Chapitre 24 : révélation

Suite à ma journée de repos, j'avais décidé d'aller en cours le jour d'après. Néanmoins, le soir – certainement trop excité à l'idée de revoir ma poupée – je n'avais réussi à dormir qu'une heure ou deux. J'étais donc, allongé sur mon lit, ne pouvant fermer l'œil depuis 2h du matin. Alors, je me levai et me préparai malgré l'heure hâtive. Il était 5 heure quand je décidai d'envoyer un message à Haeli. Mais voyant qu'il ne répondait pas, je pris l'initiative de l'appeler. Je dus entendre quatre sonneries passer avant qu'il ne décroche.

– Allo... ? répondit une voix grave et fatigué.

Un sourire amusé se dessina sur mes lèvres tant le son qu'il dégageait m'attendrissait.

– Salut, bébé, bien dormi ?

– Shun... il est cinq heures... !

– Hm. Descends, je t'attends en bas.

– Qu... quoi ?!

– Dépêche, j'ai froid.

– M... mais... je suis fatigué !

– Et moi je veux te voir.

– Je ne suis même pas habillé.

– Peu importe. Je te donne cinq minutes pour venir sinon je te quitte.

– Que... quoi...

J'avais raccroché. Bon... il ne me reste plus qu'à attendre. On se gèle en hiver à Chicago, mais à cette heure encore plus ! Je bougeais dans tous les sens tentant de me réchauffer comme je pouvais. Ça fait au moins cinq minutes, non ? Argh ! Haeli... grouille toi !
Au même moment, je vis la porte d'entrée s'ouvrir faiblement, laissant apparaître mon bébé. D'un coup, j'eus extrêmement chaud.

Il était habillé d'une simple chemise de nuit ainsi que d'un pantalon ample et avait les cheveux complètement en bataille. Dans ses pantoufles à l'apparence douce, il marchait rapidement vers moi, un air endormi mais joyeux sur son visage. Je me precipitai alors vers lui et, une fois à sa hauteur, je me baissai afin de le porter, avant de me lever à nouveau. Merde... ma blessure au mollet me fait encore plus mal.

Il enlaçait fermement mon cou, la tête dans ses bras, pendant que je serrais avec conviction son buste, enfouissant mon nez froid dans le creu chaud de son cou. Les jambes enroulées autour de moi, Haeli ne semblait pas vouloir me lâcher... et moi non plus d'ailleurs. Ça ne fait pas si longtemps qu'on ne s'est pas vu, et pourtant j'ai l'impression que je ne l'ai pas serré depuis une éternité !

Dire qu'il y a quelques jours à peine j'étais prêt à tout laisser tomber... à le laisser tomber ! Tout ça pour des prétextes stupides et insensés ! Oui, j'aurais bien regretté de ne plus pouvoir le voir, le toucher et l'entendre. C'est décidé, à partir de maintenant, à chaque fois que je me sentirais mal, je penserais à lui et à tout ce qui fait de lui la personne que j'aime tant.

– Tu devrais rentrer maintenant, bébé.

– Hm ? Non... je veux encore rester dans tes bras.

– Et moi je ne voudrais pas que tu attrapes froid par ma faute.

– Peu importe... je ne veux pas partir.

– Va t'habiller et reviens, je t'attendrais pour qu'on aille au lycée ensemble.

– Shun... tu ne comptes pas m'embrasser ?

– On est devant chez toi, chéri, imagine que quelqu'un nous aperçoive.

– Pfft ! Tu es littéralement en train de caresser mon corps pendant que je te serre comme un fou et tu penses que, s'il y avait bel et bien quelqu'un pour nous regarder, qu'il ne s'apercevrait pas qu'on s'aime ?

Je n'avais rien à répondre face à tant de véridiction dans son argument. Alors, je relevai la tête et il fis de même, avant de poser hâtivement mes lèvres contre les siennes, les faisant mouver avec ivresse. Puis il ajouta quasiment au même instant sa langue afin de rencontrer la mienne pour qu'on puisse jouer ensemble à s'essouffler amoureusement. Bordel... imaginez que quelqu'un nous observe bel et bien... ce serait juste putain d'embarrassant !
Je fis ensuite glisser lentement Haeli vers le sol, afin de nous séparer en douceur.

