after ten [3]

TykenaProduction.©





À ta recherche - Rafaël





J'écarquille les yeux.

- Quoi ?

Il ne dit rien et reste devant la baie vitrée.

Je me lève et vais a côté de lui.

- Tu aimes encore maman ?!

Il me regarde et soupire.

Saïf - Quand ta mère est arrivé dans la prison en tant que simple gardienne on était touuus à fond sur elle. Tu voyais une jeune femme arriver, belle taille, un visage magnifique, une bouche qui t'envoûte... et des formes.. waaah, son cul était d'une forme.. t'avais envie de d-

- Arrête c'est bon wesh, elle est mariée.

Saïf - Oublie pas que ta mère je l'ai baisé plus d'une fois. J'ai encore le droit de parler de son corps.

Je roule des yeux.

- Évite moi ce genre de détail alors.

Il ricane et se retourne vers la baie vitrée.

Saïf - Elle était parfaite. Des paris étaient déjà sortis. 100€ pour celui qui réussirait à la baiser dans la semaine, 50€ pour celui qui réussirait a l'embrasser dans la semaine et tout ce genre de connerie.

- Tu as parié ?

Saïf - Non. Mes gars et moi on faisait pas ce genre de choses. Pourquoi parier ? On a pas besoin de la motivation de l'argent pour arriver à nos fins. Le nombre de gardienne que j'ai soulevé là-bas c'était fou.

- Bien évidemment..

Saïf - Nous on se contentait de fantasmer sur elle et de la mater de loin. En ce temps-là on s'approchait pas des gardiens, c'était nos pires ennemis donc c'était hors de question. Mais ta mère.. déjà c'était la première gardienne noire au milieu de blanc donc t'avais.. comment dire ? Pas une sécurité mais.. arh..

- Tu te voyais en elle ?

Il me regarde.

Saïf - Quels études de blanc tu fais ?

- C'est pas une étude "de blanc". Je fais psychologie.

Il me regarde de haut en bas.

Saïf - Tu as Tarek dans la peau toi.

Je roule des yeux. Il manque pas un moment de le "descendre".

Saïf - Et oui je me voyais en elle. Je voyais quelqu'un qui pouvait peut-être "me comprendre" mais je disais rien.

- Tu l'as dragué ?

Saïf - Non, jamais.

- Ah ouais ?

Saïf - Jamais.

- Comment tu l'as approché ?

Saïf - Un jour j'ai entendu dire que les latinos avaient des pensées tordues envers elle.. et-

- C'est-à-dire ?

Il me regarde.

Saïf - Des pensées tordues.

- Comme ?

Saïf - Rafaël putain. Réfléchis un peu, ton daron adoptif t'a rien appris ou quoi ?!

- Mais frère tu me dis "pensées tordues" en mode je suis censé comprendre. Tordues comme ?!

Saïf - Toi t'es vraiment con. Imagine toi t'es un mec, enfermé dans une cage durant des années sans avoir été dehors, sans ken, sans aucune liberté et avec une frustration qui grandit en toi. Et un jour une putain de femme avec un corps d'enfer arrive et te met dans tous les états. A quoi tu vas penser ?

Je le regarde et fais la grimace dégoûté.

Saïf - Sachant que c'était un maton et qu'elle était inaccessible. Tu vas réfléchir avec ton cerveau ou ta bite ?

- Ils voulaient...

Saïf - Violer ta mère, eh ouais.

Je fais la grimace et ferme les yeux.

Saïf - C'était fréquent les viols là-bas. Sur des nouveaux détenus apeurés, c'est fréquent.

- Toi aussi tu faisais ça ?!

Il me regarde très mal.

Saïf - Je soulève des chattes, pas autre chose.

Je roule des yeux.

Saïf - Quand j'ai su ça, ça m'a rendu fou.

- Pourquoi ? Tu ne la connaissais pas.

Saïf - Oui mais c'était le seul maton qui depuis 2-3 ans me souriait.

Il me regarde et moi aussi.

Saïf - Pour un simple sourire chaque fois qu'on se croisait. Je sais pas si tu te rends compte. Suffisait d'un putain de sourire pour que j'aille menacer les latinos que si il arrivait quelque chose à ta mère...

