Chapitre 49 : Deux voies pour deux voix
En retard. En retard. En retard de ouf ! Je me répète en arrivant en courant à l'entrée du bon terminal, mes clefs de voiture d'une main, et mon téléphone mentionnant le lieu où je dois aller de l'autre. Mon réveil n'a pas sonné, encore. De surcroît, même en pleines vacances, la circulation est toujours aussi désastreuse. Les travaux d'été sur la Grand Central Pkwy m'ont rendu dingue une demi-heure de plus que prévu. J'arrive dans le terminal 4 en sueur, pour ne pas dire avec cette impression de moiteur extrême comparable à une cascade, et d'une humeur matinale peu commune. Une ou deux étapes de mon réveil ont été sautées, à savoir les deux ou trois cafés. Qui, à l'heure où je vous parle, apparaissent plus comme des solutions de réanimation que comme de simples breuvages. Sauté pour une raison stupide que tout le monde dans sa vie a vécu au moins une fois, le réveil qui ne sonne pas.
L'aéroport grouille de monde, de voyageurs, de travailleurs, de passants, de chauffeurs et de gens. Tout ce beau monde s'infiltre autour des panneaux d'annonces, des restaurants ou encore autour des chaises laissées à disposition des voyageurs en correspondance. J'observe tout de cette satanée effervescence, qui même postée depuis les rambardes du premier étage ne prête attention à rien. Un grain de sable au milieu d'un désert. Je tente tant bien que mal de savoir où je vais, soit vers les indications de portes de débarquements. Quel bourbier. J'espère qu'il n'a pas trop attendu... J'espère que cet idiot n'a pas osé prendre un taxi. Suite à nos quelques échanges de la veille, je me rends compte que j'ai oublié de lui reconfirmer que je venais bien le chercher aujourd'hui. Et, vous pouvez me croire sur parole, s'il est monté dans une autre voiture que la mienne c'est officiel il dort dehors.
Luke, où es-tu bon sang ...
J'effectue un tour sur moi même, ne sachant pas où donner de la tête exactement. Ne trouvant pas plus d'indications sur la localisation de mon voyageur, je me mets malgré moi à observer l'espace dans lequel je me trouve. Toutefois sans pour autant y voir plus de choses qu'à mon arrivée. Non loin de là, jeter fois ce n'est plus l'architecture moderne ou les gens que je parcours : mon esprit vagabonde vers la raison de ma présence ici à une heure aussi matinale.
Je me rappellerai toujours de nos mains l'une dans l'autre immobiles depuis de longues secondes, tout comme nos regards. Il était temps de se dire au revoir, et j'étais résolue à la prendre cette décision d'adulte. Le choix de le laisser partir vivre son plus grand rêve au détriment des sentiments que nous pouvions avoir l'un pour l'autre. Le genre de résolution douloureuse mais nécessaire pour le bien commun. Il en aurait fait de même si les situations avaient été inversées. Le genre de condamnation, où tu sais que seul le temps parviendra à rendre l'absence moins pesante, mais qu'il vaut le coup si c'est pour ne plus rendre l'autre malheureux. Je me rappelle du visage de Luke perplexe observant nos mains toujours jointes :
Notre poignée de main est ferme, professionnelle.
" Et toi, amuse-toi bien à New-York...
- On se reverra tous les trente-six du mois."
Sa référence à notre conversation dans la cuisine m'a fait instantanément sourire. J'ai essayé. Je le jure que j'ai essayé d'être raisonnable et de tout laisser derrière moi sans un regard. Seulement, quelque part au fond de moi je savais que je ne voulais pas être raisonnable. Que j'en étais incapable. J'avais essayé ce mode de vie. Qu'une vie de solitude morbide n'était pas aussi faite pour moi. À défaut de croire en une vie stable, je m'étais toujours réfugiée dans cette alternative en pensant qu'il s'agissait de la seule, où au moins personne ne souffrirait de mon inconstance. Mais alors qu'il fallait le laisser partir, je me suis aussi rendue compte que cette solitude me ferait bien trop mal. Je n'étais pas faite non plus pour elle. Alors sans vraiment réfléchir je me suis avancée vers lui afin de poursuivre notre "au revoir" de manière bien plus proche. Bien plus intéressante. Nos lèvres se sont frôlées avec légèreté libératrice, et ce pendant de longues minutes. Avant que je ne souffle au bout d'un moment :
" Finalement, je crois que nous n'allons pas être séparés très longtemps Hoffman, voire pas du tout.
- C'est une perspective assez intéressante, tu ne trouves pas ? A-t-il dit en renforçant sa prise sur ma taille afin de coller nos deux corps un peu plus l'un contre l'autre.
- Et cela me rend très heureuse, ai-je murmuré en approfondissant un peu plus l'objet de notre au revoir."
Après cela, un nouveau défi s'est lancé. Une relation à distance entre deux états. À très exactement 328,49 kilomètres à vol d'oiseau. 3h56 de voiture. Et 55 minutes d'avion.
Pour résumer : un supplice.