– File.

Haeli sourit avant de tourner les talons. Et, à l'instant où il allait commencer à marcher, j'attrapai sa manche avant de saisir ses joues et de poser un rapide baiser sur ses lèvres encore humide.

– Reviens vite, chéri.

Il éclata alors de rire.

– Tu agis comme si on se quittait pour des jours !

– P... Peu importe... dépêche toi de partir !

– Oui oui... je m'en vais... marmonna-t-il en s'éloignant lentement.

J'avais ensuite attendu quelques dizaines de minutes (dans le froid ) avant que Haeli ne reviennent, coiffé et habillé. Puis, on était arrivé au lycée une heure avant le début de notre premier cours et avait donc discuté en attendant son commencement. La matinée étant achevée, nous nous rendimes sur le toit avec notre déjeuné préalablement acheté.

Nous voilà donc sur le sol, l'un face à l'autre, à manger en se regardant – je l'avoue – timidement. Je vous jure... je ne m'habituerai jamais à sa beauté ! Comment une personne peut-elle être aussi adorable en mangeant ?! Les petites bouchées qu'il prend, sa façon de boire, de s'essuyer maladroitement la bouche... tout est trop mignon ! Tellement que j'en oublie ma douleur.

– Shun... tu te souviens... de notre appel de la dernière fois ?

Pourquoi faut-il qu'il en parle dans cette situation ?! Je me sens de nouveau humilié maintenant ! Mais bon... il faut croire qu'on ne va pas jouer au roi du silence encore longtemps.

– Non.

Mais... attendons encore.

– Que... quoi ?

– J'ai oublié de te dire, mais je suis atteint d'alzheimer, donc j'oublie quelques trucs parfois.

Il me fixa longuement, sans comprendre.

– Arrête de plaisanter !

– Quand ai-je fais ça ?

– Que...

– Je ne me souviens plus du tout.

– Shun !

– J'ai oublié de te dire, mais je suis atteint d'alzheimer, donc j'oublie quelques trucs parf...

– Arrête ça !!! s'emporta-t-il soudainement.

Une tension se forma entre nous. Haeli détourna la tête tandis que je baissai la mienne.

– Désolé... c'est juste que... ça m'inquiète.

– Ça te dérangerait d'oublier cet appel, Haeli... ?

Il ne répondit rien et on resta silencieux un long moment, ne sachant quoi faire.

– J'ai comme l'impression... de ne te servir à rien, lacha-t-il soudainement.

– Que... qu'est-ce que tu racontes ?

Il mordit sa lèvre avant d'ajouter :

– Je... je suis là pour toi, tu sais. Même si je ne suis pas aussi grand et fort que toi et que je te paraîs incapable de te protéger ou juste... de te soutenir, j'aimerais que parfois tu me fasses entrer un peu dans ta vie. Mais à la place, tu passes ton temps à me rejeter et à me dire de passer au-dessus, de fermer les yeux sur tout ce qu'il t'arrive. Peut-être que... que ce n'est rien pour toi, mais je déteste te voir dans cet état et... ce n'est pas la première fois que tu me dis d'oublier.

Quand j'y pense, j'ai souvent pété les plombs devant lui. Que ce soit de tristesse ou de colère, il a eu toutes les pires facettes de ma personnalité. J'en ai parfaitement conscience et c'est bien pour ça qu'à présent j'aimerais tout camoufler à nouveau. Ça ne me dérange pas de souffrir en silence, de me tordre de douleur dans l'obscurité ou même... de lui dire que tout va bien alors que je suis brisé entièrement ; pour la simple bonne raison que je veux le protéger. Le protéger de tout– à commencer par moi.

– J'ai... des problèmes, commençai-je, des problèmes... psychologiques.