Il hausse les épaules.

Saïf - J'étais prêt à reproduire ce que j'avais fait auparavant. J'étais prêt à tuer pour ta mère.. alors que je ne savais même pas si elle connaissait mon nom.

- Pourquoi wesh ?

Il hausse les épaules et me regarde.

Saïf - Pour son sourire ? Tu sais depuis combien de temps j'avais pas vu ce genre de sourire chaleureux venant d'une personne extérieure ? A chaque fois qu'on se croisait, ta mère avait tout le temps tendance à me sourire, elle cherchait mon regard pour me sourire, même quand j'étais sur les nerfs, que je voulais pas parler ou quoi.. suffisait de voir son sourire qui m'étais destiné pour que ma journée reparte. C'était une dinguerie je te jure.

Il tourne la tête vers la baie vitrée et souris.

Saïf - Et elle avait un sourire.. putain..

Pour moi il est pas amoureux. Après tout ce qu'il lui a fait ? Il est pas amoureux, désolé.

Saïf - Les latinos ne me prenait pas au sérieux parce que j'étais le rigolo de service là-bas.. mais pour une fois de ma vie je rigolais pas. Tu touchais à Taynara, j'allais te frapper jusqu'au sang.

Je m'appuie contre le baie vitrée et le regarde.

- Mais par après ils t'ont pris au sérieux ?

Il hoche la tête négativement.

- Qu'est-ce que tu as fais alors ?

Saïf - *rire* Je crois que les latinos m'ont détesté de là jusqu'à ma sortie à cause de ta mère. J'en ai frappé 2, jusqu'à en laisser 1 à moitié mort dans sa cellule et j'ai vidé mon tube de déodorant dans les yeux du troisième.

Et vous allez me faire croire que ce mec est normal ? Dites-moi ce que vous voulez hein mais pour moi ce gars est instable. Mentalement parlant, il est instable de fou.

Saïf - Je ne les ai plus revus tourner autour de ta mère.

- Tu es pas bien.

Saïf - Je sais.

- Maman le sais ?

Saïf - Ouais.

- Et ?

Saïf - Arh ta maman est une boudeuse, donc elle a boudé. Comme d'habitude. Mais elle l'a jamais su en prison hein, elle l'a su après.

- Pourquoi tu le lui as pas dit avant ?

Il hausse les épaules.

Saïf - C'était pas important. Le plus important c'est qu'elle allait bien. Depuis ce jour-là je me suis rapproché d'elle, notre relation était tout d'abord amicale, j'étais son préféré d'ailleurs.

Il rigole.

Saïf - Puis elle est monté en grade, elle est devenue gardienne en chef..

Il mords sa lèvre en regardant face à lui.

Saïf - ...qu'est-ce qu'elle était belle putain. Je la regardais tous les jours, rentrer dans le réfectoire chaque matin, avec son sourire, son déhanché..

Il reste silencieux quelques secondes.

Saïf - Elle avait une façon de rire.. elle détestait la manière à laquelle son nez bougeait quand elle rigolait donc elle mettait toujours quelque chose pour le cacher... elle passait toujours une main sur sa nuque quand elle stressait ou quand elle était triste.. *rire* et j'aimais trop la manière à laquelle elle caressait ma joue pour me saluer..

Mais ? C'est son ex putain.

Saïf - Et au lit.. waaaah, une putain de d-

- Oui oui ok, ça je peux m'en passer !

Il sourit et ne dis rien.

Saïf - Pendant des années je la regardais de loin et je tombais amoureux d'elle petit à petit.. je devenais complètement dingue de ta mère, dingue.

- ...

Saïf - ...mais je le lui ai jamais dit. J'ai vécu des années tout proche d'elle, la voyant avec d'autres hommes, la voyant même avec un autre détenu que j'ai fini par haïr *rire*, je la voyais souffrir avec tous ces hommes et tout ce que je voulais lui dire c'était : "viens avec moi, je te ferais pas souffrir parce que moi je t'aime réellement" mais.. *rire* je n'étais qu'un prisonnier, qu'est-ce que j'avais à lui offrir ?