Mais en même temps une révélation. Par cette distance nous avions tout deux une raison de se battre pour que cette relation marche. Pas de doutes possibles, et en même temps, il n'y avait pas vraiment de place non plus pour nos doutes respectifs. Comme si tout coulait de source. Cela n'empêchait pas l'absence de peur certains jours, seulement d'une volonté à ce que cela avance dans le bon sens. Nous étions tous les deux dans nos fonctionnements respectifs, nos travails, nos vies. J'avais toujours été réticente à montrer mes émotions à mes partenaires. Trop pudique à me laisser aller, ou encore à m'attacher sincèrement. Ou peut-être que je n'avais jamais vraiment connu le manque aussi. Cette douce torture avait été ce qu'il nous fallait aussi pour prendre conscience de l'étendue de notre attachement l'un pour l'autre. Le peu de moment où nous arrivions à être libre nous le passions dans l'État voisin. La valeur du peu de jours qui nous étaient accordés rendait chaque seconde, chaque sourire et chaque caresse encore plus précieuse. Et je pèse mes mots.
J'ai vécu les six premiers mois de notre relation dans le travail constant à la mise en place de toute la phase marketing et communication de « The Highlight », tout comme Luke finalement, qui partait très souvent du jour au lendemain au milieu des déboires politiques de la capitale. Le travail que j'entreprends actuellement avec Olivia tend à aborder les sujets les plus épineux sans aucune influence. Autant vous dire que c'est un travail de longue haleine. Trouver les bons partenaires, négocier les contrats, des collaborateurs, ainsi que monter le projet pour qu'il fasse du bruit... C'est colossal. Ne pas avoir à me sentir apte à répondre un peu trop tard à un message ou encore de louper un appel est un phénomène étrange lorsqu'on y est pas habitué. On s'en veut d'abord terriblement, la boule au ventre lorsque les résonances dans le téléphone durent, puis c'est pire lorsque l'autre décroche. J'imaginais les premières fois Luke crier ou encore sentir la déception de mon comportement dans sa voix, mais non. Cela ne changeait rien, il m'interrogeait avec enthousiasme sur mes activités et mes journées. Ce fut d'abord incongru puis à terme complètement naturel. Mon compagnon ne faisait qu'attendre un minimum de communication et de présence dans sa vie. Je ne pouvais pas être le centre de la sienne pour l'instant alors il n'aurait pas pu exiger la réciproque disait-il. Nous avions les mêmes attentes. Si quelques soirs trop dans le travail nous ne parvenions pas à nous parler vraiment, entendre sa voix, une fois rentrée chez moi, par l'intermédiaire de mon téléphone ou de mon ordinateur, l'avoir quelques minutes ensemble était ce qui me faisait attendre chaque fin de journée avec impatience. À défaut de savoir où nous allions vraiment, j'ai découvert la sensation dont mon père me parlait tant de fois. J'ai compris les étoiles dans les yeux qu'il pouvait avoir en parlant de son être aimé. Celle que j'écoutais et regardais toute mon enfance avec admiration, alors qu'une partie de moi savait que jamais je ne pourrais prétendre à cela. Auprès de Luke je suis épanouie. Heureuse. Confiante. Nous ne marchons certes pas sur le même chemin, toutefois nous sommes côte à côte. Une équipe.
" Elie ? Elie ? La voix grave de Luke me ramène peu à peu à la raison."
Je reprends conscience du monde et du bruit autour de moi, et après constatation de sa présence à quelques mètres de moi, je m'élance afin de lui sauter dans les bras, avec tout l'enthousiasme dont je suis capable. Une semaine de congés à l'avoir que pour moi. Une infime partie de moi est un peu terrifiée à l'idée que ce séjour entre nous se passe mal, mais à la vue de Luke, tout disparaît soudainement. Il ne s'agit que de cette ancienne peur qui cherche encore une fois à me faire croire que je ne mérite pas une telle relation. On s'embrasse comme dans toute fin clichée de film au milieu de l'aéroport sans la moindre gêne, jusqu'à en perdre le souffle. Je me rends compte que j'ai compté les jours jusqu'à son arrivée pour la fête du 4 juillet. Et je sais qu'il a sa manière de me tenir contre lui, qu'il en a été de même de son côté. On s'observe un long moment. Son regard est aussi fatigué que le mien, et sa barbe est un peu trop longue. Un grand sourire illumine mon visage en voyant le tee-shirt froissé qu'il porte, comme si lui aussi était tombé du lit. C'est décidément bien l'homme que j'aime qui se tient devant moi.
" Bonjour à toi aussi ma chérie, il chuchote contre ma tempe avant de l'embrasser elle aussi.
- Tu as fait un bon voyage, je demande, ma mauvaise humeur loin derrière moi ?
- J'étais entre un bébé qui pleure et un mec qui ronflait tellement fort que tout l'avion demandait grâce, il lève les yeux au ciel, mais bon ça valait le coup pour te voir sur le pied levé à 8 heures pour un 4 juillet.
- Tout de suite les grands mots, je réponds en me détachant de lui.
- Ah je t'assure que tu as la même tête que la dame qui avait l'air d'avoir dormi moins de dix heures en trois jours, il éclate de rire.
