Crime Scene - Do Not Cross [New Version]


Une fois raccroché, Stan se sentit à nouveau extrêmement seul. A la fois physiquement car les bureaux étaient vides, mais aussi psychiquement. Il se força à prendre un peu de recul et essaya de réfléchir.
Son regard se porta de l'autre côté de la cloison vers le bureau d'Alain. Il était en désordre, sans dessus dessous, comme si quelqu'un avait cherché quelque chose sans le trouver. Cela ne pouvait pas être la police, c'était trop tôt car toutes les équipes scientifiques étaient concentrées sur la scène du crime près de Steve Jobs. Il y avait tout de même une banderole en plastique " Crime Scene - Do Not Cross" qui bloquait l'accès au bureau du défunt. Elle avait dû être tendue par Mendes. Stan avait aperçu un rouleau jaune et noir dans les mains charnues du cadre du SFPD lorsqu'il prit congé.

Mais la curiosité du français l'emporta. Il scruta encore autour de lui : personne à l'horizon. La législation imposait l'absence totale de caméra dans le bureau et il le savait. Il se mit donc à genoux pour passer sous la banderole jaune striée de noir. Il se devait de découvrir ce qu'il était arrivé à Alain et le bureau du défunt devait sûrement regorger d'indices. Mais il devait se dépêcher, les flics allaient venir rapidement pour faire leur boulot.

La languette de plastique franchie, il se releva, essoufflé de stress, et commença à fouiller dans les papiers étalés partout.

Il n'y avait là que de vieilles notes de service et des feuilles de brouillons avec des logigrammes. On pouvait voir aussi des pièces de rechange pour les véhicules du programme humanity : de vieux radars, des caméras d'ancienne génération, des capteurs ultrason, des lidars... Et dans un coin, un vieux pins en forme de losange Renault.

Tu avais gardé cela, c'est drôle ! pensa Stan avec un petit sourire attendri.

Avant de partir pour les USA, les deux s'étaient rencontrés en France chez ce grand constructeur historique justement. Stan, déjà passionné par les algorithmes d'IA entropiques, avait été recruté par son futur mentor pour la réalisation d'une thèse de doctorat sur ce sujet. À l'époque, il avait été demandé à tous les collaborateurs d'arborer le pins de la marque au losange. A l'image des basket rouges plus tard, inutile de vous préciser que l'exemplaire de la petite broche transmise à Alain n'avait jamais été épinglé sur sa chemise.

Il doit bien y avoir quelque chose, Stan réfléchis !

Le nouveau cocu se parlait à lui-même tout en continuant à chercher. Il fouilla dans les tiroirs et les placards, mais la tâche était immense tellement Alain aimait tout garder.

Rien de rien. Alain aide moi !

Stan interpella son chef devenu expert de la nage immobile entre deux eaux en sachant bien qu'il n'aurait pas de réponse. Mais cela l'encouragea à continuer de fouiller.

* * *

- Ça y est ? Vous en avez fini ? Le corps est parti pour la morgue ?

Mendes, venait de croiser l'équipe scientifique du SFPD et leur tendit le rouleau de banderole « Crime Scene – Do Not Cross ».

- Oui, mon lieutenant lui répondit un gars portant une combinaison blanche le couvrant de la tête au pied.

- Du coup, allez jeter un œil là-haut au burlingue du nageur refroidi, reprenez ce rouleau et cette godasse aussi.

- Oui donnez-moi tout ça. Justement nous étions en train d'y aller.

- Et dépêchez-vous ! Vous n'êtes pas réveillés ou quoi... vous et votre bande trop bien payée de cosmonautes de la rubrique « faits divers ». Nous ne sommes pas dans une série télé, là ! Il n'y a personne pour le moment dans les bureaux mais il ne faudrait pas que des curieux nous fasse perdre de précieux indices.

- On y va, on y va... répondirent en cœur les hommes qui avaient du mal à regarder devant eux avec leurs masques à gaz embués.

***

Oh Miracle, Stan aperçut la sacoche de l'ordinateur portable de son ex-chef.

Il n'a tout de même pas laissé son PC ici ? se dit-il persuadé qu'il n'allait trouver qu'une petite mallette de tissu vide.