Il hausse les épaules.

Saïf - J'avais rien à offrir. Alors j'ai préféré l'aimer de loin. Je l'écoutais me raconter quelques fois les moments passés avec ses mecs du passé, comment ils la rendaient heureuse quelques fois et ça me tuait mais..

Il me regarde avec un rictus.

Saïf - ...elle était heureuse alors je l'étais aussi.

Il se tourne vers la baie vitrée et reste silencieux. Moi de même.

J'étais.. perdu.

En le voyant parler comme ça.. on voit un homme qui était et qui, apparemment, est encore fou amoureux de ma mère. Qui n'a des yeux que pour elle, qui peut mourir pour elle et qui ne la quittera pour rien au monde.

Pourtant..

Il a fait complètement le contraire.

Il l'a détruit, il lui a fait du mal, il lui a dit qu'il ne l'aimait pas..

Je comprends pas.

Est-ce qu'il joue un rôle ?

Avec qui il joue un rôle ? Avec moi ? Ou est-ce que son rôle il l'a joué avec ma mère auparavant ?

Il continue donc à me mentir.

Mais il avait l'air si sincère aujourd'hui. Il a beau être le plus gros batard de l'univers.. aujourd'hui il avait l'air si différent..

Ou bien..

...

*rire*

J'ai compris maintenant..

Il ne ment pas. Il ne m'a pas menti cette fois. Enfin je crois.

Ce n'était pas leur amour le problème..

- ...j'étais le problème alors ?

Il se tourne vers moi et me regarde.

Saïf - Tu n'étais pas le problème Rafaël.

- Tu as quitté maman, tu l'as abandonné et laissé à cause de moi.

Il ne dit rien et me regarde seulement de manière neutre.

- Parce que tu ne m'as jamais voulu dans ta vie.

Il a un regard passif, un regard vide.

- Je te comprends pas.

Je fronce les sourcils.

- Tu as laissé la femme que tu prétends aimer le matin après qu'elle t'ait annoncé sa grossesse. Tu as disparu de la circulation en lui disant que tu ne l'aimais plus et que tu aimais toujours ton ex. Tu l'as laissé, elle et ton bébé dans le ventre, seule face à un moment qu'aucune femme ne devrait subir seule. Elle a accouchée seule, sans aide, sans assistance parce que sur son dossier.. ton numéro ne passait pas. Tu revenais quelques fois, histoire de te montrer mais tu disparais complètement alors que j'étais âgé de seulement 6 mois. Tu l'as fait pleurer plus d'une fois, tu l'as détruite d'une manière.. *rire* t'es un pro.

Il tourne la tête pour une fois, en assumant pas mon regard accusateur.

- Mais là... tu me dis que tu l'aimes et que je n'étais pas le problème ? *rire* Explique moi, je suis perdu.

Il soupire mais reste silencieux.

- Est-ce que, pour une fois, tu peux être sincère ?

Il croise ses bras et souffle.

Saïf - ...le problème ce n'était pas ta mère et encore moins toi.. le problème c'était moi.

Ça je n'en doutais pas..

Saïf - Quand ta mère m'a annoncé qu'elle était enceinte... une énorme peur m'a envahie. Une angoisse s'est installée en moi. Je ne voulais pas y croire, je voulais même pas y penser mais c'était bien là.. elle était contente, elle me brandissait les papiers du médecin disant qu'elle attendait notre enfant toute heureuse pendant que moi... j'étais en plein stress. J'ai pris peur.

- ...

Saïf - ...

- ...peur de quoi ?

Il me regarde.

Saïf - Peur de te perdre. Peur de perdre un autre enfant. Peur de me rater encore une fois comme je l'ai fais si bien. Peur qu'un jour je reçois l'appel de l'hôpital pour me dire que tu n'étais plus là. Peur que je te perde comme j'ai perdu Hafsa. Avoir un enfant était devenu ma phobie.

- ...

