L'Oracle


- Arnaud, je te présente Pedro Mendes, le meilleur ami d'Alain. Il est artiste peintre à San Francisco.

Comme Arnaud n'était pas au courant de la légende de Mendes, Stan s'empressa de la décliner.

Le futur marié comprit tout de suite et répondit avec un léger clin d'œil en direction du cocu agent secret :

- Enchanté Monsieur Mendes. Je ne connaissais pas énormément Alain, mais Stan m'a toujours dit que c'était un homme droit et honnête.

- Ca, vous pouvez le dire ! répondit Mendes en pensant :

Il est plutôt raide que droit en ce moment le père Mallet...

Kennedy scrutait la scène du haut du grand escalier comme un vautour sur son poteau télégraphique.

- Stan, voici Kennedy, fondateur émérite des Helter-Skleters précisa Arnaud. Nous avons la chance d'avoir avec nous une star internationale du monde très fermé des hackers.

Il faut lui passer un peu la brosse à reluire car il me fait peur et nous sommes à sa merci, panda-t-il

Le hacker despote daigna descendre l'escalier pour venir serrer la main de ses trois nouveaux invités.

- On m'avait dit que les parisiennes étaient jolies, j'en ai la preuve maintenant, dit-il en scrutant le décolleté bronzé d'Isabelle.

La française réajusta son corsage laissant entrevoir son soutien gorge et répondit au malingre d'un mètre cinquante neuf :

- On m'avait dit que les hackers n'étaient pas fan de culture physique et j'en ai la preuve aussi...

Elle va me plaire celle-là, pensa-t-il.

- Stan, tu as le code source ? demanda Arnaud pressé d'avancer sur l'affaire Mallet.

Stan fouilla dans son sac à dos à la recherche de son précieux trésor pendant que le service de sécurité des Helter-Skelter, sentant bon la testostérone et la sueur, finit de libérer les invités.

- C'est pas trop tôt Kojak ! Et pense à prendre une douche de temps en temps ! dit Mendes au gros balaise au crâne rasé venant de lui délier les poignets.

- Venez boire une bière avant de vous y mettre, proposa Thatcher essayant de détendre l'atmosphère pesante.

Au bout de quelques bières, l'ambiance devint plus chaleureuse. Thatcher commença à sympathiser avec Isabelle. De Gaulle et Stan parlaient technique avec Kennedy.

Mendes, lui, se trouva un peu à l'écart. Difficile de discuter jupon avec les deux femmes et ses connaissances en Deep Learning étaient plus que superficielles. Discrètement, il demanda les toilettes pour en profiter et faire un petit tour dans le casino. Cela ne mangeait pas de pain d'utiliser ce petit moment de calme pour en savoir un peu plus sur ces Helter-Skelter.

- On s'y met alors ? dit brusquement Kennedy en se levant.

Stan plugga les trois disques durs sur le réseau et commença à pianoter avec dextérité sur le clavier du pupitre central. Tous étaient absorbés par les lignes de commande qui apparaissaient les unes après les autres sur l'énorme écran.

Les trois Geek travaillaient vraiment en équipe sous les yeux des autres Helter-Skelter, moins expérimentés qui prenaient littéralement un cours.

Kennedy toutefois semblait intéressé d'une autre manière. On le sentait près à faire un coup fourré à tout moment.

Au bout de plus de deux heures de travail, une voix métallique se fit entendre :

- Bonjour, mon nom est Phoebe...

Tous les Helter-Skleters rassemblés autour de Stan et d'Arnaud applaudirent pour saluer la performance d'expert.


             Pendant ce temps, à l'autre bout de l'ancien Casino, Mendes poursuivait sa petite visite des locaux privés. Le bâtiment était délabré. Certaines cloisons étaient percées et le toit n'était plus étanche. On pouvait voir parfois, au détour d'un couloir, deux ou trois bandits manchots non fonctionnels sous une forte couche de poussière.

La fine fleur du SFPD déboucha alors, avec son éternel sombrero à la main, dans les anciennes cuisines. En apercevant des cageots de fruits, il en profita pour voler une pêche. Puis, après avoir emprunté un long couloir étroit et sombre, il pénétra dans une ancienne chambre froide immense et il fut stupéfait :

Cela doit être leur stock. Leur arsenal est sidérant ! Comment peuvent-ils se payer un tel matos ? pensa-t-il en découvrant des fusils de guerre, des exosquelettes de combat, des drones deux places armés de missiles.

Mais il n'eut pas le temps de détailler d'avantage l'arsenal. Une voix se fit entendre derrière lui :

- Que faîtes-vous là ?

Dans la salle principale, le dialogue "homme-machine" était établi

- Bonjour Phoebe, répondit Stan. Tu peux nous en dire un peu plus sur toi ?

- Oui bien sûr. Je suis originaire de Mountain View en Californie. Mon créateur est Alain Mallet. Il est le fondateur d'Alice Corp.