- On voit son sens du compliment, j'élude, parce qu'au fond de moi j'ai une idée de ma tête. On va manger un bout avant de rentrer ? Je propose en entrelaçant mes doigts aux siens alors que l'on se dirige vers la sortie du terminal.
- J'ai la dalle, s'exclame-t-il en serrants sa paume contre la mienne !"
— —
" Au fait on s'organise comment pour chez tes parents cette année ? Demande Luke en terminant son bagle."
Nous sommes assis devant Madame Liberty, la seule et l'unique. La journée est belle et je me revois en juillet 2017, lors d'un de nos premiers voyages en ville. Il faisait aussi beau et chaud, l'air était humide, mes cheveux raides avaient pris une forme étrange, comme les cheveux de Méduse. C'était un de ces matins où tu as passé une nuit agitée et pleine de surprise. On s'était frittés avec Luke, ce matin-là, à Battery Park, devant la grande statue au loin, on s'était découvert autrement. Là sur le même banc où nous sommes actuellement assis, nous avions parlé, puis dormi. C'était beau et romantique mais on avait encore du mal à mettre un mot sur notre relation. Aujourd'hui aussi, c'était difficile mais d'une manière complètement différente. Notre relation, c'est Luke, moi et le regard tourné vers la mer de la Liberté.
" Faut que j'appelle papa pour lui demander quand il nous attend. Ton père nous veut opérationnel quand ?
- Pas la moindre idée, il rigole alors que je sirote mon deuxième café.
- Ton sens de l'organisation laisse toujours à désirer... Dis moi dès que tu sais afin que je bloque mes jours auprès de la grande patronne.
- D'ailleurs les affaires avec Olivia se passent bien ? Me questionne-t-il tout en passant son bras derrière mon dos. Inconsciemment je me laisse aller à ce contact.
- J'ai l'impression d'être submergée depuis des mois, on sort à peine la tête hors de l'eau qu'elle me demande d'élargir les présentations au grand public. Tout ça dans le but de rayonner encore plus largement dans la diffusion de Highlight. Je ne vais plus parler qu'à des équipes de journalistes là mais à tous les fonctionnaires... Tu me vois sérieux sur une scène à la Steve Jobs en train de vendre un projet toute pimpante ?
- Pimpante je ne sais pas, il me charrie en m'embrassant l'épaule, après pour ce qui est de la présentation de projet, tu le connais par coeur, et de ton sens social, tu t'en sors mieux que tu ne le crois dans tes laïus. Pourquoi ça ne marcherait pas. Fais confiance en ta Big Boss. Puis au pire tu te plantes et c'est pas grave. Le projet de Highlight c'est du vrai journalisme avec un grand J, à vous seules vous inspirez les potentiels écrivains de demain. Il réfléchit, quoi que non, évite de te planter en fait.
- Au pire tu nous verras arriver, ma honte dans une valise et moi, le soir même, j'ironise en posant ma tête sur son épaule.
- Voilà, et tu viendras courir derrière les hommes politiques acariâtres et imbus d'eux même pour faire sortir la vérité pour d'autres hommes acariâtres et véreux.
- C'est fou comme la description de ton métier donne envie ! Je m'exclame en buvant une gorgée de mon or noir.
- N'est-ce-pas ? D'ici le moment où ton bagage de honte et toi viendrez frapper à ma porte à D.C, j'aimerais bien que tu me permettes de déposer cette valise là avant qu'on ne finisse par fondre. Les lèvres de Luke commencent doucement à effleurer les zones érogènes de mon cou, me procurant de ce fait un délicieux frisson, si madame daigne terminer sa drogue."
J'avale rapidement le fond de café qu'il me reste.
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Nous arrivons dans mon petit appartement, largement suffisant pour mon bordel et moi. J'ai essayé de ranger un peu avant l'arrivée de Luke mais lorsque j'ouvre la porte, je constate que même après deux heures d'effort la pièce principale est toujours aussi désastreuse. Et je suis toujours la seule à blâmer de cet état, personne d'autre que moi n'a passé cette porte depuis des mois. Nos derniers moments avec Luke se sont déroulés dans la capitale au détour d'un week-end accordé par Olivia. Mon compagnon observe la pièce à vivre, qui depuis quelque temps, grâce à mon salaire, bénéficie d'une décoration de plus en plus décente, puis il sourit.
" Bienvenue sur la planète Elie, il retire ses chaussures et se débarrasse de son manteau, qu'il jette sur le canapé. Des livres, du bordel, des livres, des restes de chinois, des plantes et ..? Il soulève une culotte qui traine sur une console. Du bordel.
- On a du goût ou on en a pas, j'hausse les épaules nullement intimidé en avançant dans mon espace."
Le voir ainsi au milieu de ma pièce à vivre me fait pourtant chaud au cœur. Toutefois je ne peux m'empêcher de penser au sentiment que j'avais lorsque Allen était au milieu de mes affaires, ce n'était clairement pas la même chose. Je ne me sens pas gêné par la présence de Luke dans mon intimité, certainement car je sais que le moindre commentaire qu'il fera lui sera tout aussi applicable, et plus encore qu'il ne s'agit nullement de critiques. Je m'avance pour saisir sa valise restée près de la porte d'entrée et afin de la ramener vers ma chambre. Avant de me suivre, il dépose sur la table ronde près de la cuisine ouverte une large sacoche contenant son ordinateur, ainsi que tout son travail. Un vrai bureau de travail sur pattes.
