|INSTINCT D'AÎNÉ| Bill Weasley
Pour ceux qui avaient déjà lu cet OS, j'ai changé le nom de Sven Hankook en Charles Donty parce que Sven Hankook est devenu un personnage à part entière de Le voile de nos souvenirs. Bonne lecture ^^ !
***
31 octobre 1981. Halloween. Bill Weasley, aîné d'une fratrie de six garçons, était en première année à Poudlard. Accompagné de son meilleur ami de Gryffondor, Charles Donty, ils s'installèrent à table. Après celui de la rentrée, il s'agissait seulement de leur second banquet depuis leur arrivée à l'école de sorcellerie.
Bill était affamé et d'après les trépignements de Charles, il n'était pas le seul. Son assiette en or - malheureusement vide pour le moment - lui faisait de l'œil. Il était en pleine croissance et c'était un argument tout à fait valable puisque sa mère le validait. Il se retourna une énième fois vers la table des professeurs et vit que le directeur, le Professeur Dumbledore, se levait enfin. Le silence se fit et le vieux sorcier à la barbe argentée ouvrit les bras.
- Mes chers élèves, je suis très heureux de pouvoir assister à repas d'Halloween ! Je suis sûr que si je vous expliquais les raisons de mes absences fréquentes, vous les comprendriez et les approuveriez mais je suis au regret de vous annoncer que le Ministère n'estime pas de vous le droit de savoir.
Malgré le sourire bienveillant du directeur, Bill devina que ce n'était pas la vraie raison. Il ne se questionna pas plus. C'était Halloween, il n'allait pas s'empêcher de fêter l'occasion comme il se doit parce que Dumbledore leur cachait quelque chose.
- Sans doute n'y avez-vous pas le cœur, reprit le sorcier debout, mais profitez bien de cette soirée. Je sais que certains d'entre vous sont endeuillés par des pertes terribles et n'auront pas le moins du monde envie de faire la fête mais souriez, riez. Cela vous fera le plus grand bien.
Le regard de quelques élèves de la Grande Salle se dirigèrent vers la table des Poufsouffle où régnaient trois places vides. Laurinea McIntosh et ses frères, Lyall et Louis, étaient partis de Poudlard trois jours auparavant, en larmes. Le lendemain, les journaux avaient fait état d'une famille écossaise entièrement décimée.
Bill, lui, ne se tourna pas pour regarder les places vides des McIntosh et eut une pensée amère pour ses oncles, Gideon et Fabian Prewett, tués six mois auparavant. Sven lui sourit, compatissant. Bill lui rendit faiblement. Charles avait vite su beaucoup de choses sur la vie de Bill Weasley. Étant l'aîné, il s'était promis de ne jamais faillir et de toujours protéger ses frères. C'est pour cela qu'il n'avait jamais parlé de ses craintes et tristesses à sa famille. Alors, Charles lui avait servi de parloir. Ensemble, ils s'étaient partagés leurs peines et depuis, ils étaient inséparables.
- Je ne vous parlerai pas plus de la terrible guerre que nous vivons, finit Dumbledore. Comme je vous l'ai dit, ce soir, faites la fête. Oubliez la noirceur des temps qui courent. Bon appétit !
Il claqua dans ses mains et des plats remplis de mets et victuailles apparurent sur les tables. Il se rassit et Bill reporta son attention sur la tarte à la citrouille qui trônait devant lui. Il ne se fit pas prier pour prendre la plus grosse part, déclenchant les moqueries narquoises de Charles.
- Bill ! Espèce de Snargalouf ! Tu ne pouvais pas me demander mon avis !
- Toute fachon, t'es allerchique à la chitrouille ! asséna Bill, la bouche pleine.
- Oui, bon, d'accord. Mais les autres ? Ceux qui supportent les cucurbitacées ?
Bill leva les yeux au ciel, avala sa bouchée et répliqua.
- Rien à faire, ils n'avaient qu'à se servir avant moi ! Et est-ce que tu peux arrêter de faire ta science juste pour ce soir ?
