XVIII. Je jure solennellement...

J'aurai été un adolescent en pleine puberté connaissant tout juste l'amour ou s'en approchant, je pense que je serais en train de paniquer. Vraiment paniquer. Je serais comme un con, enfermé dans ma bulle à remettre mon monde voire carrément mon existence en question.

Sauf que je ne suis plus un gamin.

J'ai quitté le lycée et toutes ses mésaventures il y a de cela des années. D'ailleurs, à cette époque, j'avais des rêves. Des projets d'avenir. J'étais plein de fougue et d'ambitions. J'avais gonflé mon égo à son maximum et puis...Entre temps, mon égo a éclaté façon bouton purulent d'acné, plein de pue dégoulinant, emportant avec lui tout ça. Tout ce monde que je croyais avoir. Que je pensais pouvoir conquérir.

Je ne suis rien de moins qu'un pauvre type, m'étant fait larguer sur l'autel, à quelques heures de son mariage et ayant lâché sa vie.

Même pas une once de courage et de bravoure. J'aurai pu rester. Me dire "Tant pis" et reprendre ma vie, car après tout, elle continue, mais je crois que j'ai vu le fait d'être cocu comme une occasion de faire un point. De faire une pause. Vous savez, l'une de ces pauses que l'on se dit toujours "Je vais prendre du temps pour moi", mais qu'au final, qui n'arrive jamais.

J'ai tout planté, parce que je suis à moitié stupide, et j'ai absolument tout quitté pour ce bout d'océan. Ce banc de sable.

Franchement, au début, je voyais ça comme l'occasion de faire le point et de me préparer à l'avenir. Je voyais ça comme le seul moment de ma vie où je pouvais me dire "Bon, et maintenant, je fais quoi ?" car de toute évidence, je ne pourrais pas rester ici indéfiniment. Ça fait bien trop longtemps que je larve dans ce trou paumé et sans doute, si je n'avais pas rencontré Camille, je serais déjà reparti. Où ? Je n'en sais rien. Quelque part, dans un autre endroit.

Au fond, je ne fais que répéter sans cesse le même circuit infernal sans vraiment essayer de m'en sortir. À croire que j'attends que ça vienne pour moi. Que l'on vienne pour moi.

Je n'y crois pas trop au sauvetage.

N'écoutant que les dires de Camille, je suis alors retourné sur la plage. Les couples présents étaient tous déjà repartis et l'endroit paraissait soudainement silencieux. Désert.

Je l'aurais compris si j'avais été un si mauvais parti au lit, sauf que, sans vouloir me vanter, je suis conscient de mes propres exploits et je sais que généralement niveau sexe, je m'en tire pas mal. Mieux que la moyenne générale en temps normal.

Était-ce si terrible que ça ? Non, ça ne peut...

Était-ce le fait qu'elle et moi... ? Je l'aurais-je brusquée ? Effrayée ?

Ce n'est pas comme si je lui avais passé la bague au doigt. Je me suis juste envoyé en l'air avec cette fille. C'était chouette et j'ai envie de recommencer. Juste ça. Sans attaches. Sans promesses de lendemain. Sans attentes particulières. Sans sentiments.

Sans rien.

Je veux juste me sentir "bien" pour une fois dans ma vie. Était-ce trop demander ? Un effort supplémentaire ne serait pas mal.

Alors comme un abruti, je me suis assis le cul dans le sable et j'ai cherché. J'ai réfléchi. C'est rare. J'ai jamais été le genre à réfléchir, à planifier. D'habitude je me laisse guider et j'avise, mais là, c'est différent.

Camille est différente.

On vient de s'envoyer en l'air et cette fille m'a envoyé bouler juste après. Pourquoi ? Je n'en sais strictement rien.

Et je n'aime pas ne pas savoir.

Je me relève et marche d'un pas ferme jusqu'à son bungalow. Elle ne veut peut-être pas me voir à son boulot, je peux le comprendre, mais là, elle va faire un effort la petite.

Les fesses à nouveau dans le sable, je l'attends devant chez elle.

"- Camille ?"

