Chapitre 43 : restaurant
Ayant passé le reste de l'après-midi sur la plage à tantôt manger des glaces, tantôt se baigner à la mer, nous avions particulièrement faim et sommes allés dans un petit restaurant près de la plage. On a commandé un "Stone crab claws" (ce sont des pinces de crabes géantes accompagnées d'une sauce tartare et d'une salade choux carottes), du poisson grillé à la créol servi avec du riz et des pousses de soja (nommé "fried snapper") ainsi qu'un "Keys fisheries lobster reuben", qui est tout simplement un sandwich à la langouste.
– Ajoutez à cela deux cocktails "sex on the beach", s'il vous plaît, annonce Haeli au serveur.
Ce dernier nous observe un instant, sceptique. Pour cause : ce cocktail est alcoolisé et je fais peut-être un peu adulte, mais ma poupée beaucoup moins. L'homme en costume hésite encore un peu avant d'abandonner son devoir de bon citoyen pour nous saluer et tourner les talons. Bouclettes tourne la tête vers moi, satisfait.
– C'était risqué de commander de l'alcool, commencé-je.
– On est à Miami, Shunie. On peut prendre tous les risques possibles.
Je médite un petit moment cette phrase, la trouvant de plus en plus véridique. Il est vrai que depuis que nous sommes ici, nous passons notre temps à faire des choses dangereuses. Enfin... des choses que nous n'aurions pas faites à Chicago. Fuguer, dormir hors de chez nous, se saouler ensemble, s'embrasser et manquer de passer à l'étape supérieure en public...
Quand j'y pense, mis à part s'embrasser et ce qui va avec, toutes ces choses sont des expériences que j'ai déjà faites ; mais jamais avec Haeli. C'est ce qui rend ces moments si spéciaux et précieux.
– Passons la journée au studio demain.
– Hm ? Pourquoi ? demande Haeli.
Je hausse les épaules.
– Parce que...
Le serveur arrive avec nos plats. Je m'interromps pour le laisser les poser et le remercier. Puis, lorsqu'il s'en va et que Haeli a terminé de faire quelques photos, on commence à manger. Il lève les yeux vers moi d'un air interrogeur.
– "Parce que" ?
– Ah oui. Eh bien, tout simplement parce que j'ai pas envie de sortir.
Il affiche un mine légèrement déçu en acquiesçant. Une vague de panique me prend.
– Après si tu voulais aller quelques part en particulier demain, c'est toujours possible, tu sais ! Ça ne me dérange pas tant que ça de sortir !
Il secoue la tête de gauche à droite.
– Non, non. C'est juste que j'imaginais une raison plus... intéressante à ta volonté de rester au studio... tous les deux.
Je remarque alors un très léger rictus au coin de ses lèvres et je comprends instantanément où il veut en venir. J'approche lentement mes doigts de sa joue afin de la caresser tendrement pour les glisser sous son menton. Là, je lui fait gentiment relever la tête pour qu'il plonge sensuellement son regard dans le mien. Je diminue un peu la distance de nos deux visages dans le but de rendre mes paroles plus intimes.
– On pourra faire ça aussi, chéri.
Son sourire s'agrandit et ses doigts viennent se poser sur les miens puis il repose sa joue sur ma paume en frôlant mes falanges du bout du pouce. Mon cœur accélère. Argh !... trop de beauté !
– Combien de fois ?
Je déglutis, sentant la chaleur croître en moi telle une vague prête à s'abattre sur mon corps pour me faire perdre la tête.
– Autant de fois que tu le voudras, Haeli.
Satisfait de ma réponse, il romp notre contact visuel et physique en attrapant sa fourchette pour se remettre à manger. Je l'imite en l'observant comme à mon habitude. Vous voyez, tout comme c'est parfois excitant de regarder du porno pour rendre un "soulagement individuel" plus agréable ; lorsque je regarde ma poupée manger, la nourriture me semble meilleur. Enfin bon, je vous l'accorde, ce n'est pas un exemple des plus appropriés mais... qui s'en soucis ?
– À quoi tu penses ? demandé-je à Haeli, le trouvant un peu dans la lune.
– À des idées de positions.
