours. Elle se lève donc naturellement et lui sourit comme à son habitude. Elle ne remarque pas qu'il ferme la porte derrière lui car pour elle, c'est un geste banal qui ne susciterait aucune méfiance. Du moins pas avec lui. Ils parlent alors de tout et de rien jusqu'à ce qu'il évoque sa vie sentimentale. Attentive comme toujours, elle ne comprend pas réellement ce qu'il tente de lui dire. Elle tente de le soutenir comme elle peut et essaie de trouver les mots justes pour ne pas le froisser. Le plus important est de lui faire comprendre le message, mais elle ne veut pas lui faire de mal.

Empli de douceur, il s'abandonne alors totalement à elle. Différent, il dévoile une facette de sa personnalité qu'il n'a jamais montré auparavant. L'ami docile et calme devient un véritable prédateur. Sans qu'elle ne puisse l'expliquer, elle se fait emprisonner par ses griffes acérées. Elle tente de s'en défaire par tous les moyens, mais sa prise est trop robuste. Elle tente de crier de désespoir pour attirer quelqu'un. Hélas, sa voix semble emprisonnée dans cette cage d'émotions qui se bousculent dans sa tête.

Rage, désespoir, trahison, rancœur, dégoût, tristesse : tels ont été ceux qui se sont distingués parmi les sanglots qui ont afflué le long de son visage. Désarmée face à ce griffon redoutable, elle n'a pu résister que quelques instants avant de mourir entre ses bras. Ses crocs se sont enfoncés dans sa chair et dans un regard priant pour qu'il la lâche, il finit par totalement la détruire. Il a volé sa vie sans aucun scrupule. Au contraire, il s'est délecté de sa proie et de l'agonie qu'il lui a fait subir. Il n'a pas hésité à clamer son triomphe dans cette salle où personne n'est accouru pour sauver la belle en détresse. Il l'a poignardé encore et encore pendant plusieurs secondes jusqu'à ce qu'il voie son cœur réduit en mille morceaux. Il l'a déchiquetée et s'est délecté de sa chair avant de l'abandonner tel un vulgaire déchet. Il ne lui accorde aucun regard. Il ne s'attarde pas sur ce repas dont il vient de pleinement profiter. Il la laisse choir là sans se préoccuper de son sort.

Elle se retrouve donc seule, moitié morte, moitié vive. Elle ne sait que faire, elle reste hagarde, les yeux dans le vague. Elle aimerait se venger de ce supplice qu'il lui a fait endurer, mais elle n'en a pas la force. Elle aimerait juste se cacher, s'enterrer six pieds sous terre et ne jamais reparaître. Disparaître dans le noir pour ne devenir plus qu'une ombre qui pourrait s'échapper et se muer discrètement dans l'obscurité. Elle ne voudrait pas à avoir à se sentir si vide. Se sentir si sale alors que nulle crasse visible ne parcourt son corps. Elle ne parvient à se mouvoir que lorsqu'elle entend quelques agitations se rapprocher du lieu de son crime. Elle fuit alors sous les douches et allume de l'eau pour dissimuler ses pleurs. Elle n'en est sortie qu'au bout de longues heures, ce qui lui a valu une pluie de questions de la part de son amie. Hélas, seul le silence a répondu à cette curiosité mal placée.

Quand elle se retrouve enfin chez elle, elle s'enferme dans sa chambre. Roulée en boule sur son lit, elle ne cesse de se demander pourquoi cette horreur lui est arrivée. Elle se demande pourquoi lui à qui elle a fait tant confiance. Pourquoi ce jeune homme qu'elle a aimé comme un frère lui a-t-il volé tout honneur et toute joie de vivre ? Pourquoi lui a-t-il fait endurer un tel calvaire ? Que lui a-t-elle fait de mal ?

Tant de questions sans réponses. Elle pourrait aller le voir pour les lui poser. Ce qui a été au-desus de ses forces. Elle n'a même pas supporté de le regarder dans les yeux par peur que cette bête ne fonde de nouveau sur elle. Dès qu'elle s'en est rendue compte, elle a tout fait pour l'éviter sans que ça ne paraisse trop suspect. Elle ne s'est jamais remise de ce soir funeste, mais elle fait semblant. Elle ne peut pas s'effondrer. Elle ne veut pas laisser ce monstre de cruauté gagner. Elle veut avoir l'air plus forte. Elle veut surpasser ce traumatisme et aller de l'avant même si elle ne sera plus jamais la même. Elle veut juste ne pas se faire détruire par une atroce impulsion de cette vile créature. Elle ne veut pas se laisser briser même si c'est dur de faire comme si rien ne s'était passé. Pourtant, elle s'accroche à sa volonté de fer. Elle refuse de céder avant de voir son ennemi répondre de ses actes. Elle ne se serait jamais douté qu'il se punisse lui-même.