Nous traversons la porte donnant sur le salon afin d'arriver dans ma chambre, ou l'état de rangement n'est pas mieux, alors que je dépose sa valise près de la grande armoire mise au bout de la pièce.
" Je t'ai fais un peu de place, dis-je en ouvrant la porte du meuble avant de m'asseoir en tailleurs sur mon lit confortable.
- Elie Cobb m'a fait de la place dans son armoire ? Il s'exclame hilare, attends, j'ai le droit de laisser ma brosse à dent aussi ? Cette fois, il éclate de rire.
- Si tu trouves ça si drôle tu peux laisser tes affaires dans ta valise et je récupère le monopole de mes rangements, je rétorque avec une mine faussement boudeuse.
- Tu as déjà le monopole du rangement que te procure le sol, dit-il en allant dans la salle de bain attenante afin d'y déposer sa trousse de toilette.
- Ne rend pas plus exceptionnel qu'il ne l'est ce genre de détail, je lance plus fort avant qu'il ne revienne et se place devant moi en bout de lit.
- Chérie, il rigole en se penchant sur moi afin de m'embrasser la joue, avec toi chaque détail vaut la peine d'être mentionné.
- Et si je mentionne le minuscule minuscule détail du fait que j'ai envie de toi depuis qu'on a passé la porte de l'aéroport ? Tu préfères le détail de la brosse à dent ou ce détail-ci ? Je demande d'une voix faussement innocente tout en passant mes mains sur sa nuque pour m'agripper à ces cheveux en bataille.
- Je dirais qu'une seule chose, son regard de braise fixent mes lèvres avec envie, et sa main vient se poser contre ma joue. T'en as mis du temps."
Il capture mes lèvres à peine sa phrase terminée, alors que je le tire un peu plus vers moi. Je lui retire son tee-shirt alors que ses lèvres descendent vers mon cou, ainsi que sur le reste de mon corps. Ce dernier en frissonne autant de plaisir que d'impatience. Nos corps se trouvent parfaitement entre chaque soupirs et chaque "je t'aime" murmurés contre la peau de l'autre. Nous vibrons l'un avec l'autre.
Je n'avais pas mesuré à quel point il m'avait manqué.
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Plus tôt dans la journée
" Il est 7 heures, nous sommes le vendredi 2 juillet, vous écoutez bien The Ugly NYC, 100.2 FM et l'équipe est ravie de vous avoir parmi nous en cette chaude journée ! Une vague de chaleur s'abat actuellement sur notre sinueuse cité et je crois bien que chaque New-Yorkais se languit bien d'un coin à l'ombre, d'un petit vent frais et d'un verre pour célébrer le week-end qui se profile à l'horizon. La semaine a été longue, éprouvante pour certains, exaltantes pour d'autres mais qu'importe, la soirée va être brûlante !"
L'animatrice de la matinale me fait un clin d'œil alors que je m'installe sans demander mon reste dans la chaise qu'elle me désigne. Alors qu'elle continue à parler, je prends un grand plaisir à la voir s'agiter sur son siège en bougeant ses mains dans tous les sens. Son récapitulatif des news est très efficace et j'en viens à penser qu'elle pourrait être une personnalité très intéressante dans mon équipe. Je reprends avec difficulté mon souffle tandis que je refais ma queue de cheval qui a glissé avec la sueur. J'ai déboulé comme une bombe dans les locaux de la radio il y a à peine 2 minutes, mon passage à l'antenne est prévu dans 5 et je ressemble à un veau qui vient de naître ! Tout ça à cause du trafic infernal de cette ville ! Je ne m'y habituerais jamais même après quelques années ici.
Le temps où je prenais le métro est révolu à mon plus grand désespoir. Je ne peux me déplacer qu'en voiture ou alors en train puisque nous n'habitons plus le centre-ville. Ça a ces avantages comme ces inconvénients vous me direz. Le ciel semble plus grand lorsque l'on vit dans le Connecticut et qu'on a un jardin que lorsqu'on a un studio exposé plein nord dans Tribeca.
Cela fait un an ce mois-ci que nous avons quitté l'État de New York pour New Canaan, une ville proche de Stamford et reliée à Grand Central Terminal par un train de banlieue que je prends le plus régulièrement possible. À l'origine, nous devions juste partir vers Long Island ou bien upstate mais je suis tombée amoureuse des automnes dans l'État voisin. De plus, c'était plus simple de trouver une retraite paisible pour mon peintre de compagnon. Si on ajoute le fait amusant que la région s'appelle littéralement la Nouvelle Angleterre, je crois que j'ai été faite pour cet endroit. Mon cœur d'anglaise expatriée chavire à chaque fois que je pense à ce qu'il y a de l'autre bout de l'océan.
