Je refermai la porte derrière moi puis je m'éclaircis la voix avant de m'avancer d'un pas sur le palier vers les deux jeunes hommes, un sourire hésitant aux lèvres.

— Desya, je te présente Bluebell Rojas. Elle est assistante sociale et présidente de l'association "Liberty's Sun Child" à East Harlem.

Les yeux noirs transperçant d'Olsen me parcoururent avant de venir se planter dans les miens. Un frisson me parcourut le dos. Son regard sombre comme la nuit manifestaient une franche hostilité à mon égard. Je me raidis. Bien plus grand que moi, il était très impressionnant, tant par son apparence que par sa froideur. Des tatouages partaient de ses poignets jusqu'à ses biceps musclés. En dessous de son tee-shirt noir, je devinai des épaules larges et bien dessinées. Paolo se racla la gorge pour rappeler à Desya les bonnes manières :

— En-chan-té, articula le jeune homme avec exagération.

— De même, répondis-je un peu trop rapidement, amère.

Je me tournai vers Paolo, qui visiblement ne savait pas trop quoi faire avec cette atmosphère d'un froid polaire.

— Je peux te parler une seconde ? demandai-je en faisant mon possible pour cacher toute mon aigreur.

Mon ami me répondit avec un petit hochement de tête. En m'éloignant, je sentis dans mon dos, le regard lourd d'Olsen.

— Je ne sais pas si c'était vraiment une bonne idée.

— Tu te fou de moi ? chuchota Paolo, agacé.

— Il me fait flipper. Enfin, regarde-le. Tous ces tatouages sur ses bras, son cou. J'en suis sûr qu'une croix gammée recouvre son torse ou son dos. Il va me tuer dès qu'il en aura l'occasion.

— Desya Olsen doit suivre un programme très strict s'il ne veut pas retourner en prison. Crois-moi, il en est conscient.

Je jetai un coup d'œil au fond du couloir. Le jeune homme attendait, une épaule contre le mur. Soudain, je crus apercevoir ses lèvres s'enrouler en un léger sourire mauvais. Effrayée, je détournai aussitôt les yeux, le cœur battant.

— Mon Dieu, Paolo, je n'ai jamais détesté quelqu'un de ma vie. Cet homme est le premier. À cause de toi, j'ai l'impression d'être une mauvaise personne.

Les mains chaudes de mon ami se posèrent sur mes joues pour relever mon visage. Je rouvris doucement les paupières, ses yeux verts m'apaisèrent comme quand nous étions petits.

— Tu ne seras jamais une mauvaise personne, Blue. Tu as sauvé un nombre incalculable d'âmes.

— Pourquoi crois-tu vraiment en lui ?

Paolo relâcha mon visage et soupira.

— Le juge Gibson m'a mis sur le dossier, je ne peux pas refuser sinon ma carrière risque d'en pâtir. C'est égoïste de ma part de penser à moi, je sais. Je te promets que je te revaudrai ça, Blue.

Je levai mon visage en direction du plafond avant de revenir sur Paolo avec un pauvre sourire :

— OK, pour toi, seulement pour toi.

Soulagé, il relâcha ses épaules puis vint m'embrasser le front.

— Si ce mec ose quoi que ce soit, je te promets que je lui ferai la peau.

Même si le ton de sa voix se voulait calme, une colère sourde raisonnait en lui.