Néanmoins, si le protéger signifie le faire souffrir, alors je préfére le confronter à tous les dangers ; au moins, il saura à quoi s'attendre.
Je passais longuement ma main dans mes cheveux en inspirant profondément, afin de me donner du courage.

– Il y a quelques années... ma vie est partie en vrille complètement et un panel d'événements l'a fait dégringoler encore plus vite. Alors je... j'ai développé des sortes de... de troubles. Des trucs du genre... dépression... crise d'angoisse et incapacité à contrôler mes émotions normalement. Mais j'ai réussi de mieux en mieux à me sortir de... ça.

Je racontais tout ça en maintenant les yeux clos les sourcils froncés et la tête baissée afin de ne penser à rien d'autre.

– Seulement, il y a deux jours, j'ai comme... rechuté. Je ne peux pas trop t'expliquer pourquoi ou même te dire exactement ce que j'ai manqué de faire ; mais dis toi juste que j'ai eu très, très mal. Donc quand tu m'as appelé, j'étais juste... dans cette descente infernale.

Bordel... qu'est-ce qui me prends de raconter tout ça ?!
Je relevai la tête vers Haeli et aperçu son visage complètement anéanti. Merde, j'aurais du mentir en prétextant que j'avais juste peur de le perdre ou autre ! Rien ne m'obligeait de dire toutes ces conneries !

– Est-ce que... tout ça a un rapport avec les blessures de ton corps ? me demanda-t-il soudainement.

– Qu... quoi ?

– Ta joue est enflée, ta lèvre ouverte, ton arcade explosée et... tu grinces des dents à chaque pas que tu fais.

Moi qui pensais avoir réussi à couvrir entièrement les plaies de mon visage...

– Non. Je suis tombé dans les escaliers, c'est pour ça.

Bouclette baissa la tête.

– Bon, ok, j'avoue... je me suis battu avec quelqu'un. Mais, de un j'ai gagné... et de deux, ça n'a rien à voir avec ça. Crois moi, chéri.

Ma poupée bouda adorablement avant de marmonner :

– Je te crois...

Quelques dizaines de minutes s'écoulèrent ensuite sans que nous n'interagissions plus que ça, avant que je ne réalise une chose.

– Ah oui, bébé !

– Hm ?

– On devra reporter notre rendez-vous samedi.

– Ooh... pourquoi ?

– Je ne l'avais pas réalisé plus tôt, mais c'est Noël !

– Ah, et alors ?

– Comment ça ? Noël est une fête familiale et... tu dois certainement avoir des choses à faire avec tes parents et tout.

– Toi tu as des plans ?

Je detournai le regard.

– Pas vraiment... je pense regarder un film ou autre, en mangeant des nouilles.

– Seul ?

Aish... il en pose des questions embarrassantes !

– Ou... ouais.

Comme d'habitude quoi.

– Dans ce cas, je viendrais.

– Quoi ? Et tes parents ? Tu ne peux pas ne pas passer les fêtes avec eux !

– Ils ne sont jamais là.

– Même pour Noël ?!

– Si, bien sûr qu'ils viendront ! Mais... je m'en fiche. Je les verrai après ou peut-être avant, peu importe. Tout ce que je veux... c'est être avec toi.

Je le regardais fixement, surpris mais plutôt flatté avant de m'exclamer :

– Quel fils indigne tu fais !

Haeli fit alors la moue, en croisant ses bras.

– Ça leur apprendra à passer des mois entiers sans voir leur fils.

– Le petit gosse de riche qui ne voit jamais ses parents... quel cliché !

– N'est-ce pas ? déclara-t-il avec dégoût, je n'ai pas à me plaindre... ce serait absurde.

Pour une raison ou pour une autre, je me sentis mal. Mais, étant un peu trop excité à la simple idée qu'on allait passer tout un week-end ensemble, je ne réagit pas plus que ça. Seulement... il y avait un détail que j'avais manqué : je suis littéralement aussi mal en point qu'un punching ball usé. Donc bon... pour bouger efficacement samedi, il va falloir que je prenne sur moi.
Enfin peu importe, espérons que je me sentirais mieux d'ici là.

