52| Today I can't pretend
Noa Sparks
-Jasper?
Tous nos amis nous ont rejoint tandis que la foule et les clients retournent à leurs occupations. La musique reprend doucement avant de s'accélérer pour remettre tout le monde dans l'ambiance. Mais je suis encore bien trop chamboulée pour faire comme si de rien était. Mon ami reste un peu de côté alors que tous viennent s'échanger des étreintes, commandent des boissons et rattrapent le temps perdu l'espace de cette soirée. Alec n'aura pas besoin de quitter les lieux, ses paroles ont apparement autant émues les employés que moi... Et toute la foule.
Jasper se retourne et le regard qu'il m'accorde me peine un peu. J'y vois de douleur mais aussi de l'acceptation, comme si il était en plein conflit avec lui même; mais la sagesse reprend le dessus en lui faisant comprendre que le mieux à faire, que ce soit pour lui ou pour nous tous, est d'accepter.
-On aurait dû te le dire plus tôt. Ça nous aurait évité beaucoup de conflits.
Il déglutit et hoche la tête en évitant d'affronter mon regard, se frottant l'arrière de la nuque. C'est une habitude qu'il adopte quand il est mal à l'aise.
-Oui, peut-être mais... On ne peut pas revenir en arrière, pas vrai?
-J'espère que ça ne le soit pas, justement. Je veux revenir en arrière, je veux retrouver mon meilleur ami, dis-je sincèrement en m'éloignant de la foule à ses côtés.
Il me regarde avec soucis avant de sourire doucement.
-Tu sais Noa... C'est plus un secret, tu le savais comme à peu près tout le monde le savait. Tu me plaisais beaucoup. Et... Tout ça, ça m'a aidé à tourner la page. Mais il me faut encore un temps d'adaptation. J'espère que tu comprends.
-Je comprends tout à fait et... Je voudrais aussi m'excuser d'avoir été une amie horrible. Je n'ai pas accordé assez d'attention à tes sentiments. Jasper, t'es mon meilleur ami. Et tu le resteras toujours mais je n'ai jamais rien ressentis de plus. Peut-être que j'aurais dû avoir eu le courage de te le faire comprendre de façon plus efficace.
Il pose une main sur mon épaule et cherche mon regard pour le plonger dans le miens.
-Tu n'avais pas à faire ça. On ne contrôle pas ses sentiments, c'est Alec qui me l'a bien fait comprendre.
Je souris de plus belle avant de regarder sa main sur mon épaule et soupirer.
-Je ne mérite pas un ami comme toi.
-Tu mérites bien plus de choses que tu ne le crois Noa. Personne n'est parfait, on l'a tous compris durant ces deux mois. Mais tu sais quoi? On a tous appris à s'aimer avec nos qualités comme avec nos défauts, et c'est ça le plus important.
Je ne peux m'empêcher de l'enlacer subitement en l'attirant contre moi. Il enfui son visage dans mon cou alors que je ferme les yeux en profitant de son contact. Je murmure dans son cou de façon à ce qu'il puisse m'entendre.
-Tu trouveras quelqu'un qui t'aimes pour qui tu es, qui t'aimes sincèrement, qui te rendras tout l'amour que tu mérites, Jasper.
Il frotte mon dos avec douceur avant de rompre notre étreinte en me souriant.
-Merci Noa.
-Non, merci à toi, pour tout.
Une main se pose sur mon épaule, je sursaute alors que Jasper fait de même; nous nous tournons tous les deux vers Christopher qui nous sourit avec un air encourageant.
-Est-ce que ça veut dire qu'on va de nouveau jouer à Pac Man tous les trois au café en bas de notre rue en rentrant, tout en buvant du chocolat chaud à la noisette? Genre... Comme au bon vieux temps?
-Si le bon vieux temps était il y a deux mois, alors je suppose que oui, dis-je en me blotissant contre lui.
Il me sert fort à ses côtés avant de faire de même avec Jasper et nous nous tournons dans un même mouvement pour rejoindre les autres. Ils ont tous en main des verres de margaritas et certain regardent leur boisson comme si elle venait d'une autre planète.
