Jour 2 : Au bout du tunnel


C'est un dimanche mitigé qui m'attend sur la route des vacances. Tantôt de la pluie, tantôt du soleil, ce temps ne donne pas envie de prendre des vacances. Cela fait des heures que je conduis, la fatigue de la conduite commence à me peser. À la prochaine aire de repos je ferais une pause, mais là je dois affronter le tunnel de la Fourvière, à Lyon. Le decor aussi n'incite pas au vacance. Les arbres autour sont sans feuilles, morts sur plusieurs kilomètres. La végétation est jaunie par l'été persistant, et l'entrée du tunnel, de béton froid et désuet, nous donne plus l'impression de rentrer dans une usine d'incineration. Même le lion ou le dragon dessiné sur le devant est d'un autre âge, lavé par le soleil, la pollution et la pluie. Évidement, la raison qui est ma seule compagnie se grésille dès mon entrée dans le boyau de béton. La circulation se densifie, et les lumières sur le côté passent de manière régulières et m'hypnotisent. Pendant un instant je ferme les yeux, juste une seconde. Je les réouvre sur une grande chose blanche, que je comprend vite être mon airbag. Je suis désorienté, je ne comprend pas tout de suite ce qui se passe.

J'arrive avec grande peine à sortir de ma voiture, enfin de ce qu'il en reste. Elle s'est encastrée dans le mur du tunnel, le nez écrasé. En regardant autour de moi, rien, personne, ni dernière moi, ni devant moi. Que s'est-il passé ? Où sont-ils tous passé ? J'attend de voir si quelqu'un arrive, mais je dois me rendre à l'évidence, personne ne vient. Pour couronner le tout, mon téléphone ne s'allume pas, comme la voiture. Au bout de 10 minutes, je me résigne à marcher vers la sortie du tunnel, je ne dois pas être loin. Quelques mètres plus loin, je vois un téléphone de secours. Je me précipite dessus, mais peine perdu, aucune tonalité, aucune réaction même en appuyant sur les touches. Le silence ambiant est juste entrecoupé par des bourrasques de vents, réels seules autres voyageurs de ce tunnel. Je me résous à marcher, dix minutes, vingt minutes, une heure, deux heures, avant de me rendre compte que je tourne en rond. Je reviens à mon point de départ alors que j'ai marché tout droit, l'autre sens me donne le même résultat. Le vent a tendance à s'atténuer avec le temps, les lumières aussi. Je dois me rendre à l'évidence, je suis piégé.

Plus le temps passe, plus j'ai l'impression que ce tunnel rétrécit. Je n'entend plus que le silence, et je ne vois que par une lumière tamisée. J'attend près de ma voiture en miette, le seul objet ici. Je regarde au loin, le bout du tunnel est noir comme de l'encre, et comme le reste, j'ai l'impression qu'il s'approche de moi. Derrière moi aussi ce même brouillard noir angoissant avance doucement. Mon corps devient de plus en plus lourd, je suis de plus en plus fatigué alors que le boyau de béton se contracte. Je n'arrive plus à bouger, le brouillard noir s'avance doucement, m'encercle de plus en plus, je ne vois que ça, je ne vois que lui, je ne ressens plus rien, je me laisse tomber comme atteint de grande fatigue, le noir m'enveloppe, le noir me pénètre, je suis le noir...

...

L'urgentiste essaye une dernière fois, sans succès. Le coeur de ce malheureux n'arrive pas à repartir pendant que l'ambulance fonce à toute allure, se frayant un chemin dans la foule de voiture. Il soupir.

« Il est parti... prévenez l'hosto, on n'a pu rien faire. »

Le passager du conducteur prend sa radio et annonce la nouvelle au PC. Il le couvre d'un drap. Encore un inconscient qui s'est endormi au volant. Encore un qui ne verra pas le bout du tunnel.

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