Tome 1 - Chapitre 7


C'est quand j'apprends qui je suis !

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NDA

Petite note afin de vous préciser que les parties en italique seront des PDV de Gildas ou de Madeleine en fonction du dialogue.

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Ce samedi aurait dû être le jour de mon annonce. J'aurais dû parler à mes parents, leur dire que je ne voulais pas épouser Charles, que je voulais partir pour vivre ma vie, que je voulais m'assumer, vivre la vie normale de toute jeune fille de mon âge. Leur dire que je devais emménager dans un appartement au deuxième étage d'un petit immeuble ancien, bourré de charmes. J'avais pu voir l'appartement en photos et signer les papiers du bail grâce à Madeleine qui connaissait le propriétaire.

Avant que mon père et Madeleine ne me racontent leur histoire, leur amour, leur envie de ne plus se cacher, de vivre ensemble aux yeux de tous et qu'ils ne me dévoilent leur secret.

Leur secret...

Vous savez, le genre de secret, que l'on cache. Le genre de secret de famille qui change une vie... Le genre de secret qui bouleverse une vie.

Des vies à jamais.

La réponse à ma question m'a été donnée par mon père, il n'a pas hésité une seule seconde pour me répondre. Il paraît même soulagé que la vérité soit enfin révélée. Madeleine, elle ne sait plus quoi faire, quoi dire, quoi penser... Son regard apeuré se perd entre mon père et moi.

Et moi ?

Eh bien moi, je n'ai qu'une envie, c'est de fuir, de courir le plus loin possible, de partir pour oublier ce que je viens d'apprendre. Pour faire comme si je n'avais rien entendu, comme si cette réponse n'avait jamais existé. Car c'est impossible, c'est irréel... Mon père n'a pas pu me répondre ça.

Mon imagination me joue encore des tours... Oui, ça ne peut être que ça, je me suis tant de fois inventée des vies, je me suis racontée tant d'histoires. Celles où la petite fille que j'étais serait heureuse avec un papa et une maman qui l'aimeraient. Que je ne peux être que dans un de mes rêves. La voix grave de mon père me tire de ma léthargie.

— Orphélia, regarde-moi.

Mais je ne peux pas faire ce qu'il me demande, c'est au-dessus de mes forces.

— Orphélia, s'essaye gentiment Madeleine. Écoute-moi ma puce.

Cette voix douce, calme, qui m'a tant et tant de fois consolée, quand j'avais peur la nuit. C'est cette même voix que j'entends à l'instant. Car oui j'ai peur, j'ai besoin d'être rassurée et il n'y a qu'elle pour y arriver.

Alors comme à son habitude, elle me prend dans ses bras, me caresse les cheveux et me chante cette chanson, cette berceuse qu'elle me chantait quand j'étais petite :

« Doucement, doucement

Doucement s'en va le jour.

Doucement, doucement

À pas de velours... ».

Elle m'embrasse le front, me berce pendant de longues minutes attendant que je trouve la force de revenir parmi eux, que je sois capable d'intégrer cette nouvelle information, que je réalise.

Et que je dise tout émue :

— Tu es ma maman ?

Madeleine me tient toujours dans ses bras, me berce encore comme j'aime tant qu'elle le fasse, et me répond aussi doucement que je lui ai moi-même parlé :

— Ma puce, j'ai toujours été ta maman. Dès ton premier souffle, j'ai été ta maman. Dès le premier regard, j'ai été ta maman. J'ai toujours été ta maman, même si celle que tu devais appeler mère, ce n'était pas moi. À mes yeux, cela n'avait plus aucune importance. Car moi, je suis ta maman. Je suis celle qui t'a porté, qui t'a donné la vie, celle qui t'a aimée plus que sa vie, celle qui a bercé tes nuits, celle qui a essuyé tes larmes, celle qui a lu tes histoires, celle qui aime tellement sa fille. Je me suis toujours tue parce que le plus important était que je sois avec toi.

— Mais pourquoi ? Pourquoi m'avoir caché que tu es ma maman ? dis-je, bouleversée les larmes bordant mes cils.

Madeleine lève la tête vers mon père et lui demande doucement :

— Maintenant c'est à toi de lui expliquer, de lui dire et de répondre à sa question.

Mon père hoche la tête, prend une grande inspiration et me révèle la raison de leur silence :

— Orphélia, tu dois comprendre que ce que nous avons fait, c'était aussi pour ton bien, pour ton bonheur.

— Mon bonheur ? Mais comment peux-tu dire ça ? Vous m'avez menti pendant toutes ces années, éclaté-je en me levant brusquement.