Je sors rapidement mes deux téléphones de mon sac, le professionnel et le personnel, afin de les disposer à côté de moi. Mon fidèle 3310 est toujours mon téléphone principal auquel je reviens à chaque fois mais le professionnel est bien plus récent. Je ne l'aime pas.
Je tapote sur les boutons épais du personnel afin de voir si j'ai un message. Aucun. Mon sourire se perd quelques instants tandis que j'entends quelqu'un m'interpeller.
" Vous avez finalement réussi à être là à temps ! J'ai cru que j'allais faire votre interview toute seule, blague la journaliste alors qu'elle vient de lancer un morceau pour les auditeurs, nous sommes hors antenne, ça n'aurait pas été très drôle !"
Je secoue la main qu'elle me tend franchement et je lui souris en retour.
" Les bouchons sont terribles avec ce temps aujourd'hui. J'ai espéré que les vacances vident un peu les routes. Visiblement, j'ai eu tort ! Nous rions en cœur.
- On espère tous que la bonté divine nous offre des trajets sans trafic mais c'est un peu comme la fée au lait, après un certain âge, ça ne sert plus à rien d'y croire. Cette femme a un don pour vous mettre à l'aise, c'est fou. Vous vous sentez prête ?
- De parler devant des milliers d'inconnus ? Je suis à deux doigts de mourir de peur.
- Ne vous inquiétez pas, tout va bien se passer, quand vous serez dedans, vous n'allez même plus y penser !
- Je ne m'y suis jamais habituée, que voulez-vous, je reste une femme de l'ombre dans l'âme.
- Une femme de l'ombre qui dirige pourtant un de ces nouveaux journaux prolifiques et immanquables de notre petite île !
- Comme quoi, tout est possible, même le plus improbable.
- Sauf la disparition des bouchons, ironise la jeune femme en face de moi.
- Sauf la disparition des bouchons, cela va de soi."
Elle hoche la tête puis replace son casque correctement sur ses oreilles tout en m'indiquant d'un geste sûr de faire de même. Ça y est, c'est le grand moment. Je prends une grande inspiration puis m'installe correctement en ajustant le micro sur pied à mon niveau.
" On se retrouve pour le grand événement de notre fin de semaine, nous vous en parlons depuis quelques jours et mon petit doigt me dit que beaucoup d'entre vous attendent cette rencontre exclusive avec impatience ! Et bien nous aussi, c'est le moment de l'interview sans filtre avec la directrice du journal sensation "The Highlight", j'ai nommé Olivia Lawford ! La présentatrice fait une pause, le temps de lancer son jingle de séquence puis réajuste son déroulé de programme face à elle. Bienvenue Olivia, bienvenue, faites comme chez vous ! Ça va bien ?
- Merci beaucoup pour votre accueil très chaleureux, même en cette journée étouffante, nous rions, je me porte comme un charme
- Avec l'équipe, on est du genre gros plaid et chocolat chaud avec nos invités. Mais pour des raisons évidentes, on va rester sur la limonade et le brumisateur, vous voulez bien ? Bref, on est super heureux d'avoir pu décrocher un court instant avec vous, ce qui est extrêmement rare puisque vous n'en accordez jamais à personne. Ma première question sera la suivante: Qu'est-ce qui vous amène ici ? Depuis quelques années, plus précisément l'affaire Mediatics pour ceux qui ne s'en rappelle pas, on entend à peine votre voix sur les ondes. Une raison à ça ?
- Je répondrais simplement qu'il y a un temps pour parler et un temps pour juste se retirer de la vie publique afin de développer un avenir solide. Il me fallait prendre du recul et puis sincèrement, après toute la folie de 2017, je crois bien que les gens en avaient ras le bol de nous ! Même moi j'en avais assez.
- Je ne sais pas si c'était le cas pour nos auditeurs mais en tout cas, vous avez manqué et c'est un plaisir de vous retrouver. D'ailleurs, j'allais y venir mais quel avenir vous avez bien pu créer en quelques années ! The Highlight fait un tabac en ligne ainsi qu'en papier alors que vous l'avez lancé il y a deux ans et vous êtes pressenti pour un prix pour la qualité de vos enquêtes. Le succès semble paver votre chemin où que vous alliez !
- Tout ça est grâce à mon équipe de choc sans qui notre papier ne serait resté qu'un parapluie de fortune pour la plupart de nos concitoyens, j'en suis convaincue. Et puis, ce n'est pas moi -et heureusement d'ailleurs- qui écrit les articles, ça serait un désastre !
- Vous dites ça alors votre édito, toujours ponctué d'un humour très british, donne à Highlight une saveur toute particulière. Sans vous ou votre rédactrice en chef, elle-même journaliste Elie Cobb, il manquerait cette ironie, ce sarcasme qui nous fait demander un second round chaque mois. Vous ne pouvez pas envisager un bi-mensuel pour nos beaux yeux ?
- J'adorerais mais je ne pense pas que mes collaborateurs seraient ravis de la charge de travail doublée, j'adresse un grand sourire à mon assistant derrière la vitre phonique qui feint de s'évanouir. Et puis, autant apprécier les choses de la vie par petite touche plutôt que d'en manger trop et trop vite puis de s'en lasser.
