Chapitre 51.1 - Soirée en boîte

Chapitre Cinquante-Et-Unième - Partie I

Magda et Martijn s'étaient installés définitivement dans leur appartement depuis lundi. Le 26 juin. Magda avait fait une croix sur le calendrier qu'ils avaient accroché dans la cuisine. Le mardi, le piano que les frères de la jeune fille lui avaient offert pour son anniversaire était arrivé et elle mourait d'envie d'en jouer. Elle le trouvait tellement beau. Mais il devait s'habituer à la pièce et l'accordeur ne passerait que dans deux semaines. Alors pour l'instant Magda se contentait de toucher avec les yeux. Elle trouvait cela très frustrant. En attendant, elle utilisait la guitare de Martijn mais ce n'était définitivement pas la même chose. Elle l'avait prévenu que cet été elle reviendrait de France avec son violon et son violoncelle. Comme ça elle aurait tous ses petits instruments auprès d'elle. Mais pour l'instant, elle n'avait qu'une guitare avec laquelle elle commençait à s'ennuyer fermement. Alors, pour l'occuper le temps de la semaine avant leur départ pour New York, Martijn l'avait mise à contribution pour peindre le mur de la cuisine, puis pour le déballage de ses cartons. Magda avait accepté de bon coeur à l'exception du carton contenant ses baskets. Elle avait été très claire sur le sujet: elle ne s'occuperait jamais de ses chaussures, il se débrouillait avec et elle ne voulait pas les voir trainer partout.

« Marty ?, appela Magda en rejoignant l'intéressé sur le canapé. Je t'ai laissé le gros carton blanc. Y avait écrit « persoonlijk » dessus.

-Ok, je m'en occuperais tout à l'heure. Je sais plus ce qu'il y a dedans. Staas m'a appelé tout à l'heure, il nous propose d'aller en boite demain soir. Je lui ai dit oui, ça te va ?

-Ouais, carrément ! Passe moi une manette, demanda Magda en tendant la main vers la manette de la console qui trainait sur la table basse.

-Tu vas perdre, prévint Martijn.

-Tu m'as l'air bien sûr de toi... Est-ce qu'il faut que je te rappelle que la dernière fois que tu as dit ça c'est quand on a joué au babyfoot chez mes parents et que je t'ai mis la raclée du siècle ou ça va aller ?

-Ça va aller, répondit Martijn en tendant la manette à Magda. Et j'ai fait ça pour ne pas te vexer. Tu jouais à domicile.

-On va dire ça. »

Ils avaient fait deux parties. Martijn avait gagné les deux, mais il devait avouer que Magdalena s'était très bien défendue. À la fin de la dernière partie, Magda était partie préparer le dîner, tandis que Martijn était allé voir ce que contenait ce fameux carton blanc.

Trois bon quart d'heure plus tard, Magda appela Martijn pour venir à table mais elle n'obtint aucune réponse. Elle réitéra son appel en allant vers la chambre sans plus de succès. Elle poussa la porte entrebâillée et trouva Martijn, assis sur le tapis au pied du lit, des photos éparpillées tout autour de lui et un album photo posé sur les genoux. Magda ne dit rien et alla s'assoir sur le sol, à côté du jeune homme qui semblait complètement absorbé par ses souvenirs. Il finit par se tourner vers Magda et posa un baiser sur sa joue sans explications. Magdalena ne posa pas de question, elle attendit que Martijn lui parle de lui même. Mais au lieu de prendre la parole, il lui tendit la photo qu'il avait dans les mains. C'était une photo avec deux enfants dans les bras l'un de l'autre. Magda porta son regard sur les autres photos qui étaient éparpillées sur le sol. La plupart représentaient des enfants qui regardaient parfois l'objectif avec plus ou moins de surprise, ou parfois au-delà du cadre sans que l'on sache vraiment ce qu'ils regardaient. Ces enfants avaient toujours un large sourire, parfois entaché de quelques dents tombées ou parfois d'appareil dentaire. Magda ne mit pas beaucoup de temps à reconnaitre Martijn sur les photos: il avait les mêmes cheveux blonds qu'elle avait pu voir sur l'album que Suzanne lui avait donné. Mais sur ces photos, ses cheveux étaient un peu plus longs et en coupe au bol.

« Celle que t'as dans les mains, c'est ma soeur et moi. C'était le jour où on a fêté ses sept ans. Celle-ci, continua Martijn en prenant une seconde photo sur le tapis, c'est le jour où je me suis fais ma cicatrice sur le front. Ça a été pris avant la chute par ce que la terrasse ne ressemble pas encore à une scène de crime. Le monsieur debout derrière, c'était mon grand-père. Sur celle-ci, tu peux voir presque tout mes cousins. J'ai compté, il en manque deux. Mais j'ai pas encore réussi à trouver qui. Cette photo-là, c'est celle qui m'a inspiré le tableau que je t'avais montré. Celui où je nous avais dessinés avec Louis. Ça fait une éternité que j'ai pas vu toutes ces photos. »

Magda pouvait entendre l'émotion dans la voix de Martijn. Elle avait passé sa main dans le dos de Martijn et, au fur et à mesure qu'il lui racontait l'histoire qui se cachait derrière chaque photo, Magda avait remonté sa main dans ses cheveux. Elle s'amusait à tourner une mèche de cheveux autour des ses doigts.

