J'attendais le bus assise sur un banc tout en lisant mon roman. Je laissais mon doigt tracer une ligne le long de la page blanche avant de la tourner délicatement. Une brise vint faire virevolter une de mes mèches que je replaçais rapidement derrière mon oreille. Je sentis ensuite le banc grincer sous le poids de la personne qui s'installait à mes côtés, mais je n'y prêtais pas attention et continuais ma lecture qui était bien plus passionnante.  

Après quelques instants les nombreuses personnes autour de moi s'agitèrent. Je refermais alors mon roman en prenant soigneusement garde de ne pas perdre ma page. J'agrippais mon sac à main noir et me redressais. Je posais mon regard sur le bus rouge qui roulait lentement devant moi.   Un bruit sourd se fit entendre, puis une foule de personnes se bousculèrent pour entrer dans la boîte en fer à quatre roues. Je me faufilais entre les nombreuses personnes, validais ma carte de bus et m'installais confortablement dans un siège contre une fenêtre.  

Je pris soigneusement mon livre entre mes petites mains et l'ouvris. Je compressais mon sac contre ma poitrine et repris ma lecture.  

Il dansait au rythme de la douce musique balançant leur corps dans un mouvement sensuel. Les yeux dans les yeux, ils tournaient encore et encore sous ce ciel illuminé par les étoiles. Jamais elle ne s'était senti si libre, si vivante. Elle se sentait à sa place, ici, tout près de son coeur.  

« Il est là, s'extasia une blonde derrière moi me perturbant dans ma lecture. 

- Il est encore plus beau que tu me l'avais dit, Clem. » rajouta son amie en s'extasiant à son tour.  

Intrigué par la discussion des filles derrière moi je levais la tête de mon livre et suivis leur regard. Mes yeux se posèrent alors sur un jeune bouclé qui marchait de façon nonchalante dans le couloir principal. Il regarda rapidement autour de lui, puis il s'installa à son tour sur un siège.  

C'était la première fois que je le voyais dans le bus. Et je me demandais bien pourquoi je ne l'avais pas remarqué avant car il semblait être une personne que l'on n'oublie pas facilement.  

Je pris le temps de le détailler pendant un court moment. Il était plutôt grand. Largement plus grand que moi. Il était habillé d'un simple T-shirt bleu marine avec un jean noir qui lui moulait parfaitement les deux fines jambes qui supportaient le poids de son corps. Ses cheveux formaient de grandes boucles brunes qui retombaient négligemment dans sa nuque, caressant sa peau légèrement bronzé. Et il portait des lunettes de soleil noires, ce qui lui donnait un air mystérieux. Je me surpris même à vouloir découvrir la couleur de ses yeux me les imaginant.  

Il mâchouillait un chewing-gum, ce qui faisait remuer ses joues dans un rythme hypnotisant. Mes yeux suivirent ses mouvements de mâchoire qui étaient lents, intriguée.   

Sa tête reposait sur le dos du siège écrasant quelques-unes de ses mèches contre le tissu bleu et son regard dérivait sur la fenêtre à sa droite. Du moins c'est ce que j'en déduisais car ses yeux étaient cachés par ses lunettes, ce qui avait le don d'éveiller ma curiosité.  

Elles avaient raison, il était magnifique. Et je pense que tout comme moi, elles devaient le regarder sans relâche ce demandant si ce garçon était bien réel ou si ce n'était qu'un mirage. Un magnifique mirage.  

Je le fixais silencieusement, le dévorant littéralement du regard. C'était la première fois que je faisais ce genre de chose. Je n'avais jamais réellement prêté attention à un quelconque garçon auparavant. Mais je ne pouvais détacher mon regard de ce garçon.   

J'explorais d'un regard curieux chaque trait que je pouvais voir de lui. J'avais cette impression de ne pas pouvoir dévier mon regard. C'était comme-ci mes yeux ne voulaient pas regarder autre chose que ce magnifique bouclé.  

Il tourna son visage dans ma direction sentant sans doute mon regard sur sa personne. Je détournais alors rapidement mon regard et me cachais derrière mon roman.  

Et merde, pensais-je.  

Je sentis mes joues me brûler à la simple idée qu'il est pu poser son regard ne serait-ce que quelques secondes sur moi. Et je me trouvais encore plus ridicule de me mettre dans un état pareil pour un inconnu.  

Je luttais contre l'envie de le regarder encore une fois. Caché derrière mon livre, je me mordis la lèvre inférieure essayant tant bien que mal de me calmer.  

J'avais beau essayer de reprendre ma lecture à plusieurs reprises, rien n'y faisait. J'étais totalement troublé par sa présence. Et je n'étais apparemment pas la seule à éprouver cela vu comment les filles derrière moi se tortillaient en rigolant.  

Quand ce fut mon arrêt, je rangeais mon livre dans mon sac à main et me redressai. Je pivotais légèrement pour me mettre en face des portes. Et sans le regarder une dernière fois, je descendis du bus rouge.   