- C'est joliment dit. Bien, nous en arrivons à la question perso. Après ce silence radio, si je puis dire, qu'est devenue la jeune anglaise suite à toute cette histoire ? Toujours avec l'homme à qui vous aviez fait chavirer le cœur ? Il est de notoriété publique que Caleb Barnes est devenu artiste mais aussi mécène dans le Connecticut et en ville mais cela fait des lustres qu'il a lui aussi complètement disparu des radars."
Je détourne mon regard un instant pour voir si mon téléphone personnel n'affiche aucuns nouveaux messages. Toujours rien, mon visage se teinte de déception. Cela fait presque deux mois que je n'ai pas vu Caleb, que je n'ai pas pu le tenir entre mes bras. Et je ne risque pas de le voir avant une durée indéterminée, nos emplois du temps ne concordent plus depuis très longtemps.
J'ai pris mon envol quelques mois après le verdict, chacun a pris son chemin et nos retrouvailles, bien que fusionnelles, se font de plus en plus rares. Il vit la moitié du temps avec moi, l'autre avec ses tableaux et sa galerie d'art. Quand je suis à New York, il est à New Canaan et lorsque j'y suis, il doit partir pour un rendez-vous à l'étranger, à l'autre bout du pays, je ne sais où. Il ne me dit plus où il va depuis assez longtemps pour que je ne commence à m'inquiéter.
Vous savez, des fois, la nuit, quand je suis seule dans mes draps, j'ai peur qu'il ne revienne jamais. C'est peut-être de la dépendance, je ne sais pas mais m'imaginer sans lui, ce n'est pas envisageable.
Ce matin, en partant, je lui ai envoyé un petit message pour savoir si tout allait bien, que je me languis de lui ainsi que de savoir que je dois prendre l'avion et m'éloigner encore plus me rend morose. Okay, oui, c'est complètement mélodramatique mais s'il faut tirer sur la corde sensible pour qu'il revienne à moi, je ne vais pas me retenir. Cependant il y est deux heures plus tard et je n'ai aucun mot de sa part. D'un côté, je fulmine, de l'autre j'essaie d'avoir une explication rationnelle.
Autant vous dire que la rationalité a fini dans la poubelle plus vite que vous ne pouvez le croire.
" Nous partageons tous les deux un goût accentué pour la discrétion. Mais il va bien, nous allons bien, il s'épanouit et moi de même. C'est le plus important non ?
- C'est ce qu'on dit, oui. La jeune femme blonde acquiesce en baissant la tête, quelque peu déçue de ma réponse évasive. En tout cas, on espère le revoir sur le devant de la scène un jour ou l'autre. Sur un autre ton, continuons..."
— —
Tout s'est très bien passé, je n'ai pas gaffé (il n'y avait rien à révéler d'indiscret de toute façon) et j'ai pu dire à l'interviewer après avoir rendu l'antenne que j'étais persuadée qu'elle serait le genre de profil que l'on recherche à Highlight. Elle a souri en rougissant et je me suis revue en elle. Elle a ce côté candide de mon arrivée à New York avec la pointe d'assurance qu'il me manquait avant toute cette histoire. Je lui ai donné ma carte, on ne sait jamais.
Elle a murmuré un merci, a enfoncé le papier cartonné dans sa poche puis m'a laissé à la sortie. Je pense qu'elle me rappellera. Pas aujourd'hui en tout cas, mais dans l'avenir oui.
Ma valise cabine contre moi, j'agite un dernier geste de la main à Antoine, mon chauffeur de taxi français préféré qui n'a pas encore pris ses jambes à son cou. C'est assez surprenant d'ailleurs...
" À bientôt, fais-je avec mon meilleur accent français !
- See ya', me répond-il avant de démarrer !"
Me voilà seule au dépose-minute, la tête remplie de pensées pénibles et le cœur terrassé par son absence.
Le hall des départs de JFK, bien qu'il soit très grand, me paraît bondé. Je navigue avec difficulté dans le flot de corps qui me sépare de ma porte d'embarquement. Cela me rappelle ces allers routiniers au café et mes conversations passionnées avec Ashton autour des gobelets en carton (qui est parti à l'autre bout du pays soit disant passant). Ces foutus départs en vacances auront ma peau ! De plus, je suis dans une colère noire. Aucun message, aucun appel, rien ! Je grommelle en fermant mon téléphone violemment tandis que je viens m'écraser sur un siège proche de la fenêtre. Je peux voir l'avion que je vais prendre être préparé au loin. Je ferme les yeux en me frottant les tempes. Il faut que je me calme, je suis complètement ridicule.
Ridicule mais malgré ce constat alarmant, il me manque terriblement. Nous ne nous sommes pas vu depuis des semaines et j'aimerais tant qu'il soit assis juste à côté de moi, même pour une ou deux minutes, juste pour savoir comment il va. Je me mords à l'intérieur de la joue de rage alors que j'entends un toussotement sur ma droite.
" Excusez-moi madame, j'aimerais bien m'asseoir, fait une voix masculine alors que je suis perdue dans mes pensées.
