Crise d'adolescence de Melly. Hurlements fracas et portes claquées. Maquillage, garçons et devoirs mal faits. Pour elle, le monde imaginaire, c'était vraiment plus d'actualité, de toute façon, elle était trop occupée à remplir sa chambre de posters colorés.

***

Mélisse fut la première à sortir de ce doux cocons qu'on nommais enfance. Prise de cours par son besoin d'émancipation, Camille fut contrainte à parler de tout et de rien dans une chambre aux murs rose pâle, les ongles de pieds recouverts de trois couches de vernis mal étalées. Pendant des après-midis entiers, Bergamote se retrouvait seule avec ses contrées imaginaires qui, sans Cam', devenaient un peu ternes. Et la vérité, c'est qu'elle se sentait trahie. Le pacte avait été rompu, leurs deux sangs s'était dissociés, le petit papier taché ne voulait plus rien dire. Elle en aurait presque chialé de rage. Onze ans et sa première trahison, onze ans et ses premières désillusions. Rien n'avait plus de sens sans les doux yeux bleus qui veillaient tendrement sur elle, qui prenaient par la mains les siens pour la rassurer, la guider sur ses propres pas.

Bien sûr, de temps en temps, dans le plus grands des secrets, les deux filles se retrouvaient dans le parc aux aventures et, plus souvent, dans le placard aux confidences, loin du regard accusateur de Melly et de ses lubies adolescentes. Mais ce n'était plus pareil. Avant, leurs petits rendez-vous secrets était une habitude, maintenant qu'ils était devenus presque interdis, ils en devenaient d'autan plus précieux, fragiles et éphémères. Quand elles devaient se quitter, ce n'était pas la joie de se revoir le lendemain qui les animaient, mais bien la déception quant à la terrible attente à venir.

Cam', de son côté, prenait de moins en moins de plaisir à jouer ce rôle en compagnie de Mélisse. Certes, au début, elle trouvait ça drôle ; explorer une nouvelle période de vie, découvrir l'amour et ses exaltants tourments. Mais, au fond, il s'avérait que ce n'était plus si intéressant que ça, elle préférait largement cette vie faite de poème et d'à peu près qu'elle partageait avec Bergamote, cette vie plus vraie, cette vie qui semait de la poussière d'étoile dans ses yeux, qui lui donnait force et courage.

Ça lui manquait, tout ça. Et puis, le placard de la cuisine semblait rapetisser au fil du temps.

Elle ne le disais à personne, mais tout ça, ça l'effrayait ; cet endroit exigu dont elle n'avait pas assez profité, qui, bientôt, peinerais à les contenir, elle et ses histoires. C'était le lieu de tout les secret, de toutes les vérités, la chose chose qu'il leur restait de l'année passée. Une ruine à laquelle elles s'était attachées. Une ruine dans laquelle, au cours des rares et dorés rendez-vous, Camille avait appris à Bergamote comment les parents faisaient les bébés, lui en avait appris un peu plus sur ce monde.

Un monde qu'elle aurait dû découvrir bien plus tôt si seulement Cam' et ses univers n'était pas ces principales préoccupations.

Ce fut donc sur un tonitruant

-BEURK !

Que Bergamote découvrit la reproduction humaine et ses aspects peu ragoûtants.