CHAPITRE 48

Hey vous ! :)

Oui, c'est une note de début de chapitre, ce n'est pas souvent !

C'était juste pour vous dire que ce chapitre mêle deux mondes ; le mien et celui de NeilGallen. D'ailleurs, je le remercie de m'avoir "prêté" ses personnages :) Si vous n'avez pas encore lu "Ma femme s'appelle Eric", vous pouvez lire les premiers chapitres sur son profil !

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Morgan toqua doucement à la porte soixante-quatorze. Aucune réponse.

Il poussa la lourde porte avant d'entrer dans la pièce. Les volets roulants étaient fermés de demi, inondant la pièce d'une faible lumière naturelle. Il y avait une lampe, une petite table de chevet, une chaise en plastique rouge ainsi qu'un grand lit. L'ambiance était légère car à part le patient endormi, personne n'était présent. La fenêtre, entre-ouverte, laissait passer une petite brise pour rafraîchir la pièce.

– Monsieur ? C'est l'heure de se réveiller pour le check-up... déclara le médecin.

Aucune réaction. Il s'approcha du lit. Le corps pâle était là, allongé et relié à des moniteurs par des perfusions. Les cheveux noirs étaient en bordel, étalés sur l'oreiller blanc. Une couverture polaire rose vif remontait jusqu'à ses hanches. Il s'affaira sur la petite table de chevet où plusieurs dossiers avaient été déposés. Il y posa le sien. Tanguy de Gauvet. Un nom bien pompeux pour une poupée, ainsi endormi. Les traits apaisés harmonisaient le visage fin de cet homme.

– Tiens, ce n'est pas la première fois qu'il est amené ici, réfléchit Morgan.

Ses yeux bruns parcouraient les lignes. Plus qu'il ne le pensait, le patient avait changé de médecin plusieurs fois au fil des démissions et des changements de poste. Maintenant, c'était à lui qu'on avait confié la tâche de le suivre médicalement.

Ledit il grogna un peu. Il bougea ses jambes afin de mieux se positionner. Ses paupières papillonnèrent vaguement. Elles s'ouvrirent sur deux grands yeux clairs. Tanguy regarda ce qu'il pouvait voir avec un air perplexe. Généralement, les gens qui se réveillaient à l'hôpital étaient perdus, mais lui, il avait presque l'air habitué.

– Monsieur, je suis votre médecin. Voulez-vous boire quelque chose ?

Les yeux pâles dévièrent sur lui. Seul mouvement dans ce corps de marbre.

– S'il vous plaît, marmonna le patient, la langue pâteuse d'avoir longtemps dormi.

Morgan attrapa la carafe d'eau avant d'en verser le contenu dans un verre. Il le tendit vers le lit. Une main sortie des draps pour porter le verre à ses lèvres craquées. Tanguy se redressa pour s'adosser contre les coussins gonflés par une infirmière il y avait quelques heures déjà. Il s'enfonça presque dans l'amas de tissus blanc.

– Comment vous sentez vous ? demanda doucement Morgan.

Le patient émergeait lentement grâce à l'eau fraiche qui avait calmé la brûlure de sa gorge. Quelques secondes de flottement passèrent entre eux, le temps que Tanguy reprenne la maîtrise de son corps et de son esprit. Il lâcha un bâillement pénible, réduisant son visage à celui d'un enfant ennuyé.

– Bien... marmonna enfin l'homme en baissant les yeux sous celui du grand brun.

– A d'autres. Je suis médecin, pas l'un de vos amis. Je sais pourquoi vous êtes ici.

Ils s'affrontèrent légèrement du regard, le patient ne voulant pas lâcher sa position tandis que le médecin voulait faire comprendre qu'il était là pour son bien. Tanguy soupira avant de passer sa main dans ses cheveux, gêné.

– De quoi vous souvenez vous ?

– J'étais en train de répéter la nouvelle chorégraphie avec mon collègue, Eric.

– Un grand roux ? questionna Morgan en croisant les jambes, se mettant à l'aise.

– Oui.

– Il est celui qui vous a emmené ici, alors, à ce que je lis.

Un marmonnement lui répondit. Tanguy triturait la couverture. Il n'appréciait pas vraiment que son collègue l'ai vu dans ce moment de faiblesse. Cependant, il était quand même soulagé. Il n'allait pas se prendre un savon de la part de Gabriel. Ou même Aaron. Du moins, pas encore. Il grimaça à la pensée de ce qu'il allait subir en rentrant chez lui.

– Je vois que ce n'est pas la première fois que vous venez ici, dit Morgan en parcourant des yeux les lignes noires sur les feuilles blanches. Avez-vous peut-être une idée de la raison ?

Ses yeux marrons tombèrent immédiatement dans ceux du danseur. Il affichait une moue songeuse et boudeuse. Morgan voyait bien qu'il avait mis le doigt sur quelque chose qui faisait mal. Quelque chose de puissant qui était perdu dans une bonne couche de déni.

– Non, je ne vois pas pourquoi.

« En plus, il est de mauvaise foi », pensa le brun.