-Non, sérieusement, c'est quoi ça? dit Spencer comme pour lui-même.
Alec, devant lui, porte le verre à son visage pour sentir.
-On dirait du produit vaisselle. Ça se boit?
-Non Alec, le produit vaisselle ne se boit pas. Je pensais que tu le savais, intervient Nate en fronçant les sourcils.
Les deux garçons éclatent de rire alors que Nate ne semble pas comprendre pourquoi. Pourtant il ne tarde pas à joindre son rire aux leurs. Je souris en les voyant à nouveau rire ensemble, tous les trois, comme si rien ne s'était jamais passé. En me retournant, je tombe nez à nez avec Mary. Elle porte entre ses mains, une margarita et un verre d'eau; elle me tend ce dernier.
-Tiens. Je préfère que tu boives de l'eau, histoire de conserver le souvenir de cette soirée dans ta mémoire pour le restant de ta vie avec le plus de détails possibles.
Je ris en acceptant le verre alors que mon amie me regarde avec un sourire sincère et ému, comme si je venais de lui annoncer une excellente nouvelle. Et là, deux bras enlacent ma taille; j'en lâcherais presque mon verre. Son odeur emplie mes poumons; une odeur fraiche de gel douche, maritime, mélangée à une pointe de citron et même de cannelle. Alec pose sa tête sur mon épaule en me tenant le dos contre son torse et je ne peux que me sentir comme si il m'approchait lors des tous premiers jours de notre relation. J'ai l'impression que le compteur est remi à zéro, qu'il me touche, qu'il m'embrasse pour la toute première fois.
-On rentrera bientôt? demande-t-il avant de déposer un léger baiser dans mon cou, s'adressant à Mary. J'ai envie de tous nous réunir à la villa. Toi et Denis pourrez prendre la chambre d'amis.
La brune hoche la tête en gloussant avant de s'éloigner en m'envoyant un clin d'oeil qui me fait rougir.
-Et pourquoi Mary ne dormirait pas avec moi cette nuit? je demande en me retournant dans ses bras pour lui faire face, posant mes mains sur son torse.
Il me regarde avec une tendresse qui me fait tressaillir; je ne pensais pas qu'autant de douceur et d'amour puisse passer dans un regard.
-Si tu penses te débarrasser de moi si facilement, tu te mets le doigt dans l'oeil.
Je me mordille la lèvre et l'attire à nouveau contre moi en enfuyant mon visage sur son torse, inspirant son odeur à plein poumons; jamais je ne m'en lasserai. Il m'avait tant manqué, à un tel point que je n'oserais le dire de vive voix. Que le temps s'écoule lentement quand notre coeur est brisé...
Il suffit d'une demi-heure à tout le monde pour terminer nos boissons et se serrer dans les voitures de Mary et Denis. Alec ne mentait pas; il ne compte plus me lacher. Assis à l'arrière de la voiture de mon amie en présence de Chrisopher qui occupe le siège passager, il me tient contre lui et passe tout le trajet, la tête posée sur la mienne tandis que je repose sur son épaule. Je voudrais que la route jusqu'à la villa soit plus longue.
Je voudrais qu'elle dure éternellement.
⁂
-Mais c'est incroyable! Qui va faire les courses pour cette maison? Un homme célibataire de quarante ans qui s'appelle Henry-Paul, qui jongle entre son boulot de concierge et le poker en ligne?
Nate s'active dans la cuisine en ouvrant tous les placards, secouant toutes les boites avant de les jeter à travers la pièce.
-Nop, c'est plutôt un étudiant célibataire qui a pas mal la flemme de cuisiner, s'exclame Spencer en se laissant tomber dans le canapé. Il reste de la bière dans le garage?
-Ça se voit! réplique le brun en levant deux boites de nouilles instantanées devant ses yeux pour les exposer à tout le monde. Si tu comptes garder la forme en mangeant ces crasses tout le temps je...
-Il reste des bières au garage? insiste Spencer en levant les yeux au ciel.
