Bonus 1 - Perfect
Perfect
Martijn quitta le salon. Sa grand-mère avait prévenu qu'il fallait encore attendre que le rôti finisse de cuire et qu'il leur restait du temps libre. Tous ses cousins et cousines étaient partis à différentes activités ; il avait rapidement entendu Otto lui proposer une partie de billard mais il avait gentiment refusé, en lui promettant de les rejoindre plus tard.
« Je vous laisse vous entrainer, avait-il sourit. »
Sa sœur l'avait regardé avec un petit sourire entendu, Martijn avait fait comme s'il n'avait rien vu et était sorti dans le jardin. Il ne faisait étonnamment pas si froid pour une fin de mois de janvier. Une toute petite neige recouvrait l'herbe et quelques flocons tombaient encore du ciel. Martijn alla jusqu'à la tonnelle et tira une chaise pour s'y installer. Magda venait de lui envoyer un message en lui disant, qu'elle non plus n'était pas prête de passer à table: Max était au téléphone avec sa meilleure amie. Elle avait donc du temps. Ils s'échangèrent encore des messages. Des dizaines. Il souriait devant son écran qui l'obnubilait ; aussi, n'entendit-il pas une autre chaise être déplacée à côte de lui.
« Marty ?
-Oma ?, s'étonna Martijn en relevant brusquement la tête.
-Qu'est-ce que tu fais dehors ?
-Je voulais être tranquille.
-Je vois. Et qu'est-ce que tu fais sur ton téléphone depuis ton arrivée ?
-Oh... tu as remarqué...
-Tu n'es pas avec nous Marty, rit sa grand-mère devant la tête désolée de son petit-fils. Tu veux m'en parler ? »
Martijn sentit son téléphone vibrer encore une fois dans sa main.
« Oma ?
-Ja ?
-Je crois que je suis amoureux.
-Tu lui as dit ?
-Que je l'aimais ? Non. J'ai un peu peur de... de lui faire peur justement. Et je ne veux pas qu'elle parte.
-Tu as l'impression de l'avoir attendue ?
-C'est quoi cette question ?, fit Martijn avec un rire nerveux.
-Je me souviens que, quand j'ai rencontré ton grand-père pour la première fois, j'avais l'impression de l'avoir attendu. Même si je ne savais pas encore qu'il était la personne qui m'attendait. Nous étions très jeunes quand nous nous sommes rencontrés, nous n'étions que des enfants et, on ignorait ce que c'était. L'amour.
-Je sais Oma, répondit Martijn en se souvenant de l'histoire que ses grands-parents leur avaient raconté des dizaines de fois.
-C'est important que tu saches ce que tu ressens Marty.
-Il parait... Mais tu sais... je... Je ne la laisserai pas partir cette fois-ci. »
Sa grand-mère ne répondit pas. Il reporta son regard sur la neige qui tombait autour d'eux un peu plus ardemment que tout à l'heure. Le portable de Martijn vibra encore une fois dans sa main. Comme sa grand-mère ne rajoutait rien, Martijn s'autorisa un rapide coup d'œil sur les deux messages qu'il avait reçu.
De MAGDA:
Marty ? Je peux t'avouer un truc ?
C'est pas très grave, hein...
De MARTIJN:
Vas-y...
De MAGDA:
J'ai envie que tu m'embrasses. Tout doucement.
Comme hier soir.
Martijn relut ce message une bonne dizaine de fois avec ce sourire imbécile sur le visage.
De MARTIJN:
Et moi, je veux re-danser avec toi dans mes bras.
De MAGDA:
Dans le noir ?
Quand Martijn avait su qu'il avait la maison pour lui toute la journée, il avait proposé à Magda de venir passer l'après-midi avec lui. Elle était arrivée avec des pizzas pour le déjeuner et Martijn s'était dit qu'il avait vraiment une copine extraordinaire. Ils avaient mangé, en tête à tête, devant le dernier épisode de la première saison de Dexter. Martijn avait décidé au début du mois de recommencer cette série et comme Magda avait toujours voulu la visionner sans jamais avoir eu le courage de le faire seule, ils avaient décidé de regarder cette série ensemble. A la fin de l'épisode, ils n'avaient pas su quoi faire. Magda avait posé son regard sur la fenêtre qui donnait sur le jardin et elle avait tout de suite remarqué les quelques gouttes qui apparaissaient sur le carreau.