— Laisse-moi t'expliquer pourquoi nous avons dû prendre cette douloureuse décision.

Je me rassieds sur le rocher, croise mes jambes puis mes bras contre ma poitrine et attends qu'il s'explique en faisant la tête.

— Vas-y, je t'écoute... Papa, émis-je sèchement.

Je sens Madeleine s'asseoir à côté de moi, me prendre la main puis commencer à la caresser avec son pouce. Elle sait comment me calmer, comment me faire comprendre que je dois l'écouter et ne pas le juger sans savoir.

Mon père, lui, se tient droit devant nous, ses paumes quittant ses poches pour passer dans ses cheveux avant de retourner dans ses poches, ne sachant sans doute pas par où commencer.

— Gildas arrête de cogiter, arrête de te poser toutes ces questions, tout ce que veut savoir notre fille, c'est juste la vérité. Juste que tu sois sincère avec elle pour qu'elle puisse enfin comprendre.

— Je sais souffle-t-il, mais ce n'est vraiment pas facile de trouver les bons mots...

Il ferme les yeux pour mieux se replonger dans ses souvenirs, alors que j'attends avec appréhension ce qu'il va me dire.

— Le soir où j'ai revu ta mère c'était à ma soirée d'anniversaire, ici, dans cette maison. Je fêtais mes vingt-quatre ans entouré de ma famille, de mes amis et de Gaia. Nous n'étions mariés que depuis six mois. Ta mère était là et je n'en revenais pas. Elle déambulait mal à l'aise entre les invités avec son plateau dans son ensemble jupe noire, chemisier blanc et petit tablier. Elle avait fait son chignon haut. Elle n'osait pas croiser mon regard, ni ceux qu'elle avait connus jadis. La seule qui lui avait parlé, c'était ta grand-mère, fidèle à elle-même.

Mon père se tourne vers elle et lui déclare :

— Tu étais toujours aussi belle. Tu faisais tout pour m'éviter, alors que moi je n'avais d'yeux que pour toi. Je n'avais qu'une envie, c'était de te parler, de te toucher, de t'embrasser, de ressentir ces frissons dès que j'étais à tes côtés. Ceux-là mêmes qui me disaient que j'étais vivant et qui permettaient à mon cœur de battre à nouveau.

— Gildas, j'étais là pour le travail et puis tu étais marié...

— Je sais... D'ailleurs, Gaia s'était vite rendu compte de ta présence et m'avait pris à part.

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— Tu as vu qui est là ? vociféra-t-elle.

— Oui, j'ai vu. D'ailleurs, je ne vois qu'elle.

— C'est bien le problème, car je ne suis pas la seule à m'en être aperçue. D'ailleurs, qu'est-ce qu'elle fait là ? Elle ne fait pas partie du petit personnel que j'ai sélectionné.

— Je ne sais pas pourquoi elle est là, mais j'en suis ravi. C'est le plus beau cadeau d'anniversaire que je pouvais avoir, la narguai-je avec un sourire que je n'arrivais plus à effacer.

— Arrête cela tout de suite, Gildas, et comporte-toi en maître de maison. Tu me fais honte là, à regarder cette fille comme si c'était la septième merveille du monde. Ce n'est rien d'autre qu'une employée, une paysanne... cracha-t-elle.

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— Elle avait raison.

— Comment ça, papa ? Tu trouves qu'elle avait raison de traiter maman de cette manière ?

— Je n'avais pas le droit de montrer autant d'intérêt envers elle devant tout le monde, je me devais d'être plus discret, tu comprends ? Quant à son comportement envers ta mère, je n'ai pas laissé passer ça, je te rassure, ma fille. J'ai attrapé Gaia par le bras en l'entraînant derrière la maison à l'abri des regards.

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— Je t'interdis de parler de Madeleine de la sorte ! Tu m'entends, lui ordonnai-je en la secouant un peu et en serrant les dents.

— Oh ! Mon pauvre chou, j'ai osé écorcher l'image de la Sainte Madeleine, ironisa-t-elle.

— Gaia, je ne te laisserai pas te moquer d'elle et encore moins lui manquer de respect, grondai-je en la repoussant.

— Mais détends-toi, mon chéri, qu'est-ce qu'il t'arrive ? dit-elle en s'approchant de moi tout en papillonnant des cils. C'est bon, tu ne vas pas me faire une scène pour cette fille, fit-elle en balayant l'air de sa main avec son air dédaigneux.

— Cette fille, comme tu dis, est l'amour de ma vie, ce que toi tu ne seras jamais ! lâchai-je, prêt à exploser.

