Cabines d'essayages [New Version]
Stan en se levant, ne savait pas quoi dire à Cécile encore une fois. Il devait constamment peser le moindre mot. Il ne fallait surtout pas aborder les sujets qui pouvaient la fâcher. Il devait être concentré pour ne pas la contredire et surtout ne pas aborder le futur. S'il exprimait une idée au sujet d'un quelconque projet d'avenir, Cécile lui retournait une phrase cinglante du type :
« Mais tu sais Stan, à cette date, nous n'habiterons plus ensemble ! » ou « Arrête ! Il n'y a plus d'espoir ! Alors cesse de faire des projets avec moi ! »
Parfois il se demandait s'il la connaissait vraiment. Elle semblait plus attachée à ses dents de lait qu'elle gardait dans une petite boîte qu'à ses conjoints jetés comme des Kleenex inutiles.
Dans tous les cas, il ne devait alors surtout pas répondre pour éviter une escalade qui la ferait lui échapper encore un peu plus.
Il ne lâchait rien. Il avait toujours été combatif dans sa vie. Il était donc concentré toute la journée sur ce qu'il devait dire ou ne pas dire. Il se rapprochait des enfants. La seule chose qui pouvait le détendre et lui faire oublier cette atmosphère pesante. Il arrivait toujours à amuser et faire rire ses deux petites filles. Il aimait le faire et éprouvait de la joie à entendre leurs rires qui lézardaient les murs pour paraphraser Renaud ce chanteur du vingtième siècle qu'adorait sa mère. Il aimait d'autant plus le faire qu'il sentait que cela faisait rire aussi Cécile. A chaque rire des petites, il la regardait discrètement du coin de l'œil et il la voyait sourire. Parfois même, elle le regardait dans les yeux.
Il s'était levé avant elle pour donner le petit déjeuner aux filles pour qu'elle puisse se reposer. Comme tous les jours, il lui avait préparé un café, un jus d'orange frais et des tartines de pain grillé à la confiture de fruits rouges. Même si elle n'arrêtait pas de lui dire qu'il n'y avait plus d'espoir, elle le remerciait chaque matin pour ces petits déjeuners et mangeait les tartines. Il ne comprenait pas pourquoi elle continuait à les manger. Il interprétait cela comme un signe d'espoir. Ce signe qui peut sembler dérisoire lui donnait du courage pour toute la journée. Parfois même, si elle se levait avant lui, elle lui préparait son café. Alors bien-sûr, lui n'avait pas le droit à des tartines, mais ce simple café le mettait en joie.
Ce matin-là, il vit le chat du voisin dans le petit jardin carré de la maison où trônait un fier cerisier qui n'avait jamais donné de fruits. Il s'agissait d'un gros chat castré de couleur noir, fauve et blanc. Il avait vécu tranquillement depuis sa naissance il y a sept ans. Son territoire comprenait le jardin de ses maîtres bien-sûr mais aussi celui de Cécile et Stan. Cependant depuis un mois, lui aussi devait faire face à la concurrence d'un chat de gouttières noir et blanc, venu de nulle part. Evidemment, Stan s'était vite identifié à ce gros matou maître des lieux jusqu'à présent. Ce jour-là, il le vit détaler avec frayeur devant le chat de gouttière triomphant. Stan ne trouva donc rien d'autre à faire que de sortir avec fureur et chasser le noir et blanc. Forcément, il ne manqua pas de se faire reprendre par Cécile le traitant de fou à réagir sans raison comme cela.
- Ca ne va pas ? Tu vois le bruit que tu fais ? Tu as fait peur aux enfants ! Quelle est cette violence soudaine ? Tu me fais vraiment peur Stan, continue comme cela et je te retire les enfants complètement !
Bien-sûr, il ne dit rien de peur d'aggraver les choses. Ne comprenait-elle vraiment pas la symbolique de cette scène entre les deux chats ? Était-elle complètement déconnectée de la réalité ? Était-elle anesthésiée et hypnotisée à ce point par son amant et son sexe aussi gros soit-il ? Elle réagissait comme une adolescente. Même s'il se l'interdisait, elle baissa encore un peu dans l'estime de Stan, qui la pensait plus perspicace que cela.