« Il pleut.
-T'es perspicace, avait répondu Martijn un sourire aux lèvres mais avec les yeux sur son téléphone.
-On regarde un film ?
-Si tu veux. Lequel ? »
Magda se leva du canapé et alla jeter un petit coup d'œil à la collection de DVD des Gelderman.
« Sur la Route de Madison ?
-Mais encore...
-N'oublie jamais ? »
Martijn ne pris même pas la peine de répondre et se contenta de hausser de sourcils.
« Ok... Orgueil et Préjugés ? Non plus... T'as des idées ? Pour que ça aille plus vite...
-Ocean's Eleven, répondit Martijn sans réfléchir. »
Magdalena se retourna vers lui et pencha la tête. Il avait remarqué qu'elle faisait ça quand elle réfléchissait entre deux options. Plus le choix était difficile, plus elle penchait sa tête. Et actuellement, le choix avait l'air vraiment très difficile.
« Ok. Adjugé pour Georges Clooney. »
Magda avait attrapé le DVD et l'avait inséré dans le lecteur avant de retourner avec Martijn sur le canapé.
« Niveau film romantique, on a fait mieux...
-Magda... Le premier film qu'on a vu ensemble, c'est Tireur d'Elite... Je crois que les films romantiques c'est juste pas notre truc.
-Pas ton truc, corrigea Magda avec un petit sourire aux lèvres.
-Ouais, c'est pareil. »
Les onze truands étaient en pleine étude du plan du prochain lieu du braquage quand Magda avait murmuré:
« Marty... Il neige.
-Mmhmmh.
-Regarde ! Comme c'est beau...
-A chaque fois j'ai l'impression que tu découvres la neige, sourit Martijn.
-Il neige pas souvent chez moi, en France. Viens, on va dans le jardin. »
Magda attrapa la télécommande et mit le film sur pause. Elle ignora Martijn qui râlait dans le canapé et se leva pour aller récupérer des blousons, écharpes et bonnets. En revenant dans le salon, elle enfonça un bonnet sur la tête de Martijn et l'embrassa sur la joue avant de lui dire qu'elle l'attendait dans le jardin. Une fois à l'extérieur, elle descendit jusqu'à la troisième marche de la terrasse, les mains enfoncées au fond de ses poches à regarder les flocons tomber du ciel. Elle dut attendre quelques minutes avant de sentir son bras être saisit et apercevoir Martijn la tirer vers l'herbe qui blanchissait à vue d'œil.
« Il a plu Marty... On va mettre de la boue partout sur nos chaussures.
-On s'en fout. On les lavera plus tard. Viens, on danse.
-Là ?
-Oui. Là.
-Y a pas de musique, fit remarquer Magda. »
Martijn attrapa son téléphone et se concentra quelques secondes sur l'écran, jusqu'à ce qu'une musique s'élève enfin. Ces premières notes, c'étaient celles de Big Jet Plane. Martijn attrapa la main de Magda pour qu'elle se rapproche encore plus de lui. Il posa ses mains dans le creux de ses reins alors que Magda glissait ses bras dans sa nuque. Ils se balançaient au rythme de la musique et Magda se disait que c'était drôle comme, parfois, une chanson pouvait parfaitement coller à la vie. Un peu comme si l'auteur avait écrit cette chanson pour ce moment-là, qu'il avait imaginé ce texte pour ce moment.
« On a l'air débile. Je sais pas danser et en plus je ressemble à rien avec ce blouson...
-Tu es parfaite Magda, murmura Martijn. »
Leur danse n'avait duré que le temps de la chanson. Parce que la pluie s'en était mêlée et qu'ils avaient dû retourner à l'abri dans la maison pour tout le reste de la journée. Ils avaient fini le film et Magda n'avait pas trouvé le courage pour bouger. Elle était restée contre Martijn. Elle lui avait piqué son téléphone et avait choisi des musiques. Ils les avaient écoutées sans un bruit. Martijn avait voulu faire un jeu de société après que Magda ait remis pour la quatrième fois la même chanson de Beyoncé. Ils étaient tombés d'accord sur les petits chevaux et Martijn avait pu remarquer à quel point Magda pouvait être mauvaise joueuse. Pour le dîner, ils avaient décidé de faire la cuisine. Enfin Martijn s'était assis sur la table avec le livre de recette qu'il lisait à voix haute avec Magdalena qui exécutait. Après manger, ils étaient allés dans la chambre de Martijn. Ils s'étaient allongés sur le lit et ils avaient discuté. C'était tout simple mais en même temps, Magda trouvait cette situation incroyablement intime. La nuit était définitivement tombée sur Amsterdam et il faisait sombre dans la pièce. Aucun des deux ne pouvait distinguer précisément les traits du visage de l'autre.
