49. Trent
Précédemment : Aaron fait ses adieux à Livie tout en la raccompagnant à l'aéroport. Tous deux se sentent complètement dépassés par la situation et c'est le cœur lourd que Kane regarde Livie lui échapper.
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Livie
Les jours précédents m'avaient parus si longs. Je n'étais pas sorti de ma chambre, je n'avais pas mangé non plus depuis plusieurs jours. Si Aaron voyait ça. Je soupirais. Ca recommence. Chaque minutes de mon esprit lui était dédiées. A chaque fois que je faisais quelque chose, mon esprit se ramenait à lui. Qu'est ce qu'il dirait ? Qu'est ce qu'il penserait ?
Mais ce matin, je me suis décidée. Je ne peux pas me laisser abattre. De toute façon je n'ai pas le choix, il faudra bien que je reprenne ma vie. Alors je me levai tôt, me préparant avec une minutie presque obsessive. Chaque geste, chaque choix vestimentaire était une tentative de réaffirmer mon identité, de me rappeler que j'étais une étudiante avant tout, pas seulement la femme qui avait aimé un mafieux.
J'avais surtout besoin d'une bonne dose de changement.
J'attrapais un ciseau au fond du tiroir de mon bureau et m'installais en face du miroir de ma petite salle de bain. Je soupirais. J'attrapais une mèche de cheveux et commençait à la couper délicatement, pareil avec la seconde, puis la troisième. Les mèches s'enchaînaient, et j'avais l'impression de renaître. Il paraît que les cheveux sont la mémoire du corps. Alors je préférais tout oublier.
Au bout d'une trentaine de minutes, j'arrivais enfin au résultat que je voulais.
Je me scrutais attentivement dans le miroir, contente d'y être parvenue. Ce carré était magnifique. Droit et légèrement ondulé. Je semblais avoir plus de caractère ainsi. J'aimais être une autre personne que celle qui s'était laissée briser trop longtemps.
Je terminais de me préparer, un peu de maquillage et une tenue bien différente de d'habitude.
Habituellement, je portais des jeans avec des baskets, plutôt sobre. Aujourd'hui j'ai envie qu'on me remarque. J'enfilais une petite robe en jean que je dégotais au fond de mon placard, c'était un cadeau de Bella que je trouvais habituellement trop extravagant. Il était parfait pour l'occasion de la nouvelle moi.
J'accessoirisais ma tenue avec des escarpins vernis et un sac assortis.
- Parfait, m'exclamais-je dans le miroir, fière du résultat.
Lorsque je tournais la tête en direction de mon réveil, je remarquais qu'il était plus que temps d'y aller. Rapidement, j'avalais quelques calmants pour modérer une potentielle crise de panique, et je sortais en me hâtant.
La route vers l'université, que j'avais autrefois parcourue sans y penser, me sembla interminable. Les bâtiments familiers prenaient une nouvelle signification dans ma vie actuelle. Je me sentais comme une étrangère dans un monde que je connaissais pourtant si bien.
À mesure que je traversais le campus, je ne pouvais m'empêcher de me sentir observée. Les regards des autres étudiants, que j'interprétais comme des jugements silencieux, m'oppressaient. Chaque rire, chaque conversation animée autour de moi soulignait mon propre malaise. Cette nouvelle apparence attirait effectivement tous les regards, ne me mettant finalement pas si a l'aise que ce que j'espérais. Reprendre la fac était difficile, mais en plein milieu d'un semestre encore plus.
Je trouvai refuge dans la bibliothèque, espérant me perdre dans les livres et échapper à mes pensées tumultueuses. J'en profitais pour trouver un nouveau job étudiant, mais même là, l'ombre d'Aaron planait sur moi. Je pris place à une table isolée, ouvrant un journal de petites annonces sans vraiment y prêter attention. Mes pensées dérivaient inexorablement vers lui, vers ce que nous avions partagé et ce que j'avais définitivement perdu.
Alors que je feuilletais distraitement les pages de la presse, une voix douce mais assurée me tira de mes pensées.
- Excuse-moi, cette place est libre ?