Il ne lui a fallu que quelques mois pour céder. Un beau matin d'avril, elle a cru pouvoir renaître, mais rien n'est si simple dans la vie. Ce matin du 15 avril, il fait beau et chaud. Elle porte un léger pull et un jean. Comme à son habitude, elle sourit à son entourage pour que personne ne se doute de son malheur. A dix heures trente, tous quittent la salle de cour pour prendre un peu de repos. Avant même qu'elle ne sorte complètement dehors, elle entend des cris d'horreur et des sanglots effrénées. Elle entend que l'on crie à la mort. Rapidement, elle comprend que quelqu'un a mis fin à ses jours, mais elle ne sait pas qui. Elle pousse comme elle peut les élèves qui l'empêchent de voir le visage du misérable cadavre. Une fois qu'elle a la vue dégagée, elle se fige pendant un instant. C'est lui. Par réflexe, elle pousse un soupir de soulagement.

Frénétiquement, elle se met à pleurer. Ce qui est normal vu que tout le monde fond en sanglot. Contrairement à la foule, elle pleure de joie, elle se sent libre. Au risque d'être affreuse, elle a l'impression qu'il a reçu la leçon qu'il a tant méritée. Elle se dit qu'il existe une justice dans ce monde. Elle est persuadée que tout ça soit derrière elle et qu'elle pourra tourner la page. Pourtant, tout n'est pas si simple. Pour le coup, elle s'en fiche. Elle savoure sa victoire. Ce n'est pas elle qui a cédé en premier. Il a sûrement été rongé par le poids de la culpabilité tandis qu'elle a été consumée par la honte et l'incompréhension. Pourtant, elle a été plus forte que lui. Et en voyant sa dépouille orner le sol et l'inonder d'hémoglobine, elle se sent fière.

Fière de voir le monstre trépasser alors qu'elle respire encore. Son cœur bat fortement dans sa poitrine alors qu'elle regarde fixement cette dépouille que l'on tarde tant à recueillir. Elle se sent horrible, mais elle pense qu'il l'a mérité. Il mérite de connaître ce tragique sort. De ne voir sa carcasse n'être relevée qu'au bout de longues minutes, de sécuriser le périmètre et que l'on nettoie son sang pour faire comme si rien ne s'était passé. Hélas, ils ont tous eu droit à une longue thérapie et elle en fait partie. Son comportement a alerté ses parents qui ont cru qu'elle a agi comme ça à cause de la perte de son meilleur ami. Alors que son comportement si triste ne reflète que les derniers instants de son supplice. Ses parents se sont sentis coupables de ne pas avoir fait plus attention à elle. Ils ont cru que sa dépression a été comme un présage de la fin tragique de son acolyte. Comme si elle savait les tourments qu'il a dû traverser avant de commettre cet ultime acte de désespoir. Elle ne les a pas démenties. Cela lui parait plus simple que de leur expliquer ce qu'elle a subi. C'est plus flatteur et ça la fait passer pour une personne altruiste au lieu de dévoiler sa faiblesse et son incapacité à se protéger. Malheureusement pour elle, tout mensonge a ses conséquences.

Ses parents n'ont pas été les seuls à se convaicnre qu'elle a été proche de cet adolescent jusqu'à sa fin. Les géniteurs de cet odieux personnage pensent aussi qu'elle lui voue un amour fraternel sans bornes. Si seulement ils savaient tout le mépris qu'elle lui prodigue. A ses yeux, il est décédé bien avant son suicide. Sauf que personne ne connaît cette vérité. Mis à part toi, Alicia, personne ne connait le terrible secret que cette jeune femme dissimule. C'est pour cela qu'elle a été conviée à son enterrement. Cela se tiendra le dernier jour du mois d'avril. Et tout le monde souhaite sa présence. Ce serait bizarre qu'elle n'y aille pas.