— Enfin, Gildas, tu me connais si peu ? Comme si être aimé de toi avait une quelconque importance à mes yeux ! déclara-t-elle en rejetant ses cheveux en arrière avec ses mains et en me tournant le dos, signe que la discussion était terminée.

Cette femme me poussait à bout, je ne la supportais plus. Mais d'habitude, je m'en accommodais et faisais comme si elle n'existait pas, mais là je ne voulais pas lâcher l'affaire.

— Pour une fois, Gaia, nous sommes d'accord sur un point. Tu ne m'aimes pas et je ne t'aime pas non plus.

Elle se stoppa net.

— Ce mariage n'était rien d'autre qu'un arrangement entre nos deux familles, repris-je. Alors dans la mesure où je ferme les yeux sur tes nombreuses parties de jambes en l'air extraconjugales, je te demanderai d'en faire autant pour Madeleine et moi.

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— Elle était partie sans même me répondre, avait repris sa marche comme si de rien n'était vers nos convives. Droite, fière mais sans doute touchée dans son amour-propre.

— Vous ne vous êtes donc jamais aimés ?

— Non, ma fille, ce mariage était juste un rôle, de la figuration envers les autres... C'est tout !

— Et comment se fait-il qu'elle ait accepté que maman vienne travailler et vivre chez vous ?

— Oh, elle n'a pas accepté de suite et quand elle a découvert ta mère le lundi matin à la porte de service de la maison, elle a explosé et interpellé ta mère méchamment.

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— Eh, vous ! Que faites-vous ici ?

— Bonjour, madame de Saint Péone.

— Où allez-vous avec votre valise ?

— Monsieur de Saint Péone, ne vous a pas prévenue de mon arrivée ?

— De votre arrivée ? Mais que venez vous faire chez moi ? grimaça-t-elle avec sa voix montant dans les aiguës, preuve de son agacement.

— Monsieur de Saint Péone m'a embauchée comme gouvernante ! répondis-je avec une petite pointe de satisfaction face à la tête de Gaia.

— Mais il n'en est pas question, cria-t-elle. Nous avons déjà une gouvernante, que j'ai moi-même choisie.

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— Les cris de Gaia m'avaient interpellé, je m'étais dépêché de les rejoindre aux cuisines. Je n'aurais jamais dû laisser ta mère rentrer seule dans la maison.

— Pourquoi n'étais-tu pas avec maman ?

— L'embauche et l'arrivée de ta mère s'étaient faites très vite et je n'avais pas eu le temps de donner des directives pour la préparation de sa chambre sans que Gaia soit mise au courant.

— Et bien sûr, Gaia était là et elle m'est tombée dessus, me dit-elle.

— Je suis tellement désolé Madie, je pensais, qu'elle ne serait pas encore revenue d'une de ses sorties "entre amies".

Mon père se tourne vers moi pour m'expliquer :

— C'était l'expression qu'elle employait, à chaque fois qu'elle allait s'envoyer en l'air. J'avais donc pensé que c'était le bon moment pour installer ta mère et mettre ensuite Gaia devant le fait accompli.

— Sauf que ce jour-là, elle était là ! Oh maman, ça a dû être une terrible épreuve pour toi.

— Tu peux le dire. Déjà que je n'étais pas rassurée, alors tomber sur elle en plus, c'était le comble. Mais je ne me suis pas laissée démonter par Gaia et lui ai répondu.

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— Vous verrez cela avec Monsieur votre mari, en attendant, je voudrais bien aller m'installer.

Il n'est pas question que vous vous installiez chez moi ! me stoppa-t-elle en m'attrapant le bras.

— Lâches-là de suite Gaia ! Je t'interdis de poser les mains sur Madeleine.

— Alors fais-la sortir d'ici. Tout de suite, hurla-t-elle en montrant la porte de sa main.

— Madie... Tu veux bien suivre Oscar ? C'est notre majordome, il va te montrer où se trouve ta chambre.

— Non pas du tout, au contraire Gildas ! L'air est irrespirable ici, lança-t-elle d'un regard appuyé à Gaia.

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— Une fois ta mère partie avec Oscar, nous avons eu une de nos plus grandes disputes avec Gaia. Elle ne voulait pas de ta mère sous son toit et ne voulait pas en démordre. Et puis, tu la connais, elle est partie dans un de ses monologues habituels.

— Oh oui ! Je les connais que trop !