Je levai les yeux, surprise, et croisai le regard d'un jeune homme blond aux yeux pétillants. Il portait une chemise impeccablement repassée, contrastant avec l'atmosphère décontractée des autres étudiants. Il me souriait d'un air amical, une étincelle de curiosité dans les yeux.
- Je t'en prie, répondis-je, tentant de dissimuler mon trouble.
Le jeune homme prit place en face de moi, sortant ses affaires avec une aisance naturelle. Il semblait rayonner de confiance et de sérénité, des qualités qui me faisaient cruellement défaut en ce moment.
- Trent, dit-il en tendant la main. Tu es nouvelle ici ? Me questionnait-il
- On peut dire ça oui, soupirais-je en essayant de cacher ma maladresse. Disons que j'ai pris une pause.
Trent hocha la tête, semblant comprendre plus que je ne disais.
- Reprendre les études après une interruption, c'est toujours un peu compliqué, commenta-t-il avec un sourire.
J'acquiesça d'un simple sourire en guise de réponse avant de me replonger dans mon journal. Je parcourais chaque annonce que je trouvais, les notant dans un petit carnet pour me rappeler de les contacter.
Au bout de seulement quelques minutes, ma lecture fut de nouveau interrompue par ce fameux et impeccablement soigné, Trent :
- Il y a un club que je fréquente qui recrute une danseuse.
Je levais les yeux dans sa direction, surprise de son commentaire pour le moins direct. Mais avant même que je puisse réfléchir à une quelconque réponse, il reprit :
- En fait, je t'ai observé de loin et tu avais l'air absolument charmante. Dit-il de manière désinvolte, sans la moindre hésitation.
- Merci je suppose... repondis-je de manière confuse. A vrai dire je ne sais pas trop quoi dire...
- Ils organisent des sélections demain soir, si tu es intéressé-
- Absolument ! Le coupais-je net.
C'était la solution à mon problème, et une nouvelle expérience qui ne me rappellerai rien de ma vie passée. Alors je prend.
- Super, 19h devant la BU je passe te prendre.
Il déchira un morceau de papier de mon carnet et inscrit son numéro au dos.
- Tiens, comme ça tu pourras me joindre. Dit-il avant de s'éclipser.
Son geste me réchauffait le cœur, au point de me décrocher un sourire. Je dois avouer que c'est plaisant, cette sensation d'être considérée a l'égard de quelqu'un de normal.
Malgré tout au fond de moi, je doutais. Pourquoi un inconnu s'assiérait a la table avec l'unique gentillesse de résoudre mes problèmes d'argent ? J'enfonçais mon visage entre mes mains en soupirant.
- Tu recommences, me dis-je a moi même
Depuis tout ça, je suis complètement méfiante, de tout. J'ai parfois du mal à saisir que j'ai repris ma vie, et que je ne crains plus rien à présent que je ne suis plus la distraction de Kane.
La journée avait défilé à grande vitesse, et je devais de nouveau regagner ma tanière sombre et lugubre. La boule au ventre apparut de nouveau. Je m'empressais de sortir mon téléphone pour envoyer un message à Trent :
De Livie à Trent : Hey, c'est la fille de la bibliothèque, tu es occupé ?
De Trent à Livie : Salut Olivia, non pas du tout, tu veux qu'on se voit ?
Il avait répondu du tac au tac. Je serrais mon téléphone entre mes bras. Sa réponse avait éloigné toute angoisse de rentrer chez moi, du moins pour un moment.
De Livie à Trent : Comment tu connais mon prénom ?
De Trent à Livie : C'était écrit sur la couverture de ton carnet.
De Livie à Trent : Okay tu es très attentif j'admet, on se retrouve à la bibliothèque dans 10mn.
De Trent à Livie : J'y serai !
Je filais à la bibliothèque sans même faire attention à ce qui m'entourait. Les gens continuaient de me scruter du coin de l'œil lorsque je passais. Mais au fil de la journée, ça n'était finalement pas désagréable de se sentir désirable.
Au moment où je pénétrais dans la bibliothèque pour la seconde fois de la journée, Trent était assis à la même table que ce matin, son visage s'illuminant lorsqu'il me remarquait.
Je souris en me dirigeant vers lui.
- Alors qu'est ce qu'il y avait de si urgent ? Me questionnait-il
- Euh... je- begayais-je
- Okay tu sais quoi ? On va aller se balader et tu vas m'expliquer tout ça.