Saïf - C'était dur. Je ne voulais pas être brisé une seconde fois, je ne voulais pas revivre ma jeunesse une seconde fois, je ne pouvais pas. J'aimais ta mère à en mourir mais si je restais avec elle et toi.. je finirai par vous perdre alors je suis parti. J'essayais de revenir, j'essayais de me montrer, d'être présent pour vous deux, je ne voulais pas vous laisser seuls mais... je n'y arrivais pas. Je ne voulais pas revivre la même chose encore une fois... et me détruire encore une fois..

- Et tu es parti..

Saïf - Et je suis parti.

Je le regarde et lui aussi.

Saïf - Je ne sais pas pourquoi, ni comment je me suis retrouvé avec Tania mais j'ai préféré rester avec elle. Je pensais qu'elle allait m'aider à vous oublier mais... je n'arrêtais pas de penser à vous. J'arrêtais pas. J'avais une culpabilité horrible en moi. Et quand ta mère à accouché et qu'on m'a envoyé des photos de toi...

Il sourit avec un regard vide, perdu.

Saïf - J'ai compris que tu serais tellement mieux sans moi. J'ai compris que si j'étais avec toi.. je n'allais rien t'amener de bien, rien du tout. Ta mère allait s'occuper de toi, ta mère allait te faire grandir et te protéger comme je ne pourrais jamais le faire... je n'ai pas pu le faire avec Hafsa qu'est-ce qui me dit que j'aurais pu le faire avec toi ?

- Mais.. tu n'as même pas essayé..

Il hausse les épaules.

Saïf - Ça n'en valait pas la peine... alors je vous ai abandonné.

Je le regarde et ne dis plus rien.

J'ai eu mal.

Je contracte ma mâchoire et le regarde tout simplement.

Je me demande si il regrette.

Saïf - ...c'était la chose la plus dur de ma vie, crois-moi Rafaël.

Je le regarde quelques secondes.

Saïf - Tu ne peux pas imaginer comment ça m'a fait mal. Personne ne pourrais l'imaginer. Et personne n'a vécu pire que moi.

- Personne.

Saïf - Personne.

Je hausse les sourcils et croise les bras.

- C'était dur pour toi hm ?

Saïf - Tu ne peux pas imaginer comment.

Je ne peux pas imaginer comment.

Il ose me dire que je ne peux pas m'imaginer comment.

- ...

Saïf - Et j'y p-

- Tu sais que j'ai fait une tentative de suicide le jour de mes 18 ans ?

Il me regarde avec surprise dans ses yeux.

- Mon grand-père venait de mourir d'une crise cardiaque et ma grand-mère l'a suivie 2 mois après un jour avant mon anniversaire. Maman était dévastée, elle venait de perdre ses deux parents donc elle était finie et moi ça m'a encore plus tué.. voir mes grands-parents décéder, ma propre mère dévastée, mon vrai "père" qui ignorait mes appels et qui venait de me bloquer alors que je lui avais envoyé juste l'invitation pour ma fête d'anniversaire ainsi que l'annonce de ma réussite à l'école.. c'était trop pour mon mental.

Et il eut un silence de quelques longues secondes. Je pense qu'il ne savait pas quoi dire.

- Je sais pas ce qui m'a pris cette nuit là mais *rire* je voulais en finir, j'en pouvais plus alors je voulais en finir. J'ai pris des antidépresseurs et de l'alcool. Au bout d'une bonne trentaine de minutes j'ai fait une crise d'épilepsie.

Il évite mon regard et retourne lentement s'asseoir sur le canapé en gardant ses yeux rivés au sol.

Il sait pourquoi il ose pas me regarder.

- J'ai fait 2 semaines à l'hôpital.

Je m'assieds sur l'accoudoir du canapé face à lui.

- Maman t'a prévenu au moment où l'ambulance était arrivé à l'hôpital. Elle t'a harcelé de messages et d'appels pour te dire que ton gosse était à l'hôpital entre la vie et la mort, dans un état très critique.

Il passe ses mains sur son visage.

- Mais tu n'as pas bougé d'un poil et tu as bloqué son numéro de téléphone aussi. Tu n'as rien voulu entendre. Si je perdais la vie tant pis, si je m'en sortais tant mieux.