-Je vais voir, conclut Christopher en reculant pour éviter d'intervenir dans la conversation.
Alec saute sur un des fauteuils et tapote ses genoux en me regardant, m'invitant à le rejoindre. La fraîcheur de la nuit se fait ressentir; nous fermons les fenêtres et allumons la télévision. Évidemment, personne ne la regarde. Je me laisse glisser sur les genoux du bouclé alors qu'il attrape ma taille en me faisant changer de position. Soudain, le voilà allongé sur le fauteuil, les pieds sur l'accoudoir, me tenant fermement contre lui. Me laissant aller contre son torse, je lui permet de poser sur nous une fine couverture. Alors je ferme les yeux en écoutant son coeur battre, posant ma main dessus. Ses lèvres trouvent leur place dans mon cou, l'embrassant avec lenteur et sensualité. Je le laisse faire en laissant s'échapper un soupire d'aise presque inaudible. Il caresse mes bras, il me serre fort contre lui, il embrasse ma nuque, mes épaules... Et peu importe si nos amis nous entourent; nous ne nous cachons plus. D'une oreille distraite, j'écoute les conversations autour de nous tandis qu'Alec et moi ne faisons que profiter de la présence de l'autre.
-Je voudrais nous cuisiner quelque chose de végétarien, grommelle Nate. Peut-être un curry de légumes ou des pâtes aux noix et à la sauge...
La voix de Denis s'élève; je lève les yeux en ayant une bonne vue sur les deux garçons. Denis croise les bras en marchant derrière Nate, suivant chacun de ses faits et gestes.
-Moi aussi je suis végétarien! Ça va faire un mois, c'est tout nouveau.
-Oh! Pourquoi tu ne m'as pas dit ça?
Denis lui donne une petite tappe sur l'épaule en regardant en l'air, prenant un faux air vexé.
-Peut-être que tu le saurais si tu m'avais invité à diner quelque part.
-Je devrais faire ça? demande Nate en haussant les sourcils.
-À ton avis? Quelle question!
Il glousse en entraînant Nate dans un rire timide; je souris en me blotissant un peu plus contre Alec, déposant au passage un baisser le long de sa mâchoire. Sa main trouve mes cheveux en se perdant dedans; je suis tout simplement aux anges.
-Laissez tomber, on commande des pizzas, propose Jasper en cherchant apparement un numéro sur son portable
-Hm.
-Il y en a des végétariennes sur le menu de ce restaurant. Avec des courgettes, des tomates et un assortiment de salades.
-Va pour les pizzas.
Christopher revient un instant plus tard avec un casier de bierres entre les bras, le posant lourdement sur la table du salon devant nous.
-Monsieur Russel est servit et... Hey, Jasp'.
J'ouvre un oeil et observe discrètement la scène. Jasper a les sourcils froncés, concentré sur son portable. Comme il me l'a dit, il a besoin de son temps d'adaptation avant tout... Nous ne pouvons pas lui en vouloir de ne pas rire aux éclats à l'heure qu'il est. L'asiatique prend place à côté de son meilleur ami, rapidement suivi de Mary.
-Je connais une pizzeria vachement naze, ça te dirait de leur faire une blague?
Jasper lève un sourcil, hésitant, avant de tendre le portable à Christopher qui cherche le numéro avant de le composer en numéro masqué. Je souris en les regardant; Christopher sait y faire pour consoler ses amis.
-Okay, sois inventif.
Il lui tend le portable mis en haut parleur alors que tout le monde se tait, le sourire aux lèvres, comme de véritables enfants.
«Pizza Roma bonjour, que puis-je faire pour vous?»
Jasper ouvre grand les yeux en nous dévisageant tour à tour et se racle la gorge avant de continuer.
-Hm, euh, bonjour, je voudrais... Commander une pizza.
Christopher se frappe le front du plat de la main face à sa maladresse; je ricanne dans le cou de Alec.
«Bien, puis-je avoir votre nom s'il vous plait?»
-Oui, hm... Harry.
«Et votre nom de famille?»
-Harry... Cot? Haricot.
