chapitre deuxième
Assise au sol, sur un rugeux tapis aux motifs horriblement laids, devant l'une de mes télénovelas préférées, mes yeux scrutent avec attention l'écran.
─ Je t'aime Julio, oui ! je t'aime si fort, mon amour.
Monica est niaise mais Monica est belle. Et Monica m'attire.
─ Tu sais, ma fille, commence Molly avant d'expulser la fumée emprisonnée dans ses poumons, les hommes sont bêtes, dit-elle en écrasant sa cigarette dans le cendrier, et j'espère pour toi que tu ne tomberas pas sur un connard qui te laissera tomber en apprenant que tu es enceinte de lui comme ton salaud de père, crache-t-elle en lâchant le dernier mot avec dédain. Si t'en as la chance, marie-toi à un homme riche, dépouille-le et barre-toi.
Je quitte des yeux la télévision pour lancer un regard par dessus mon épaule à Molly qui consume tranquillement une nouvelle tige de nicotine ─ la quatrième de la journée ─ sur le canapé poussiéreux derrière moi. Nous nous fixons quelques seconde. Je suis la première à détourner le regard vers l'écran lorsque la voix de Monica s'écrase délicieusement contre mes tympans.
─ J'aime pas les hommes, rétorqué-je d'un ton las.
─ Tu n'as que neuf ans, ma petite. Je disais la même chose à ton âge et regarde-moi maintenant.
Monica croise le regard d'une jeune blonde qui la fixe intensément. Sans doute que sa beauté l'a, elle aussi, frappée. Je souris. Monica est si belle. Et attirante. Et c'est une femme.
─ Sauf que je suis pas toi.
Et encore heureux ─ un sourire malicieux vient courber mes lèvres ─ parce que moi au moins, je ne risque pas de croupir sous les coups de la créature que j'ai peiné à faire croître en moi le temps de trois trimestres.
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