Tome 2 - Chapitre 31

Tristan

C'est quand... Je lui en parle !

_______


Trois ans...

C'est le temps que j'ai perdu, à me prendre la tête avec la teneur de cette lettre. J'avais tellement peur de son contenu, que je n'arrivais pas à l'ouvrir, à la lire. Et je me sens terriblement con maintenant. Comment j'ai pu croire que cette lettre pourrait être négative ? Comment j'ai pu envisager, que ma sœur pourrait m'en vouloir ?

Je regrette tellement de l'avoir laissé sans nouvelles, sans réponses. La laissant sans doute culpabiliser encore plus, qu'elle ne doit le faire elle-même.

Je m'en mords les doigts aussi de m'être torturé l'esprit, en pensant que cette lettre pouvait me détruire.

Tant de temps perdu pour rien.

Tant de tristesse répandue par peur, par lâcheté.

Car oui, j'ai été faible et lâche face à cette lettre, j'ai préféré me réfugier derrière des excuses à la con.

— Tristan ?

Ma petite femme me rend la lettre, alors qu'elle est toujours assise entre mes jambes, adossée à mon torse, entourée de mes bras afin de me réconforter.

Je la lui ai donnée après l'avoir lu, certes elle l'a découverte en même temps que moi, mais je voulais qu'elle la relise. Je voulais qu'elle puisse me confirmer, que je n'avais pas rêvé et que ma sœur m'aimait toujours.

— J'ai perdu trois ans...

— Oui.

J'avais soufflé cette information dans les cheveux de ma petite femme, comme un constat de ma connerie, à croire que tout ne pouvait être que négatif, lorsque j'étais concerné.

— Je comprends que tu t'en veuilles. Mais justement, il y a trois ans, tu n'étais pas apte à prendre cette décision. Ta vie n'était pas assez stable.

— Tu te rends compte, ce qu'elle doit endurer à cause de moi.

Je resserre son corps contre le mien. J'ai besoin de la sentir encore plus près de moi. J'ai besoin de ses mains sur mon visage, dans mes cheveux, de ses caresses qui me détendent comme à chaque fois. Et lorsqu'elle pivote légèrement son corps vers le mien, j'ai besoin de lire dans ses yeux, que je ne l'ai pas déçue, que je vais arriver à faire ce qu'il faut...

Toute cette douceur me renvoi, encore plus vite, auprès de ma sœur.

Héloïse, aussi, avait cette façon de faire pour me calmer, pour me câliner, quand très souvent je pleurais à cause d'eux.

— C'est ce qu'elle ressent elle aussi. Elle s'en veut de t'avoir laissé, pour pouvoir vivre avec l'homme qu'elle aimait.

Je comprends d'autant plus ma sœur, depuis que je connais et vis cet amour incomparable avec ma petite femme. Jamais je ne pourrai renoncer à Orphélia au profit de ma sœur, et pourtant Dieu sait à quel point j'aime Héloïse.

— Même, si sur le moment, j'ai mal réagit en pensant qu'elle m'abandonnait, je sais bien qu'elle n'a pas eu le choix. Ils ne le lui ont pas laissé... Putain...

— Ils pensaient, à tort, faire pression sur elle en te gardant auprès d'eux. Ils voulaient la faire changer d'avis...

— Ils ont obtenu tout le contraire, ces cons !

Le silence s'impose, je dois digérer tout ça, l'analyser, et le ranger comme sait si bien le faire ma petite femme. Elle sait que j'ai besoin de ce temps, pour assimiler... Lorsque mon regard se pose sur cette femme brune, qui vient d'arriver dans le parc.

Elle n'a même pas la trentaine, et pourtant elle est accompagnée de deux enfants, un jeune garçon et une fillette étant la plus grande des deux.

Ce petit blondinet, me fait penser à moi, plus petit...

Ce tableau, que m'offre cette femme, est celui que doit vivre ma sœur avec ses deux bambins. Manon et Marius. Je ressors mon portefeuille et regarde cette photo d'eux trois.

— En effet, me dit-elle doucement, juste dans un souffle.

D'un simple coup d'œil, elle a compris que ces trois-là, me faisaient forcément penser à eux. Comment il aurait pu en être autrement ? Orphélia sait toujours ce que je pense, même dès fois, avant moi.

Elle regarde plus attentivement la photo, puis le gamin qui fait le pitre sur le toboggan, sa grande sœur qui l'aide à descendre, et leur maman qui reste à leurs côtés, au cas où elle devrait intervenir.

— En plus, il ressemble à ton neveu...

— Oui, déglutis-je avec émotion. On dirait aussi Héloïse et moi, la seule différence est que ma « génitrice », elle, elle n'est jamais venue avec nous au parc. Et tant mieux d'ailleurs, au moins, ces souvenirs-là ne sont pas entachés, par sa présence nocive.

Orphélia accepte mon nouveau silence.