– Mmh... ? chantonna le brun. Il y a plusieurs raisons, vous savez. Il y a l'exercice, les antécédents familiaux, l'âge avancé, des défaillances cardiaques, les baisses de tensions répétées ou même le surmenage, énuméra-t-il en brandissant ses doigts.

Le médecin vit les réactions à peine cachées de Tanguy. La première lui tira un léger haussement d'épaules tandis que la dernière engendra un froncement de sourcils. Presque imperceptible. Visiblement, il ne voulait pas admettre quelque chose. Cependant, Morgan n'était qu'un médecin, et non un psychologue. Il ne voulait pas non plus braquer le patient avec des questions indélicates. Ce dernier se tortilla entre les draps pour remonter un petit peu. Son corps était mince, peut-être un peu maigre, même, mais là n'était pas la question. Il avait certainement un métabolisme fin, de base. S'il était danseur, ce que supposait fortement le brun, il était tout sauf maigre. Il fallait porter ces muscles et ces mouvements atypiques du corps.

– Je pense que la réponse est sous votre nez, mais je n'approfondirais pas. Par contre, au vu de vos analyses, je peux voir que vous avez des carences en vitamine D, en fer et en magnésium. Vous alimentez-vous correctement ? Assez pour une journée ?

– Je m'alimente suffisamment, oui...

– Non, je ne vous parle pas d'un petit casse-croûte pendant une pause. Je vous parle d'un vrai repas. Avec des féculents, de la viande, des légumes et des laitages. Etes-vous certain que ces nécessités sont apportées à votre corps ? Monsieur, je ne suis pas qualifié pour vous faire la morale, mais je peux vous aider. Il n'y a pas de médicaments pour les évanouissements, mais vous pouvez changer votre quotidien pour les éviter.

– J'entends, oui, mais je n'ai pas le temps, répliqua Tanguy.

Morgan se frotta l'arête du nez en soupirant. Il avait horreur des patients bornés comme celui qui se présentait sous ses yeux. Il savait très bien ce qu'il devait lui recommander, mais si le petit brun n'était pas réceptif, il serait admis dans une nouvelle chambre le mois prochain. Il pouvait très bien lui répéter ces paroles jusqu'à ce qu'il ai un déclic. Un quelque chose qui le ferait changer d'avis. Calmement, il se constitua de nouveau un sourire enjoué.

– Chacun a son travail à fournir dans la journée, mais pour le fournir, il faut avoir quelque chose à puiser. Sauf que vous, vous n'avez plus rien à puiser, dit-il en pointant les résultats des analyses de sang.

Le médecin avait vaguement l'impression de fâcher un enfant capricieux.

Les yeux clairs du patient le scrutaient de haut en bas. Morgan n'arrivait pas à savoir à quoi il pensait. Peut-être qu'il ne voulait pas, au final. Tanguy devait certainement penser qu'il n'était qu'un gros abruti qui devait penser mieux que les autres. Or, entre les deux, dans cette pièce, il était celui qui savait le mieux ce qu'il fallait faire pour son patient.

— Donc, sur quoi voulez-vous partir ? Être alité tous les mois, ou faire des efforts sur quelques semaines et voir le résultat ? proposa le médecin, un stylo entre les doigts.

Le danseur essaya de trouver une lueur moqueuse, ou même agressive dans les yeux de l'autre. Il en avait vu, des médecins qui perdaient leur calme devant son entêtement. Il en avait vu certains le forcer à prendre des médicaments et lui installer des routines. Avec l'homme qu'il avait en face de lui, il ne se sentait pas acculé. Il sentait une réelle envie de l'aider de la part du docteur Barthélémy, comme l'indiquait son badge sur la poche.

— Allez-y, dites-moi ce que je dois faire...

Tanguy rendait les armes durant cette bataille. Un éclat soulagé passa dans les yeux de l'autre. Un sourire courba ses lèvres et l'air autour d'eux fut moins chargé.

— Je suis soulagé de l'entendre ! Pour l'instant, les perfusions s'occupent de tout. Je vais vous faire une ordonnance. Pas d'allergies due au médicaments, parfait... lis Morgan sur l'une des feuilles. Pour les vitamines D, je vous propose des ampoules à prendre tous les jours pendant un mois. Cela vous boostera et vous vous sentirez moins fatigué. Cela vous convient-il ?

Le patient hocha la tête. C'était bien la première fois qu'on lui demandait son avis.

Mais Morgan était comme cela. Si le patient n'était pas réceptif à la prise des médicaments, il savait que c'était toujours compliqué pour suivre un traitement, même temporaire. Il en avait suivi, des gens qui faisaient n'importe quoi avec leurs doses.

— Pour le fer, continua Morgan, je vais vous donner une liste d'aliments qui en sont riches. Si cela n'est pas suffisant, je vous conseille de prendre des comprimés sur une durée de trois mois. Je sais que ce n'est pas évident, alors je vous recommande vraiment d'orienter votre alimentation afin de combler ce vide.

Il notait sur une feuille à part ce qu'il disait, tout en remplissant une prescription. Les yeux pâles suivaient les mouvements, sans un mot. La façon de faire de Morgan l'intriguait. Il était médecin, mais cherchait à contourner la prise de médicaments par des moyens naturels et simples.

