Chapitre 5 : Touche moi

Nous sommes Dimanche, il est 20h54 et je suis heureux. Pourquoi ? Après tout, le week-end est bientôt terminé. Eh bien pour la simple et bonne raison que je suis en vacance pendant dix jours. Dix jours sans voir ce couple agaçant, dix jours à pouvoir me lever à l'heure que je veux et à faire le nombre de monde parallèle dans mon imagination que je souhaite, sans que la réalité ne m'oblige à m'en déconnecter. Oui, je suis heureux.
Tao arrive soudainement dans ma chambre.

– T'as fais ta valise ? me demande-t-il en scrutant de gauche à droite ma chambre.

– Pour ?

– Le voyage scolaire bien sûr !

– Évidement que non ! Je n'y vais pas !

– Pfft ! Parce que tu penses avoir le choix ?

– Ça coûte certainement une blinde et en plus ça va être nul et...

– Je me suis déjà chargé de tout, ne t'inquiète pas.

– Quoi ?! Mais tu ne m'as même pas demandé mon avis ! Je ne veux pas y aller moi !!

– Ne dis pas n'importe quoi, tu vas à New York ! Avec tous tes camarades en plus ! J'ai regardé le planning et vous serez dans un magnifique hôtel en plein centre ville. Tu vois que ça sert d'être dans une école de riche ! À ton âge, j'aurais adoré faire ce genre de voyage !

– Tch ! Tu préférais coucher à gauche à droite, t'en avais rien à foutre des voyages scolaires !

– Tu veux que je te frappe ? dit-il en riant.

– Oui, au moins je pourrais éviter d'aller là-bas.

Tao ricane avant de me dire de régler mon réveil à quatre heure du matin car le départ aura lieu à six. Vous vous souvenez quand j'ai dis être heureux ? Eh bien ma joie a été plus éphémère qu'un papillon !! Qu'est-ce que je vais foutre à New York ?! Pendant dix jours ?! Avec ma classe ?! Ce n'est pas n'importe quel étranger avec qui je serais... mais ma classe ! Celle qui me déteste avant même que je ne me présente ! Donnez moi directement un billet pour tomber en dépression, ça ira plus vite.

Le lendemain, je me rends sur le lieu du rendez-vous vous, en métro ( puisque je ne peux pas laisser ma moto durant dix jours garée devant mon lycée). Je ne sais si je tire la valise ou si la valise me traîne mais je suis sûr d'une seule chose : ce voyage ne présage rien de bon. Arrivé devant le bus qui doit nous emmener en enfer, notre professeur principal fait l'appel et on s'installe à l'intérieur.

Le seul point positif est que je n'ai pas besoin d'être à côté de quelqu'un puisque le véhicule est assez grand pour laisser une ou plusieurs personnes monopoliser deux places. À peine avions nous démarré que Morphée m'accueille dans ses bras. Sachant qu'on a devant nous douze heures de route, une pause toutes les trois heures est imposée.

À mon réveil, nous étions à la deuxième. J'ai donc dormi un peu plus de six heure non-stop. Ce n'est pas un réel problème. Le vrai problème aurait été de manquer cette pause là puisqu'on est sensé changer de bus ( pour une raison x ou y ). Je me lève donc et sorts du bus. Tout le monde est autour d'une table avec leur pique-nique. Mon frère m'a préparé un bento ( super appétissant d'ailleurs), mais manger avec eux serait trop gênant.

Ils me regarderaient en chuchotant des «Sa seule présence a suffit pour plomber l'atmosphère !» ou encore des «Les racailles aussi mangent comme des gens normaux ?». Donc bon, je passe mon tour. Je les contourne donc et me dirige vers l'arrière de la station-service, à l'abris des regards pour fumer une clope.

Si je continue comme ça, je ne mourrais pas d'un cancer des poumons comme j'avais prévu, mais de faim. J'ai des vertiges et j'ai l'impression que mon estomac se tord dans tous les sens. Je m'accroupis donc, toujours ma cigarette à la main, la tête baissée. J'entends alors un bruissement à quelques centimètres de moi.

