Chapitre 14 : Une grande histoire d'amitié compliquée
" Nous y sommes. Introduit la jeune anglaise en s'installant sur un fauteuil. Je comprends qu'elle veut que je fasse de même alors qu'elle fait un signe de tête dans sa direction.
- C'est votre bureau ? Fais-je, le tout en m'asseyant à mon tour, mes yeux s'arrêtant sur tous les détails possibles.
- Mon bureau pour une durée indéterminée on va dire. Elle sourit, se contenant pour ne pas y aller trop fort. J'aimerais prendre mon envol pour une autre aventure après la fin de toute cette histoire.
- Vous comptez rentrer à Londres ? Je farfouille pour prendre mon enregistreur et mon bloc, afin de prendre des notes de cette entrevue. Alors que je m'apprête à le lancer, Olivia pose sa main sur l'appareil, arrêtant ma démarche.
- Cette discussion doit être exclusivement privée, personne ne doit savoir que vous êtes montée ici, pas même votre partenaire. Elle se montre ferme, solennelle. Je me doute que ça puisse être compliqué de répondre à ma requête mais je vous demande de ne faire confiance à personne ici, même pas à lui..."
Je déglutis avec difficulté puis basculer mes affaires dans mon sac, me libérant les mains. C'est comme s'il me manquait quelque chose dans celles-ci, que cela me provoquait un manque de ne pas avoir un carnet pour griffonner entre les doigts. Mais pour poursuivre, je dois répondre à ses lourdes exigences. Comment je vais faire pour tenir ma langue à Luke ?
" Je comprends, je serais muette sur les événements qui vont suivre.
- Super ! Elle se décrispe et attrape une petite bouteille en verre et deux verres justement. J'ai cru comprendre que vous aimez les alcools forts mais je n'ai que du whisky sous la main, un cadeau de Caleb que je n'ai pas vraiment d'usage pour l'instant, un petit remontant ? Elle agite le liquide et n'attend pas ma réponse pour me refiler un fond de verre, pour commencer doucement.
- Merci, j'apprécie l'attention. Remercié-je, elle repose le whisky et attrape une bouteille d'eau pour s'en verser. Vous ne voulez pas prendre le risque de finir bourrée avant ce soir Miss Lawford ? Elle me détaille un instant confuse puis se met à rire.
- J'en rêverais mais je ne peux pas pour l'instant. Elle boit d'un trait son verre avant de le reposer sur une petite table basse. Je la dévisage longuement avant de ripper sur son ventre. Olivia suit mon regard avant d'ajouter, aussi confuse qu'amusée. Oh non, non, non, je n'ai pas de polichinelle dans le tiroir, je dois juste faire attention à ce que je dis en public, histoire de ne pas me discréditer devant la presse et tous nous mettre en péril. N'allez pas croire des sottises pareilles, ça fait à peine six mois que mon compagnon et moi nous nous connaissons et croyez-moi je suis plutôt une partisante de la prise de temps à ce niveau là. Elle sourit et je me retrouve un peu en elle, moi aussi, j'aime prendre mon temps pour ces choses là.
- Je suis un peu pareil de ce côté là, rassurez-vous. Nous nous faisons face comme si nous étions de bonnes amies d'enfance mais nous reprenons nos esprits à quelques secondes de différence. Bref, maintenant que je suis là, comment puis-je vous aider ?
- En faisant votre boulot je suppose... Dit-elle soudainement gênée. À vrai dire je ne sais pas vraiment par où commencer. Elle se tortille sur son assise, tirant sur le tissus de sa robe.
- Je serais tenté de vous dire par le commencement mais je me rends compte que c'est assez cliché et que finalement, ça n'aide pas à grand chose. Je ris puis poursuis. Alors limitez-vous peut-être à une phrase, vous développerez ensuite."
Olivia s'enfonce dans son siège et croise les jambes, frottant son crâne doucement pensive.
" Ça risque d'être assez brut alors si je procède ainsi. Vous vous sentez prête ?
- Évidemment, lancez-vous, je vous écoute."
Elle prend une grande inspiration et regarde intensément ses genoux puis les ferme fortement.
" Il y a un témoin du meurtre de Liam. Elle ouvre un œil et me regarde d'un coin."
La première dizaine de secondes est la plus longue. Je reste silencieuse et la dévisage, le cerveau ayant du mal à associer mes pensées qui m'inondent. La seconde dizaine, Olivia ouvre la bouche pour parler mais se ravise et me fuit du regard. Intérieurement, je compatis puis je ressens une vague de questions imminentes débarquer sur ma langue.
" Pardon ? C'est le seul mot que j'arrive à sortir, plus inquiète que surprise.
- Vous avez réellement besoin que je le redise ? Fait-elle, soudainement sur les nerfs.
- Oh non, non, j'ai bien compris, c'est juste que j'ai tellement espéré qu'il y ait un témoin, quelque chose qui corrobore avec mes hypothèses que je... Mais merde quoi, un témoin ! Je ne peux m'empêcher d'hausser la voix mais la femme qui me fait face me fait clairement comprendre qu'il faudrait que je me taise.
- S'il vous plaît, je ne vous ai pas choisi pour ce genre de choses, personne ne sait ici à part moi et, cela coule de source, le témoin lui-même de son existence. J'aimerais que cela reste le plus longtemps secret que possible, je ne sais pas ce qui pourrait lui arriver si cela venait aux oreilles du père de Caleb. Elle grimace à cette pensée, assez effrayée à l'idée.
- Vous n'en avez même pas parlé à votre compagnon ?