~  

Le soleil brillait de mille feux dans le ciel. C'était une belle journée ensoleillée. Elle le regarda un instant se perdant dans ses yeux océan. Les battements de son cœur devenaient alors irréguliers.   Il lui gratifia un magnifique sourire ce qui la fit sourire en retour. Elle était heureuse auprès de lui. Et c'était la première fois qu'elle se sentait ainsi. C'était la première fois que son sourire n'était pas faux.  

Je refermais mon livre, un léger sourire aux lèvres. J'enviais son histoire, l'amour qui naissait entre elle et Edward. Je voulais moi aussi pouvoir vivre cela. Je voulais moi aussi ma propre histoire d'amour.  

Je grimpai à bord du bus et vis les mêmes filles que la dernière fois au fond de celui-ci. Je m'installais rapidement sur un siège et fixais l'entrée principale du bus.  

Allais-je le voir aujourd'hui ? Je me surpris à espérer le voir monter dans le bus une nouvelle fois. J'avais envie de pouvoir encore poser mes yeux sur son doux visage digne d'un ange. Mais quand son arrêt arriva et que les portes se refermèrent, je mordis ma lèvre légèrement déçue de ne pas le voir monter dans l'encadrement de la porte.    

~  

Les semaines passèrent et il n'était plus réapparu dans le bus. Et même si je désirais le revoir, je m'étais fait à l'idée que je ne le recroiserais plus.  

Abrité sous mon parapluie, j'attendais le bus accompagné par de nombreuses personnes qui s'abritaient comme elles pouvaient sous l'abri en verre. Quand le bus arriva, elles se bousculèrent pour rentrer les premières dans le bus. Je regardais la scène, puis je fermais mon parapluie le secouant un peu pour faire tomber les quelques gouttes d'eau qui s'accrochaient au tissu gris. Puis je montais à bord du bus en saluant le chauffeur.  

Je m'installais confortablement sur le siège refermant mon manteau noir sur moi sentant mon corps frémir à cause du froid. Rapidement le chauffage du bus réchauffa mon corps, décontractant mes muscles peu à peu. Je sortis mon livre de mon sac et repris ma lecture.  

« Edward tu ne devrais pas être ici, tu sais que c'est risqué pour toi qu'on soit vu ensemble, lança Elizabeth d'une voix tremblante.

- Cela m'importe peu, Elizabeth. Je prendrais tous les risques qu'il faut pour te voir. » 

Elle esquissa un faible sourire alors que Edward entoura son doux visage des ses grandes mains.  

«  Je t'aime Elizabeth, je t'aime plus que tout au monde.  »

Je sentis une légère pression à côté de moi. Je posais alors mon regard sur la personne qui avait prit place à mes côtés, mais rapidement je sentis mes joues devenir brûlantes. Je replongeais mon visage dans mon livre totalement déstabilisé.  

Il était là. Le magnifique inconnu était à côté de moi. À quelques centimètres de moi. Je pouvais même entendre sa respiration qui était lourde.  

Une douce odeur vint rapidement chatouiller mes narines. Oh mon dieu, son parfum!, ma conscience hurlait en moi. Cette odeur puissante était si envoûtante que j'aurais pu rester là, éternellement, à humer cette odeur masculine que je trouvais délicieuse.  

Les yeux rivé sur mon livre, je gigotais dans tous les sens ne sachant pas comment agir auprès de lui. Il était si proche de moi qu'en levant juste mon coude je pouvais le toucher.  

Je me sentais mal à l'aise si près de lui.  

Je baissais légèrement mon livre pour le regarder quelques instants. Il fixait son cellulaire qu'il tenait entre ses deux grandes mains. Je n'avais jamais vu des mains aussi grandes et aussi belles. Je posais ensuite mon regard sur son visage. Je pouvais enfin voir ses yeux. Ses magnifiques yeux. Ils étaient d'un vert étincelant. On aurait dit que des petites étoiles s'y étaient logé tellement ses yeux brillaient. J'en restais toute retournée.  

Je posais ensuite mon regard sur son nez, que je trouvais tellement adorable. Puis mes yeux s'accrochèrent à ses lèvres. Il avait de grandes et fines lèvres légèrement rosées par le froid. Je me mordis la lèvre inférieure m'imaginant les goûter.  

Je devais avoir l'air d'une idiote ainsi à le détailler sous toutes les coutures. À l'admirer sans retenue.  

Je dérivais ensuite mon regard sur son cellulaire qu'il tripotait avec ardeur. Il envoyait un message à une certaine Lina. Prise de curiosité, je me penchais légèrement pour voir ce qu'il lui écrivait. Mais chanceuse comme je suis, au moment où je m'étais penché pour voir son message, le bus étant dans un rond-point avait basculé sur la droite ce qui me fit perdre l'équilibre et j'avais basculé sur le bel inconnu, atterrissant la tête contre ses cuisses.  