A sa grande surprise, l'ordinateur était là. Il l'ouvrit avec empressement sachant bien que la police devait être en route vers le bureau. Mais à quoi cela allait lui servir, il ne connaissait pas le mot de passe d'Alain. Tremblant de stress, il tenta tout de même de taper les dates de naissances d'Alain, de son ex-femme, d'Alice leur unique enfant décédé. Puis il poursuivit par les prénoms, il tenta même de taper "Stan"... mais rien ne fonctionnait. Le laptop restait irrémédiablement muet.

Il faut que j'accède à ce PC, c'est le seul moyen de comprendre ce qui s'est passé marmonnait- il.

***

- On y est... connecteur 4C. C'est derrière cette porte ! La voix du sergent, essoufflé par la montée des quatre étages, résonnait dans la cage d'escalier à travers son masque à gaz.

- Ce n'est pas trop tôt !... rouspéta le dernier de la bande des marcheurs blancs désigné non volontaire à la lourde tâche de transporter les valises de matériel d'analyse.

Stan les entendit arriver. Mais il fallait qu'il trouve absolument. Il continua à tester encore de nouveaux mots de passe.

- Monsieur ! Monsieur ! appela le premier de cordée des chasseurs alpins de la scientifique.

- Monsieur ! S'il vous plaît arrêtez !

- Oui, pardon ?

- Monsieur, vous savez où est le bureau de Mr Alain Mallet ?

- Oui, désolé je ne vous avais pas entendu. C'est celui près de la fenêtre là-bas. Je crois qu'un de vos collègues est déjà passé le sécuriser.

- Merci beaucoup !

Stan, avait eu le temps finalement de mettre l'ordinateur d'Alain dans son sac à dos et sortait du plateau en croisant les experts médico-légaux qui arrivaient.

Il sortit du bâtiment et alla observer tout de même la scène tragique en cours près de l'étang baptisé avec le nom de l'inventeur du Macintosh.

Les trois quarts de l'entreprise devaient être là à regarder le drame effroyable qui se déroulait. Stan n'arrivait pas à savoir si tous ces badauds étaient rassemblés par simple curiosité malsaine ou par sympathie pour le fondateur d'Alice Corp. Certains fumaient et semblaient ne rien en avoir à faire. D'autres affichaient des mines tristes et même, certaines femmes pleuraient.

Mais il n'y avait plus rien à voir. Le corps était parti et les hommes en uniformes noirs bardés des lettres jaunes "SFPD" pliaient bagages. Signe de leur départ, les sirènes des Ford Crown Victoria et autres Dodge Charger LX hybrides recommençaient à se faire entendre.

- Allez, retournez travailler s'il vous plaît. Il n'y a plus rien à voir. Circulez !

Un policier en képi s'acharnait à disperser les curieux. Stan se dirigea vers la sortie du site. Il ne pouvait rester là plus longtemps avec le pc portable d'Alain dans son sac. Il essaya de marcher le plus vite possible sans pour cela paraître suspect et arriva enfin aux portes automatiques du site.

Re-bonjour Stan. Félicitations ! Vous quittez très tôt aujourd'hui. Il est onze heures cinquante-six. Ceci vous fait redescendre votre durée de présence moyenne hebdomadaire de...

Le portillon n'eut pas le temps de finir sa phrase. Une autre voix de synthèse se fit entendre :

- Bonjour monsieur Martin ! Veuillez me suivre s'il vous plaît.

Stan s'arrêta. Il connaissait cette voix. Elle le glaça en une fraction de seconde. Une peur bleue l'envahit. L'avaient-ils vu prendre le laptop ? Il n'y avait pas de caméra dans les bureaux pourtant, il en était sûr.

Il se retourna doucement et essaya d'arborer sa légendaire « poker face ».

Elle ne fonctionne déjà pas dans tes parties de Texas Hold'em avec tes potes le samedi soir, ce n'est pas comme cela que l'on va s'en sortir, se dit-il.

Mais c'est ce qu'il avait de mieux.
Une fois retourné il vit Titan qui le scannait avec ses deux leds perçantes.

- Oui, que se passe-t-il ? déclara le français en essayant de faire chevroter sa voix le moins possible.

- Monsieur Connelly veut vous voir. Pourriez-vous me suivre s'il vous plaît ? 

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