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-Et voilà, déclare George en posant les deux verres remplis de café frappé, et Lando hoche la tête.

-Merci. Et merci d'avoir accepté de goûter avec moi alors que tu n'aimes pas le café.

George hausse les épaules.

-Il y a des personnes qui aiment l'un, mais pas l'autre. On ne sait jamais.

Lando acquiesce avant d'attraper sa paille et de boire une gorgée. Il hausse les sourcils, et en reprend une deuxième.

-T'aimes bien, sourit George, et ça n'est pas une question, mais une affirmation.

-J'ai encore rien dit, rétorque Lando, et George rit.

-Oui, mais ça se voit sur son visage. Tu as fait la mimique de surprise dans le bon sens. Tu pensais que tu n'allais pas aimer, et finalement, tu aimes beaucoup.

Lando le dévisage quelques instants, perplexe. Depuis quand est-il capable de décrire ses émotions aussi correctement ?

-Et toi ? demande-t-il alors, et George hausse les épaules.

-Je n'aime pas. Il y a toujours le goût du café.

-Oui, c'est souvent ce qui arrive quand on boit... du café, répond Lando avec un sourire moqueur, et George sourit.

-Merci pour cette analyse, Lando.

Lando repense à cette discussion durant le reste de la soirée, et une fois couché, il ne peut pas dormir. Il ne pensait pas être aussi transparent pour George. Bien sûr, tout le monde sait reconnaître les émotions sur les visages des gens, mais sa description était si précise et détaillée qu'elle demandait une bonne connaissance de la personne et de ses réactions.

Lui aussi, il savait faire ça avec George. Il avait su reconnaître la tasse à café de chez Williams simplement en regardant ses yeux.

Qu'est-ce qui était en train de se passer ?

Après les qualifications du samedi, Lando se promène sur le paddock à la recherche d'une personne bien précise. Il doit lui parler.

Il le trouve devant chez Ferrari, en train de discuter avec Charles. En le voyant arriver, Carlos semble tout de suite remarquer qu'il se passe quelque chose, puisqu'il coupe rapidement court à la conversation avec le monégasque pour venir vers lui.

Sans parler, il l'invite à s'asseoir sur un banc. Il attend quelques secondes avant de dire :

-Qu'est-ce qui t'arrives ? Je vois bien que t'es pas dans ton assiette, en ce moment, déclare Carlos, et Lando sourit timidement. Carlos le connaît trop bien.

Pourtant, en entendant cette phrase, son cœur se serre. En parler, ça veut dire rendre ça réel.

-Je sais pas si j'ai envie d'en parler.

Carlos hausse les épaules.

-Peu importe ce dont il s'agit, je n'en parlerai pas si je dois le garder pour moi, assure l'espagnol, et Lando sait qu'il a beaucoup de chance d'avoir un ami comme Carlos.

Il a besoin d'en parler. Et il n'a envie d'en parler à personne d'autre que Carlos.

-Il y a cette personne qui ne me laisse pas insensible.

Carlos hoche la tête.

-Continue. Je me doute bien que ce n'est pas ça, le problème.

-Le problème, c'est que c'est un homme et que j'aime les femmes.

Carlos sourit.

-Cette phrase est un peu contradictoire.

-Je sais, mais c'est vrai. Je n'aime pas les hommes, j'aime les femmes.

-Pourtant, tu viens de le dire, il ne te laisse pas insensible.

-Mais je n'ai pas envie. Je n'ai pas envie qu'un homme me plaise.

Carlos prend quelques secondes pour réfléchir à ses mots, avant de demander :

-Pourquoi ? Par rapport à notre métier ? Aux médias ?

-Non, répond Lando en secouant la tête. J'ai pas envie, c'est tout. J'aime pas les hommes, moi, j'aime les femmes. Il doit y avoir une erreur.

Carlos sourit. Ce n'est pas un sourire moqueur, loin de là. C'est un sourire de personne qui a quelque chose à lui expliquer.

-Lando, c'est pas comme ça que ça marche. Premièrement, tu peux aimer les deux, l'un n'empêche pas l'autre. Et tu n'es pas obligé de vouloir te coller une étiquette. Par contre, tu ne peux pas rester dans le déni ou dans le refus.

-Je voudrais juste aimer les filles.

Carlos soupire.

-Lando, t'es assez grand maintenant pour savoir qu'on ne choisit pas de qui on tombe amoureux. Homme ou femme, peu importe. Que tu veuilles essayer quelque chose avec cette personne, peu importe. Mais tu ne peux pas te battre contre tes sentiments parce que tu ne les acceptes pas. La façon dont tu le regardes ne trompe pas.

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cette discussion entre Lando et Carlos est très importante et elle est au cœur du sujet qui me tenait à cœur. dans le coming out, il y a aussi le coming out à soi-même. et je sais que pour certaines personnes c'est simplement une évidence, mais ce n'est pas toujours le cas et c'est ça que je veux représenter ici. parfois, on est dans le déni. parfois, on ne veut pas accepter, sans même penser à la réaction des autres. on ne veut pas être comme ça parce qu'on ne s'y était pas préparé alors il nous faut du temps. Lando choisit de se tourner vers une personne de confiance pour partager tout ça mais souvent on préfère le garder pour soi, j'ai mis un an à accepter que j'aimais les filles, et pendant trois ans personne n'était au courant.
c'est un sujet important pour moi, la fiction est loin d'être finie mais je voulais quand même vous remercier de lire 🤍

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