« Celle-là, elle a été prise à la plage. On y avait été avec mes grands-parents et Suzanne. Ma grand-mère nous avait dit qu'on devait rentrer, mais nous, on n'était pas vraiment de cet avis. Du coup, on leur a dit qu'on allait rincer les jouets, et à la place, on s'est baigné. Tout habillé. Quand on est remonté sur la plage, ma grand-mère était furieuse mais on s'en fichait pas mal parce qu'on avait dû attendre que nos t-shirt sèchent avant de partir. Donc on avait gagné: on restait plus longtemps. Ça avait bien fait rire mon grand-père de voir ma grand mère s'énerver et nous éclater de rire.

-T'as le même sourire que lui, remarqua Magda. C'est aussi le même sourire que ta mère.

-C'était son père. Tu l'aurais adoré, mon grand-père. Moi, je l'adorais. On était très proche, on faisait toujours plein de trucs ensemble, c'est lui qui m'a appris à peindre. Quand il se mettait devant son chevalet, il m'installait sur une chaise à côté de lui, avec une feuille de papier dans les mains et je devais essayer de faire comme lui. Et en peignant, il me racontait toujours des tonnes d'histoires. Des histoires de son enfance, de son adolescence, de comment il avait rencontré ma grand-mère, de l'enfance de ma mère aussi. C'était toujours des histoires de fou. Enfin non... C'était des histoires banales mais quand lui les racontait, ça devenait des histoires de fou. Tu sais, c'était le genre de personne qui, pendant les repas, s'asseyait au bout de la table et racontait des histoires qui passionnaient tout le monde même si on les connaissait toutes. Il avait toujours des histoires qui faisaient rire tout le monde comme si on les entendait pour la première fois. Il avait le talent d'apporter la bonne humeur partout où il allait. Petit, je voulais être lui. C'est ce que je disais quand on me demandait ce que je voulais faire quand je serait grand. Je répondais que je voulais être mon grand-père. Je l'adorais et l'admirait. Vraiment beaucoup. Et c'est con mais parfois, quand tu dis ou que tu fais des trucs, je me dis qu'il aurait fait pareil. Parfois, tu me le rappelle un peu. Je suis quasiment certain qu'il t'aurait beaucoup aimée. »

Martijn finit par tourner la tête vers Magda et la jeune fille vit que ses yeux s'étaient emplis de quelques larmes. Avec sa main toujours dans les cheveux bruns de son amoureux, Magda rapprocha leur deux visages, et posa doucement ses lèvres sur celle de Martijn. Il ne montrait pas souvent cette partie-là de lui, il ne parlait pas souvent de son passé. La plupart du temps et pour tout le monde, Martijn était le garçon super souriant et de bonne humeur. L'éternel optimiste. Magda n'arrivait pas toujours à savoir ce qui pouvait se cacher derrière ce sourire.

« T'as réussi, tu sais. Toi aussi, tu es celui qui apporte la bonne humeur. Je te promets, ton sourire est tellement contagieux que, juste en te regardant, n'importe qui retrouve le moral. Et je suis persuadée qu'il serait très fier de toi, s'il pouvait voir qui tu es devenu.

-Tu crois ?

-Oui. Tu es quelqu'un de profondément gentil, Martijn. Je peux t'assurer que toutes les personnes qui sont autour de cette petite tête blonde, sont tous très fiers de l'homme que tu es devenu, fit Magda en secouant une photo de Martijn petit. Je pense même que t'as pas tellement changé depuis cette époque.

-Tu rigoles ? Déjà, je pense qu'au niveau capillaire, je me suis trouvé.

-Ça t'allait bien les cheveux blonds.

-Ok. La prochaine fois que je fais chez le coiffeur, je me teins les cheveux.

-Non ! Non, brun ça te va mieux. Je te jure. Le blond, ça allait bien à mini-Martijn. Ce que je veux dire, un peu plus sérieusement, c'est qu'à cette époque, tu étais déjà ce Martijn gentil, charismatique et un peu fou. T'as juste perdu un tout petit bout de ton innocence. Mais le Martijn dont je suis tombée amoureuse, il était déjà un peu là.

-Magdalena ? Est-ce que je t'ai déjà dit « je t'aime » ?

-Euh... Je crois que oui.

-Dans le doute, je vais te le redire alors. Je t'aime, répéta Martijn.

-Moi aussi. »

Magda l'embrassa chastement et se remit sur ses pieds.

« Tu viens manger ?, demanda-t-elle en tendant sa main à Martijn. On finira de tout regarder après ? »

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