«D'accord...»
-Et merde, c'est nul. Bonne soirée.
Jasper raccroche sous les éclats de rire de tout le monde. Je suis secouée par le rire de Alec qui soulève sa poitrine en me faisant bouger. Même le concerné se met à rire en prenant son visage entre ses mains.
-Jasper le roi des canulars téléphoniques. Qui dit mieux?
-Mon estomac. Il propose de commander une pizza jambon champignons maintenant et tout de suite! s'exclame Mary.
C'est ainsi qu'un peu moins d'une heure plus tard, on sonne à la porte. Tout le monde étant déjà installé devant la télévision avec un pled sur les genoux et une boisson en main. Étant les plus près de la porte, nous avons droit à une vague de regards de la part de nos amis. Mais Mary, en tant que bonne âme, se porte volontaire pour y aller à notre place.
-De toute façon, il ne faut même pas penser à compter sur ces deux là, lance Mary en nous souriant de façon narquoise.
Je lui tire la langue avant de me reposer à nouveau contre Alec qui se met à jouer avec mes doigts en fixant l'écran. Nous avons décidé d'entamer un marathon Marvel en commençant par Iron Man. Je l'observe un instant dans l'obscurité de la pièce plongée dans le noir. La luminosité de l'écran éclaire son visage qui semble si pâle sous cette lumière blanche, faisant encore plus ressortir ses tâches de rousseurs. Une étincelle brille dans ses yeux, il me fait penser à un enfant tout à fait absorbé par son dessin animé préféré. Je souris tant il est adorable et ne peux que me rendre compte pour la énième fois à quel point il est beau.
Quand notre amie apporte les pizzas sur la table devant nous et que j'essaie de me pencher pour en attraper une part, il m'attire à lui en me calant contre son torse par son bras et prend deux parts pour nous. Je pousse une exclamation de surprise qui le fait rire.
-Je te l'ai dis, tu ne te débarrasseras pas de moi si facilement.
Huit pizzas et un film plus tard, nous sommes tous d'accord pour aller nous coucher, épuisés par les événements de cette journée. Alec enlace ses doigts avec les miens en me jetant un coup d'œil et nous montons tous les deux à l'étage en nous bousculant mutuellement dans les escaliers. Son rire, ses manies enfantines, ses gestes amoureux... Tout ça m'avait tant manqué. Et à présent qu'il me tient par la main devant nos amis, maintenant qu'il me sert dans ses bras devant tout le monde, maintenant qu'il m'embrasse en public... C'est comme si le poids de toutes mes culpabilités s'envolait et que je me retrouvais si légère qu'en marchant, mes pieds effleuraient à peine le sol. Alec referme la porte derrière nous et lève les yeux vers moi qui m'assied sur le lit. Il s'approche doucement, j'allume la petite lampe de chevet qui crée dans la chambre une ambiance tamisée. A cause sa silhouette qui s'approche, son doux sourire angélique, je sens des frissons parcourir l'entièreté de mon corps en laissant sur ma peau une légère chaire de poule. Il s'accroupi en face de moi tandis que je suis assise, me voilà légèrement plus grande que lui. Ses mains s'emparent des miennes, il lève les yeux vers moi.
-Plus jamais, commence-t-il d'une voix douce, presque dans un murmure, plus jamais je ne te quitte.
-Ce n'est pas envisageable, dis-je sur le même ton en lâchant sa main pour aller poser la mienne sur sa joue.
Il humecte ses lèvres sans cesser de sourire et ouvre légèrement la bouche.
-Alors aujourd'hui, je te le demande officiellement. Noa Sparks, veux-tu être ma petite amie?
Je ris en laissant mon pouce se promener sur sa joue en cherchant son regard si sombre dans l'obscurité de la chambre mais toujours aussi doux.
-Alec Bradwell, c'est un grand oui.