- Oh, pardon, oui, oui bien sûr, je vais pousser mes affaires, débité-je à toute vitesse, sans lever une seule fois la tête vers mon interlocuteur. Je m'étale un peu trop."
Tout en regroupant mes affaires à mes pieds, je me poursuis, penchée en arrière et je ne lui ai toujours pas jeté un seul coup d'œil
" Vraiment, je suis désolée, ce n'est pas le genre de chose que je fais. La semaine a été rude... En plus mon stupide petit-ami ne m'adresse plus la parole depuis si longtemps et-...
- Le stupide petit-ami s'excuse, déclare mon voisin, me coupant dans mon élan. Un profond silence s'immisce entre nous. Il a honte de lui pour être tout à fait honnête."
Je me fige, en regardant le vide, la main à peine dans mon sac à main pour regarder encore si je n'ai pas reçu un SMS. Je reconnais enfin la voix dans mon dos. Mes yeux se remplissent de larmes avant même que je n'y réfléchisse. Je me retourne enfin afin de percevoir les traits de son visage.
" Je suis vraiment le plus grand abruti de la Terre, n'est-ce pas, demande-il en m'adressant un sourire palot ?"
Mes larmes viennent couler sans discontinuer tandis que je le serre tout contre moi. Je sens une odeur de savon et il y a une tache de peinture verte dans le creux de son cou. Ses mains s'agrippent à mon dos, comme s'il pouvait perdre la vie rien que de me lâcher. Je vous avais prévenu, nos retrouvailles sont sans exception fusionnelles. Mais soudain je me décolle précipitamment de lui en le dévisageant. Sa chevelure, qui est maintenant parsemée de petits cheveux blancs, semble avoir pris presque quelques centimètres. Il a un peu changé en mon absence. Avec le temps, il a abandonné les tuxedos et autres costumes pour des tenues bien plus ordinaires, peintures-proof si on peut dire ça comme ça, accompagné d'une casquette élimée. Cependant, malgré sa barbe de trois jours et sa ride du lion qui le vieillit un peu, Caleb conserve toujours cette aura qui m'avait tant plu à l'époque. Je me recule avant de le frapper avec mon poing dans le bras.
" Tu crois que tu vas t'en sortir aussi facilement ? Ça fait des jours que je m'évertue à t'appeler et c'est limite si tu ne fais pas le mort ! J'étais inquiète ! Où étais-tu ? Je veux bien croire que quand l'inspiration est là, tu peux faire le tour de la Terre trois fois mais quand même, tu n'es pas tout seul ! Je commençais vraiment à envisager le pire et on sait très bien que le pire est déjà arrivé ! Je le tambourine rageusement sur le bras et il couine de douleur. Espèce de co-..."
Il attrape mes mains serrées et les stoppe avec douceur. Mon souffle est saccadé et mon nez est à deux doigts de couler. On aura connu plus glamour, c'est sûr.
Caleb affiche encore son petit sourire qui m'agace. Je plisse les yeux en croisant mes bras contre moi. Soudain je réalise quelque chose. Aujourd'hui, plus je le regarde, plus je sens quelque chose de différent, en plus de sa flegme naturelle. Il me paraît étrange avec ses yeux de merlan frit. Je fronce les sourcils.
" Pourquoi tu me regardes comme ça ?
- Mh ? Il secoue la tête. Oh excuse-moi, je prenais mon temps pour réfléchir à l'excuse qui pourrait marcher.
- Du temps, tu en as eu assez là où tu étais dernièrement, si tu veux mon avis.
- Je sais, je sais Liv'. J'étais un peu pris par la tournure des événements.
- Et qu'est-ce qui peut avoir le culot d'être plus important que de juste me répondre au téléphone de temps en temps, histoire de dire ?
- Tu vas le savoir très vite. Il se lève sur ses deux jambes et me tend sa main."
Je le toise, interdite. Un coup d'œil sur la montre et je peux vous dire que je décolle bientôt.
" Arrête de faire l'idiot, mon vol m'attend, si je m'éloigne trop, je vais le louper. J'attends ce rendez-vous depuis des mois, je ne peux pas... Il se penche pour me lever de mon fauteuil et je décolle du sol. Repose-moi immédiatement Caleb, je ne rigole pas !
- Il y a peut-être un changement de plan concernant ça d'ailleurs. Et je te dépose que si tu te décides à me suivre de ton plein gré. Je préférais que tu le fasses parce que j'ai un mal de dos du tonnerre et là tu es en train de me le ruiner.
- Toi, tu ne veux pas vivre longtemps.
- Je préfère m'effondrer au sol dès maintenant si je ne peux pas vivre avec toi.
- Quel beau parleur !
- On me le dit souvent, fait-il en me m'adressant un clin d'œil. Tu viens ? On n'est pas à la bonne porte de toute façon et j'aimerais ne pas rater l'embarquement.
- L'embarque-... Quoi ?"
Je bouillonne de questions alors que je le suis. En me retournant, je vois que ma valise est ramassée par le chauffeur de Caleb. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
" Caleb, qu'est-ce qui se passe ?
