trente-quatre

Charles se sent à l'étroit dans son costume noir, il a l'impression d'étouffer avec cette cravate qui le serre un peu trop à son goût. La nervosité tire ses traits et son sourire est forcé. Il regrette que Charlotte ne soit pas à ses côtés en ce jour particulier, mais cela semble évident alors que leur relation s'est arrêtée publiquement deux semaines auparavant.

Il récupère le trophée du vice-champion et Charles aimerait juste arrêter les discussions avec ces journalistes. Ses pensées sont tournées à des centaines de kilomètres de la capitale française et il jette un énième coup d'œil à son montre.

Elle doit avoir terminé son programme court.

Le cœur du monégasque bat un peu plus vite, ses lèvres se pincent sous la nervosité et celle-ci n'est pas liée à l'interview qui fait remonter des souvenirs meurtris de sa saison désastreuse. Et dès qu'il est libéré, Charles retourne s'assoir à sa place attitrée.

Son regard est attiré par son téléphone posé sur la table, il jette un coup d'œil aux messages qu'il vient de recevoir. Il sent toute la tension accumulée sur ses épaules se relâcher immédiatement tandis qu'un sourire étire doucement ses lèvres, venant creuser ses fossettes.

80,55 points

il reste 2 candidates dont la japonaise

elle est première.

Et Charles soupire de soulagement en répondant à l'entraîneur canadien. Il se sent soudain mieux. Il est soulagé. Il n'a qu'une seule hâte : quitter cette cérémonie afin de rejoindre son ukrainienne en Italie.
Il est soulagé en repartant avec son trophée de la seconde place, c'est une façon pour lui d'enterrer définitivement la saison qu'il vient de terminer.

Après une nuit à l'hôtel parisien, Charles débarque sur les terres italiennes, non pas Maranello mais dans la ville de Turin où se déroule la finale. Il pénètre à l'intérieur du bâtiment en début de matinée, le complexe de la Palavela possède une architecture particulière et Charles comprend ce lieu a été désigné pour accueillir l'événement.

Le froid s'intensifie en rentrant dans l'enceinte climatisée, Charles accède aux tribunes encadrant la surface glacée et ses yeux sont immédiatement attirés par la brune, vêtue de sa tenue d'entraînement. Il ne la quitte pas des yeux en s'approchant du rebord et durant de longues minutes, il reste à l'observer avec admiration.

Comme à son habitude, Nadejda ne l'aperçoit pas immédiatement. Elle est bien trop concentrée par les mouvements qu'elle effectue, elle est bien trop préoccupée par les autres patinuers gravitant autour d'elle. Elle fait attention à ne heurter aucun d'eux.

Elle prend un peu de vitesse en se dirigeant en marche arrière, un dernier coup d'œil dans son dos lui assure que personne ne coupera sa trajectoire. Elle aperçoit brièvement un bonnet rouge avant d'enchaîner son triple lutz et son triple loop dans une combinaison parfaite déclenchant les applaudissements des quelques spectateurs présents à l'échauffement.

Nadejda se réceptionne en saluant aussitôt la foule d'un geste de la main. Son regard se porte sur le monégasque et ses pas l'emmenent instinctivement dans sa direction. Elle s'approche pour l'étreindre rapidement par dessus le rebord de la patinoire, elle n'a pas le temps de faire le tour et de trouver l'une des sorties de la patinoire.

- Ton bras, souffle Charles en frôlant sa peau froide du bout des doigts.

Ce contact est brûlant et Nadejda ne peut s'empêcher de frissonner. Ses yeux suivent ceux du monégasque, elle observe le petit bleu présent au niveau du pli de son coude et elle le rassure en murmurant :

- C'était le contrôle antidopage, j'ai jamais été aussi rapide pour faire pipi avec tout ce que j'ai bu depuis le début de la matinée.