Il se lève enfin en se penchant vers moi tout en me poussant légèrement vers l'arrière pour me faire tomber sur le lit, déposant ses lèvres sur les miennes. Un énième feu d'artifice explose dans mes entrailles, propageant en moi, dans l'entièreté de mon être, des milliers de papillons. Ça a toujours été et ça reste pour moi la plus belle, la plus magnifique et la plus agréable des sensations. Suivant ses lèvres en accord parfait avec les miennes, je retrouve cette synchronisation que j'avais eu l'impression de perdre depuis si longtemps. Tout est parfait quand sa langue rencontre la mienne, quand elle caresse mon palai, quand il se retire pour reprendre son souffle, quand il recommence à laisser ses lèvres se balader le long de ma mâchoire pour finalement se perdre dans mon cou.
Et puis la porte s'ouvre.
-Oh non! Cache toi les yeux Mary! s'exclame Denis.
-Oops! Je crois que ce n'est pas la chambre d'amis, ricanne Mary.
Alec se redresse en sursaut et je tourne la tête vers mes deux amis qui sont hilares.
-Allez-vous en! je m'exclame avant de lancer un oreiller dans sa direction.
Malheureusement, il s'écrase sur la porte qui se referme sur eux. Nous les entendons rire dans le couloir pendant quelques secondes et je ne peux m'empêcher de rire à mon tour. Alec se laisse tomber à mes côtés et fixe le plafond en poussant un profond soupire, le sourire aux lèvres. Je décide de me lever pour enfiler mon pyjama; je sais très bien qu'il me regarde et peu importe combien de fois il m'a déjà vue démunie de mes vêtements, je ne peux m'empêcher de rougir. Quand je reviens à lui, son t-shirt a déjà trouvé sa place au sol et la couverture couvre son corps. Il ouvre les bras pour m'inviter à m'y blottir. Quand alors je me retrouve contre son corps chaud, il dépose un baiser sur le haut de mon front avant de redescendre vers mes lèvres. Je souris contre celles-ci et enfuie ma tête dans son cou.
-Bonne nuit Alec, je t'aime, dis-je dans un soupire.
-Je t'aime tellement...
Je sens ses bras musclés m'étreinter à nouveau alors que je sens mes paupières se fermer avec lenteur. Bercée par les battements de son coeur et sa respiration régulière, je m'endors dans les bras du garçon que j'aime et que j'ai toujours aimé.
⁂
Je voudrais vous dire que mon histoire est semblable à celle d'un compte de fée. Je voudrais la comparer à une histoire d'amour qu'on rencontre la plupart du temps dans les films ou dans les romans. Sauf que mon histoire n'est pas seulement une histoire d'amour. Non, mon histoire ne se résume pas qu'à un garçon. Mon histoire à l'heure qu'il est en compte six. Six garçons et deux filles. Six garçons et deux filles qui me font face. Mon histoire ne parle pas que de romance, mon histoire parle aussi d'amitié, elle parle de relations, de compréhension, de chagrins. Tous les jours, quand je me repasse les deux mois que j'ai vécus à Malibu dans ma tête, je réalise qu'il se cache derrière chaque moment une nouvelle morale, une leçon à apprendre. Parce que si mon histoire ne résume pas à deux âmes soeurs, Malibu ne se résume pas à un paysage de carte postale. Ce que je veux faire comprendre par là, c'est qu'il y a en chaque personne, en chaque lieu, en chaque histoire un fond que l'on se doit de chercher par sois-même. Et quand l'on trouve ce qu'il se cache dans les coulisses, dans l'envers du décor, on en tire des tas de choses merveilleuses. En réalité, on apprend même à se redécouvrir sois-même.
Quand alors je regarde mes amis assis en cercle face à moi et que je prends conscience de toutes les choses qu'ils m'ont fait vivre en l'espace de deux mois, de huits semaines, de plus ou moins cinquante-six jours, je me demande si il s'agit de la réalité.
Face à moi, un couple amoureux. Deux âmes que tout opposait mais qui malgré tout étaient faites pour se rencontrer. Le joueur de jeux vidéos timide et bien trop gentil a un jour abordé la mannequin pleine de confiance en elle, laissant toujours libre court à sa pensée, au sourire radieux et à la bonté impressionnante. Christopher et Mary sont blottis l'un contre l'autre et se regardent avec tendresse, comme si jamais ils n'avaient rien vu de plus magnifique sur cette terre que l'un et l'autre.