- Jamais ! riposta Charles en riant. Ca t'énerve trop pour que je ne continue pas !
Seulement là, Bill remarqua qu'ils faisaient partie des seuls à avoir prit au mot le directeur. Les conversations avaient repris, plus vives mais ce n'était pas suffisant. L'ambiance était plombée et morose. Il remarqua que le quatrième année assis à côté de lui les regardait.
- Je suis ravi de voir que les plus petits ont encore le cœur insouciant, sourit-il, formant des petits plis aux coins de ses paupières.
- Il ne faut pas se laisser abattre ! fit sauvagement Charles en pointant sa fourchette sur laquelle était piquée une carotte vers l'élève.
Arthur Williamson, puisque c'était son nom, se tourna vers Sven et ses yeux pétillèrent.
- Donty, c'est bien ça ?
Charles, derechef, opina sèchement. Il était un garçon menu et pas très grand, certes, mais il était aussi fier que McGonagall était sévère.
- Saches, Donty, que je suis parfaitement d'accord avec toi. Pour ce soir, tout du moins. Toi et Weasley - la couleur de cheveux, précisa-t-il avec un clin d'œil à Bill - vous êtes encore des garçons terriblement innocents. Ce qui est arrivé aux McIntosh peut arriver à tout le monde, tous les jours. Et personne n'est à l'abri.
Son ton s'était fait plus amer et plus sombre. Aucun des deux Première année n'approfondit le sujet mais ils assurèrent à Arthur qu'ils feraient tout pour garder leur bonne humeur et leur joie de vivre.
Bill et Charles recommencèrent à se battre gentiment sur des sujets futiles et les assiettes étaient presque terminée lorsque les lourdes portes de la Grande Salle s'ouvrirent sur Rusard, le concierge.
Au fur et à mesure qu'il traversait la salle d'un pas pressé, les élèves se taisaient et le regardaient fixement. Il arriva devant la table des professeurs et chuchota quelque mot au directeur. Dumbledore se leva d'un bond, grave. Il remercia Rusard, fit un geste qui se voulait rassurant à Minerva McGonagall qui était prête à se lever et tout le monde avait les yeux rivés sur lui et le concierge lorsqu'ils parcoururent la Grande Salle dans le chemin inverse et que les portes se refermèrent sur eux.
Le départ précipité de Dumbledore laissa les élèves confus quelque secondes. Ensuite, les discussions reprirent bon train et, évidemment, toutes tournaient autour du même sujet.
- Tu ne trouves pas ça bizarre qu'il quitte le repas en plein milieu ? demanda Bill à Charles. Il aurait attendu la fin, non ?
- Je ne sais pas, dit Sven en haussant les épaules. Je pense qu'on en saura plus demain.
Le banquet d'Halloween finit dans une ambiance de plus en plus morose et peu joyeuse. Personne n'avait vraiment le cœur à rire et cela s'en ressentait. Le professeur McGonagall les envoya se coucher à la fin du repas, sans pouvoir cacher son air inquiet. Ce soir-là, Bill et Charles eurent du mal à s'endormir, chuchotant leurs inquiétudes dans la chaleur réconfortante du dortoir.
Le lendemain matin, Bill et Charles arrivèrent en même temps que la plupart des élèves dans la Grande Salle pour prendre leur petit-déjeuner malgré leur - très - courte nuit.
Encore tout ensommeillé, Bill se laissa tomber sur son banc et attrapa un toast pour le beurrer tout en écoutant les paroles peu compréhensibles et sans contexte réels que Charles s'efforçait à enchaîner pour retrouver le rythme de babillage qu'il avait à l'habitude.
Alors qu'il assénait une énième fois à Charles que personne ne l'écoutait - pas même lui - le courrier arriva et Bill fut surpris du nombre d'hiboux bien plus grand qu'à l'habitude. Il y en avait tellement qu'il ne vit pas Errol, le hibou familial qui commençait à se faire vieux, foncer sur lui et atterrir dans ses œufs brouillés. Miraculeusement, personne ne se fit éclabousser mais Sven en profita pour se moquer.