Un sourire étire ses lèvres en disant ses propos et le monégasque en est soulagée. Il avait cru qu'elle était tombée à l'un de ses entraînements, il ne peut s'empêcher de soulever que les contrôles sont fréquents. La patineuse ukrainienne en a eu un autre deux semaines plus tôt lors de la dernière compétition.

- Ce n'est pas du hasard, constate-t-il.

- Non, soupire Nadejda. C'est parce que je suis russe et que j'ai été entraînée par leur fédération.

Charles acquiesce, il avait bien compris et sans un mot, ses mains se posent sur les joues de la brune. Il se penche au dessus du rebord pour capturer ses lèvres sans un mot et Nadejda sent son bas-ventre trembler d'exaltation. Leurs baisers sont devenus plus fréquents, Nadejda est moins intimidée mais cela n'empêche pas à son corps de réagir de manière démesurée.

- Hier soir...

- Ça va, assure-t-il en haussant les épaules.

Nadejda ne paraît bien rassurée par son petit sourire. Toutefois, elle ne rajoute rien. Elle s'éloigne légèrement pour l'observer tandis qu'il change de sujet :

- Tu devrais y retourner sinon Brian va me tuer.

- Il n'a jamais tué personne, souffle-t-elle. C'est un nounours.

Elle désigne l'entraîneur à l'autre bout de la patinoire en sachant que le monégasque va le rejoindre pour ne pas rester seul, en l'absence de la famille de Nadejda. Cette dernière n'a pas voulu que Carla vienne, elle ne se serait pas sentie à l'aise en la présence de la blonde et de ses parents, surtout pour ce moment important.

- C'est vrai, murmure-t-il.

- Quoique, il va peut-être me tuer après les interviews avant le programme libre, avoue-t-elle en se pinçant les lèvres.

Charles ne relève pas ses sous-entendus. Il ne comprend pas pourtant la nervosité de la patineuse refait surface en début d'après-midi lorsqu'elle se présente à la presse avant son programme libre se déroulant le lendemain.

Ses genoux s'entrechoquent tandis qu'elle se tient maladroitement sur ses patins recouvert de ses protège-lames, une veste aux couleurs de l'Ukraine est posée sur ses épaules frêles. Elle écoute le journaliste avec attention.

- Il faut quand même rappeler vos derniers résultats. Vous terminez quatrième au Triphée d'Angers, voyant vos chances diminuer pour une qualification à la finale du Grand Prix ISU. Vous êtes revenue en force après le Grand d'Espoo en Finlande où vous prenez la première place assurant votre qualification pour cette finale.

Nadejda acquiesce, son regard se perd sans le vide en se remémorant les deux dernières compétitions où son cœur a fait les montagnes russes. Elle se souvient des jours suivants le trophée d'Angers et de toutes les critiques qu'elle a reçues dans les journaux slaves. Elle écoute d'une voix distante le journaliste continuer :

- Et aujourd'hui, vous êtes en tête des le programme court en passant première et en gardant la tête tout le long de l'épreuve, il ne reste que le programme libre et vous êtes assurée d'avoir une médaille, pas mal, non ? L'objectif pour demain ?

- Ça serait beau de gagner demain, avoue-t-elle d'une voix émue. Je donnerai tout pour mon dernier programme libre.

Le journaliste fronce ses sourcils n'ayant pas bien compris son sous-entendu au contraire de Charles et de son regard brûlant. Elle baisse les yeux un court instant, honteuse d'avoir menti, pour fixer ses pieds le temps de reprendre le dessus sur ses pensées en ébullition.

Elle inspire profondément quelques secondes, sa main chasse soudainement une larme venue s'échouer sur sa joue. Son regard sombre souligné de maquillage se plante de nouveau dans la pupille de la caméra lorsqu'elle lâche une bombe à retardement :

- Demain sera mon dernier programme. Peu importe le résultat, peu importe que la médaille soit de bronze, d'argent ou d'or, je mettrai un terme à ma carrière.

décision surprise mais est-elle logique selon vous ?

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