La douceur incarnée aux intentions pures qui n'a jamais réellement eu l'occasion d'être elle-même jusqu'à aujourd'hui fait connaissance avec ce garçon aux cheveux constamment désordonnés. Ce garçon maladroit et adorable à la fois qui ferait tout pour contribuer au bonheur de ses amis. Bien souvent on ne le lui rend pas car personne ne se rend jamais compte de tout ce qu'il peut faire pour nous rendre heureux. Mais aujourd'hui tous sont pleins de gratitude à son égard. Car aujourd'hui il s'affirme. Aujourd'hui il garde la tête haute et sourit à nouveau: il a tourné une page importante de sa vie. Pour Jasper, c'est un nouveau départ qui s'annonce radieux. Et je suis heureuse de le voir s'entendre si bien avec Sasha.
D'une autre part, deux inséparables amis rient aux éclats en se bousculant de temps en temps. D'un côté il y a ce garçon au visage angélique et aux cheveux mi-longs. Ses airs innocents s'accordent parfaitement avec ses intentions et sa personnalité. Une âme aussi pure et innocente, jamais plus vous n'en croiserez plus tard. Il donnerait tout pour voir ceux qu'il aime sourire à la vie, pour partager ses passions, ses habitudes. Sous ses airs simples, Nate est bien plus que ce qu'il montre à tous. Parfois, je me dis que son coeur est bien trop grand pour son corps. Quelle amitié improbable... Celui dont les yeux bleus vous transpercent, celui qui prend tout à la légère, celui qui communique plus par le sarcasme que par des paroles communes s'entend pourtant si bien avec un être comme Nate. Personne ne sait jamais si Spencer plaisante ou non. Il est un garçon bien maladroit, dépassé par la force de ses propres sentiments et responsabilités. Il n'est pas encore tout à fait en équilibre avec lui-même et en prend tout doucement conscience. Pour lui, le passage à la vie adulte est bien plus compliqué à traverser que pour d'autres. Mais il tient bon. Il se rend compte de ses erreurs, des choses qu'il faut changer. Et il a beau essayer de prouver au monde entier le contraire, quand il aime quelqu'un, quand il tient à quelqu'un, c'est avec une sincérité impressionnante.
Pendant ce temps, Denis les regarde en souriant à pleines dents. Je le soupçonne de surtout porter son attention sur Nate, mais passons. Denis est un cas! C'est peut-être le garçon qui se prend plus en dérision que n'importe qui d'autre sur cette planète. Il aime être lui-même, il le montre et il en est fière. Et surtout, il protègerait ses proches à n'importe quel prix, remettant n'importe qui à sa place par la force de ses paroles bien placées pour le bien de tous. Denis est l'ami dont tout le monde a besoin dans sa vie, je suis honorée de le compter dans la mienne.
Ensuite, il y a ce Garçon. Lui. Celui qui m'a fait tourner la tête tout l'été. Le sujet de mon histoire d'amour, cette histoire d'amour couverte par ces milliers de petites histoires tout autour. Il est là, il se tient en face de moi, le cœur léger, son sourire creusant dans ses joues des fossettes marquées. Le soleil couchant souligne son teint hâlé et ses tâches de rousseur qui éclaboussent son visage et ses bras. Il sourit à pleine dents. Je sais qu'il n'aime pas ses dents, qu'il les trouve trop grandes... Pourtant son sourire illuminerait même la journée de la plus triste personne vivante sur terre. Ses cheveux retombent en boucles désordonnées sur son front, voletants autour de lui à cause de la fine brise maritime de soirée. Il émane la joie et l'amour. C'est lui, c'est Alec, c'est le garçon que j'aime. Il est celui qui occupe toute la place dans mon coeur comme dans mon esprit. Il est aussi celui qui a le plus changé au court de ses deux mois, passant de l'adolescent farouche au jeune homme indécis pour finalement se transformer en adulte en paix avec lui-même, qui sait ce qu'il veut. Et c'est ça que j'aime chez lui; c'est le fait qu'il en ai tant appris et qu'il ai accepté d'apprendre, qu'il ai accepté de laisser le temps et les expériences le changer. Au fond de lui, il riera toujours devant un dessin animé et sortira toujours des blagues légères à n'importe quel moment de la journée. Mais son coeur, lui, a trouvé sa voie.