Je sais que c'est nouveau pour elle de me voir agir ainsi, mais elle ne fait pas de commentaire. Je tente d'appliquer tout ce que m'a appris le Doc. Et je m'aperçois, que depuis ce matin, je ne peux m'empêcher de relier tous les événements que je vis, à lui. Ce con a pris une telle importance dans ma vie, que je n'arrive même plus à penser, sans me dire « tiens le Doc dirait, ça » ou « le Doc ferait, ci ». Fais chier... Pourquoi a-t-il fallu qu'il me mente ?

— Tristan, ça va ? s'inquiète-t-elle.

— Hum...

— Tu penses au Doc ?

— Comment tu sais ?

— Je m'en suis doutée, c'est tout.

Mes yeux l'interrogent, et je la laisse m'expliquer ce qui lui fait penser à ça.

— Ton silence, tes pauses, tes réflexions, forcément c'est la méthode du Doc que tu appliques, et tout cela ne peut que te renvoyer auprès de lui. C'est normal Tristan, c'est lui qui t'a appris à analyser les situations, sinon à quoi auraient servi tes deux mois au centre et psychothérapie.

— Tu n'as pas tort, et ça me fait d'autant plus chier, qu'il m'ait joué cette comédie avec l'aide de mes grands-parents.

— Tu leur en veux à eux aussi ?

— Non...

— Alors pourquoi, tu en veux tellement au Doc ?

— Parce que j'avais confiance en lui.

— Tu avais donné ta confiance au Doc, pas à Patrice...

— Tu veux en venir où ?

— Le Doc t'a aidé, t'a expliqué et t'a appris, tout ce dont tu avais besoin pour t'en sortir. Par contre, Patrice, lui, il n'avait pas sa place au centre.

Nouveau silence.

Machinalement, je tends la main, je cherche ma bouteille d'eau du bout des doigts. Merde. Même ça, c'est ancré en moi... Et dire, que je n'arrêtais pas de le chambrer avec cette manie, et pourtant là j'en ressens le besoin, comme si par cette action, j'allais laver mon esprit...

— On peut rentrer ? m'empressé-je, de lui demander.

— Oui bien sûr, en plus je commence à avoir un peu froid, le temps se couvre et en tee-shirt...

— Désolé ma douce, j'étais tellement plongé dans mes pensées, que je n'ai pas vu que tu avais des frissons.

— La marche va me réchauffer, sourit-elle.

Je colle son corps tout contre le mien, pour qu'elle ne ressente pas le vent souffler directement sur elle, et c'est d'un pas rapide que nous rejoignons notre appartement.

Notre appartement...

Qu'est-ce que j'aime, cette notion d'appartenance, enfin concrétisée par notre vie à deux.

Après avoir, plus rapidement que la veille, effectué le nouveau rituel d'Orphélia - ma douce n'ayant conservé, que nos pauses au niveau des paliers, afin que je l'embrasse et lui dise mes : « Je t'aime », ainsi que ses caresses sur mon visage, une fois arrivé à notre étage - nous poussons la porte de chez nous, tout aussi pensif, l'un que l'autre, et déposons les courses sur l'îlot central en silence.

Orphélia range tous les produits frais, et je m'occupe de tout ce qui va dans les placards. Une fois terminé, je me pose sur le tabouret, et après avoir bu un grand verre d'eau, je réfléchis, tout en faisant tourner mon téléphone entre mes mains.

— Tu devrais l'appeler, me souffle-t-elle.

— Tu crois ? Il ne va pas m'envoyer chier après tout ce que je lui ai dit ?

— Il te connaît assez pour comprendre ta réaction. Ce n'est pas pour rien, qu'il a attendu pour t'en parler.

— Mouais... Et puis, j'ai envie de lui parler de la lettre, tu comprends...

— Oui je comprends Tristan. C'est important pour toi, et ça l'est tout autant pour lui. Tu t'en doutes bien.

Je vous ai déjà dit que ma petite femme était une perle... Oui ? Eh bien je vous le redis. Cette femme est juste exceptionnelle. Je l'attire tout contre moi, l'embrasse tendrement, avant de lui souffler :

— Merci mon cœur.

Ses doigts effleurent mon visage comme si elle y dessinait des arabesques. La douceur qu'elle met dans chaque mouvement, si petit soit-il, est remplie d'amour et je reste là, entièrement soumis à son charme, sans même essayer de m'y soustraire. C'est tellement bon...

— Je vais nous préparer une salade, ça te va ?

— Hum, réponds-je, dans un état second.

Encore dans la ouate de ce bien être que ses caresses ont provoqué sur moi, je ne développe pas plus que ça ma réponse, et pose ma joue contre son cœur. Je suis si bien, que je n'ai pas envie que ce moment s'arrête. Mais Nirvana en a décidé autrement, il vient se frotter contre nos jambes tout en miaulant.

— Mon pauvre chat, toi aussi tu réclames les caresses d'Orphélia, n'est-ce pas ? Comme je te comprends, ce sont les meilleures au monde.