Légèrement sonné par le choc, je clignotais des yeux alors que son regard émeraude se posait sur moi. Je sentis mes joues devenir couleur tomate alors rapidement je repris ma place initiale.  

« Vous allez bien ? me demanda-t-il d'une voix suave.

Sa voix me fit frémir. Elle était à la fois si douce et si grave.  

« Euhm oui, excusez moi.  »

Quelle idiote !, m'insultais-je intérieurement.  

J'étais vraiment douée pour me faire passer pour une imbécile! Je gardais mon regard loin du sien, plus que mal à l'aise suite a ce qui venait de se passer. Je portais rapidement mon livre à mon visage afin de me cacher de ses magnifiques yeux.  

Il esquissa un sourire alors que je me cachais toujours derrière mon livre.  

« Il n'y a pas de raison de vous excusez.  »

Impressionnée par son assurance et son charisme je perdis la parole. Il eut donc pour seule réponse un hochement de tête.  

Il me fixait toujours alors que j'essayais de me cacher derrière mon roman. Il semblait vouloir voir mon visage, mais je ne me sentais pas prête à affronter son magnifique regard.  

Il posa ensuite son regard sur la couverture de mon livre et semblait lire le titre de celui-ci.  

« Amour interdit, il lisait, c'est un bon livre ?  »

J'hochais positivement la tête.  

« Vous croyez vraiment à ce genre de choses ?

- Ce genre de choses ? osais-je demander.

- L'amour, il dit presque avec dégout. 

 - Oui, pas vous ?

- Non, je trouve çà ridicule.  »

Je fus légèrement surprise par sa réponse.  

C'était bien la première fois qu'une personne me disait trouver çà ridicule.  

« Et bien je ne pense pas que çà soit ridicule, au contraire. Il me regardait intrigué. Sans amour, nous ne serions rien. Nous n'aurions aucun but dans la vie. Je veux dire on passe notre vie à chercher notre âme sœur se doit bien être pour une raison valable non ? Je continuais mon monologue sous le regard insistant du beau bouclé, Ne vous a-t-on jamais parlé d'amour avant ? Ne vous a-t-on pas expliqué à quel point ce sentiment peut nous être bénéfique ? À quel point il nous rend fort et heureux ? Il nous est nécessaire, affirmais-je. Il est à l'essence même du monde, car sans l'amour vous ne seriez pas là. Nous ne serions pas là, je précisais.  »

Je replaçais rapidement mon livre en face de moi réalisant que je l'avais baissé pendant mon monologue laissant mon visage à découvert.  

« C'est une autre façon de voir les choses. » finit-il par dire.  

Je l'observais. L'avais-je blessé ?  

Il regarda un instant dans le vide, puis il étira ses lèvres en un sourire adorable. Il tourna ensuite sa tête dans ma direction me regardant. Je gardais toujours mon livre à la hauteur de mes yeux, me cachant derrière, me sécurisant face à lui. Il rapprocha son index vers moi le posant délicatement sur le haut de mon livre faisant pression dessus pour le baisser. Je le laissais faire alors que je détournais mon regard du sien.  

Je ne savais pas comment il faisait, mais il m'intimidait vraiment. Son regard sur moi me brûlait. J'avais du mal à soutenir son regard. J'avais du mal à rester lucide face à lui. À me contrôler.  

« J'aimerais beaucoup connaitre ce sentiment, pourriez vous un jour me le montrer ? » Il me demandait un sourire malicieux dessiné sur ses lèvres.  

J'arquais un sourcil légèrement surprise pas sa demande ce qui le fit sourire.  

« L'amour çà ne se montre pas, çà se ressent.  »

Il se rapprocha dangereusement moi alors que je me plaquais contre la vitre froide du bus. Il plaça son visage près de moi ne semblant pas être déstabilisé par ce rapprochement soudain. Je compressais mon livre contre mon nez cachant mon visage. Ses magnifiques yeux verts détaillèrent le peu de mon visage que je lui laissais entrevoir.  

« Et bien, pourriez vous me le faire ressentir un jour ? murmura-t-il d'une voix incroyablement douce et grave me faisant frémir.

-  Je....je, » balbutiais-je en cherchant mes mots.  

Le nom de mon arrêt résonna dans le bus. C'était mon échappatoire. Je pris alors mon sac du bout des doigts et me redressais.  

« C'est mon arrêt. »  

Il se décala légèrement me permettant de passer entre lui et le siège. Je marchais jusqu'à la porte principale sans me retourner encore chambouler par la conversation que je venais d'échanger avec lui.  

Je descendis du bus replaçant mon parapluie au-dessus de moi. Je posais mon regard sur la vitre alors que le bus redémarrait. Et là, je le vis me sourire. Je sentis mes joues rougirent alors je me retournais spontanément pour ne pas qu'il ne le remarque. J'entendis ensuite le bus s'éloigner emportant avec lui, ce magnifique bouclé qui avait le don de me mettre dans tous mes états.