Désormais parfaitement réveillé, Bill vit qu'il n'y avait aucune lettre attachée à la patte d'Errol. Un simple journal enroulé et un mot de la main de sa mère griffonné à la hâte « Pas la temps de t'écrire aujourd'hui. Lis la Gazette. A demain ». Perplexe, il défit l'attache du journal et se demanda ce qui pouvait bien être si intéressant dedans. Il n'était pas abonné à la Gazette et ne souhaitait d'ailleurs pas l'être. Il déplia le journal et hoqueta.
« LA FIN DE CELUI-DONT-ON-NE-DOIT-PAS-PRONONCER-LE-NOM !!!
Chers lecteurs, chères lectrices, nous avons le bonheur de vous annoncer la fin de Vous-Savez-Qui !
En effet, tard hier soir, Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom s'est rendu à Godric's Hollow, commune de résidence de la famille Potter. Famille Potter qui, nous l'avons su hier, vivait sous la protection du Sortilège Fidélitas (voir les autres conséquences de cette nuit en page 5).
Vous-Savez-Qui s'est donc introduit chez les Potter et a malheureusement tué le couple : Lily et James Potter. Il aurait entreprit de tuer leur fils âgé de un an, Harry Potter, mais une chose est certaine : il n'a pas réussi ! Encore mieux, il a disparu !! Les Aurors sont formels, il n'y a aucune trace de Vous-Savez-Qui à Godric's Hollow et le jeune Harry Potter a bien survécu à un Sortilège de la Mort.
Personne ne sait pourquoi Harry Potter a survécu et encore moins comment Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom en est mort mais une chose est sûre, ce sont là le retour des temps calmes ! Harry Potter, celui qui convient désormais d'appeler le Survivant, nous as sauvé alors que ce n'est qu'un bébé ! [...] »
Il ne savait pas trop pourquoi mais cette nouvelle, bien qu'elle le réjouisse, rendait Bill mal-à-l'aise. Il jeta un œil autour de lui et vit que - fait inhabituel - presque tout le monde avait un exemplaire du journal à la main et... s'extasiait. Personne ne semblait partager son trouble. Il revint aux pages imprimées et les tourna jusque la page cinq.
« LA FIN DE VOUS-SAVEZ-QUI : COMMENT, POURQUOI, QUI ?
Peu de temps après l'attaque, à Godric's Hollow, chez les Potter et la fin de Vous-Savez-Qui, un de ses plus fidèles serviteurs s'est révélé au grand jour.
Sirius Black, ami et Gardien du Secret des Potter, est la personne qui a trahi ses amis au profit de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Il a donné leur adresse à son Maître et, une fois morts, a voulu s'attaquer au reste de ses anciens amis. En plein cœur de la banlieue londonienne, Sirius Black a tué douze Moldus et un sorcier, Peter Pettigrow, dont on a retrouvé qu'un doigt.
Lorsque nos Aurors sont arrivés, Black était toujours là et riait comme une bête devenue folle. A l'heure où nous écrivons, il est déjà à Azkaban.
Nous adressons nos plus sincères condoléances à Remus Lupin, dernier ami des Potter et de Peter Pettigrow. »
Bill savait ce qui le dérangeait. Le fait que tout le monde soit heureux de cette nouvelle alors que la plupart de cette histoire était particulièrement triste. Il tapota ses œufs du dos de sa cuillère tout en réfléchissant. Les parents d'un petit garçon étaient morts et ce bébé devenait orphelin sans en avoir conscience. Les parents en question étaient morts parce que leur meilleur ami - Bill se doutait bien qu'il fallait avoir une grande confiance en la personne qu'on faisait devenir le Gardien du Secret - avait préféré le pire mage noir de tous les temps à eux. Ce même homme avait tué des Moldus et un autre de ses amis sans scrupules. Et il avait ri. Bill était dégoûté par cette inhumanité et il n'avait plus faim de tout. Oui, la fin de la guerre le réjouissait mais... il y avait trop de noirceur dans cette fin et tout le monde semblait l'oublier.