Elle est là.

Elle semble étonnée, presque surprise de me voir là.

Tu t'attendais à quoi ? À ce que je reparte tranquilou mimilou chez moi ?

"- T'as le temps pour discuter là ou je te dérange aussi ?"

Mon ton est sec, presque agressif. À croire que je ne sais décidément pas parler aux femmes. Hortense avait peut-être eu raison de me quitter pour l'autre enfoiré.

"- Écoute...

- Non, toi tu vas m'écouter."

J'en ai marre de laisser les femmes aux commandes de ma vie.

Comme disait un grand monsieur : "Le changement c'est maintenant !" parce que c'est mon projet...de changer !

"- Je vais peut-être te paraître rustre, mais je t'avoue que je suis complètement largué. Je ne comprends pas pourquoi t'as été aussi froide avec moi. Quand tu es partie, ça semblait plutôt "cool" entre nous et là, tu m'envoies sur les roses pour je ne sais quelles raisons et tu sais quoi ? J'aime pas ça. Néanmoins, même si j'ai le crane plus vide qu'un coquillage quand il en vient aux femmes, je ne suis pas totalement idiot et si tu as tes raisons, je peux les entendre et les comprendre. Juste, explique-moi. Parce que là, je t'avouerais que je nage dans le noir complet."

Donc, éclaire-moi.

Tel un phare en pleine tempête.

Éclaire-moi.

"- Je suis pas le genre de fille qui s'embarque dans une relation sur un coup de tête. Jusqu'à présent, je traînais mes guettes ici juste parce que je bossais là. J'avais mon job de serveuse, mes petites économies de côté...Et puis t'es arrivé et ça fait une variante de plus à gérer. Je suis déjà débordée honnêtement. Je ne sais pas si je pourrais...

- Me gérer ? Tu t'emballes un peu, tu ne crois pas ? Ça va paraître horrible ce que je vais dire, mais...C'était juste un plan cul."

Au fond, c'était juste le temps de se faire plaisir.

Sans arrière-pensée. Sans rien.

C'était le temps d'écouter ses instincts premier sans forcément devoir s'engager. Une partie de jambes en l'air n'engage que ceux qui le veulent bien.

"- Ah...Donc...

- Je suis désolé, peut-être t'ai-je laissé croire qu'il pourrait y avoir plus, mais honnêtement, la fille à qui j'ai accordé pratiquement dix ans de ma vie m'a trompé avec mon meilleur pote pour ensuite m'annoncer qu'ils allaient se marier. J'ai beau faire le gros malin, ça n'a pas arrangé les choses dans mon cœur et je n'arrive pas à aller de l'avant ô combien j'essaye. Donc pour l'instant, je ne cherche pas l'histoire d'amour du siècle !"

Elle lâche alors un soupir de soulagement avant de se laisser tomber à côté de moi sur le sable.

"- Putain, j'ai eu peur ! Le temps d'un instant, j'ai cru que toi et moi on pourrait...enfin, tu sais...Devenir un couple.

- Quoi ? Non ! Bien sûr que non ! Ça serait absurde.

- C'est un peu comme deux potes de colonies, c'est ça ?

- On peut voir ça comme ça, mais...avec les avantages?

- Sacré avantage !

- Dois-je en déduire alors que ça ne t'a pas déplu?

- Non, c'était même plaisant. C'est juste que je n'ai vraiment pas la tête à me mettre dans une relation. Trop de complications et tout ça.

- M'en parle pas. Tu prêches à converti là."

Je suis peut-être même le mieux placé pour le savoir.

Mais ce genre de nouvelles me soulage. Savoir que Camille et moi sommes sur la même longueur d'onde me rassure.

"- Tu sais quoi ? Faisons une promesse. Parce que nous sommes deux adultes responsables

- Laquelle ?

- Donne ton petit doigt déjà."

Ok...

"- Promis juré qu'aucun de nous deux ne doit tomber amoureux de l'autre. Trop d'emmerdes !

- Facile ça !

- Promets le Camille.

- Promis, promis. Je jure..."

Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises.

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