Je tourne la tête vers le son et aperçois un pain à la crème enveloppé dans son emballage plastique.
Je me lève alors, voulant l'écraser en sachant de qui il est, pour une raison ou pour une autre, je le prends délicatement et me met à le manger conscieusement. C'est doux et moelleux... comme lui.

Après ça, on monte dans le second bus afin d'achever les six dernières heures du trajet. Je les ai passé tantôt à parler avec Jun et Kenta, tantôt à dormir. Et, enfin, on arrive devant l'hôtel. Il est grand et luxueux ce qui, durant un trop court moment, me fait me réjouir d'être venu. Néanmoins, ma joie disparaît à l'instant où les professeurs accompagnateurs nous disent de nous séparer en deux groupes, filles/garçons, afin de procéder à la répartition des chambres.

– Étant donné que l'on veut éviter tous conflits entre vous, nous n'allons pas vous laisser choisir vos chambres, nous informa notre professeur principal, la détermination de chaque duo se fera en fonction de l'ordre alphabétique.

Fallait s'y attendre, je n'aurais certainement pas eus une chambre pour moi seul ( même si je l'espére au fond de moi). Avec un peu de chance, je tomberai sur quelqu'un de docile à qui je ferai faire toutes les tâches ingrates et qui ne me créera pas de problème.

– Et pour finir, chambre 412, Song Haeli et Wang Shun.

– C'est une blague ?! m'indigné-je. De tous les gens présents ici, c'est sur Bouclette que je tombe ?!

Un brouhaha se forme. Étant donné que tout le monde aime Haeli et sait que je l'ai fait pleurer, ils semblent tous déboussolés par cette annonce.

– Monsieur ! Haeli ne peut pas aller avec lui ! dit un tel.

– Il faut à tout prix changer Haeli de chambre ! dit un autre.

Monsieur Johnson se masse les tempes avant de demander le silence.

– D'accord, d'accord. Je vais changer les binômes. Donc, qui veut remplacer Song Haeli et se mettre avec Shun ?

Un silence radio prend place entre les élèves. Tch ! Quel bande de froussards ! Quand c'est pour m'insulter ils s'y mettent tous, mais quand il faut faire quelque chose, personne ne prend les devants.
Une main se lève alors.

– Monsieur, est-ce possible que Haeli se mette avec moi et mon binôme ? On sera juste trois dans la chambre et comme ça tout le monde sera content, propose Dojin.

– Moi je suis d'accord, affirmé-je déjà heureux de penser au fait que j'aurais une chambre pour moi seul.

– Non. Arrêtez d'être ridicule, on ne va pas changer toute l'organisation des chambres pour un seul binôme ! clame le professeur.

– C'est juste deux chambres ! m'exclamé-je.

– Wang Shun ! À ta place je me ferais tout petit, tu ne peux t'en prendre qu'à toi-même si ta relation avec tes camarades est aussi mauvaise !

Je vous jure, je vais finir par buter ce prof.
On se met donc à avancer vers l'entrée de l'hôtel et, une fois les formalités effectuées, la moitié de la classe se rend au quatrième étage. J'allais emprunter le couloir pour me diriger dans ma chambre quand quelqu'un retint mon poignet.

– Qu'est-ce que tu veux encore ? m'agacé-je.

– Je te préviens, commence Dojin, si tu fais du mal à Haeli, je te tue.

Ouh... j'ai peur.

– T'inquiète pas, Pablo, il ne ressentira que du plaisir, dis-je un sourire mesquin aux lèvres avant de me libérer de son emprise.

Je me remets donc en route derrière Haeli et fait exprès de regarder son cul avant d'adresser un clin d'œil à Dojin. Il bouillonne de rage en serrant ses poings, impuissant. Tout bien réfléchi, je pourrais profiter de ma colocation avec Bouclette pour foutre le bordel dans leur couple et ainsi me venger d'eux deux.

La chambre est constituée d'un lit double au milieu de la pièce, d'une fenêtre sur le mur de droite ainsi que d'une penderie face au lit. À droite, se trouve une porte menant certainement à la salle de bain. L'ensemble est très luxueux et propre mais le seul bémol est, et vous l'avez compris, le lit double. Après, ça s'arrange, Haeli dormira par terre ce soir... et tous les autres.

