La nuit a écorché le jour : des ténèbres gluantes, épaisses coulent sur la terre. Une lune sacrée, comme une sévère matrone, se lève. Un sourire s'allonge sur son visage brun. La lumière lisse, transparente de ses dents pénètre comme une lance d'Achille, comme une épée d'Arthur, la nuit qui saigne, qui hurle. J'entends ses souffrances dans les gémissements du vent, dans le sifflement de la chouette et dans les élégies des étoiles. 

Soudain, comme une étincelle dans un feu, comme une poussière dans une pierre, comme un éclat dans un éclair, le monde change. Il me semble qu'un autre soleil troue ses joues, qu'un autre ciel enfle dans sa bouche et qu'un autre univers coule sur ses lèvres. 

Je comprends qu'il existe un autre monde dans lequel il n'existe pas et dans lequel je suis heureuse.