Je cherchais son regard mais lui me le donnait pas.

Il esquivait mon regard et ne voulait absolument pas que je le regarde. Il refusait.

Pour quelle raison ?

Je sais pas.

Est-ce qu'il avait honte ? Ou juste pas envie ?

Ou il faisait genre d'avoir honte p-

Arh.. pour finir ? Ce n'est plus mon soucis. Il fait ce qu'il veut.

Plus tard dans la journée quand je quitterai cette maison ça sera la dernière fois que je passerai le seuil de sa maison. J'ai eu ma conclusion, j'ai eu mon bouclage et j'ai eu ce que je voulais : une discussion avec lui.

Je ne m'attendais pas a ce qu'il prenne ses responsabilités ou quoi, non. Maintenant je suis sûr et certain que cet homme.. ne pourras rien pour moi parce qu'il ne le veut pas.

Je ne suis personne pour forcer quelqu'un à endosser un rôle.

- J'aurais dû te détester mais.. j'ai pas pu. J'ai continué à rentrer en contact avec toi jusqu'aujourd'hui et me voilà...

Je hausse les épaules.

- Alors non, je ne peux pas m'imaginer comment ça t'as fait mal mais oui, d'autres personnes ont vécu pire que toi sans avoir le choix. Tu avais le choix de te rattraper et d'assumer. Dieu t'a donné plusieurs chances de te rattraper et tu avais la capacité et la force de le faire mais tu n'as rien fait. Ça n'a jamais été ton absence qui m'a affecté mais c'était ton manque de réponse et ton ignorance.

Il m'a regardé à l'entente de la dernière phrase.

- Mon grand-père me répétait toujours que le mieux c'est d'ignorer lorsqu'on t'ignore.. mais comment tu veux ignorer une personne quand c'est cette personne là qui vous fait du mal depuis l'adolescence ?

Son regard ne m'a plus quitté.

- Tu aurais pu juste essayer.. juste essayer.

Saïf - ...essayer quoi Rafaël put-

- Essayer de m'aimer comme tu as réussi à aimer Hafsa.

Et dernier silence.

J'étais fatigué. Mentalement et physiquement. J'étais fatigué.

J'ai vidé le sac qui se remplissait depuis plus de 10 ans. Ce grand poids au coeur a pu se vider, enfin.

Il n'a rien dit et moi aussi.

Les minutes passèrent.

Je ne sais pas à quoi il pensait. Pas du tout.

Je regardais vers la baie vitrée en pensant à ma mère, je sais pas pourquoi.

Elle a vécu des choses que je n'aurais jamais pu porter seul. Je vous jure que quand elle me raconte des moments de sa vie, je reste là à l'admirer et me dire que j'ai comme mère une guerrière.

Une mère célibataire qui était prête à tout abandonner pour son fils.

Elle mérite des acclamations.

Taynara Pereira est une femme avec un grand F. Un énorme.

Et je sais même pas ce que je ferais sans elle aujourd'hui.

Je sais pas où est-ce que j'irais.

Je souris en y repensant et soupire avant de me lever.

- Je te laisse.

Il lève enfin les yeux vers moi. Yeux larmoyants ?

- J'ai eu ce que je voulais alors maintenant je ferais ce que tu as toujours voulu : je te laisse disparaître.

Je met mes mains dans les poches et souffle une bonne fois pour toute.

Le soulagement est enfin arrivé.

- J'ai un père qui m'attend à la maison...

Je souris en y pensant.

- Alors ne t'inquiète pas pour moi Saïf.

Je tends ma main vers lui qu'il regarde avant de me regarder.

Il se lève et me serre la main après hésitation.

Je hoche la tête et souris avant de me retourner et partir vers la porte mais :

Saïf - Rafaël.

Je me suis arrêté et me suis retourné vers lui.

Et pour la première fois, j'ai senti que j'avais son attention.

Pour une fois j'avais l'impression d'avoir changé les rôles.

Saïf - ...je t'appellerai.

Vous savez le nombre de fois que je me suis imaginé cette phrase dite par lui ?

Je sais pas si vous vous rendez compte du nombre de fois.