Après avoir posé nos valises, on descend dîner vers 20h30 dans le restaurant de l'hôtel. Je me retrouve donc, sans le vouloir, seul dans l'ascenseur avec Haeli. Il y a un truc qui m'intrigue, pourquoi n'a-t-il rien dit lorsque la répartition des chambres a été annoncée ? Était-ce dû à sa manie de faire tout le temps l'opposé des autres ou il y a-t-il une vraie signification derrière ça ?

– Hum... merci... pour tout à l'heure, ça m'a fait plaisir, balbuté-je.

– Hm. Je ne voulais pas que tu t'évanouisses, commence-t-il, tu as aimé ?

Je pris un moment à comprendre de quoi il parlait.

– C'était pas mal.

Tandis que je le remerciais pour ne pas m'avoir rejeté comme tout le monde, il voulais savoir si j'ai apprécié son foutu pain à la crème. Peut-être me suis-je simplement trompé et qu'il n'a juste rien dit car ce n'est pas dans son caractère de faire des scandales.

Peu importe ses intentions, je le déteste maintenant. Arrivé au rez-de-chaussée, alors que Haeli rejoint son copain et ses amis, je m'installe à une table près d'une fenêtre. Quelques minutes plus tard, un serveur vient prendre ma commande et, après une petite attente, mon burger arrive.

Ça faisait déjà une dizaine de minutes que je mangeais quand mon professeur de biologie se joint à moi. Il passe commande et me salue amicalement.

– Salut, prince ténébreux ! lache-t-il fière de sa blague.

– Bonjour, monsieur.

– Ha ! Là ! Là ! Cesse ces formalités avec moi !

– Comme vous voudrez.

– Bref ! Je voulais te demander, tu aurais pas une clope pour ton vieux professeur ?

– Désolé, j'essaie d'arrêter.

C'est faux. J'ai pas envi de partager le seul paquet que j'ai pris pour le voyage avec lui. Et puis, il me mettrait un avertissement à peine l'aurai-je sorti !

– Quoi ?! Pourquoi ?! Hum... je veux dire... c'est bien ! Bonne initiative, Shun ! Continue sur cette voie !

Sa naturelle aura amicale m'arrache un pouffement de rire.

– Sinon, tu ne comptes pas te faire des amis dans ta classe ?

– Pas vraiment non. J'en ai à l'extérieur et puis... ils me détestent tous !

Il soupire d'exaspération.

– C'est parce que tu es définitivement plus amical avec les adultes qu'avec les personnes de ton âge !

– Je ne trouve pas. Je parle de la même façon à tout le monde, rétorqué-je.

– Dans ce cas, pourquoi penses-tu avoir une aussi mauvaise réputation ?

– Ça n'a rien à voir avec ma façon de parler aux gens mais avec mon apparence.

– Mouais.

– Et puis, il n'y a qu'avec vous que j'arrive à m'entendre ! Les autres professeurs préfèrent ne rien avoir à faire avec moi ou me traiter constamment différemment des autres.

La commande de M. Stevenson arrive alors.

– Je sais que je te l'ai déjà dis, mais sache que tu peux vraiment compter sur moi. Pour n'importe quoi !

– Hm.

On se met donc à manger dans le silence durant quelques minutes.

-Oh ! Là ! Là ! Tu as beau faire deux mètres et agir comme un gros dur, tu ne sais vraiment pas manger ! dit-il.

Interrogé, je relève la tête vers lui. Il essuye alors le coin de ma bouche avec sa serviette en me souriant amicalement. C'est quoi... cette atmosphère ?

– Je sais que ce restaurant est super bon, mais prend ton temps pour manger, hm ?

J'acquiesce lentement, encore un peu déboussolé par son action précédente.
On finit de manger sans plus d'incident et, après l'avoir salué poliment, je quitte le restaurant et remonte dans ma chambre. Haeli n'est toujours pas rentrer. Tch ! Il doit certainement être avec cet enfoiré de Dojin ! Rien que de les imaginer ensemble suffit pour me mettre en rogne !
Après m'être partiellement calmé, je décide de prendre une douche.

