Chapitre un
Je tirai une dernière fois sur ma cigarette, évacuant la fumée par mes narines. Je tournai nonchalamment la tête vers un groupe d'étudiants bourrés, l'un d'eux vomissait ses tripes contre un mur. Un rictus se dessina sur le coin de mes lèvres, amusée par cette situation que je connaissais si bien. C'est facile de s'amuser avec l'alcool, mais quand il s'agit de noyer ses problèmes dans ce type de boisson, s'en était autre chose. Je regardai les jeunes partir en finissant ma dernière cigarette puis rentrai à nouveau dans la boîte de nuit afin de boire un dernier shot pour la route. J'avisai les derniers clients du petit matin, tous pétés, sortant au compte-goutte affronter les premiers rayons du soleil.
-Nous allons fermer, mademoiselle.
-Donne-moi la bouteille, je la finirai en route.
-Je crains fort que...
-Arrête de discuter et donne-la moi. Je l'aurais fini si je n'étais pas sortie fumer de toute façon.
Le serveur me dévisagea pendant un moment, la bouteille dans les mains. Je plaquai ma main sur la table.
-Dépêche-toi, j'ai pas tout mon temps.
Il déposa la bouteille si vite qu'elle dansa un moment sur le bois laqué du bar. Je la saisis par la tête et lançai un billet pour payer ma consommation.
-J't'ai donné un pourboire pour la peine. Alors chiale pas comme une fillette.
Je descendis de la chaise haute et marchai en titubant vers la sortie. Dehors, alors que je m'habituais à la lumière du soleil, je fus accostée par un homme ivre qui passa ses mains le long de mon corps, nichant sa tête dans le creux de mon cou. Dans le même état, je le laissai faire mais le repoussai au bout d'un moment : il puait tellement l'alcool. Je marchai ensuite jusqu'à ma voiture et insérai la clef pour faire démarrer mon véhicule.
-C'est pas très sage tout ça, MiSeon. Tu ne devrais pas conduire dans cet état... Oh et puis j'emmerde les flics !
Je démarrai ma fiat 500 et m'engageai sur la route, descendant du trottoir en zigzaguant. Un rire nerveux secoua mes épaules alors que des klaxons retentissaient derrière moi. Je descendis ma fenêtre et pointai mon majeur à l'arrière.
-Allez tous vous faire foutre.
Je pris la route à droite, filant vers le centre-ville où se situait mon appartement. J'habitais un immeuble juste en face du parc de la ville, ce qui rendait le quartier plutôt calme. J'avais juste à le traverser pour arriver dans la rue piétonne qui comportait plusieurs commerces de tout type ; pratique quand on a besoin de faire des courses ou un peu de shopping. Enfin, quand on avait de l'argent.
Je garai ma bagnole en face de mon garage attitré et descendis de l'habitacle. Je levai les yeux vers le ciel, rencontrant un ciel dégagé en cette belle matinée d'octobre. Mon regard se porta sur l'immeuble, apercevant la concierge perchée à sa fenêtre. Elle rentra à l'intérieur après avoir haussé les épaules.
-Y'a un blèm, mamie ?
Je fermai la voiture et fis le tour de l'immeuble afin de passer par la porte principale. Tiens, ça doit bien faire trois jours que je n'ai pas ouvert ma boîte aux lettres : des pubs et des enveloppes dépassaient carrément de la fente. Je les attrapai en soupirant et fis quand même un effort pour prendre ce qu'il y avait l'intérieur. Des pubs, des pubs, des factures, des pubs, une... lettre ? Qu'est-ce que ça peut être ? J'espère que ce n'est pas le Casanova du troisième étage, parce que ce serait pas mon truc de connaître des choses obscènes avec ce dernier. Je gravis les marches en m'accrochant à la rambarde et arrivai au premier étage, celui que j'occupais. J'avais eu de la chance, l'appartement que j'avais acheté un an plus tôt avait tout juste été libéré. Quelqu'un qui ne s'était pas plu, sûrement.
Toute la paperasse que j'avais dans les bras tomba sur le paillasson alors que je fouillai mon sac à la recherche de mes clefs. J'ouvrai ensuite mon appartement puis entrai. Je fis volte-face et ramassai ce que j'avais laissé dans le couloir. Toutes les pubs que je ramassai me donnèrent une idée. Je m'assis par terre, plaçai mes jambes en V en déposant les pubs devant moi. Je posai mes mains sur le tas et au bout de trois... je lançai toutes ces pubs dans le couloir, les éparpillant à leur bon gré. Je rentrai ensuite dans l'appartement en sifflotant, et refermai la porte du bout du pied. De toute façon, c'est pas ma faute. C'est la faute du facteur. Ou des commerciaux. Ou je ne sais quoi, mais ce n'est pas ma faute.
J'étais en train de boire un verre d'eau fraîche pour me curer les intestins après avoir subi un lavage gastrique éclair il y a quelques minutes, quand la lettre me revint en tête. Je m'approchai de la petite table de la cuisine et inspectai l'objet de ma curiosité sous toutes ses formes. Une lettre des plus banal, rien d'écrit dessus mis à part mon prénom. Sobre. Ce qui n'était pas mon état en ce moment, par ailleurs. Je l'envoyai valser un peu plus loin et partis me coucher, pas du tout apte à bien réfléchir sur quelque chose qui bouleverse mon quotidien morose. Je rejoignis ma chambre tout en me déshabillant petit à petit, puis me fourrai sous la couette une fois que je fus en sous-vêtements.
-Tu m'avais manqué, toi.
Mon lit m'accueillit dans sa tendre et douce chaleur qui m'enveloppa afin de me transporter aux pays des rêves. Même si la vie n'était pas rose, l'inconscient nous livrait des images qui constituaient notre survie en ce bas-monde, nous poussant à rejoindre le lendemain pour un nouveau jour meilleur. Car il n'y a jamais pire que ce que nous vivons la veille. Mais nous pouvons facilement retomber deux jours après. La vie c'est comme un yoyo, en plus de te faire passer pour un funambule : toujours à quelques millièmes de seconde de la chute dans le néant. Et crois-moi, tu remontes pas si facilement sur le fil.
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