Après avoir pris sa douche, il ne savait pas s'il devait se montrer dénudé devant elle ou au contraire se cacher. Peut-être qu'en se montrant elle allait se dire que finalement il était encore un peu désirable. Ou alors, au contraire, se dire que décidément son amant était le bon choix.
Le peu qu'il lui restait de fierté le poussait soit à faire "comme chez lui" et n'en n'avoir que faire, ou à l'inverse, ne rien montrer de son corps car elle ne pouvait pas tout avoir. Il choisit le compromis : nu en haut et un pantalon en bas.
On dirait Bruce Lee dans La Fureur de Vaincre, pensa-t-il.
Enfin, il a bien morflé Bruce ! conclut-il toujours guidé par son autodérision habituelle en regardant ses abdominaux mort-nés.
Elle, en revanche, n'avait jamais cessé de se promener nue devant lui. Cela ne semblait pas la gêner. Il ne savait pas s'il devait la regarder ou détourner le regard. Cela lui faisait si mal de la voir comme cela et de ne pas pouvoir la prendre dans ses bras.
Parfois, il se surprenait même à avoir un début d'érection. Mais pas le genre d'érection voulue qui met en joie un homme... Plutôt une érection réflexe non assumée qu'il voulait cacher.
Comme s'il avait honte ! Il avait dans le regard cette lueur d'intelligence que l'on peut voir chez certains ânes. Vous savez ? Ceux que l'on croise parfois à la campagne. Sans savoir pourquoi, ils se surprennent à avoir le sexe en érection, le gland trainant presque par terre sans raisons, seuls à brouter du foin.
Elle, ne semblait rien remarquer. Souvent, il lui arrivait même de lui montrer pendant de longues minutes les vêtements qu'elle avait pu acheter la veille. C'était la pleine époque des soldes d'été et elle passait des journées entières dans les Outlets. Elle refaisait ses essayages de pantalon, chemisiers et même de lingerie devant lui. Elle lui demandait même son avis en affichant les vêtements en réalité augmentée sur son corps à demi-nu. Pourquoi faisait-elle cela ? Il ne pensait pas que c'était par vice ou pour lui faire encore plus de mal. Il préférait penser que c'était par insouciance ou égoïsme. Surtout, il savait que ces strings étaient destiné à son amant et aux photos 3D qu'elle devait lui envoyer.
Cécile n'avait pas la taille mannequin mais était dans la pleine force et l'assurance de ses quarante ans. Elle aussi avait maigri depuis trois ou quatre mois. Certainement depuis la rencontre avec son amant pensait Stan. Elle arborait des seins en poire généreux, chauds, doux et gorgés de plaisir. Ses cheveux blonds, une fois détachés, tombaient de manière sensuelle sur ses épaules. Cela la rendait encore plus désirable aux yeux de Stan. Ses jambes étaient musclées et fermes. En la regardant dénudée devant lui, Stan essayait de se souvenir de la sensation qu'il éprouvait lorsqu'il pouvait encore être en elle. A sa grande tristesse, il s'en souvenait de moins en moins.
Après une dizaine de minutes de ce défilé de mode pathétique et malvenu dans le dressing, il se dit qu'il devait aller tout de même au bureau.
C'est à cet instant que son téléphone sonna.
- Allo, oui ? Oui c'est moi. Quoi ? Comment ça ? D'accord je suis chez moi, j'arrive tout de suite.
- Que se passe-t-il ? dit Cécile tout de même un peu inquiète du ton blême apparu subitement sur le visage de Stan.
- Alain est mort au bureau. Je dois y aller tout de suite.
Il crut apercevoir un semblant de compassion dans le regard de sa future ex-femme puis entendit derrière lui le claquement sourd de la grosse porte blindée de la maison en sortant.
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