Je manque de m'étouffer avec mon cocktail, me faisant tousser abominablement.
– Ça va ?
Je le fusille du regard, faussement énervé.
– Sale pervers, tu veux ma mort ?!
Haeli éclate de rire.
Ainsi, nous finissons de manger tranquillement, en se taquinant de temps à autre. On prend ensuite une coupe de crème glacé (spéculos, oréo et vanille) et quand vient le moment de régler l'addition, il nous est impossible de payer. À chaque fois que l'on essaye d'appeler un serveur, il nous contourne, nous évite ou ne nous voit tout simplement pas. Au bout d'innombrables vents, nous avons finis par abandonner, attendant simplement en soupirant d'agacement, d'ennuis et de fatigue.
– Partons, propose soudainement Bouclette.
Je le regarde avec incompréhension.
– On n'a pas encore réglé.
Il hausse les épaules, un sourire malicieux se dessinant sur ses lèvres avant de marmonner d'un air boudeur :
– On a essayé...
Je continue à le fixer, ne croyant pas ce qu'il prononce tant imaginer ma poupée frauder est tellement impensable à mes yeux. Haeli commence alors à se lever lentement, très lentement. Je le menace du regard de se rassoir. Il fait mine de ne pas me voir.
– Haeli ! Je t'ai dis que je t'invitais ce soir ! Attendons simplement que...
– J'en ai marre d'attendre !
Étant levé, il commence à marcher vers la rue (puisqu'on est sur la terrasse). Je me lève alors à mon tour pour le rattraper par le poignet.
– Haeli !
Il se libère de mon étreinte et se met à courir vers une ruelle. Paniqué qu'on nous ait vu, je regarde de gauche à droite. Personne n'a rien remarqué. Je soupire alors bruyamment et le suis. Une fois que je parviens à le trouver, il saisit ma main et commence à courir à toute vitesse, me traînant avec lui.
– Vite, Shun ! On va nous rattraper !
J'éclate de rire.
– Personne ne nous poursuit, chéri.
Il continue à avancer rapidement, s'amusant à se retourner pour me dire d'avancer plus vite. Moi, je me tords de rire ce qui rend la chose encore plus difficile.
– Tu sais où tu vas au moins ?
– Évidement !
Je le vois alors observer un peu partout autour de lui, perplexe.
– Enfin... je crois...
Je ris de plus belle. Haeli s'arrête un instant, change de direction et recommence à courir en me tirant par la main. Il s'amuse à avancer à reculons, se retournant de temps à autre, afin de me crier d'arrêter de rire pour me dépêcher. Je remarque un poteau qui se rapproche dangereusement de lui alors qu'il est retourné.
– Regarde devant toi !
Il exécute mon ordre mais, trop tard, il se prend le cylindre en pleine face. Mes yeux s'arrondissent d'horreur et je me rue vers lui afin de vérifier qu'il va bien. Tenant sa tête baissée, il se redresse en riant. Je m'accroupis face à lui et retire ses mains pour inspecter son visage avec attention.
– Bordel...
Son arcade sourcilière est explosée et le coin de sa lèvre inférieure est légèrement enflée.
– Aïe... haha...
– Soit tu te plains, soit tu ris. Tu ne peux pas faire les deux en même temps !
Il choisis de rire en poussant quelques fois des gémissements douloureux. Je soupire gravement et le prends sur mon dos, profondément irrité.
– Je t'avais dis de regarder devant toi !
– C'est bon... c'est pas très grave.
– Bien sûr que si ! Ton visage est complètement... aish! Ça m'énerve !
Haeli enroule ses bras autour de mon cou.
– Tu vas arrêter de m'aimer parce que je suis défiguré ? demande-t-il d'un ton boudeur.
– Tu n'es pas défiguré ! Mais même si tu l'étais, je t'aimerais toujours. Là n'est pas la question ! C'est juste que c'est énervant.
– Pourquoi ?
– Bah parce que... !
Je serre ma mâchoire, trouvant mon explication un peu absurde.
– Parce que j'ai l'impression qu'on t'a frappé et ça m'énerve de me dire que je ne suis même pas foutu de te protéger d'un putain de poteau.
Haeli éclate de rire. Je rougis honteusement et accélère.