— Et enfin, pour le magnésium, il faudrait manger des oléagineux. Les amandes sont très efficaces. Une poignée par jour, et le tour est joué. Le chocolat noir est aussi un très bon remontant. Je ne sais pas si vous connaissez les graines de chia, ou de lin, mais dans un yaourt, c'est excellent.

— Je vais essayer, si vous le dites, certifia le danseur. Merci.

— C'est normal, c'est mon travail. Je suis peut-être médecin, mais les médicaments abusifs ne sont pas bons pour la santé, alors, pour votre cas, je préfère user de la médecine douce. J'espère que vous allez respecter ces consignes, au moins...

— J'ai des amis qui vont vite me le rappeler, si j'oublie.

Enfin, oublier était un grand mot. S'il ne prenait pas volontairement le traitement, plutôt. Satisfait de la réponse, le brun replongea dans ses feuilles. Il écrivit quelques lignes concernant le traitement à bases de gélules, et apposa sa signature. Toute en longueur, elle prenait une bonne partie du bas de la feuille.

— Je ne connais pas vos amis, mais ils vont être mes meilleurs alliés dans cette bataille, rigola Morgan, presque sur le ton de la confidence.

Tanguy suivit et son rire s'envola dans la pièce. Morgan posa le dernier point sur les recommandations, et plia les deux feuilles avant de les fourrer dans une enveloppe. Il la laissa en évidence sur la table, afin que le patient pense bien à la prendre en partant.

Il regarda sa montre, et vit qu'il ne restait que vingt minutes avant sa pause déjeuner. La matinée était assez calme, et il n'avait plus de rendez-vous, sauf si une urgence pointait le bout de son nez. Il décida alors d'engager une conversation plus légère.

— Mais dites-moi, vous m'avez parlé de chorégraphie, vous êtes danseur ?

Soudain, les traits boudeurs du patient s'ouvrèrent légèrement. Ses yeux clairs passèrent de la porte de la petite salle de bain à la silhouette de Morgan qui s'était mieux ajusté dans la chaise en plastique. Son air curieux donnait envie à l'autre de répondre.

— Vous aimez la danse ? demanda-t-il en retour.

— C'est un art que je ne connais pas du tout, alors ça m'intrigue.

— C'est quelque chose de magique. Se fondre dans la peau d'un personnage et raconter une histoire est un sentiment que je n'arrive même pas à exprimer.

— Vous faites de la danse classique ?

— Hum, oui. Beaucoup de personnes n'aiment pas, à vrai dire.

Morgan n'osait pas dire que c'était son cas. Du moins, il n'avait jamais eu l'occasion d'en voir en représentation, alors il ne pouvait pas juger avec certitude. Il hocha la tête avant d'aviser le visage du patient. Il rayonnait littéralement.

— Vous êtes dans un ballet ? Ou sur une petite scène ? Excusez-moi si les termes ne sont pas les bons, mais je n'y connais pas grand-chose, en danse, dit Morgan.

— Ne vous en faites pas, je comprends ce que vous voulez dire ! Je représente au Manoir Pourpre, avec quelques danseurs de renoms et une troupe fort sympathique.

Il attendait le jugement du médecin.

— Ho ! J'ai vu l'une des pubs, il n'y a pas longtemps. Il faudrait que j'emmène mon petit ami, mais je n'ai jamais le temps, avec les services du soir. Le concept de l'établissement sort vraiment des codes, ça change. Peut-être que nous pourrions vous voir évoluer sur scène, alors ?

— Ce serait avec plaisir, en effet.

Leurs regards se croisèrent une nouvelle fois. Il fallait dire qu'ils étaient tous les deux surpris. Morgan imaginait parfaitement son patient danser, le corps entravé de costume extravagants. De son côté, Tanguy n'aurait jamais imaginé que le médecin puisse prendre la nouvelle aussi bien. Il le pensait presque arrêté sur ses idées, un peu buté, aussi. Il était agréablement surpris de trouver un homme curieux du monde qui l'entourait.

— Peut-être que nous nous croiserons alors, dit calmement le brun.

Il regarda de nouveau sa montre et s'aperçut avec surprise qu'il devait y aller, pour ne pas prendre du retard sur ses consultations de l'après-midi. Il rangea ses dossiers, se leva et replaça sa blouse blanche.

— Monsieur, je vous remercie du temps que vous m'avez accordé. J'espère sincèrement que vous allez suivre ce que je vous ai prescrit, car vous en avez vraiment besoin. Je repasserai demain, afin de juger si vous pouvez sortir rapidement ou non.

Il salua le danseur et s'éloigna, lui tournant le dos.

— Je vous remercie de ne pas être un abruti.

Tanguy ne verrait jamais le large sourire qui avait envahi les traits du médecin.

Décidément, il était un patient plein de rebondissements. C'était en partie pour cela que Morgan aimait son travail.

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Voici un nouveau chapitre !

Des avis ? :)

Bisou sur votre joue gauche,

Rheexus

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