Tous s'attendent à ce qu'elle vienne lui offrir un dernier hommage alors qu'elle cherche un stratagème pour échapper à cette dernière offense. Même dans la mort, il la fait souffrir. C'est vraiment une enflure ! Elle pense à tout dévoiler, mais elle pense que ce serait au-dessus de ses forces. Elle a tenté de faire passer son chagrin pour cause de son absence, mais ses géniteurs lui ont assuré que cela l'aiderait à tourner la page. Elle a donc cherché un autre moyen pour échapper à cette ultime torture. Tout la condamne à y assister alors qu'elle voudrait tant manquer cette oraison funèbre. Elle devrait sûrement prendre la patole car elle a été proche de la victime. Elle pourrait alors dévoiler ses méfaits sans totalement dévoiler ce qu'il a fait. Elle pourrait...Non, je pourrais faire des sous-entendus.

Moi, Elina, je pourrais me défaire de tout ça une fois pour toutes. Je pourrais utiliser ma voix pour exprimer tout le mal qu'il a dissimulé à la face du monde. Je ne suis peut-être pas la seule qu'il a blessé. Au fond, je l'espère car ce serait désolant que d'autres aient subi cela. Mais si elles se sont également tues, personne ne peut savoir ce qu'elles endurent. Je vais donc m'y rendre pour que ce fardeau se brise et que le poids qui écrase leurs cœurs s'évaporent. Peu importe si je passe pour une folle, j'ai besoin de cracher sur lui une dernière fois.

C'est pour ça que je décide finalement de m'y rendre. Etonnamment, il y a beaucoup de brouillard comme pour me dissuader de le faire. Ce qui est trop tard. Je suis résolue à le faire et rien ne pourra me faire changer d'avis. Je cesserai de mentir et je dénoncerai ce qu'il a été de son vivant : une bête assoiffée de sang et de vice. Une bête qui a détruit plus d'une vie. Une créature obscure qui a failli me détruire. Ils doivent le savoir, je ne peux me taire plus longtemps.

Quand la voiture de mes parents s'arrête sur le parking menant au cimetière je sens mon cœur battre à toute allure dans ma poitrine. Je sens mes membres trembler, mais je ne compte pas me laisser abattre par ma nervosité. Je ne compte pas abandonner si près du but. Ce serait une injure envers moi-même et le drame que j'ai vécu. Je profite du sermon du prêtre et de tous les hommages portés à son encontre pour m'apaiser. Toutes les louanges qui lui sont portées me donnent envie de vomir. Je ne sais pourquoi, mais j'ai la désagréable impression que la plupart ne sont pas sincères. Je ne ferais pas preuve de la même lâcheté. Je ne suis pas là pour encenser ce monstre qui a failli me broyer. Je suis là pour une raison et je ne compte pas plier.

Néanmoins, un doute inexorable me saisit lorsqu'on me demande si je souhaite prendre la parole. Je ne doute pas de mes intentions et je n'ai pas besoin de ça pour aller mieux. Sa mort a suffi à me faire renaître. Je crains que parler ainsi d'un macchabé ne fasse qu'accentuer le malheur de ses proches. Pendant quelques secondes, je pense à refuser de parler, mais je me ressaisis. Si je ne le fais pas, personne ne le fera. Personne dans cette assemblée ne semble avoir assez de cran pour le faire. C'est donc à moi que revient cette basse besogne. La tête levée, je m'avance jusqu'à cette fichue estrade. Prenant une grande inspiration, je me râcle la gorge avant de prendre la parole d'une voix déterminée :

« Bonjour à toutes et à tous. Je suis Elina Dirdolf et je viens pour rétablir la vérité sur le défunt Harry Windle. Pendant plusieurs minutes, j'ai entendu plusieurs éloges dépeindre cet ami ou ce fils perdu. Je tiens à adresser mes plus sincères hommages à Monsieur et Madame Windle pour tout ce qu'ils ont vécu depuis la perte de leur enfant. Personne ne devrait connaître la souffrance de perdre un enfant. Même quand ce dernier est un monstre. Oui, j'ai bien dit que Harry était un monstre. Contrairement au héros que tout le monde s'est efforcé de dépeindre, je tiens à rappeler les vices dont il était emprunt. Certes, il pouvait être un bon fils, un bon ami et un bon confident, mais il n'était pas que ça. C'était aussi une créature obscure qui était mortifère. Je ne vous dirais pas ce qu'il m'a fait, cela ne regarde que nous deux. Mais je me dois de rappeler qu'il était empli de travers qui expliquent ce suicide. Son suicide est sûrement la dernière bonne action qu'il a commis en ce monde. Il nous a délivré de ce mal qu'il a causé. Je suis convaincue que certaines personnes savent de quoi je parle, mais peut-être n'est-ce pas le cas de tout le monde.