Je laisse l'eau brûlante couler silencieusement le long de mon corps. Et, plus les gouttes ruissele, plus mon esprit s'apaise. Je ne sais combien de temps je passais sous la douche mais, en sortant, j'étais complètement déboussolé. Je me sèche dans les grandes lignes et pose une petite serviette sur mes cheveux avant d'enrouler une plus grande autour de ma taille. Puis, je sors de la salle de bain. À ma grande surprise, Haeli se trouve assi sur le lit, face à moi.

– J'ai oublié de prendre mes vêtements, marmonné-je.

Bouclette semble complètement figé. Il fixe mon corps, la bouche bée sans prêter attention à ce que je lui disais.

– Tu... mesures combien ?

– Vingt deux centimètres, déclaré-je un sourire en coin.

Soudain, une idée génialissime me vient à l'esprit. Ce soir, je vais le faire tomber amoureux de moi une nouvelle fois.

– Tu penses pouvoir supporter une taille pareille ? le provoqué-je en avançant vers lui.

– Oui.

Mon cœur rebondit dans ma poitrine et je ne sais que répondre à cela. Est-ce... vraiment l'innocent Haeli que j'ai devant moi ? Une fois arrivé à un mètre de lui, il plonge enfin ses yeux dans les miens.

– Tu veux qu'on le fasse maintenant ? demandé-je.

Haeli semble soudainement reprendre ses esprits et est complètement embarrassé.

– Je... je ne parlais pas de ça ! M... mais de la taille de ton... ton corps ! Moi je fais un mètre soixante-trois. Et... et toi ?

– Un mètre quatre-vingt onze, répondé-je calmement en posant mes bras de part et d'autre de son corps.

Nous sommes à présent plus proche que nous ne l'avions jamais été. Nos visages ne sont qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. À mesure que Haeli s'incline pour élargir la distance, je le fait pour la diminuer.

– Que... qu'est-ce que tu fais, Shun ?!

– J'aime quand tu prononces mon prénom. Redis-le encore une fois et tu te retrouve à quatre pattes ici même.

– A... arrête ça ne me fait pas rire !

– Parce que tu as l'impression que je plaisante ?

Il protégeait son visage avec ses bras, désespérément.

– Laisse moi partir... !

Je ricane.

– Tu te sens piégé ?

Il acquiesçe lentement, me regardant tel un chiot apeuré.

– Très bien. Touche moi alors.

– Qu... quoi ?

– Pose tes mains sur mon corps et repousse moi. Je t'assure que je ne présenterai aucune résistance.

Il baisse ses bras et pose ses mains sur ma poitrine, délicatement. Ma respiration s'accélère et mon excitation accroit. Ça va aller, Shun, il va te stopper et tout va bien se passer. On ira se coucher tel de parfaits inconnus sans rien faire de plus.

– Qu'est-ce que tu attends ?

Il ne répond rien et continue à me dévorer des yeux, les mains toujours sur mon torse. J'avance automatiquement mon visage vers le sien et m'arrête juste avant que nos lèvres ne se frôlent. J'ai l'impression que mon cœur va percer ma poitrine tant ses battements sont rapides et mon souffle n'a jamais été aussi saccadé. Non, est-ce que je respire même ? Est-ce mon souffle que je sens traverser mes lèvres ou la chaleur du sien ?

– Shun.

Je le plaque violemment sur le matelas en immobilisant ses bras, tenant ses poignets entre mes mains. Ses yeux me regardent avec un mélange entre la peur et l'excitation. Il halète rapidement en me dévorant du regard. Je l'ai enfin vu, ma poupée en chaleur. Je resserre alors mon emprise sur ses poignets et m'apprête à l'embrasser lorsqu'on frappe à la porte.
Je me redresse alors soudainement, camouflant mes lèvres avec le dos de ma main.

– Va-t-en... s'il te plaît, murmuré-je à Haeli.

Son visage s'assombre et il se précipite vers la salle de bain.
Merde... un peu plus et je perdais le contrôle. C'est dangereux. Très dangereux.

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Fin du chapitre 5.

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