— Et pendant plus d'une heure, elle a voulu me convaincre qu'on ne pouvait pas la garder ici, car c'était à elle de choisir le petit personnel. Que les gens allaient faire des commérages sur le fait qu'une paysanne venait travailler chez nous. Qu'ils cancaneraient parce qu'ils connaissaient notre passé avec ta mère. Que je faisais tout cela juste pour me venger de son comportement. Que je voulais la rendre ridicule et qu'il n'était pas question qu'elle perde la face devant nos amis. Qu'elle ne pouvait pas justifier l'arrivée de ta mère à ses amies sans passer pour une idiote... Je t'ai fait un résumé de tout ce qu'elle avait pu me dire.

— Je m'en doute, c'est vrai que la situation devait être embarrassante.

— En effet, mais tout cela m'avait mis hors de moi, et je lui avais dit que je me fichais de ses amies, de nos connaissances et que je voulais garder ta mère à mes côtés, que ça lui plaise ou non. C'était la première fois que j'osais m'opposer à elle et à ses décisions. J'ai été dur avec elle en lui disant qu'elle était ma femme et qu'en tant que telle, elle devait m'obéir et faire ce que je lui ordonnais. Je n'étais pas fier de moi, mais je n'avais pas d'autres solutions pour faire céder Gaia.

— Et elle a accepté sans rien dire ?

— Oui, à partir de ce jour, elle a fait comme si ta mère n'existait pas, tant que je me tenais à notre accord.

— Quel était cet accord, papa ? demandé-je avec intérêt.

— Nous devions être les plus discrets possible et personne ne devait savoir pour notre relation et nos sentiments.

— Et Gaia, qu'est ce qu'elle avait à y gagner ?

— Et bien elle était encore plus libre de faire ce qu'elle voulait, comme elle le voulait, et de jouir de ses plaisirs sans que je m'y oppose.

— C'était donc un accord qui arrangeait tout le monde !

— Oui et c'est ce que nous avons fait, nous avons été discrets, car nous étions tellement bien ensemble et heureux, qu'il n'était pas question que l'on nous vole ces moments de partage et d'amour. C'est de cet amour que tu es née, Orphélia. Car ce que tu dois savoir, c'est que nous te désirions, tu n'as pas été un accident, ni une erreur ma fille. Avec Madeleine, nous avons toujours voulu avoir des enfants, un prolongement de notre amour. Et quand Madie m'a annoncé qu'elle était enceinte, ce fut l'un des plus beaux jours de ma vie.

— Nous avons attendu quelque temps avant de le dire à Gaia. Tant que ma grossesse ne se voyait pas, il n'y avait pas lieu de lui en parler, m'informe ma mère.

— Et puis un jour forcément, il a bien fallu que l'on ait cette discussion, tous les trois. Et là, ça a été horrible, ma fille...

— Ça, tu peux le dire, Gildas, cette discussion restera gravée en moi comme un des jours les plus douloureux de ma vie. Ce jour où nous avons dû accepter l'accord que Gaia nous imposait.

— Oh mon Dieu, qu'est-ce que Gaia a fait ? demandé-je horrifiée à ma mère.

— Laisse-moi t'expliquer et tu vas comprendre pourquoi nous n'avons pas pu te dire plus tôt que tu étais ma fille. Nous nous étions assis tous les trois dans le petit salon. Elle, sur un fauteuil et ton père et moi sur le canapé lui faisant face. Nous nous tenions par la main pour nous donner du courage.

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— Alors, je vous écoute, qu'est-ce que vous aviez de si important à me dire ?

— Madeleine est enceinte, elle attend mon enfant.

Au départ, elle ne disait rien. Pas de cris, pas de pleurs, comme elle savait si bien le faire, pas de répliques bien acerbes de son cru, non plus. Rien...

Et je pensai, à juste raison à ce moment-là, que son silence était bien pire encore. Nous nous regardions, sans comprendre son comportement, jusqu'à ce qu'un sourire machiavélique se dessine sur ses lèvres.

Gaia prit la parole en nous toisant :

— En faisant ça, Gildas, tu as rompu notre accord. Tu t'en rends compte ?

— Oui, je le sais, mais...

— Mais quoi, Gildas ? Tu n'es plus en mesure de dire ou de décider quoi que ce soit pour le « bâtard » qu'elle porte ! Vous deviez rester discrets et bien félicitations... railla-t-elle. Car là, tu as décroché le pompon en lui faisant ce « bâtard », « ce moins que rien », « cet illégitime ». Elle en est à combien de semaines ? balança-t-elle sans même me regarder.