Le reste de la journée se déroula tranquillement ( si ce n'est les interminables contrôles qu'on avait eu toute l'après-midi ) et je fus forcé de me séparer de ma poupée avant même de réaliser que l'on était ensemble. Autrement dit : je ne voulais pas le quitter. Évidemment, il m'avait encore proposé de venir dîner chez lui mais, ne ressemblant à rien de plus qu'une racaille sortie tout droit d'un combat de rue, je refusai naturellement.

En rentrant chez moi, je me souvins que je devais acheter un cadeau à Haeli. Alors, je me rendis dans un magasin ( je ne vous direz pas lequel pour que vous ayez la surprise en même temps que mon soleil ) et liquidai toutes ( mais vraiment toutes ) mes économies pour obtenir ce que je voulais. Puis, je retournai dans mon appart' mais, à ma grande surprise, Tao s'y trouvait. Je profitai néanmoins de cet instant pour lui poser une question des plus importantes.

– Ah oui, gēge, tu comptes revenir à quelle heure ce week-end ?

– Je pense dans les alentours de quinze heure puisque je dois enchaîner avec le chantier, le mieux serait que je ne perde pas de temps en rentrant à la maison.

– Je vois...

– Pourquoi ?

– Oh hum... pour savoir.

C'est vraiment génial ! Si je viens chercher Haeli durant l'après-midi, ça signifiera qu'on pourra passer plus de 24h rien que tous les deux !
Mon exaltation est telle que j'ai envie de sauter de joie ! Mais je ne vais certainement pas le faire pour des raisons de fierté bien trop restrictives.

Je devais ensuite emballer le cadeau de ma poupée. Mais, par peur que Tao n'entre brusquement dans ma chambre, me surprenne et donc se doute que je vais inviter quelqu'un, je m'enfermai dans la salle de bain. Étant donné qu'il se méfierait de quelque chose si je m'enfermais dans cette dernière sans prendre de douche, je décidai d'en prendre une rapide avant de sortir de l'eau, de me sécher et m'habiller à la même vitesse. Je m'étais dis que si j'empaquetai en moins de cinq minutes, Gēge penserait juste que je me prépare ou autre.

Néanmoins, je n'avais aucune connaissance en la matière ; alors les cinq minutes promise s'était transformé en une trentaine. Avant de vous moquer, écouter la difficulté de la chose ! Tout d'abord, je devais faire le moins de bruit possible... et le son incontrôlable du papier n'aidait rien. Ensuite, le scotch était aussi collant que... de la colle ; ce qui veut dire qu'à chaque fois que je le prenais en main, il restait sur mes doigts et, à force de le coller et de le décoller, il perdait sa capacité première, à savoir : coller. Bref, ajoutez à ça la chaleur insoutenable de la salle à cause de la douche brûlante que j'avais pris, mes cheveux mal séchés qui coulaient le long de mes tempes ainsi que sur mon haut et vous obtiendrez de longues minutes de galère.

– Shun ? Qu'est-ce que tu fais là-dedans ?

Merde... Tao commence à se poser des questions. Que dire ? Que faire ?

– Heu... j... je...

Trouve quelque chose, Shun, vite !
Il y eu un long silence avant que Gēge ne déclare :

– Ooh... je vois...

Que... de quoi il parle ?

– Juste fais attention à tout nettoyer en sortant, j'aimerais pas me retrouver à essuyer ton... bref, t'as compris.

H... hein ?!! Ne me dite pas qu'il pense que je suis entrain de...

– A... Attends, c'est pas du tout ce que tu crois !

– C'est normal à ton âge, chéri, c'est les hormones, je comprends.

J'entendis ses pas s'éloigner... sans que je ne puisse rien faire pour l'arrêter.
Flash info : mon grand frère pense que je me branle dans la salle de bain... et je ne peux même pas rectifier la situation !
C'est décidé, à l'instant où il apprendra que Haeli a passé Noël avec moi ( oui parce qu'il l'apprendra certainement un jour ), je lui dirais la vérité sur le champ.

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Fin du chapitre 24

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