- J'ai encore droit de ne pas tout dire à Caleb, surtout si c'est pour protéger une de mes amies. J'hausse un sourcil, intriguée. Il comprendra mes raisons, j'en suis sûre, elle regarde dans le vide à présent, du moins je l'espère. Ce n'est jamais très facile de garder pour soi ce genre d'informations capitales mais il en est mieux pour l'instant que cela ne s'ébruite pas trop. Bref, j'ai besoin de vous pour montrer au monde quel genre de personne est Andrew Barnes, et ça ce n'est un secret pour personne.
- Mais pourquoi moi ? Je ne suis personne dans le monde du journalisme, j'avale mon verre cul sec, et encore moins la porte à côté de vos bureaux ni de New York City en général.
- Mon contact se trouve être justement loin de New York, pour sa propre sécurité mademoiselle Cobb, à Portland en fait, elle s'arrête pour me regarder dans les yeux, et vous croyez vraiment n'être personne ?
- Il y a bien plus qualifié que moi, par exemple Monsieur Wells ou même Monsieur Hoffman, mon coéquipier. Même si j'avoue que je suis très flattée par une telle reconnaissance, je n'ai encore rien publié à mon nom au Weekly. Plaisanté-je.
- Vous verrez bien vite que plus une personne est haute placé, plus elle est pervertie mademoiselle Cobb... Son sourire naturel s'égare et se transforme. De plus la question que vous avez posé à Caleb montre à quel point vous souhaitez vous intéresser à la partie immergée de l'iceberg. Après ces six derniers mois, nous avons constaté que les médias creusent juste pour trouver les os les plus récents, s'arrêtant aux premières difficultés. Je vous demande de trouver, seule, sans votre coéquipier, le dinosaure qui se cache encore en dessous.
- Attendez, sans Luke ? Mais pourquoi ?
- Monsieur Hoffman a une réputation qui le précède et je ne risquerai pas la vie de mon amie sans être sûre de moi."
Je me lève de mon siège et me rapproche de la porte ainsi que de la persienne pour la fermer puis me tourne vers Olivia qui s'est aussi levée, faisant quelques pas dans la pièce, fatiguée et moralement abattue à sa posture.
" Olivia, je peux vous appeler ainsi ?
- Allez-y, qu'est-ce que cela change de toute façon, nous aurons quelques autres occasions dans le futur de nous parler. Elle s'appuie sur son bureau et croise les bras.
- Pouvez-vous me parler d'elle Olivia ? Que je prenne contact avec elle à mon retour."
Olivia sourit puis sort un papier d'une pile de documents. Elle me le tend et je comprends qu'il s'agit d'un prénom et d'un nom ainsi qu'une date, une horaire et un lieu.
" Riley Cordell, le mercredi 5 juillet, au South Parks Blocks. Fait Olivia avant que je ne puisse ajouter une phrase. Nous avons fixé ce rendez-vous il y a quelques jours, elle vous y attendra.
- Vous saviez déjà que j'accepterais de collaborer avec vous deux ?
- Disons que j'avais ma petite idée de la réponse. Elle esquisse un air propre à elle-même puis se dirige vers moi. Et j'ai été pleinement satisfaite de celle-ci.
- Vous êtes dangereuse Miss Lawford. Fais-je, amusée.
- Je sais, je sais, elle balaie théâtralement ses cheveux en arrière, on me le dit souvent. Elle rit de bon cœur tandis que la porte d'entrée du bureau couine."
Immédiatement, sur mes gardes, je me retourne, cherchant à comprendre de qui il s'agit. J'enfonce le petit papier plié dans mon décolleté, en guise de premier réflexe puis une tête passe dans l'entrebâillement de la porte. C'est Monsieur Caleb Barnes, assez surpris de ma présence qui perd son air mal en point pour recouvrir instantanément son masque de conférence. Du regard, il interroge sa compagne puis hoche la tête.
" J'ai presque fini chéri, j'arrive dans une minute, le temps de raccompagner Mademoiselle Cobb. Elle prend une voix charmante puis lui indique de fermer la porte derrière lui d'un geste rapide de la tête.
- Dépêches-toi d'accord ? Il se pose ses yeux sur moi puis ajoute: Ce fût un plaisir de vous rencontrer, Mademoiselle.
- De même. Finis-je, peut-être trop cérémonieuse à mon goût."
Nous nous retrouvons seules, libres de pouvoir finir notre conversation mais Olivia jette un coup d'œil à son montre avant de s'activer pour prendre ses affaires. Elle s'arrête à mon niveau lorsque nous sommes toutes les deux prêtes. Elle regarde ouvertement mon décolleté avec le morceau de papier qui dépasse légèrement puis se met à rire.
" Très bonne technique pour cacher les choses mais cela manque encore de pratique Élie.
- On ne peut pas être douée dans toutes les matières Olivia. Ajouté-je, hilare.
- Vous m'en direz tant ! Elle ouvre la porte puis m'indique la sortie. Je vous raccompagne jusqu'à l'ascenseur, je pense que vous connaissez le chemin.
- Ça devrait le faire, je ne m'inquiète pas. Nous nous saluons d'une chaleureuse poignée de main puis m'approche de son oreille. Je ferais de mon mieux pour vous aider Olivia, je pense que le jeu en vaut la chandelle.
- Évitez d'allumer la bougie par les deux bouts, c'est tout ce que je vous demande. Nous nous avançons rapidement vers l'ascenseur.
- C'est noté, je souris tandis que je pénètre dans celui-ci, ce fut aussi un plaisir d'avoir pu avoir cette conversation avec vous.
- C'est un plaisir partagé. Elle lève la main tandis que les portes se ferment devant elle, ce même sourire cachant de nombreuses facettes."
Alors que ma progression pour rejoindre la terre se fait de plus en plus rapidement, je retire le papier pour en relire le contenu. Ce rendez-vous risque d'être extrêmement intéressant mais tout aussi compliqué à cacher à Luke, c'est une certitude.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top