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— Nous étions abasourdis et pétrifiés par ce que nous venions d'entendre. Par instinct ou par protection, j'ai posé mes mains sur mon ventre pour que tu n'entendes pas toutes les horreurs qu'elle disait sur toi.

— Je ne les ai peut-être pas entendues maman, mais je les ai ressenties, toute ma vie, dis-je tristement.

— Je sais, ma fille, et nous en sommes désolés. Pourtant ton père a tout fait pour lui faire entendre raison, il est resté calme le plus possible face à la situation. Mais rien ne pouvait arrêter Gaia et sa langue de vipère.

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Cet enfant est le fruit de notre amour et je ne te permets pas de l'insulter en parlant de lui ou d'elle de la sorte.

— En attendant Gildas, c'est un fruit pourri dont il va falloir se débarrasser au plus vite !

Madeleine mit les mains sur sa bouche pour s'éviter de hurler. Elle était sous le choc, totalement anéantie.

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— Elle m'a traitée de fruit pourri ? dis-je, horrifiée. Et si j'ai bien compris, elle voulait que tu avortes, c'est ça maman ?

— Oui, ma puce, j'aurais préféré que tu n'en saches jamais rien, mais on ne veut plus rien te cacher, même si c'est douloureux et dur à entendre.

— Ta mère lui a tenu tête, ajoute mon père.

— Je ne pouvais pas la laisser parler de toi comme ça et la laisser décider de ton sort. Tu étais mon bébé et j'aurais été capable de tout pour te protéger, sois-en sûre, ma fille.

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Les larmes que je retenais jusqu'à maintenant se mirent à couler sous mes paupières closes. Cette phrase n'arrêtait pas de passer en boucle dans ma tête. Je me devais de réagir pour mon bébé. Je devais lui dire que je ne la laisserai jamais faire. Que c'était mon bébé et que personne ne m'obligera à m'en séparer. Cette femme était une folle furieuse, capable de tout, juste pour pouvoir sauver les apparences.

Retrouvant mes esprits grâce à la rage qui avait pris naissance dans mes entrailles, je lui répondis d'un ton catégorique :

— Il n'en est pas question, c'est mon bébé. Jamais, oh non jamais, vous ne toucherez à mon bébé, m'exclamai-je, tout en me levant, lui faisant face pour qu'elle comprenne bien ma détermination.

— Vous, rasseyez-vous, m'ordonna-t-elle d'un signe de la main. Il n'est pas question de vos envies ici.

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— Elle était tellement haineuse envers moi que j'ai préféré laisser ton père agir, car j'avais peur qu'elle te fasse du mal.

— Tu penses qu'elle aurait pu ?

— Si tu avais vu son regard, tu ne te poserais pas la question. J'avais tellement peur pour toi...

Je me rends compte que même vingt-deux ans plus tard, cette scène entre eux trois est gravée dans leur mémoire comme si elle venait de se passer. Mon père prit ma mère dans ses bras pour la réconforter.

— Je devais vous protéger toutes les deux et faire entendre raison à Gaia. Mais tu t'en doutes, elle n'était pas de cet avis.

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Tu comptais faire quoi ? Garder ce bâtard et montrer à tout le monde que tu m'avais trompée ? Mais tu es devenu fou ou inconscient, mon pauvre !

— Nous comptons en effet le garder et je ne te demande pas ton avis, je t'informe simplement, répondis-je avec aplomb. D'ailleurs par la même occasion, je t'annonce que je vais demander le divorce.

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— Tu voulais divorcer et vivre avec maman avant ma naissance ? demandé-je, émue.

— Oui, ma fille, je voulais qu'on vive tous les trois, en famille, mais...

— Mais Gaia ne l'entendait pas comme ça. Elle s'est jetée sur ton père comme une folle furieuse en lui hurlant dessus.

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Il n'est pas question que j'accepte de divorcer. Vous êtes responsables de cette situation et je n'ai pas à en être lésée, tout ça pour un bâtard !

Tu auras ce que tu voudras pour accepter le divorce...

Son rire à nous glacer le sang me coupa la parole et elle nous terrassa en me balançant :

— Tu peux toujours rêver, mon pauvre Gildas. Tu as semble-t-il oublié qu'en nous unissant, nos pères ont rédigé et signé un contrat pour justement éviter ce genre de situation. Tu veux que je te rafraîchisse la mémoire ?

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— J'ai vu ton père blêmir, devenir plus blanc que sa propre chemise, qu'il déboutonnait au plus vite pour essayer de capter un peu d'air, il suffoquait.

À cet instant, je sais que Gaia a gagné.

Elle avait signé notre fin à tous les trois...

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