J'acquiesçais, et j'emboîtais le pas en direction de l'extérieur.
Nous nous retrouvâmes à marcher dans les jardins du campus, discutant de tout et de rien. Trent parla de son enfance, de ses rêves, et de ses ambitions. J'écoutais avec intérêt, trouvant dans ses paroles une distraction bienvenue à mes propres pensées.
- Et toi, Olivia ? demanda-t-il soudainement. Quels sont tes rêves ?
La question me prit au dépourvu. J'avais passé tellement de temps à fuir mon passé que je n'avais pas réfléchi à l'avenir.
- Juste Livie, le stoppais-je
Puis je repris ma réflexion avant de bégayer à peine quelques mots :
- Et...Je... je ne sais pas, avouai-je. Je suppose que je veux juste retrouver une certaine normalité.
Trent hocha la tête, respectant mon silence.
Malgré les moments agréables passés avec lui, je ne pouvais m'empêcher de ressentir une certaine culpabilité. Chaque sourire, chaque rire partagé avec lui était teinté du souvenir d'Aaron. Je me demandais ce qu'il faisait, s'il pensait encore à moi. Les nuits restaient particulièrement difficiles, mes rêves étant hantés par des images de notre vie commune. Je savais que je devais tourner la page, mais l'empreinte d'Aaron sur mon cœur était profonde.
Sur le chemin du retour alors que je rentrais chez moi, je me surpris à vérifier mon téléphone compulsivement, espérant un message d'Aaron que je savais pourtant ne jamais venir. Cette absence de nouvelles était à la fois un soulagement et une douleur lancinante.
Je m'assis sur le sol de mon salon, entourée de souvenirs. Je savais que pour avancer, je devais affronter mes émotions et trouver un moyen de les surmonter. Mais chaque tentative de le faire semblait me ramener à cette même douleur initiale, celle de perdre un amour intense et destructeur. La solitude de mon appartement devenait pourtant encore plus insupportable.
Je me réveillais, un mal de crâne assourdissant bourdonnait dans mes oreilles. Le sol froid de mon appartement me fit frissonner. Lorsque je pris mon téléphone pour regarder l'heure, je remarquais le message de Trent, qui captiva toute mon attention.
De Trent à Livie : Hello Livie, je passe te prendre ce matin, envoie moi ton adresse.
En voyant l'heure, ça n'était pas de refus, je lui envoyais mon adresse avant de filer prendre une bonne douche.
Je descendis en trombe et montait immédiatement dans sa voiture, qui se tenait juste la, en bas de mon immeuble miteux.
- Salut toi, réveil difficile ?
Il m'attachait un petit rire de la bouche.
- Un peu oui, je fais quelques insomnies.
- Ca c'est parce que tu pensais à moi avoue.
Si seulement... je continuais de sourire par politesse à sa blague un peu dragueuse, puis il démarrait le moteur et nous prirent la direction de l'université.
En descendant, Trent m'adressa un dernier petit mot :
- 19h ? Me demandait-il
- C'est toujours bon, lançais-je précipitamment en m'éloignant de la voiture
Trent et moi nous croisions régulièrement au fil de la journée. Que ce soit dans les couloirs de l'université, à la bibliothèque, ou à la cafétéria, il semblait toujours apparaître au moment où j'en avais le plus besoin. Sa présence était apaisante, un contraste bienvenu à l'agitation intérieure que je ressentais. Il était charmant, drôle, et surtout, il ne posait pas de questions sur mon passé. Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais à l'aise avec quelqu'un. Trent avait cette capacité rare de me faire sourire même dans mes moments les plus sombres.
Je n'arrêtais pas de repenser à sa délicate attention. Il était doux et tellement prévenant. J'aimais être traitée ainsi.
Après mon dernier cours, je regagnais sa voiture en direction des sélections pour ce fameux nouveau travail. J'avais passé une bonne journée, légère, et mes pensées négatives semblaient s'être un peu estompées. Jusqu'à ce que je j'aperçus le nom du club pour lequel j'allais potentiellement travailler. Le Carlston. Une crise de panique me figeai sur le siège passager, ne pouvant décrocher mon regard du sol.