- Tu poses trop de questions, vraiment."
Alors que nous passons devant chaque porte, l'une après l'autre, je me ronge les nerfs. Je baisse la tête pour regarder ma main dans la sienne. Il porte une montre, une Breitling noire et or, que je n'ai plus vu depuis la période de notre rencontre. Je croyais qu'il l'avait vendue pourtant. Soudain, alors que nous sommes engouffrés dans une allée remplie de voyageurs, Caleb me lâche. De toute sa hauteur, il me fait dorénavant face et je me rends compte qu'il est habillé, à un ou deux détails près, comme le soir où nous nous sommes rencontrés. Pourquoi je ne m'en étais pas rendue compte avant ?
" Tu sais, des fois, je te dis que j'aimerais bien revivre la soirée d'entrée en bourse, pas pour le pouvoir que cela m'a procuré mais plutôt pour revoir une nouvelle fois tes yeux se poser sur moi. Il remplace discrètement une mêche de cheveux derrière mon oreille. Et bien, je voulais te montrer ce pourquoi j'ai été absent si longtemps."
Autour de nous, les gens se sont tous écartés et nous observent avec joie. Caleb m'indique d'un geste de la tête de me retourner.
" Très bien, si tu le souhaites. Je te jure Caleb, si c'est une bla-... Oh mon Dieu !"
Je fais face à une fresque qui remplit toute la hauteur du mur. Il s'agit d'une paire d'yeux immenses, des yeux mélange de noisette et de vert qui me sont étonnamment familiers. Je fais un pas en avant afin de les inspecter plus en détail. Oui, ce sont bien les miens, dans toute leur splendeur. En plein milieu de JFK...
" Pour que tout le monde puisse voir ce que j'ai pu découvrir ce soir-là, susurre-t-il à mon oreille, et pour tous ceux à venir..."
Pour une fois, je reste complètement sans voix tandis qu'il me dépose un baiser chaste sur la joue. À son contact, ma peau s'hérisse et je frissonne. Alors que tout autour s'évanouit en un clin d'œil, je me retrouve transporter des années en arrière. Nous sommes là, comme deux âmes qui se percutent, moi qui farfouille dans mon sac et qui sort un piteux ticket de métro, lui qui arrive et prétend que nous sommes en couple devant le vigile. Dès lors, notre relation a pris un tournant inattendu et étrange. Sa main était déjà posée dans le creux de mes reins mais cette fois, il ne s'agit pas juste de celle d'un inconnu qui a fait preuve de galanterie. Tant d'épreuves ont été traversées, tant de larmes, tant de rire, jamais je ne regretterais cette période charnière.
Cette œuvre, aussi personnelle soit-elle, représente toutes les premières fois, toutes celles que l'on aimerait revivre sans pouvoir le faire. Mon cœur bat la chamade tandis que je fais quelques pas pour toucher la fresque.
" Si j'étais toi, je pivoterais vers moi, fait-il dans mon dos alors que je m'apprête à frôler la peinture d'un de mes yeux. J'ai préparé une argumentation sans assistance !"
Je lève les yeux au ciel face à ce vieux souvenirs de nos premiers moments ensemble à Mediatics, cela me parait tellement loin.
" Je sais que je n'ai jamais été un homme à ta hauteur, que je porte mes boulets à mes chevilles et que tu ne mérites pas d'avoir eu à subir tout ce qui nous malgré tout amener ici. Un jour, un ami m'a dit sur une plage, alors que tu dormais, d'être là pour toi comme tu l'es pour moi. Sur le moment, j'avais cru comprendre mais ce n'est que maintenant que cela fait vraiment sens. J'aimerais pouvoir m'excuser des centaines de milliers de fois, éponger tous ces instants sombres et les repeindre pour les rendre heureux. Mais c'est impossible. Mais comme l'a dit cet ami il y a longtemps « c'est un combat que l'on doit mener ensemble » et je ne suis pas prêt d'abandonner notre couple, ni maintenant, ni jamais. J'ai été absent mais, il ouvre la boîte qui recueille une magnifique bague sertie d'une émeraude, c'est pour ce combat et tout ce qu'il engendra que je te fais cette promesse aujourd'hui... Je veux voir tes yeux tous les matins comme au premier jour, je veux t'observer travailler dans ton bureau, je ne veux plus disparaître sans toi à mes côtés. Je veux te voir avec tes premiers cheveux blancs, avec des petits nous autour et créer la famille stable que je n'ai jamais eu -même si ça me terrifie- avec toi. Donc voila Liv', il montre la fresque, à défaut d'un message tous les jours, ou d'une stabilité immédiate, je t'offre ça.
- Ma tête en gros plan sur un terminal d'aéroport ? J'ironise tellement je reste sans voix.
- Pas que petite ingrate ! Il s'exclame en encadrant mon visage des ses mains, je t'offre...-
- La vision que tu as toujours eu de moi. Je termine à sa place encore plus émue par la signification de ce qu'il a créée, c'est parfait. Tout est parfait Caleb. Ma vie avec toi. Mon futur même. Tu es parfait, je termine en l'embrassant avec tout l'amour dont je suis capable."
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