« T'as jamais voulu apprendre à danser ?, demanda Martijn.
-Pourquoi tu me demandes ça ?
-Tout à l'heure, dans le jardin, tu m'as dit que tu ne savais pas danser. T'as jamais voulu apprendre ?
-Non. Baptiste avait voulu me montrer avant notre bal du lycée mais j'ai pas voulu.
-Pourquoi ?
-Parce que j'avais pas envie.
-Pas envie de danser ?
-Pas envie qu'on me voit danser.
-Ça t'a pas gênée en décembre, fit remarquer Martijn. Au gala.
-Avec toi, c'est pas pareil.
-Alors debout, ordonna Martijn en se levant. Ce soir, je vais t'apprendre à danser.
-Marty... C'est pas beau quand je danse.
-Si. C'est très beau quand tu danses. Et puis on ne risque pas de te voir. Il fait noir. Même moi, je ne vais pas te voir. Viens. »
Magda se redressa et distingua à peine la main que lui tendait Martijn. Elle la saisit pour se remettre sur ses deux pieds. Martijn posa de nouveau sa main droite dans son dos. Leurs visages étaient côte à côte, de telle sorte qu'il n'avait qu'à chuchoter pour lui parler. Magda ferma les yeux et se laissa guider. Tout doucement.
« Pose ta main sur mon épaule. Recule ton pied gauche, ensuite on pivote et tu réunis tes pieds. Et maintenant, tu avances ton pied, on re-pivote et on rassemble les pieds. Et voilà. C'est aussi simple que ça.
-Recommence, demanda Magdalena avec les yeux toujours fermés. »
Alors Martijn recommença. Et puis une autre fois encore. Et encore une autre. Magda ne compta même plus. Elle était bien. Incroyablement bien. Sans savoir vraiment pourquoi, elle laissa sa main remonter vers le cou de Martijn. Surpris, le jeune homme tourna la tête vers elle. Il la vit sourire. Avec un vrai sourire. Celui qui rend les autres heureux. Et ils s'étaient embrassés. Tout doucement. Leurs lèvres se frôlaient à peine. C'était comme si choisir de s'embrasser avec plus d'ardeur, c'était prendre le risque de casser le moment qu'ils vivaient, prendre le risque de briser leur bulle. Et aucun des deux n'avait envie de briser quoi que ce soit. Magda voulait remonter sa main dans les cheveux de Martijn parce qu'elle adorait ça ; elle les trouvait toujours tout doux et légers. Mais ce soir, elle n'osait pas. Elle préférait profiter de tout ce qu'elle ressentait. De tout ce que Martijn lui faisait ressentir. Elle ne le connaissait que depuis quatre mois et elle commençait déjà à oublier comment vivre sans lui. Il lui arrivait de trouver ça effrayant. C'était effrayant de se rendre compte à quel point, et en quelques mois, Martijn était devenu celui qu'il lui fallait pour avancer. Mais, paradoxalement, elle trouvait ça terriblement rassurant. C'était rassurant de savoir que quoi qu'il arrive, il y aurait quelqu'un pour la soutenir, pour la porter plus haut, pour la rassurer. Alors oui, ce n'était qu'un frôlement de lèvres, mais c'était un frôlement de lèvres qui donnait le vertige à Magda.
« Tu sais Oma..., reprit Martijn une fois que le flocon qu'il avait attrapé eut finit de fondre dans le creux de sa main. C'est une femme plus forte que toutes les personnes que je connaisse. Et... je sais que ça ira cette fois-ci.
-Tu le sais ?
-Oui. Je le sais. Je me souviens qu'un jour Opa m'avait dit: « Tu seras avec la bonne femme quand tu verras ton futur dans ses yeux. ». Et je crois qu'avec elle, je le vois.
-Depuis quand tu sais ça ?, demanda sa grand-mère.
-Depuis le gala. Quand je l'ai vue dans cette robe blanche. Elle était si belle... Je la trouvais parfaite. »
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