Il leva le regard vers la table des professeurs et fut heureux de constater qu'il n'était pas le seul à ne pas partager les émotions joyeuses de cette journée. Il fut d'ailleurs très surpris de constater l'absence de Dumbledore et de McGonagall. Il observa tour à tour chacun de ses enseignants et détourna vite les yeux du professeur Rogue. Celui-ci avait l'air de vouloir assassiner tous les occupants de la Grande Salle et de les découper en petits morceaux avant de les jeter au Calamar géant. Il ne s'y attarda pas car Flitwick essaya tant bien que mal de se lever et d'attirer l'attention des élèves. Peine perdue : il n'était pas beaucoup plus grand debout que assis et sa voix fluette ne pourrait pas se faire entendre dans ce brouhaha. Enfin, il vit Hagrid - les yeux rougis par les larmes, ce qui conforta Bill dans son opinion - se lever, frapper deux fois dans ses mains et laisser la parole à Flitwick. Cette fois-ci les élèves prirent conscience qu'on leur demandait leur attention et se turent. Rogue quitta la salle juste avant que Flitwick ne parle.
- Bien. Mes chers élèves, je sais bien qu'il ne me revient normalement pas le droit de vous parler des actualités mais, mes collègues étant absents pour la journée, le directeur m'en a donné le droit.
Il embrassa la grande pièce du regard avant de reprendre, un peu déstabilisé.
- Ce qui est arrivé hier soir est, évidemment, une très bonne nouvelle. Je conçois que l'on s'en réjouisse et, d'ailleurs, le directeur estime que vos esprits seront trop survoltés aujourd'hui et a suspendu les cours de la journée. Cependant - il haussa la voix pour couvrir les murmures - j'imagine que vous comprendrez que c'est aussi une tragédie que les affreux événements qui se sont déroulés à Godric's Hollow hier soir. Oui, cet enfant - que dis-je ! - ce bébé, nous a débarrassé de Vous-Savez-Qui. Mais n'oubliez pas qu'il a perdu ses parents. Il est très certainement devenu plus célèbres que le Professeur Dumbledore à l'heure qu'il est et pourtant, il ne connaîtra jamais ce que c'est d'avoir une vraie famille.
Ses paroles firent pâlir quelques sourires et Bill fut très reconnaissant à son professeur de trouver les mots qui exprimaient sa pensée.
- Enfin, reprit le professeur, je vous souhaite une excellente journée ! Demain, les cours reprendront comme à leur habitude donc profitez de votre journée de libre ! Des hiboux ont été prêtés à l'école exceptionnellement puisque le Ministère se doute que nombre de lettres vont être envoyées dans les jours qui suivent ! Bonne journée et surtout, malgré la tristesse de la chose, réjouissez-vous ! Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom n'est plus et une vie normale pourra bientôt reprendre !
Une ovation accueillit ses paroles et, même si Bill commençait à être atteint aussi par l'euphorie communicative, il n'y prit pas part. Dans sa tête, c'était encore surréaliste. Il croisa le regard soulagé de Charles et il sentit un brusque poids tomber de ses épaules. C'était fini ! Voldemort était vaincu ! Il n'y aurait plus ces journées d'angoisse, ces montées de stress quand le directeur arrivait dans votre classe pour annoncer une mauvaise nouvelle, cette appréhension à chaque lettre ! Fini !
Le poids et son trouble disparurent totalement quand il pense à ses petits frères et surtout le dernier, Ron, âgé d'à peine huit mois et qui ne connaîtrait jamais la moindre angoisse de ses parents. En cet instant, il se sentait d'être le grand frère qu'il était.
C'est ainsi que Bill Weasley et Charles Donty, deux Gryffondor de Première année passèrent leur journée à rire de tout et de rien, soulagés et heureux.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top