– Tu ne peux pas me protéger de tout, Shunie !
– Eh bien c'est mon devoir !
– Ton devoir ?
Il rit de plus belle.
– Je vais t'enfermer dans une chambre remplie de coussins pour que tu ne te blesses jamais.
– Ça me dérange pas tant que tu es enfermé avec moi.
Bouclette pose un baiser dans mon cou. Je frissonne.
– J'adorerais que tu me fasses l'amour toute la journée.
Je déglutis, tentant de penser à autrechose afin de ne pas me perdre. Ce gamin passe son temps à me déconcerter.
Un long silence accompagne ses paroles. Pas vraiment embarrassant ou désagréable ; juste... une pause dans notre conversation.
– Pourquoi tu me portes, au fait ?
Je fronce les sourcils d'incompréhension.
– Bah... tu ne t'aies pas foulé la cheville ?
Il secoue la tête de gauche à droite.
– Non. Tu m'as juste mis sur ton dos d'un coup...
Je m'arrête, perplexe et troublé. Je pose Haeli au sol et commence à avancer. Au bout de quelques mètres, je remarque qu'il est un peu à la traîne.
– Tu... boîtes ?!
Bouclettes sourit, géné.
– En fait je me suis fait une entorse en descendant de sur ton dos.
Je soupire rieusement et le reprends dans mes bras.
***
– Hm~... Shun...
Allongé au dessus de lui, j'embrasse son corps en le palpant un peu partout. Je m'amuse à aspirer et suçoter la peau de sa poitrine afin de descendre lentement jusqu'à ses cuisses Mes mains, quant à elles, se baladent sur sa taille afin de le déshabiller. J'entends Haeli haleter bruyamment en se tortillant dans tous les sens. Je lance de temps à autre des regards vers son visage pour en apprendre un peu plus sur ses zones érogènes. Je mordille tendrement l'interieur de sa cuisse. Je sens son corps se crisper et ses lèvres se pincer pour retenir un geignement plaintif.
– Tu aimes ici ?
Il acquiesce vivement, les larmes aux yeux. Je continue donc à suçoter sa peau en faisant danser ma langue dessus. Haeli glisse soudainement sa main dans mes cheveux et relève ma tête vers lui. Je le regarde avec interrogation.
– J'en peux plus... faisons le maintenant.
J'hoche la tête et me lève immédiatement afin de me diriger vers mon sac pour en sortir une boîte de préservatif. J'ouvre ensuite celui de Haeli à la recherche de lubrifiant mais la seule chose que je trouve... c'est une autre boîte de préservatif.
– Bouclettes, t'as mis où ton lub ?
Il se redresse, encore essoufflé.
– Hm ? Je pensais que tu allais en prendre.
Mon regard s'emplie de désespoir.
– Quoi ?! Mais logiquement je m'occupe des capotes et toi du lub !
– Je vois pas en quoi c'est logique !
– Eh bien... moi j'enfile un préservatif et toi tu utilises du lubrifiant pour te "protéger".
– Mais dans tous les cas, le liquide est pour nous deux puisqu'on l'utilise ensemble ! Et puis c'est toi qui me prépare donc c'est à toi d'avoir du lubrifiant sur toi !
Je soupire bruyamment, désespéré. Je reviens vers le lit et me laisse tomber dessus.
– Super !... je voulais baiser toute la nuit mais voilà qu'on n'a même pas de quoi le faire une fois, me plaigné-je.
Haeli s'assoit sur moi. Je pose une main sur sa hanche dans le but de le repousser.
– N'essaie pas de m'exciter, ça ne sera que plus frustrant.
– Allons en acheter. Il n'est pas trop tard.
Je pose les yeux sur l'horloge accrochée au mur. Vingt-trois heure quinze.
– La supérette d'à côté ?
Haeli acquiesce adorablement. Je me lève alors d'un bond, l'aide à se rhabiller correctement, et prends les clefs avant que l'on sorte pour marcher en direction du magasin.
Une fois arrivé, je cherche rapidement dans le rayon pharmacie le meilleur lubrifiant (un que m'avait conseillé Jun lorsque je lui avais demandé des conseils pour ma première fois avec ma poupée). Je le prends en grand format et m'apprête à me diriger vers les caisses lorsque je me rends compte d'une chose. Je me tourne vivement vers Haeli.