- Livie est ce que tout va bien ? Me questionnait-il.
Pas de réponse.
- Ecoute, je comprend que ça puisse paraître effrayant comme ça, tu n'es pas obligé si tu n'a pas envie.
Je hochais la tête de gauche à droite lui indiquant mon niveau de détresse actuel. Instinctivement, il me prit dans ses bras. Étrangement, mes angoissent semblaient s'apaiser, et l'atmosphère paisible que je tentais de me créer ne tournait finalement plus qu'autour de lui.
- Bon, c'est pas grave, je vais te raccompagner chez toi.
Ni une ni deux, il démarrait et nous quittions le Carlston.
En chemin, je réussis à décrocher finalement quelques mots, ne voulant pas rester seule ce soir.
- Est ce que tu veux bien rester avec moi ? Demandais-je comme une petite fille complètement apeurée.
- Aucun problème, me dit-il en passant son doigt sous mes yeux humides pour les essuyer.
Lorsque nous montions, je m'affamais sur le lit et terminais de faire couler toutes les larmes qu'il me restait en réserve. Tant pis pour Trent, tant pis si il me prend pour une pleureuse. J'ai besoin d'extérioriser. Mais à ma grande surprise, il s'assît au bord du lit, caressant tendrement mon dos pour me réconforter du mieux qu'il pouvait. Il venait de gagner ma confiance.
Alors je décidai de me confier à Trent.
Je me sentis enfin prête à raconter mon histoire. Nous étions assis sur le bord du lit, ensemble. Je pris une profonde inspiration et commençai à parler, lentement, mais avec détermination. Je lui racontai ma rencontre avec Aaron, notre amour passionné, et comment j'avais été attirée dans son monde dangereux. Trent écoutait d'une oreille attentive, sans m'interrompre, ses yeux reflétant une profonde empathie.
- Je comprends maintenant pourquoi tu as eu du mal à reprendre ta vie, dit-il doucement après que j'eus terminé. Mais Livie, tu es incroyablement courageuse. Tu as pris la décision de te sauver, et c'est la chose la plus difficile que quelqu'un puisse faire.
Ses mots raisonnaient en moi d'une telle puissance. Il me donnait la force nécessaire.
Je savais que pour aller de l'avant, je devais affronter mes émotions, les comprendre, et finalement, les surmonter. Avec l'aide de Trent, je commençai à reconstruire ma vie, petit à petit.
Je passais la nuit à lui raconter chaque détail de ce qui m'était arrivé, en passant par toutes les émotions possibles. Pourtant il se tenait toujours la, de toute sa splendeur il continuait de me soutenir.
A mesure que les jours passaient, j'avais l'impression de renaître. Je m'étais construit une routine, qui l'incluait lui à présent. J'ai même accepté de repasser les auditions au Carlston. C'est pas parce que ce club appartient à mon... à mon ex petit copain ? Je ne sais même pas si je peux le qualifier ainsi en réalité... mais une chose est sure, j'allais obtenir ce rôle, j'allais aller de l'avant, je voulais me reconstruire aux côtés de quelqu'un qui serait là pour moi, qui se soucierai de moi. Quelqu'un comment Trent.
Le soutien inébranlable qu'il m'a apporté devenait un pilier pour moi. Nous passions de plus en plus de temps ensemble, et une complicité profonde se développait entre nous. Trent ne cherchait pas à me changer, il m'acceptait telle que j'étais, avec mes failles et mes blessures. Il m'encourageait à m'ouvrir, à parler de mes sentiments, à exprimer ce que je gardais enfoui en moi.
Bientôt, les semaines passèrent, mon esprit étaient bien trop encombré par mon quotidien, pour que je puisse penser au passé. J'y arrivais. Je m'en sors. Je continuais d'appliquer ma routine bien remplie. J'avais des notes correctes à la fac, et je devais une danseuse de plus en plus douée. Tellement douée que bientôt, je devrais me produire pour la première fois devant le club complètement rempli. J'étais hésitante au départ, mais Aaron n'était jamais revenu ici. L'air enjouée et sexy dont je devais faire preuve me plaisait beaucoup aussi. J'ai découvert une nouvelle moi, qui s'affirme, tellement plus rayonnante.
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