Mon chat se met à ronronner comme pour me répondre, et termine son saut dans les bras de ma petite femme, ce qui m'offre un magnifique sourire. Je suis heureux qu'ils s'entendent aussi bien tous les deux. Bon après, il va falloir qu'il comprenne, que maintenant la place dans le lit m'est réservée.

— Tu devrais l'appeler pendant que je prépare, non ?

— Ouais je vais faire ça. Tu n'as pas besoin de moi pour la salade ?

— Je devrais m'en sortir, se marre-t-elle, en me donnant un baiser rapide.

— Hum... Un autre, lui demandé-je, en la rattrapant par la main.

Orphélia s'exécute, et cette fois-ci, elle m'embrasse en l'approfondissant, en ajoutant ses doigts fins dans mes cheveux, alors que j'arrime mes mains sur ses hanches. Et c'est à bout de souffle, qu'elle retire ses lèvres des miennes.

— Allez file au salon, sinon...

— Sinon, quoi ?

— Tu le sais très bien ! On ne va pas manger et tu ne téléphoneras pas au Doc.

— Je préférerais te manger toi, ajouté-je, en lui mordant la clavicule.

— Si tu veux, je peux être ton dessert ! me propose-t-elle, en riant.

— Hum... En plus, il me semble avoir lu, que c'était même meilleur pour la santé, de manger le dessert avant le plat. Je vais donc pouvoir mettre en application cette étude.

— Comme tu le dis mon amour, ce n'est qu'une étude !

Elle se détache de moi, et je sais, que ce n'est pas la peine d'insister. Après tout, avant ou après, le tout est que j'ai mon dessert. Orphélia me tourne le dos, elle découpe les tomates, et je la regarde un peu faire. Même vêtue d'un simple jeans et d'un tee-shirt, elle est à tomber. Ses courbes affolent mon entrejambe, et il me faut toute la volonté du monde pour la laisser, afin de me rendre au salon.

Il est temps que je prenne sur moi, et que je passe ce coup de fil. Après seulement deux sonneries, je l'entends décrocher.

— Salut Doc.

— Bonjour Tristan.

Son ton est un peu froid, et presque distant. Je ne m'attendais pas à ça, et je suis un peu décontenancé.

— Heu... Je te dérange ?

— Pas le moins du monde.

Je regarde l'heure, 13 h 00, il devrait être à la cafétéria, et pourtant je n'entends pas de brouhaha.

— Tu n'es pas au centre ? Ce n'est pourtant pas ton jour de repos, me fais-je, la réflexion.

— En effet, normalement le lundi je suis au centre... Mais pas aujourd'hui.

— Tu es malade ?

— Non.

— Bon, accouche Doc, qu'est-ce qui se passe ? Tu me fais la gueule ? Tu veux des excuses ?

— Rien de tout ça. Je ne bosse pas, c'est tout...

Sa voix s'étrangle et je comprends.

— Putain, l'autre con t'a viré !

— ...

— Ne bouge pas, on arrive !

— Ce n'est pas là...

— Orphélia est d'accord avec moi, alors ne discute pas. À tout de suite.

Je raccroche et la suis, alors qu'elle a déjà passé une veste et qu'elle me tend la mienne.

— C'est bon, le taxi sera là dans cinq minutes, m'informe-t-elle.

— Demain, je vais acheter une bagnole ! fulminé-je.

Je la suis, après avoir fermé la porte. Et je bougonne :

— On n'aura même pas eu le temps de manger, putain j'ai la dalle !

— J'ai tout prévu, regarde ! On mangera pendant le trajet.

Elle soulève un sac, que je n'avais même pas vu.

Arrivés sur le trottoir, je lui demande avec un sourire en coin :

— Et pour le dessert ?

— Je ne pense pas que le chauffeur de taxi sera d'accord, surtout avec ce que j'avais en tête.

— Fais chier, dis-je, par pure frustration.

Elle passe ses bras autour de mon cou, ses yeux pétillent de malice et ajoute :

— Je te promets une double dose de chantilly avec tes fraises, si tu es sage !

— Je le suis toujours, surtout...

Le klaxon du taxi nous fait sursauter, et c'est en se marrant, que l'on s'y engouffre.


_______


Coucou les T & O-LOVE 😍

Tristan a perdu 3 ans, pensez-vous qu'il doive s'en vouloir autant ?

Les souvenirs enfouis, que cette trentenaire déclenche sans le vouloir, raniment s'en doute l'envie de Tristan d'avoir des nouvelles...

Téléphone, lettre, voyage ? Quel choix vont-ils faire ?

Tristan en veut encore au Doc et pourtant il ne peut s'empêcher de vouloir son avis !

Il n'aura pas tenu longtemps loin de lui...

Mais qu'arrive-t-il au Doc ?

Pensez-vous qu'il a vraiment été viré du centre ?

_______

On se retrouve la semaine prochaine pour la suite de l'histoire de T&O 📍

Passez un bon week-end. Gros bisous 😘

Kty. Auteure 🌸

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top