Ça hantait mes rêves. Je me demandais quand est-ce qu'il allait me le dire.

Saïf - Je te le promet que je t'appellerai..

Je l'ai toujours rêvé mais je n'ai jamais, jamais, jamais su quoi répondre dans mes rêves.

Lui dire que j'avais pas besoin de ses appels ?

Qu'il n'était pas obligé de m'appeler ?

Je n'ai jamais su.

Mais cette fois-ci la réponse est sortie sans même passer par mon cerveau :

- Et je ne manquerai pas de te répondre, crois-moi.

Il soupire faiblement et hoche la tête.

Je me retourne et m'en vais de cette maison avec le cœur léger.



[...]



Je ferme la porte d'entrée derrière moi et souffle un énorme coup en fermant les yeux.

Il devait être 23h passé. J'ai passé un bon moment dehors. J'avais besoin d'un moment seul. Un long moment.

Je reste quelques secondes appuyé contre la porte d'entrée.

Putain j'ai parlé à Saïf.

C'est un exploit pour moi.

Je finis par sortir du hall et vais vers la cuisine.

La maison était calme pour une fois. Ça veut dire que ma mère dort ça. Il ne faut jamais la réveiller, jamais.

Je rentre dans la cuisine et vois mon père appuyé contre le plan de travail avec sa tablette.

Il lève la tête vers moi une fois que j'ai passé le seuil.

Papa - Plus jamais, j'ai bien dit, plus jamais tu vas chez lui sans même me prévenir. Plus jamais tu me fais un coup comme ça !

Je le savais.

Papa - Et en plus tu rentres à 23 heures ?! Sans même me le dire ?! Demain je travailles tôt mais je pouvais même pas aller dormir parce que t'étais pas rentré et le pire c'est que tu le sais !

C'est vraiment un papa poule. Ma mère depuuuuis elle dort, limite elle s'en fout de moi mais lui ne peut pas dormir tant que ses enfants ne dorment pas.

Papa - Tu veux me faire sortir le cerveau du crâne Rafaël ?! C'est ç-

Il a arrêté de parler quand je l'ai pris dans mes bras sans aucune raison apparente. Aucune.

J'avais juste craqué je crois.

Toute tension que je gardais en moi depuis des années.. je devais l'enlever.

J'ai jamais fait le deuil de mes grands-parents, je ne me suis jamais remis de ma tentative de suicide, j'en suis resté traumatisé même 3 ans après et aujourd'hui le fait que j'ai pu avoir cette conclusion avec Saïf.. j'ai l'impression que j'ai fait un énorme pas en avant.

Il n'a rien dit sûrement en comprenant que c'était pas le moment de m'embrouiller.

C'est rare qu'on ait des moments comme ça mais quand on les as..

Je me détache après quelques secondes et souffle un coup.

Il lève ma tête et je le regarde.

Papa - Moi je suis là.

- ...

Papa - Et personne, j'ai bien dit personne dans ce monde ne me retirera à toi. Personne.

- Je sais.

Papa - L'oublie pas.

Je soupire.

Papa - T'as tout pris de moi toi, tu ne lâches jamais une affaire qui te tient à cœur.

Je souris.

Papa - Ça c'est mon fils.

Il avait une fierté dans les yeux et je m'en rends bien compte que ça me suffit.

Papa - Allez, va dormir.. t'en as besoin.

Je me retourne et m'en vais. J'étais fatigué.

__

Maman - Tu as fait une chose que même moi peut-être je n'aurais jamais pu faire..

- Tu l'aurais fait, j'en suis sûr.

Maman - Non. J'aurais jamais pu Rafaël, jamais.

- ...

Maman - Tu as seulement 21 ans et tu as pu gérer ce problème avec un courage..

Elle caresse ma joue en souriant.

Maman - Maman est fière de toi mon bébé.

- *rire* 21 ans, pas 5 ans ma'.

Elle sourit et dépose un baiser sur mon front.

Maman - C'est ça être un Pereira.

Je souris et elle me fait un clin d'oeil.

Maman - Le dit pas à ton père.

- *rire* Être un Pereira.

-

The end.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top