Le mien aussi. Ils se sont trouvés. Nous nous sommes trouvés.
-Écoutez, écoutez! lance Nate en faisant de grands signes de ses bras pour attirer l'attention de tout le monde.
Assis en cercle sur des couvertures non loin de la mer, nous sommes seuls sur notre plage privée. Il n'y a personne pour nous ennuyer, juste le bruit des vagues qui s'écrasent sur le rivage, les mouettes qui au loin se chamaillent et le vent qui souffle avec douceur tout autour de nous. La nuit ne va pas tarder à tomber, nous allumons tout autour de nous des lanternes en tour genre, Alec nous montre même comment allumer un feu comme un véritable scoot. Nos glacières sont pleines de sodas et de snacks en tout genre pour nous occuper tout au long de la nuit.
Dans la villa, les lampes sont éteintes. Les portes sont closes. Nos bagages sont bouclés.
Notre avion décollera demain dans l'après-midi.
Quand enfin Nate capte l'attention de tous, lui et Spencer s'echangent un regad entendu. Le brun au cheveux longs s'empare de son xylophone pour enfant et frappe une touche colorée avant d'engendrer avec deux autres. Spencer conclut en nous chantant maladroitement un do ré mi fa sol la si do. Quand il s'interompt, un long silence s'intalle alors que nous attendons tous une suite à leur petit spectacle.
-Quoi? C'est tout? grimace Mary.
-Bah oui! Ça fait des semaines qu'on répète, lance Spencer en haussant les sourcils.
-J'ai trouvé ça excellent, affirme Denis en se mettant à applaudir avec entrain.
Nous rions tous de bon coeur en nous joignant à ses applaudissements. Et puis soudain, Sasha s'exclame.
-Alec! Tu n'as pas apporté ta guitare pour rien quand même!
Celui-ci prend des couleurs et se racle la gorge.
-Oh, si, je me suis dis que si la mer montait un peu trop elle pourrait nous servir de radeau...
-Allez, joue quelque chose, lui dis-je en lui accordant un léger coup de coude dans les côtes.
Il baisse les yeux en souriant avant de me regarder. Une étincelle brille dans ses yeux quand alors il s'empare de son instrument en se raclant la gorge. Sasha coupe son petit baffle qui diffusait jusque là un fond de musique et le bouclé entame ces quatres différents accords que nous connaissons tous; G, Bm, D et A.
Il déglutit un instant alors que nous sommes tous suspendus à ses lèvres, prêts à le suivre quand il le voudra.
-There is a swelling storm and I'm caught up in the middle of it all.
And it takes control of the person that I thought I was, The boy I used to know.
Il enchaine les accords avec une vitesse et une facilité impressionnante quand Sasha se met à frapper dans ses mains en rythme. J'aime la voix de Alec, je l'aime car elle n'est pas tout à fait parfaite, souvent il hésite car il ne se rend pas compte à quel point il chante bien. Ce sont ces petites hésitations adorables que j'aime le plus.
-But there is a light in the dark and I feel its warmth, in my hands, in my heart. Why can't I hold on? Vous continuez avec moi!
Tout le monde rit, tout le monde sourit et nous nous y mettons à notre tour, connaissant pour la plupart les paroles.
-It comes and goes in waves, it always does. It always does. We watch as our young hearts fade into the flood. Into the flood!
Nos voix résonnent sur la plage et peu importe à quel point nous sommes bruyants, personne ici ne peut nous entendre.
-And freedom, and falling, the feeling I thought was set in stone. It slips through my fingers, trying hard to let go... It comes and goes in waves. It comes and goes in waves... And carries us away.
