Mon père ce héro [New Version]




La dernière fois que Mendes avait malmené son corps en sprintant de la sorte, c'était il y a vingt ans lorsqu'il poursuivait un dealer de coke en pleine Grant Avenue à Chinatown. L'humanoïde, primaire à l'époque, avait terminé sa course sous un Cable-car, un de ses bras mécaniques coincé sous les leviers du Gripman, le corps immaculé de blanc par les sachets de Shnouf éventrés lors de sa chute.

Cette course rappela donc au Chicanos ses débuts dans la police mais avec la condition physique en moins.

Sa mise en action fut toutefois instantanée et instinctive. Preuve qu'il s'était déjà attaché aux deux français. Lui qui n'avait jamais plus voulu s'attacher à personne depuis Teresa et sa femme, s'était laissé piéger.

Il ne lui fallut que quelques secondes pour fendre la foule et se retrouver à relever Stan. Le chef squelette était déjà remonté sur ses fémurs et avait disparu dans la foule.

-       Relevez-vous ! Ça va ? cria-t-il dans les oreilles de Stan.

-       Oui, oui ! Pas de stress, je sais que vous tenez à moi lieutenant mais il m'a juste bousculé. Il s'est excusé d'ailleurs, répondit le futur divorcé cherchant du regard son sombrero noir à pompons blancs perdu lors de son vol plané involontaire.

Puis Stan, par réflexe ou parce qu'il sentit quelque chose de bizarre, se frotta la base du cou.

-       Viens, allons sur le trottoir, tu as l'air d'avoir pris un choc tout de même ordonna Arnaud surpris et stressé lui aussi par ce qui venait d'arriver.

-       Non ça va... Juste une petite douleur dans la nuque.

-       Cela ne doit pas être grand-chose. Probablement un coup du lapin suite au choc par l'arrière, dit Mendes.

Les trois acolytes entamèrent alors une courte pause assis sur un rebord de fenêtre en regardant quelques chars passer.

-       Bizarre tout de même, poursuivit Mendes qui n'arrivait toujours pas à comprendre ce qui venait de se passer.

Sans répondre à la remarque du détective basané, Arnaud aboya :

-        On y est presque de toute manière fit-il en pointant du doigt la boite à clé accrochée au mur d'une maison à peine à cent mètre de là.

-       C'est parti, on en termine ! reprit en se redressant sur ses canes l'ex de Cécile.

Ils arrivèrent ainsi à la boîte à clé. Il s'agissait d'un petit réceptacle noir en plastique avec un barillet formé de roulettes mécaniques. Il n'y avait plus qu'à les faire tourner pour renseigner le code.

-       Je reconnais bien Alain. Il a choisi un système électroniquement inviolable... précisa Stan d'un air admiratif en regardant les deux autres.

-       Peut-être, mais il nous faut trouver le code maintenant ! répondit Arnaud plus terre à terre que les autres pour une fois.

Stan se concentra, il savait que tout reposait sur ses épaules et que lui seul pouvait deviner le code choisi par Alain.

Il tenta la date de naissance de son ancien chef, celle de son ex-femme (celle du chef, pas la sienne...), l'année de fondation d'Alice Corp., même l'âge du baobab planté à l'entrée du centre technique..., mais sans succès.

Réfléchis Stan, pensa-t-il. Mets toi dans la peau d'Alain. Personne ne doit découvrir ce code à part ton collègue le plus proche, c'est ton unique volonté. Il est relié forcément à un événement ou une chose qui ne vous appartient qu'à tous les deux.

Il recommença à faire tourner les roulettes en aluminium, tenta un dernier numéro et Euréka ! La boîte s'ouvrit laissant apparaître un petit bout de papier rempli de chiffres.

-       Alain, tu étais vraiment le plus fort ! s'exclama-t-il. Penser à mettre le numéro du premier prototype du programme « Taxi Robot » sur lequel on a travaillé jusqu'à pas d'heure pendant deux ans, c'était vraiment une idée de génie !

Les trois compères replongèrent alors dans la foule et Arnaud qui ne voulait pas partir tout de suite se remit à danser avec quelques autochtones masquées à jupes fleuries sous les regards amusés de Mendes et de Stan.

*****

           Pendant ce temps là, au sommet de la tour centrale du complexe d'Alice Corp., le grand blond était pensif. Si son père le voyait.

Assis là, dans son bureau, il pouvait s'imaginer survoler la nappe de brume, de sa naissance au Nord sur la baie de San-Francisco jusqu'à son enroulement sur les monts Santa au sud-est.

Fils d'un magnat des transports maritimes, multimilliardaire, son avenir avait était programmé d'avance. Envoyé dans les collèges et universités les plus réputés, il n'avait manqué de rien... Sauf de l'amour de ses parents.

Sa mère, délaissée par son mari et usée par ses multiples conquêtes extraconjugales, sombra au fil du temps dans l'alcoolisme.

Le riche armateur, trop préoccupé par son image et celle de sa société, envoya la pauvre femme dans une institution psychiatrique où elle déclina lentement. Elle décéda le jour du quinzième anniversaire de son fils unique.

Constamment en voyage d'affaire à travers le monde, les moments de retrouvailles partagés avec son jeune fils étaient rares. Et Malheureusement il ne savait que les gâcher en traitant sa progéniture de bon à rien.. Il faut dire que celle-ci ne tarda pas à se mettre en opposition face à cette autorité paternelle détestable.

Oh bien-sûr, il alla dans de grandes universités mais en y passant plus de temps à fumer dans les fraternités qu'à assister aux cours dans les amphithéâtres.

Le décès de son père fut comme un électrochoc. Le riche héritier se retrouva au sommet d'une montagne d'argent avec une énorme société maritime sur les bras. Trop occupé à inséminer les riches héritières cotoyées dans différentes bringues de la jet set californienne, il n'avait pas anticipé cet héritage. Il ne voulut surtout pas prendre la suite de son géniteur. Il licencia tous les conseillers du patriarche et revendit la société.

Il voulut effacer complètement l'image de ce père et lui prouver qu'il pouvait édifier sa propre réussite.

Connelly, car il s'agit bien de lui, rencontra alors Alain Mallet à Las Végas au bar du Caesar Palace. L'héritier venait pour un tournoi de poker et se taper quelques prostituées, Alain, pour le Salon des nouvelles technologies appelé à l'époque : le CES. Le français l'avait séduit par sa volonté de changer le monde. Le riche jeune homme, saisissant l'opportunité, lui fit une proposition de rachat d'Alice Corp. que le technicien fou ne put refuser.

Même si la boîte était à la recherche d'un second souffle ces dernières années, depuis cette rencontre, l'irlandais l'avait développé avec un certain succès. Non pas pour changer le monde comme le désirait Alain, mais pour devenir l'égal de son père.

Et me voilà dans ce superbe bureau ! Tu vois papa, le tien à côté ressemblait plutôt à la case de l'Oncle Tom non ? se dit-il d'un air moqueur en observant le soleil se coucher sur la baie.

-       Dring ! Dring Dring !! ....

Le silence fut alors rompu par la sonnerie du téléphone posé sur l'immense table en marbre blanc.

-       Allo oui ? Ça y est c'est fait ? dit Connelly d'une voix détendue avant de poursuivre...
L'injection a fonctionné ? L'implant est-il bien arrivé dans le sinus carotidien ?
Parfait... Vous recevez le signal et vous pouvez maintenant le suivre ?...
Bon boulot, merci !

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