– C'est super gênant d'acheter juste du lub !
Il réfléchis brièvement.
– En effet. Il nous faut autre chose pour camoufler l'achat.
J'acquiesce et retourne dans les rayons. Je prends quelques paquets de nouilles.
– C'est bon ?
– Hmm... en Corée, il existe une phrase équivalente au "Netflix and chill".
Je lui lance un regard interrogeur.
– Laquelle ?
– "Tu veux manger des nouilles ?"
Mon regard s'emplie de panique et je redépose les paquets de pâtes instantanées immédiatement.
– Prenons autre chose alors !
Je réfléchis un temps avant de me diriger vers les fruits et les légumes. Je remplis un sachet. C'est normal et naturel d'acheter ce genre d'aliment, personne ne trouvera ça embarrassant. Haeli éclate de rire.
– Sérieusement ? Une banane, une aubergine, un concombre et... du lubrifiant ?
Je fais alors le rapprochement et mon visage se crispe d'horreur. Je repose le sachet et prends des trucs presque au hasard. Un peu d'alcool, des biscuits, des pâtes, des mouchoirs et des cacahuètes. Ça me paraît bien.
Je retourne vers les caisses après avoir fait valider mes articles à Haeli et les pose sur le tapis roulant. La caissière commence à bipper les objets. Je regarde en l'air lorsque le lubrifiant passe, trouvant au plafond un air très métaphorique et artistique.
Je paye et mets les achats dans un sachet. Je salue la caissière et elle dit alors la chose la plus déplacée du monde :
– Passez une bonne soirée ! ~
Elle sourit en nous faisant un clin d'œil. Je prends mon sac et me rue vers la sortie.
– Ne revenons plus jamais ici !
Bouclette pouffe de rire.
– Pourquoi ?
– Parce qu'ils savent... pour nous !
– Nous ?...
Il réfléchis un temps.
– Et alors ?
– Et alors c'est embarrassant ! Et énervant !
Il fronce encore plus les sourcils d'incompréhension.
– Je ne vois pas en quoi.
Je soupire bruyamment. Il faut vraiment tout lui expliquer !
– Eh bien déjà, je suis visiblement le top donc les gens comprennent que tu es le bottom...
Je laisse ma phrase en suspent afin de le faire comprendre.
– Et alors ?
– Aish !!
Je lève les yeux au ciel, désespéré.
– Et alors les gens vont se mettre à t'imaginer au lit en tant que bottom et je ne veux pas que ça arrive ! Je refuse que mon petit ami soit sexualisé par des inconnus !
Il pouffe de rire.
– T'es vraiment adorable, Wang Shun.
Je rougis intensément et me tait.
Une fois rentré au studio, nous rangeons les courses et Haeli part prendre une douche. Je fait de même lorsqu'il en sort.
Je laisse couler l'eau sur mon corps, me délectant de son contacte presque réparateur sur ma peau ciselée, et réconfortante pour mes muscles endoloris. Je me savonne ensuite lentement, profitant de ce moment de calme et de chaleur tout en me débarrassant des traces accumulées au cours de la journée. Je fais en sorte de ne sentir rien d'autre que le savon neutre à la très légère senteur de l'huile d'olive.
Je sors ensuite de l'eau et me sèche méticuleusement, pensant à Haeli qui préférerait sûrement toucher un corps doux plutôt qu'humide et sec. J'étale alors de la crème sur ma peau, attend que cette dernière s'en imprègne et enfile un short ainsi qu'un léger t-shirt. J'ouvre la porte de la salle de bain, prêt à retrouver ma poupée.
– Oh ?...
Allongé sur le lit, au dessus de la couverture, Haeli s'est endormi. Un sourire amusé se dessine sur mes lèvres et je décide de faire un peu de rangement dans l'appartement, n'étant pas si fatigué que cela.
J'adore Bouclettes. Vraiment, je l'aime énormément et de tout mon cœur mais... qu'est-ce qu'il met du bazar !
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À suivre...
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J'espère que ce chapitre vous aura plu ^^
En attendant le prochain, prenez soin de vous <33
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