Oh... Et j'ai presque oublié. Il a aussi cette jeune fille, une petite blonde aux allures banales. Elle ne sort franchement pas du lot. Aux premiers abords, on la trouve timide mais gentille. Certain disent qu'elle est d'une douceur infinie, je n'en suis pas tout à fait convaincue. Ce qu'on dit de la douceur est très surfait. Son physique est tout autant commun, il n'y rien de bien tappe à l'oeil dans son allure; des cheveux blonds et raides, des yeux verts pâles, une peau très peu pigmentée, d'épais sourcils châtains.... Sa vie n'en est pas moins commune. Deux parents divorcés, un petit appartement dans Seattle, beaucoup de déménagements, deux meilleurs amis, une vie d'étudiante comme une autre.
Mais à nouveau il suffirait d'ouvrir le rideau pour découvrir qu'il s'agit de bien plus que ça. Je suis bien plus que ça, je l'ai appris tout doucement durant ces deux mois de soleil à quelques heures de chez moi. J'ai appris à découvrir qui j'étais réellement, à comprendre quelles étaient mes qualités, quels étaient les défauts... J'apprends même à les surmonter, bien que ce soit plus facile à dire qu'à faire. Mais vous savez quoi? J'ai beau parfois prendre des décisions idiotes, prendre des chemins incompréhensibles, me perdre... J'en tire des leçons et c'est ainsi que je m'aime.
Demain, je referai des erreurs. Demain, j'aurai droit à ma victoire. Demain, je pleurerai. Demain, je rierai. Demain, je détesterai. Demain, j'aimerai à la folie.
Peu importe ce qu'il nous arrive, peu importe ce qu'il nous tombe dessus, on prend des coups, on se relève et on recommence.
J'ai toujours cru au fait que l'herbe était plus verte ailleurs, je ne me suis jamais contentée de ce que j'avais. Mais quand aujourd'hui je nous vois tous réunis ainsi, quand je vois ces sourires orner les visages des gens que j'aime le plus au monde... Que voudrais-je de plus? Dans mon histoire d'amour, dans mon histoire d'amitié, dans mon histoire de relations, j'ai appris l'importance des mots Je t'aime. J'ai appris que bien que certains les trouvent insuffisants ou trop utilisés, c'est qu'ils ne comprenaient pas à quel point ils étaient importants. À quel point ils pouvaient tout changer. Faire comprendre à quelqu'un que l'on teint à elle à l'aide de ces mots est d'une importance capitale. On ne le dit jamais assez. Mais il faut aussi savoir quand le dire pour la première fois. Dire ces trois mots, c'est signer un pacte; on s'engage à faire entrer cette personne dans notre vie pour de bon.
J'ai aussi appris à donner des secondes chances. Pardonner. C'est la clé. Pour être heureux, il faut d'abord être en paix avec sois-même. Et comment être en paix avec sois-même quand nous ne sommes plus que rancoeur et regrets? Donner une seconde chance, c'est repartir à zéro. Donner une seconde chance, c'est un nouveau départ. On m'a donné mes chances, je donne aux autres leurs chances.
Car ce soir j'ai appris à aimer pour de vrai. Ce soir j'ai devant mes yeux les visages radieux des personnes qui me sont chères.
Et voire sourire nos proches, se rendre compte d'à quel point on les aime sans raisons apparentes, sans rien attendre en retour... C'est bien plus beau qu'un paysage Californien.
Aujourd'hui, je ne peux prétendre être la même qu'hier. Mon histoire ne fait que commencer...
♔
***
Hey...! Bon et bien, voilà. Le voyage à Malibu touche à sa fin. C'est un grand moment pour moi car ce chapitre était le dernier avant l'épilogue. J'espère que ça vous a plus!
Je dédicace ce chapitre à @Cinderlinth17 !
J'espère que ça vous aura plu! Je voulais faire une belle fin car c'est ce que méritent mes personnages pour m'avoir autant fait voyager :3
Rendez-vous dimanche pour l'épilogue et la clôture de ce roman. Que sont-ils tous devenus sept mois plus tard?
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