Je vais donc mieux vous l'expliquer. Avant qu'il ne me fasse du mal, Harry était mon meilleur ami. Pourtant, il m'a brisée. Je ne l'ai pas digéré pendant plusieurs mois. Il m'a tellement brisée que j'ai pensé à faire ce qu'il a fait. J'ai plusieurs fois pensé mettre fin à mes jours, j'ai cru que ça mettrait fin à tout ça. Mais ça ne pourrait pas effacer ce qu'il m'a fait. Je ne sais pas comment bien l'expliquer à des inconnus...Alors sachez ceci, j'ai été soulagée en voyant son cadavre. J'ai été soulagée car j'ai su qu'il ne me ferait plus de mal et qu'il ne blesserait plus personne d'autre. Malgré tout, j'espère qu'il repose en paix car une partie de moi lui a pardonné. Cependant, ce serait une insulte envers moi-même si je souriais et que je faisais semblant de dépeindre un jeune homme parfait qui avait toute la vie devant lui.

Oui, il avait toute la vie devant lui, mais il était loin d'être parfait. Il a sûrement fait souffrir de nombreuses âmes naïves et il aurait pu en faire souffrir bien d'autres s'il avait continué à vivre. C'est pour ça que son trépas me rassure. Je suis désormais certaine qu'il ne pourra plus briser personne. Il ne pourra plus décevoir ceux qui s'attachent à lui et qui découvrent sa noirceur. Je ne suis pas stupide, je sais qu'il a dissimulé ses mauvaises intentions derrière un masque de bienveillance.

C'était le mal à l'état pur et il a mis fin à ses jours. Alors peu importe à quel point c'est tragique, je suis soulagée que ce soit lui et non moi qui ait trépassé. Cela me permet de faire ce témoignage. Cela me permet de vous dire de vous méfier de votre entourage car ceux à qui vous faîtes confiance peuvent à tout moment vous trahir. Et ça fait un mal de chien. C'est comme si on vous arrachait le cœur et qu'on le brisait devant vos yeux. C'est ce que j'ai ressenti ce soir-là. Hormis la honte et la rancœur, je lui en aie surtout voulu car c'était mon ami. Il aurait dû être là pour m'aimer et m'aider jusqu'à nos vieux jours. Au lieu de ça, il outrepassé ma pudeur et m'a détruite. A cause de lui, j'ai failli me terrer dans le silence à jamais. A cause de lui, c'est une vie innocente qui a failli sombrer pour toujours.

Alors, aussi injuriant que cela puisse vous paraître, je le remercie. Je lui suis reconnaissante de s'être ôté la vie avant que je ne le fasse. Grâce à ce dernier acte de courage, je peux mettre cela derrière moi. Je peux enfin aller de l'avant et vivre ma vie. Jamais je n'oublierai l'ami qu'il a été pour moi. Mais jamais je n'oublierai qu'il a été mon bourreau. Je l'aime autant que je le déteste. Et malgré tout ce qu'il a pu me faire, je pense qu'un jour, je pourrais totalement lui pardonner ce qu'il m'a fait. En attendant ce jour, je témoigne mon soutien à sa famille. Et j'espère que ses péchés seront pardonné par Dieu. Je pense qu'il le mérite. Merci pour votre attention. ».

Une fois que j'ai accompli ma mission, je fuis littéralement ce cimetière. Je n'ai pas le courage de supporter tous ces regards de stupéfaction et d'effroi face à mon manque de respect envers le défunt. Je pense que j'ai bien fait e dire tout ça car ça m'aidera. Après tout, un enterrement est avant tout fait pour aider les proches à surmonter cette perte. Il m'a permis de surmonter une perte : celle de mon innocence. Il a failli me voler ma vie, mais son décès m'a permis de retrouver celle-ci. Une fois enfermée dans la voiture de mes parents, je laisse mes larmes rouler le long de mes joues en attendant qu'ils viennent. A leur retour, j'attends qu'ils me sermonnent, mais ils restent étrangement silencieux comme s'ils avaient compris. Cela m'arrange. Une fois que je me retrouve dans ma chambre, je m'allonge sur mon lit et soupire une dernière fois avant de fermer les yeux. Sombrant peu à peu dans l'inconscience, je retiens une dernière prière à son attention. J'espère sincèrement qu'il aura droit à une rédemption.

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