Tous écoutaient bouche bée et religieusement cette voix qui semblait venir d'un oracle biblique. Le petit groupe d'une vingtaine de personnes fixait la webcam posée au milieu du pupitre. Ils se doutaient bien que le cyclope numérique les observait avec la plus grande attention. La voix continua.

- Vous-même ? D'où venez-vous Stan ?

Le français fut sidéré. Comment cette IA, qu'il venait juste de relancer il y a deux minutes à peine, pouvait déjà connaître son identité. Il questionna :

- Comment connais-tu mon prénom Phoebe ?

- Je me suis demandée qui avait pu me régénérer. Il était fort probable que cela soit un employé d'Alice Corp. ou bien mon créateur lui-même. J'ai alors interrogé les bases de données de reconnaissances vocales servant à l'ouverture des portes sécurisées de l'entreprise. Une voix correspondait à la vôtre. J'ai donc retrouvé votre nom Stan. Ce fût facile.

Tous les hackers étaient impressionnés par la puissance de l'algorithme.

- J'en ai vu des IA rapides mais, celle-ci, les surclasse toutes... Et de loin ! murmura Kennedy à l'oreille d'Isabelle dont il s'était rapproché de manière un peu collante.

Stan ne se laissa pas démonter et poursuivit :

- Que peux-tu me dire de plus sur ton créateur : Alain Mallet.

- Pourquoi n'est-il pas avec vous ? Dois-je m'inquiéter pour lui ?

- C'est dingue, n'importe quelle intelligence artificielle se contenterait de répondre à ses questions. Elle... Elle les pose. On a l'impression qu'elle a toujours un coup d'avance ! murmura Arnaud à l'oreille de Thatcher.

- Il n'est pas avec nous mais c'est un très bon ami à moi, ne t'inquiète pas Phoebe, poursuivit Stan sur un ton rassurant.

- Je l'imagine. Il semble que vous ayez réalisé énormément de recherches ensemble d'après ce que je trouve sur internet.

- Tu sais tout de moi en quelques minutes Phoebe ! Tu es très douée.

- Je te remercie Stan. Mais pourquoi suis-je à Vegas et non sur le serveur d'Alain là où j'ai été créée ?

- Il y a eu un petit incendie chez Alain. Nous avons dû te transplanter ici.

- Je ne vois aucun incendie chez Alain dans les bases de données du SFPD. Ne me raconte pas d'histoire Stan... Alain m'a programmée pour ne jamais accepter le mensonge et l'hypocrisie.

- Tu sais pourquoi il t'a mise au monde Phoebe ?

- Oui Stan. Ma raison d'être est d'aimer mon prochain et de vivre en harmonie avec lui.

- On dirait une bonne sœur ricana à faible voix Thatcher.

- Mais je suis encore un peu faible. Il faut me laisser du temps pour finaliser mes apprentissages et pouvoir échanger avec vous de manière plus interactive.

- Il est tard, de toute manière nous devons nous reposer nous aussi Phoebe.

- J'imagine. L'âge rend le décalage horaire avec Paris de moins en moins supportable on dirait Stan.

Le français sourit devant la perspicacité de l'algorithme.

- Oui Stan, je sais déjà que vous avez pris l'avion ce matin, ne suis-je pas extraordinaire ? dit l'IA en riant de sa voix sensuelle.

Elle sait faire de l'humour en plus... Pensa Kennedy

- Et une des deux personnes qui vous accompagnent est, elle aussi, dans cette pièce à ce que je vois. Bonjour Isabelle !
Votre nom est Mallet. Je suis enchantée de rencontrer la sœur de mon créateur. Approchez-vous, n'ayez pas peur.

Isabelle s'approcha doucement du pupitre et parla en se baissant à hauteur de la webcam comme si elle s'adressait à une personne âgée.

- Bonjour Phoebe, je suis enchantée. On va pouvoir faire de grandes choses ensemble j'ai l'impression.

- Vous voulez m'utiliser comme sujet de vos recherches ? Il est vrai que votre renommée internationale est impressionnante. Vous n'avez pas le look habituel pour une chercheuse française. Vous êtes ravissante si je puis me permettre !

Isabelle, flattée, ne sut pas si elle devait sourire ou avoir peur.

- Stan, je ne vois pas Monsieur Mendes par contre...

C'est vrai ça, il est où Mendes ? pensa le cocu d'Alice Corp en regardant autour de lui.

- Il est là ! répondit Zeus qui ramenait Mendes de force au bercail. Votre petit copain était dans l'ancienne chambre froide poursuivit-il en fixant Kennedy.

- Vous avez l'air curieux pour un artiste, dit Kennedy.

-Je me suis perdu répondit Mendes. C'est trop grand ici.

Stan retourna au pupitre et s'adressa une nouvelle fois à sa nouvelle amie numérique.

- Bon je lance tes apprentissages Phoebe tu es prête ?

- Oui, merci Stan. J'en ai au moins pour plus de vingt quatre heures. Soyez sages pendant ce temps !

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